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 Je suis une miraculée [post unique]

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Je suis une miraculée [post unique] _
MessageSujet: Je suis une miraculée [post unique]   Je suis une miraculée [post unique] Icon_minitimeMer 16 Mar 2011 - 19:03

La porte du hall claqua derrière Kaas, laissant son écho se répercuter de murs en murs.
Ils étaient beaux, ces murs. Comme tout le reste de la pièce. Le plafond haut, les escaliers lustrés, le sol lisse ; bientôt un silence total revint et il ne subsista plus que la sombre élégance des lieux. L'adolescente se sentit gênée, comme si elle n'avait rien à faire dans un endroit pareil. Tout ça était si différent de sa masure, de l'auberge et ce qu'elle avait connu. Elle était une intruse dans la sobriété distinguée de ce hall d'entrée. Elle n'avait même pas pensé à frapper. Mais la faim écrase tout, malaise et timidité compris ; son dernier repas était trop éloigné pour qu'elle se permette de douter. Il fallait chercher de la nourriture. Elle ne s'était pas risquée près du volcan pour s'arrêter à une entrée guindée. Reprenant courage, la jeune fille prit une grande inspiration et lança :

"Il y a quelqu'un ?"

Là encore, écho. Et puis silence. Lourd et écrasant. Kaas hésita un instant entre le couloir et l'escalier avant de remarquer un panneau d'affichage. Elle s'en approcha avec détermination, chacun de ses pas claquant et résonnant sur le parquet. Ses notions de lecture n'étaient pas très poussées et elle plissa les yeux sur les lettres minuscules. Si vous lisez ces lignes déposées sur ce misérable bout de papier, c’est que vous venez de commettre une grossière erreur, certainement la plus grosse de votre vie. Même en butant sur les syllabes, même en articulant les mots à voix basse d'un ton hésitant, même en suivant les lignes du bout de l'index, il n'était pas dur de ressentir la menace de cette phrase. Kaas regarda une fois de plus autour d'elle, mal à l'aise. Qu'allait-on lui faire pour être entrée sans permission ? La période de famine que connaissait l'île de Miyado rendait peut-être ce message futile mais rien n'était moins sûr. Péniblement, elle s'accrocha à la suite du texte. Dans un chuchotement trébuchant, elle parvint à saisir qu'elle était visiblement prisonnière et fit volte-face vers la porte avec l'impression de vivre un rêve.
Combien de personnes avaient marché vers les panneaux de bois ?
Combien avaient tourné cette poignée, serrée dans leurs mains moites ?
Combien de coups d'épaules ébranlant les murs ?

Beaucoup, d'après l'auteur du texte. L'impression de marcher dans les traces d'autres personnes était étrange, perturbante. Et cette pièce paraissait soudain si glacée pour la proximité d'un volcan... Elle s'approcha à nouveau du panneau et acheva sa lecture malgré quelques difficultés. La sensation ne se cantonnait pas à l'étrange, frôlait le surnaturel. La faim donne des hallucinations, c'était courant, non ? Kaas avait l'impression d'évoluer dans une illusion créée de toutes pièces. Mais comment aurait-elle inventé un lieu pareil, elle qui n'avait jamais vu de construction de ce genre ? Et si... C'était vrai ?
Fermer les yeux, s'adosser au mur et respirer à fond. La tête lui tournait. L'idée que cela soit réel lui donnait des bouffées d'euphorie. Sauvée de la famine ? Dotée d'un pouvoir ? Un ami retrouvé ? Comme le prix de la liberté paraissait dérisoire en échange de tout cela, pour elle qui n'avait jamais pu quitter une île grignotée de jour en jour par la mer et la lave ! Le ton sinistre du message donnait un arrière-goût amer à ce qui aurait pu être une joie intense. Mais l'espoir que le monde dépeint par cette "Periple Skye" existe bel et bien lui donnait envie de hurler de joie. Elle allait manger. Vraiment manger. Un Pensionnat ? Une bénédiction, dans tous les cas. Un cadeau du ciel. Un sauvetage. Tout cela était réel, il n'y avait plus de doute maintenant ; elle entendait ses pas, ressentait son bonheur, éprouvait sa faim. Elle vivait. C'était arrivé. A elle. Des larmes de joie lui montèrent aux yeux et elle dût parler à voix haute pour mieux se convaincre de sa chance.

"Je vais vivre ! Je vais...
- Ne te réjouis pas trop vite.
"

Kaas se retourna avec l'idée de tomber sur un autre pensionnaire, mais ne vit rien. C'est en baissant les yeux qu'elle aperçut un fennec au pelage ocre. Un museau long, des yeux luisants, une queue touffue, des oreilles démesurées... Ce fut d'abord la stupeur. Puis une autre bouffée de joie qui, accumulée aux autres, se mua en pure extase. Le vieux souvenir rejaillit ; le dessin, l'ami imaginaire et les longues discussions qu'elle entretenait avec lui. Les derniers mots du message prenaient leur sens, sens définitivement positif d'ailleurs. Retrouver le compagnon de son enfance heureuse était le nec-plus-ultra de cet endroit.

"Amme ! s'exclama-t-elle sans pouvoir retenir un rire extatique. Je n'arrive pas à croire... Tu ne trouves pas ça merveilleux ?
- Tu es coincée ici, Kaas..."

Le timbre nasillard était bien celui qu'elle avait inventé, le léger secouement de tête désapprobateur aussi. Mais aucun de ces mots ne l'atteignait, cette fois. L'impression d'avoir respiré trop d'oxygène d'un coup ou d'avoir bu trois verres d'alcool d'ananas, bien que délicieuse, la força à s'asseoir par terre pour ne pas tomber. Le petit animal en profita pour s'approcher d'elle, mais se déroba à sa main tendue.

"Je suis content que tu m'es reconnu. Je pense que je vais faciliter ton adaptation. Je me demande quel pouvoir tu peux avoir ?
- Oh, je ne sais pas ! C'est si... Incroyable que je ne peux même pas y réfléchir !
- Tu m'inquiètes un peu, lança Amme. Je suppose qu'il vaut mieux cela à une déprime. Mais j'ai l'impression que tu n'es pas très lucide.
- Tu plaisantes ? Oh, Amme, dis-moi où il y a à manger !"

Aussi étrange que cela puisse paraître, l'expression du fennec s'adoucit et il eût un espèce de hochement de tête.

"Oui, je suppose que ça n'a pas dû être facile... Suis-moi."

Kaas se releva sans hésiter tandis que la faim qui la tenaillait depuis des semaines avalait sa joie irréelle. Suivant Amme qui trottinait dans un couloir, avec l'impression de soulagement choqué qu'éprouvent les miraculés, elle pénétra une bonne fois pour toutes dans le Pensionnat Interdit.
Prisonnière à jamais.
Mais en vie.

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