Les jours, les mois, les années... Eh, non, stop, Pierre-Xavier n'était que depuis quelques mois dans ce fichu Pensionnat, hein. Faut pas éxagérer non plus. Bon, en quelques mois, il avait trouvé le moyen de mettre en panne le chauffage et l'eau chaude de sa chambrée, de faire flamber la cuisine et de détruire plusieurs dizaines de vases, mais il ne s'agissait que de quelques mois, n'est-il pas ? Alors imaginez moi ça quand il va découvrir son pouvoir... Je me demande qui se portera volontaire. Peut-être ce garçon, là, son colocataire qui semblait l'avoir pris en grippe et qui l'humiliait. Bouh, qu'il le détestait ! Un certain euh... En fait, le PX ne connaissait même pas son nom, et encore moins des façons possibles de se venger. Autant dire qu'il était très bien parti, tiens.
Bref, trève de disgressions. En ce moment présent, quelques mois après son entrée dans ce maudit manoir, le jeune héritier de la fortune Mégamiam que le monde entier lui enviait ( pensait-il ) déambulait nonchalamment dans de sombres et interminables couloirs, tandis que l'ennui s'emparait de lui. Il se sentait seul. Certes, ici, nul ne le traitait comme le boulet de service ni ne se moquait de lui ou ne lui parlait qu'en raison de son argent, mais nul ne lui adressait la parole, et le pauvre Pierre-Xav' commençait à craquer. La preuve, il était près de deux heures du matin, et le garçon, sans doute sous l'emprise d'une quelconque substance illicite, avait décidé d'escalader la tour, dans son ravissant pyjama bleu à nounours. Si ça ça prouve pas que l'atmosphère délétère du Pensionnat commençe à avoir un sale effet sur lui...
Quelques pas derrière lui, un lama blanc, qui lui avait dit s'appeler Palourde le suivait, désespéré. En effet, l'animal avait plusieurs fois tenté de faire comprendre au garçon qu'il était son Alter Ego Astral, sans jamais parvenir à se faire entendre, soit que les évènements l'en empêchaient, soit que son maître ne l'écoutait pas. Ainsi, il le suivait un peu partout en soupirant, attendant la tranquilité nécessaire pour tout lui expliquer. C'était pas gagné.
Autant dire que lorsque le boulet infini se dirigea dans le jardin en pantoufles, le lama tenta encore une fois de lui avouer, sans succès. Pierre-Xav' répondit quelque chose comme "dégage saloperie de bestiole, 'tain tu vas arrêter de me coller !" et Palourde abandonna en baissant la tête d'un air penaud.

Mais laissons là les problèmes existentiels de ce pauvre animal laineux et reconcentrons nous sur le jeune Mégamiam. Il s'avança sous la lune dans l'herbe du parc humide de rosée, sans paraître le moins du monde affecté par ses pantoufles trempées, et se dirigea dans la direction approximative de la tour. Il s'arrêta en face, le va la tête pour contempler sa hautaine magnificience et ôta ses pantoufles avant de caler ses mains entre les pierres disjointes, s'offrant des prises tout à fait acceptables. Il leva ensuite les pieds et... Hein ? Qu'est-ce qu'il compte faire, pieds nus, en pleine nuit, sur un mur de tour ? Me dites pas qu'il va s'entraîner à l'escalade ? Et... Oh Mon Dieu ! Et s'il tombe, hein, pas de baudrier pour le retenir, il y a pensé, à ça ? Et moi, je deviens quoi, sans lui ?
Voilà les quelques pensées qui traversèrent l'esprit du lama, finalement moins crétin que son maître.
Un maître qui commença à grimper de façon décidée, faisant jouer des muscles puissants, sur les pierres a demi vermoulues et sous le regard chocolat désolé de la bestiole qui l'attendait en bas.
Palourde se résigna finalement, placé en face d'un fait assez élémentaire : suffisament entraîné, le garçon ne tomberait probablement pas. Un probable qui l'alarma légèrement, mais pas assez pour qu'il choississe d'attendre le PX en bas. L'animal s'enfonça donc dans le manoir et disparut pour Dieu seul sait quoi faire. Pendant ce temps, le jeune homme arriva en haut de la tour, avec pour seule séquelle de cette escalade improvisée des courbatures dans les avant-bras et sa masse de cheveux trop longs entièrement trempée de sueur.

" 'Tain, t'es encore dans mes pattes, toi ? Comment t'as fait, je croyais que t'étais pas capable de te téléporter ! "

Ces paroles étaient bien entendu adressées à Palourde, qui pencha la tête sur le côté d'un air totalement innocent. Oui oui, bien sûr bien sûr... Pierre-Xavier tourna brutalement les talons d'un air dégouté et s'enfuit en courant à travers les couloirs. Pourquoi, pourquoi, comment, en était-il arrivé là ? A avoir en permanence cette bête qui le suivait, à ne pouvoir que rêver du monde extérieur, à...

"SBLAFF !"

Tiens, une porte. Pierre-Xav' mit un instant à analyser la situation. Il avait couru dans le couloir, un couloir dégagé, et là, il venait de s'exploser dans une porte, de tomber lamentablement à terre et de tacher son plus beau pyjama avec le sang coulant de son nez. Pourquoi s'était-il pris une porte ? Il était pourtant certain qu'elle n'était pas ouverte l'instant d'avant... Il en parvint donc à une conclusion presque logique, à savoir que quelqu'un l'avait ouverte.
C'est avec le plus grand mal qu'il se leva, un pan de son pyjama pressé contre son nez en sang, et qu'il contourna la porte, restant bouche bée devant la personne qui se tenait derrière et qui venait de l'ouvrir avec une force à décorner un boeuf.
C'était une enfant.
Ou une pré-adolescente, se disait le garçon au jugé, incapable de deviner un âge. Assise dans un fauteuil roulant, l'inconnue avait le visage trempé de larmes.

" Why are you crying ?"

Il ne manquait plus que cela pour parfaire la panoplie de boulet que transportait Pierre-Xavier. Un bug de traduction du Pensionnat. Génial. Enfin, on peut s'estimer heureux qu'il soit Américain, et non pas Serbo-Croate ou Lettonien, pas vrai ?
Let's Go !

[ En r'tard en r'tard. Désolée. ]

Mikan Eisenstein avait 14 ans, presque 15. Paraplégique de son état, elle semblait prisonnière du corps dans lequel elle était entrée dans le pensionnat, conservant à jamais l’apparence d’une fillette de 12 ans et demi. Quand la plupart des pensionnaires continuaient de vieillir, elle, elle restait dans son mètre quarante-cinq.
Les pensionnaires en avaient conclut que c’était aléatoire

Mikan n’avait jamais eu de chance avec l’aléatoire.

Donc, Mikan Eisenstein avait 14 ans, presque 15, et au beau milieu de la nuit, elle eu soudain envie de « casser la croute », comme qui dirait. Après avoir réussi à se hisser dans son fauteuil et à descendre les escaliers (comme, cela restait un mystère), elle roula jusqu’à la cuisine, Tzirvagaël accroché et endormit sur le dossier de son fauteuil. Dans la cuisine, elle s’affaira à se préparer une tasse de thé, et, après avoir rajoutée sur une assiette des petits gâteaux secs, et mit le tout sur un plateau, elle se dirigea vers le salon pour prendre sa collation de quatre heure.

Le salon était une pièce aux dimensions peu spectaculaires. Pourtant, il s’en dégageait une atmosphère digne de l’époque victorienne, et, les coussins étant très confortables, le salon était devenu un des lieux du manoir préférés de Mikan, d’autant plus quand elle venait y grignoter la nuit. Les noctambules se contentaient de passer devant sans y prendre garde, à son plus grand bonheur. Elle ne tenait pas à passer pour la goulue de service aux yeux de tous.

S’installant à l’aide de ses bras dans un des fauteuils recouverts de velours, et commença à entamer sa collation. Le thé un peu chaud lui brula la langue, mais ce ne fut pas cela qui fi bondir la pauvre handicapée.

Des bruits de pas frénétiques retentirent dans le couloir. Se… Se passait-il quelque chose ? Quelque chose du genre…

Un frisson la secoua violemment, et elle eu soudain l’envie de vomir au simple souvenir de l’odeur du sang. Ne pouvant toujours pas refouler ses sanglots au souvenir de cette journée, elle explosa tel un geyser, tentant de se remettre sur son fauteuil tant bien que mal au travers de ses larmes. Attrapant ses roues, elle se dirigea aussi silencieusement qu’elle put vers la porte, avant de poser sa main sur la poignée, et de l’ouvrir.

Rien.

Elle actionna la poignée plusieurs fois en se pressant conte la porte. Rien. La porte était bloquée. Son cœur s’affola dans sa poitrine, et ses larmes redoublèrent d’intensité. Il fallait qu’elle sorte. Il fallait qu’elle sorte ! Elle devait sortir ! Il le fallait !
Reculant son fauteuil, elle prit une grande inspiration. Réitérer son exploit de noël passé ne l’enchantait guère, mais s’il le fallait…
Elle se lança de tout son poids (et de celui du fauteuil) contre la porte qui s’ouvrit soudainement. Une seconde plus tard, elle était dehors, face à… Un type avec un air louche, le nez en sang, et… un pyjama à nounours ?!

- Why are you crying ?

Mais… Mais qu’est-ce qu’il racontait ?! Mikan ne connaissait pas cette langue, et n’avait aucune idée de ce que le « type » venait de lui baragouiner…

- Uh ... Ursäkta mig, jag förstår inte vad du säger ...

Vive les bugs de compréhension…

[Je suis inexcusable, je mérite la moooort !]