(Animation SV) I WON'T SAY I'M IN LOVE

Flâner dans les couloirs était l'activité favourite de Samuel lorsqu'il n'était pas en train de lire. Ceci n'est pas de l'ironie. Il aimait flâner, découvrir de nouveaux endroits, essayer de révéler tous les secrets de ce grand manoir magique. Pour le coup, lui qui ne croyait pas en la magie avant était bien servi. Cette nouvelle découverte l'avait rendu encore plus curieux sur les mystères de la vie.

Alors, faute de mieux, il flânait, parce que c'était bien ici, dans les couloirs, qu'il pourrait sans doute obtenir des réponses, si ce n'est des indices.

Les couloirs étaient, comme à leur habitude, plutôt vide. Les gens d'ici ne semblaient pas très intéressé par les longs dédales qui ne rêvaient que des les perde. Samuel n'avait pas peur de se perdre, il mémorisait bien son parcours et n'avait que peu de mal à retrouver son chemin.
De grand éclats de rires l'alertèrent de la présence de garnements, mais il eu à peine le temps de les apercevoir et de le frôler avant que les deux - grands - garnements ne s'enfuient à pleines jambes. Il soupire et lorsqu'il retourne ses yeux sur le chemin, là, en face de lui, se trouve Nikoleta.

Et elle est magnifique.

Il déglutit.

"Bonjour Nikoleta. Vous êtes bien charmante."

...

La pauvre tordait ses doigts et martyrisait ses phalanges, en proie aux pires tourments. Dans quelques semaines, elle ne pourrait faire autrement qu'avouer à Aarne son « indisposition », de peur qu'il n'en tire lui-même la conclusion qui s'imposait. Quitte à le mettre dans une colère noire, autant mériter les flèches qui ne tarderaient pas à suivre.
L'honnêteté démangeait Nikoleta. Si elle se mettait à mentir aux personnes qu'elle aimait, en qui aurait-elle encore confiance au bout du chemin ? Non, se promit-elle, poing soudain serré, je dois tout lui dire, et le plus vite possible.

Une montée d'adrénaline faillit lui faire faire demi-tour et affronter son funeste destin avec bravoure ; une tempête de gloussements la déstabilisa avant qu'elle ait pu coller un nom aux visages qui venaient de la dépasser.
La jeune femme papillonna des yeux, éberluée. Eh bien. Certains ne perdaient pas la joie de vivre, même après des semaines et des mois passés au Pensionnat.
Un long soupir à la gorge, elle redressa la tête.

Son cœur faillit remonter dans son œsophage et s'y coincer lorsqu'elle aperçut Samuel, à quelques pas d'elle seulement. Ses joues prirent une teinte carmin hors de propos et elle écarquilla les yeux.
Oh.

"Bonjour Nikoleta. Vous êtes bien charmante."

L'entrée en matière aurait dû lui sembler étrange, aussi hors de propos que la couleur de ses joues, et pourtant, elle sent juste une chaleur agréable lui étreindre le corps. Elle sourit, timidement, et bafouille une réponse pleine d'un trop plein d'émotion :

« Bonjour, Samuel. Je... vous... Vous êtes charmant aussi, aujourd'hui. »

Elle voulut se gifler. N'était-il pas toujours charmant ?
Ah, elle s'emmêlait les pinceaux !

Bien entendu, Nikoleta était toujours charmante. Samuel l'appréciait beaucoup pour son calme et sa gentillesse, il n'avait simplement jamais remarqué à quel point elle pouvait être charmante, dans un tout autre sens. Se sentait-il quelque peu coupable d'éprouver une soudaine passion envers elle alors qu'elle était un coeur pris? Non, pas vraiment. Peu lui importait.

« Bonjour, Samuel. Je... vous... Vous êtes charmant aussi, aujourd'hui. »

Le compliment lui alla droit au coeur. Quelle gentillesse! Ah, n'était-elle vraiment pas un déesse? Ses origines lui faisait douter de son humanité. Pouvait-on être aussi magnifique et humaine? Aphrodite devait être jalouse, si elle n'en était pas la fille. Il fit un pas en avant, un pas vers elle, son coeur tambourinant dans sa poitrine d'habitude si calme.

"Vous êtes toujours trop gentille avec moi, Nikoleta."

Toujours trop gentille avec tout le monde, en réalité. Au delà de son apparence, c'était également son caractère doux qui était charmant. Samuel ne s'était jamais senti mal à ses côtés, et il se demandait comment cela se faisait qu'il n'avait jamais remarqué à quel point elle était parfaite pour lui.

...

Le cœur de Nikoleta fit une pirouette malvenue qui faillit lui causer la nausée. Dans son état, de telles émotions n'étaient pas les bienvenues ; mais qu'y pouvait-elle ? La vision de Samuel lui donnait l'impression de flotter dans un monde éthéré et lumineux. Le pas qu'il fit dans sa direction manqua de la faire reculer.
Elle tint bon, jambes vissées au sol, les joues plus rouges que les cerises en été. Comment avait-elle pu ne jamais se rendre compte de sa beauté, de sa prévenance, de la joliesse de sa voix ? Tous ces détails qu'elle avait auparavant ignorés lui sautaient maintenant aux yeux. Elle se sentit coupable envers Aarne, mais décida de laisser son cœur lui dicter sa conduite.

L'un dans l'autre, il allait lui en vouloir. Samuel pouvait lui apporter le réconfort et le courage nécessaires.

"Vous êtes toujours trop gentille avec moi, Nikoleta."

Elle balbutia quelque chose de stupide et incompréhensible. La jeune femme regretta amèrement de n'avoir rien de beau à lui dire, aucun poème à lui déclamer. Car il l'aurait fallu, n'est-ce pas ? Ses propres mots se prenaient trop souvent les pieds dans sa langue pour pouvoir paraître élégants.
Soudain, la peur l'envahit. Les questions inondèrent son crâne, et les doutes s’immiscèrent dans son paradis. Et s'il pensait qu'elle était bête ? Si jamais, en parlant, elle le faisait fuir ? Elle n'aurait jamais pu se le pardonner.
Elle fit à son tour un pas en avant pour le saisir par les bras, l'aspect même de la détresse.

« Et j'aimerais l'être encore plus, mais je ne sais pas comment faire ! »

Elle était troublée et hésitante ; du Nikoleta tout craché.

Les joues rouges de Nikoleta étaient à croquer, une si jolie couleur sur ses joues pâles qu'il en remerciait Dieu de l'avoir autorisé à voir ce spectacle si réjouissant. Il ne s'imaginait pas un seul instant ne plus avoir la possibilité de la voir, magnifique Nikoleta, et son coeur battait si fort à l'idée de pouvoir la voir jusqu'à la fin de ces jours. Finalement, l'idée d'être coincé au pensionnat toute sa vie ne lui semblait plus si désagréable que cela, s'il pouvait être à ses côtés pendant aussi longtemps, au diable Aarne et cette relation.

« Et j'aimerais l'être encore plus, mais je ne sais pas comment faire ! »

La panique de la jeune fille le prit aux tripes, son coeur se serrant de la voir dans un tel état. Il aurait fait un pas en avant pour saisir ses mains dans les siennes s'il n'avait pas eu peur de la faire fuir dans son impatience d'être toujours plus prêt d'elle. Il n'avait jamais ressenti de telles émotions, et lui même ne savait pas comment les gérer, comment se gérer. Il l'aimait, c'était à présent certain. Samuel lui adressa un sourire qu'il espérait rassurant bien que sa peine pour elle devait être bien apparente. Un pas en avant ou un pas en arrière? Il ne savait plus trop quoi faire. Il serra ses doigts sur la matière brute de son jean, désemparé.

"Nikoleta, douce Nikoleta, vous n'avez pas à vous en faire pour cela, vous êtes déjà bien trop parfaite pour ce monde."

Il ne savait pas d'où lui venait une telle éloquence, lui qui était un homme de chiffres plutôt que de lettres, mais il espérait simplement que cela rassure le coeur incertain de la belle Nikoleta.

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