Comment avais-je réussis à atterrir dans cette forêt ? Je n’en savais rien. Sans doute l’alcool absorbé ce soir là avait eu un peu trop d’effets. Quoiqu’il en soit, je me retrouvais dans une immense forêt sans réellement savoir laquelle. Mon premier réflexe fus de sortir mon portable, il n’y avait malheureusement pas de réseau dans cet endroit. Comment allais-je réussir à retrouver mon chemin ? Je devais retrouver cet animal qui m’avait amené jusqu’ici, il serait bien revenir là d’où je venais. Je m’aventurai donc dans cette immense endroit encore inconnu à la recherche…d’une forme. Je marchai, je courrai un temps indéfinissable, j’avais l’impression de tourner en rond, et ce n’était sans doute pas qu’une impression. Soudain, j’arrivai devant un immense bâtiment, lui aussi que je n’avais jamais vu. Un grand portail qui me paraissait un peu ouvert cachait l’intérieur de cette demeure. J’aperçu, devant ce portail, la créature, enfin. Elle se tenait droite, me regardant dans les yeux, j’avais l’impression de l’avoir déjà vu quelque part il y avait longtemps. Impossible de me souvenir où et comment. Elle pénétra dans ce qui ressemblait à un internat. Ne pouvant me permettre de faire demi-tour au risque de me perdre, je n’eu d’autre choix que de la suivre. J’avançai doucement vers ce manoir qui me paraissait tout simplement hanté. J’avais connu pire, je ne frissonnais même pas. Le portail imposant était effectivement légèrement ouvert, je mis un pied dans ce bâtiment, chose que j’aurais vraiment du éviter. Je me retrouvais dans un Hall immense, classe, peut être même plus que chez moi. Je finis de faire le tour de la pièce du regard.

BAM !

Le portail c’était refermé derrière moi avec une puissance impressionnante et un bruit sourd. Je me retournai d’un coup et le poussa. Impossible. Je du essayer une dizaine de fois sans la faire bouger d’un demi-millimètre, c’était tout bonnement impossible. J’avais l’esprit encore embrumé, mais je savais que ce n’était pas un mauvais rêve, je savais que tout cela était bel et bien réel, j’en étais sur. Je m’assis sous l’effet de l’angoisse contre la porte, je ne savais pas comment j’allais réussir à sortir de là, je n’avais même pas retrouvé la créature. Allais-je donc finir ma vie ici ? Je levai les yeux et regarda à côté moi, un panneau portait quelques inscriptions, je les lus.

« … »

C’était impossible, ces messages devaient sans doute être une pure fiction… Et pourtant. Ils paraissaient dire vrai. Une grande euphorie monta en moi, étais-ce les stupéfiants qui refaisaient effets ? Non, du stress, un mal-être inégalable. C’en était finit. Le jour de mon dix-neuvième anniversaire, je savais ou j’allais passer le reste de ma vie. Je repensai à ma maison, à mon père que j’aimais et pourtant haïssais tant. Je repensai à tous et à rien. Lorsque j’entendis une...voix ? Elle était fine mais éraillé, je l’a connaissais. Je tournais la tête d’un coup et vis à côté de moi, un petit léopard qui se tenait assis.

« N’es-tu pas heureux d’être ici ? »

Me dit-il. Pas vraiment non, mais la surprise ne permit pas à ma bouche d’en ressortir le moindre son. Je le reconnaissais à présent, Koki, ce petit léopard avait bercé mon enfance, comment avais-je pu l’oublier à ce point ? Je n’en savais rien et ce n’était pas vraiment important. Il avait l’air de me sourire, bien qu’un léopard ne puisse bien évidemment pas sourire, je le sentais. Essayant de me rassurer je me répétai tout haut :

« Ce n’est qu’un mauvais rêve. Ce n’est qu’un mauvais rêve. »

J’entendis tout d’un coup des pas se rapprocher, je détournai la tête de Koki, quelqu’un arrivait.

Je ne savais pas combien de temps j’avais passé à me répéter cette même phrase, je savais que ça ne faisait pas si longtemps que ça, pourtant j’avais l’impression l’avoir ressassé pendant une durée interminable. Je relevai la tête, un jeune homme à première vu de mon âge se tenait devant moi, il avait l’air assez mystérieux, je ne l’avais jamais vu auparavant. Il fumait, l’odeur de tabac monta à mes narines. Une cigarette. Vite, une cigarette, c’est ce qu’il me fallait. Je sortis de ma poche un paquet duquel j’en retirai une et l’allumai avec précipitation sans mêmes répondre aux questions de ce prénommé Morgan. J’inspirai lentement et profondément la fumée et la soufflait tout aussi lentement comme si tous mes problèmes s’évaporaient en même temps que ce nuage qui sortait de ma bouche. Les effets de l’alcool avaient complètement disparu, malheureusement. La cigarette parvint tout de même à me calmer et à reprendre un semblant de dignité. Un cauchemar si c’est moi qui le décide ? Voilà qui était bien étrange… Je ne savais vraiment que faire, il était à présent sur que ce n’était pas un rêve et il était aussi sur que je ne pourrais sans doute jamais sortir. Au moins, je n’étais pas seul. Enfin à peu près calmée, je m’aventurai à répondre aux questions de ce parfait inconnu.

« Je me nomme Edric… Kell… »

Je n’avais pas pour habitude de me présenter aussi facilement, sans doute étais-ce l’angoisse ou bien la curiosité qui me forçait à changer bien que cela puisse paraître étrange. Je retirai encore une fois sur cette cigarette qui réussissait à me calmer. Habituellement, j’aurai tourné les talons et j’aurai laissé le jeune homme sur cette réponse, mais je n’avais de toute façon nul endroit ou me rendre. Je n’avais pas d’autre choix que de répondre bien sagement.

« Comment ai-je fais pour me retrouver ici à cette heure… Je n’en sais rien moi-même… »

Tout commençait à devenir flou, comment avais-je réussis à me retrouver ici ? Cela me paraissait être il y a tellement longtemps… Et pourtant ! Ca ne devait pas tarder de plus d’une heure. Je ne savais décidemment plus ou j’en étais.

« J’étais à ce bar… Comme tous les soirs… J’avais pas mal bu… Et vous allez sans doute me prendre pour un fou, mais j’ai cru voir quelque chose, qui se trouve être un léopard à côté de moi, enfin, cela doit être mon imagination ! Quoiqu’il en soit, je l’ai suivis et sans réellement savoir comment, je me suis retrouvé ici ! »

C’était vrai, ce Morgan allait sans doute me prendre pour un fou, peut importe, c’était la vérité, et lui qui devait être ici depuis un certains temps déjà saura peut être m’éclairer. Le temps passait, il n’y avait que nous deux dans la pièce, un silence pesant nous enveloppais. Je finis ma cigarette et écrasa cette partie de ma vie en moins. Je me levai et regardais plus attentivement le lieu dans lequel j’étais. C’était vraiment grand, et dire que ça ne devait être qu’une partie de cet endroit. Je ne me sentirais pas trop dépayser finalement. Je fus surpris de ma pensée, je parlais déjà comme si j’allais pour toujours vivre ici, ce qui risque d’être finalement le cas. Le silence était vraiment insupportable, je sortais, après tout, d’un lieu bourré de monde et d’une musique assourdissante ! Que faisais-je donc ici ? Peut importait, je me demandais surtout si il y avait d’autres personnes dans ces lieux.

« Depuis combien de temps vis-tu ici ? Es-tu seul ? »

Bien que silencieuse, la pièce était chaleureuse, empli d’une odeur agréable, indéfinissable. Je continuai de regarder de partout tel un lion en cage. Cet endroit, allait peut être me convenir ! Je me sentis finalement rassuré et chose plus qu’inhabituel je souris à mon interlocuteur. Il ne devait pas vraiment comprendre ce qu’il se passait dans ma tête. L’être humain est bien versatile.

Mon récit diffère des autres, qu’est-ce que cela pouvait bien dire ? Peut importe, j’étais ici et rien ne pouvait changer cela. Un petit frisson me parcouru à cette pensée, pourquoi suis-je ici ? Il semblerait que personne ici ne le sache réellement. Voilà qui était plutôt étrange, je n’ai jamais cru au compte de fée, au père noël et toutes ces histoires que l’on raconte aux gosses pour les endormir. Non, j’étais d’ailleurs bien le seul à ne jamais croire à ces sornettes. Et pourtant, voila que je me retrouvai dans une histoire à dormir debout. Je fus tout de même surpris d’encaisser la nouvelle si vite. Si on m’avait dit auparavant ce qui allait m’arriver, premièrement, j’aurai ris, je n’y aurais pas cru et deuxièmement je n’aurai jamais pensé m’y faire aussi rapidement. Bien sur, j’étais loin d’être prêt à l’assimiler entièrement, mais, peut être serais-je plus heureux ici. Le silence emplissait à nouveau la pièce, mais ce n’était plus le même qu’il y a quelques instants, il était à présent calme et reposant.

Morgan avait eu une légère gêne lorsque je lui avais raconté comment je suis arrivé ici, principalement lorsque j’avais parlé d’alcool. D’autant plus que celui-ci s’était reculé lorsque j’avais allumé ma cigarette, chose bien étrange puisque lui-même fumait. Je n’appréciais pas vraiment les personnes qui ne me suivaient pas dans ces nombreuses soirées alcoolisés. Je ne m’étais jamais vraiment demandé pourquoi. Sans doute étais-ce une façon de me cacher la vérité, je ne voulais pas accepter que ma vie ne rime à rien, pathétique.

Quoiqu’il en soit, cela faisait trois ans que le jeune homme vivait ici, trois ans qu’il ne voyait que ces murs, trois ans qu’il voyait encore et encore les mêmes personnes. Comment avait-il tenu ? Les autres habitants doivent valoir la peine de rester en vie dans ce cas-la. Je restai un moment figé sur le fait qu’il y avait d’autres fêtards ici. Le soulagement ne cessait de s’accroitre décidemment. Tant qu’il y avait de l’alcool, je pouvais continuer à rester ici, car là ou ailleurs, cela ne changerait en rien à mes occupations finalement. A force de parler d’alcool, je me rendis vite compte que les effets avaient été totalement dissipé, et une bouche pâteuse se faisait de plus en plus ressentir, j’avais soif. Heureusement, Morgan m’avait proposé de boire quelque chose. Je suivis donc la personne avec qui j’allais à présent vivre dans ce couloir en étant de plus en plus étonné sur la grandeur des lieux. Je me sentais de plus en plus dans mon élément.

Je bu à grande gorgées, mais la soif persistait. Il faut vraiment que j’arrête de boire de l’alcool. Mais je savais pertinemment que je ne pourrais me résoudre à cette décision et après tout peu importe. Autre source de questionnement, je venais de me rendre compte Morgan qui avait à peu près mon âge me vouvoyais, cela me paraissait étrange, rare sont les gens de ma génération qui me vouvoie. Je n’osai cependant pas contredire une personne qui m’avait si bien accueilli dans ce lieu pour le moins étrange.

Je ne comprenais pas vraiment ce qu’il voulait dire quand il disait qu’un faux pas pouvait valoir chère ici. Je brisai donc à nouveau le silence qui régnait dans la pièce.

« Que voulez-vous dire quand vous dites qu’un faux pas peut valoir cher ici ? »

Je regardais Morgan, silencieux, attendant que celui-ci se décide à répondre. Les autres habitants étaient-ils tous aussi discret et neutre que lui ? Je ne l’espérais pas vraiment, cela me provoquait une certaine gène qui me força à détourner les yeux. Je découvris une bouteille d’alcool presque vide sur une table, je ne pu m’empêcher de sourire et de la prendre ne serais-ce que pour voir la réaction de mon interlocuteur. Je l’ai vidé dans deux verres, un que je finis d’une traite et l’autre que je tendis à Morgan. Un petit sourire s’étirait sur mes lèvres, je ne voulais bien évidemment pas me le mettre à dos, juste pouvoir le cerner en le provocant un petit peu.

Ce Morgan était vraiment étrange, tout comme cet endroit d’ailleurs. Mais, j’allai peut être bien m’amuser tout compte fait, après tout, qui ne s’amuse pas avec de l’alcool ? Je me dis que j’étai peut être arrivé bien bas pour penser ce genre de choses, mais après tout, nous n’avons qu’une vie… Je me disais souvent cette phrase pour me rassurer, mais elle-même commençai à me faire peur. Mais peu importe, je continuai d’observer l’homme en face de moi, apparemment choqué de mon geste, il devait être vraiment coincé. Pourtant, il versa du jus d’orange dans son verre, c’étai déjà ça. Je continuai de le regarder, le regarder, toujours le regarder, observant le moindre de ses gestes comme s’ils allaient me donner un indice de l’endroit ou j’étais. Il fallait peut être s’y résoudre, j’étai bel et bien enfermé dans ce pensionnat… Finalement, ce n’était peut être pas plus mal, il fallait que je parte de cette vie, et puis recommencer la même ailleurs m’enchantait plus qu’autre chose tout compte fait. Le silence continuait à se faire jusqu’à ce que Morgan prenne enfin la parole. Je ne comprenais pas vraiment ce qu’il voulait dire, que ça pouvait m’énerver les personnes comme ça, on demande plus d’explications, mais eux préfère tourner autour du pot.

Tenter une promenade en plein hiver, c’est cette chose de chose que je ne ferai probablement jamais, donc il ne devrait pas y avoir de problème là-dessus, cela dit, pourquoi avoir besoin d’être mis en garde sur ce fait ? Tant de questions, pour lesquelles, je n’aurai probablement jamais de réponses. Quoique si je reste ici pour toujours, j’allais bien finir par les trouver. Par contre, que voulait-il dire en parlant de pouvoirs ? Etais-ce au sens propre ou figuré ? Mais mince ! Ou voulait-il en venir à la fin. Il commença à m’énerver, je perdais patience.

Voyant la grimace du jeune homme après avoir ingurgité le verre, je ne pu réprimer un petit sourire. Il n’avait pas l’habitude, ça ce voyait tout de suite, ou par le passé, avait-il trop prit l’habitude ? Bref, tout cela n’était en faite que détails. Celui-ci reprit la parole éveillant de plus en plus ma curiosité. J’avais envie de lui gueuler dessus pour qu’il me dise ce qu’il en est réellement, mais je savais que ce n’était pas vraiment une bonne solution et commença donc plus sagement sans même plus penser à le vouvoyer.

« Tu ne pourrais vraiment pas être plus précis ? Des pouvoirs ? Mais de quoi parles-tu ? Et vu que tu veux me conseiller, dis-moi donc qu’elles sont les mauvaises personnes à ne pas se mettre à dos ? »

J’avais gardé une voix calme et paisible, bien évidemment, en mon fort intérieur, je bouillonnais légèrement. Mais il fallait vraiment que je me concentre et ce malgré l’alcool qui refaisait surface au grand galop. Je regardai la bouteille de vodka vide, avec un air nostalgique, j’en voulais encore, encore et encore, toujours plus. Cet endroit sordide passait vraiment mieux avec quelques verres. C’était bon à savoir, et surtout une très bonne chose pour moi, mais je ne connaissais vraiment pas les lieux, et d’après ce Morgan, ce n’était pas vraiment prudent de s’aventurer dans cet endroit sans rien connaître, et finalement, je me dis qu’il n’avait sans doute pas tort. D’un certain point de vue il n’avait vraiment pas l’air méchant mais qu’est-ce qu’il m’énervait, enfin, ca passera probablement avec le temps. Espérons-le.

J’aurai bien aimé savoir jusqu’où le misanthrope irait avec cette histoire d’alcool, mais le problème et qu’il n’y en avait plus. Mon regard vacillait entre Morgan et la bouteille sans trop savoir lequel des deux m’intéressait le plus. Et dire que je refusai d’admettre que j’étai alcoolique. Mais… Nous n’avons qu’une vie.

Ce sourire qu’étendait légèrement Morgan était ce pour se moquer de moi ? De mon impatience ? Cela m’énervait de ne pas comprendre, de voir que lui savait tout et en profitait pour me faire patienter alors que ce n’était vraiment pas le bon moment. Se retrouver du jour au lendemain dans un lieu inconnu, entouré de gens inconnus, et ce à vie, car oui, je savais que tout ceci n’était pas un rêve, la vodka pur qui brulait la gorge, cet énervement, cet endroit même, n’en était pas un, tout ceci était bien réel, et je devais tout supporter, je devais le supporter aussi, lui, cet homme se croyant si supérieur. J’avais tout faux. Il s’excusait même. Je me dis finalement que bien que cette personne soit plutôt froide, elle n’en reste pas moins un être humain, qui pense, qui a des craintes, des joies et aussi surement des peines. Une sensation étrange me parcourait tout le corps, je ne la connaissais pas très bien et je n’avais pas assez bu pour que cela provienne de l’alcool qui me rend toujours plutôt un peu trop euphorique. Non, c’était une sensation que je n’étais pas sur de bien m’expliquer. De l’angoisse ? Non, c’était tout le contraire. Peut être de la reconnaissance, ou simplement de la sympathie pour ce jeune homme. Je ne croyais pas que des mots pouvaient changer une personne, pourtant, seulement avec ce « excusez-moi », j’ai complètement changé de bord. Lunatique. Trop lunatique. Etait-ce un rougissement du à l’alcool ou à la culpabilité qui s’étendait légèrement sur mes joues ? Il faut croire que j’appréciais cette personne, elle était en fait un peu comme moi.

« Oh… Ce n’est rien… Et puisque nous allons apparemment vivre un bon moment ensemble ici, pourquoi ne pas se tutoyer, ce sera plus simple, n’est-il pas ? »

Je bafouillais légèrement, je n’avais pas vraiment l’habitude de tenir ce genre de discours, mais si je ne changeai pas ici au niveau de l’alcool, peut être qu’au niveau de ma politesse, cet endroit aura un effet positif ? Je ne savais pas encore vraiment le sens de ce que Morgan voulait dire, et bien que je savais que ca n’allait pas être très joyeux, je me sentais bien ici tout compte fait. J’étais sur que plus d’une personne en arrivant ici à cherché à en sortir, à tenter de trouver tous les moyens possibles pour y arriver en se répétant continuellement, ces phrases aussi bêtes que célèbres comme « J’y parviendrais ! », « Je réussirai ! », Je trouverai la solution à cette énigme (qui n’existe finalement pas), je m’en sortirais ! … Mensonge héroïque des personnes qui ne baissent jamais les bras. Tout ceci me fit sourire, beaucoup de choses qui s’étaient assombris en moi, sans doute par les vapeurs répétitives de l’alcool s’était réveillé et beaucoup de choses me paraissaient plus légères maintenant. Je laissai le jeune homme continuer son discours.

Ah oui, le panneau, je l’avais oublié celui-la, il faut dire que beaucoup de choses s’étaient passés voir même éclaircis. Je me demandai quel était mon pouvoir, car oui, je le croyais, au point ou j’en étais, ce genre de choses étaient tout à fait possible dans ce genre d’endroit après tout. Tester le pouvoir de Morgan sans même savoir ce dont il s’agissait me fis cependant un peu pâlir. Je ne tenais pas à me faire carboniser. Non, même pas du tout. Je continuai à fixer la bouteille en face de moi, mais cette fois-ci sans faire attention, je pensais à autre chose qu’à cette liqueur qui nous fait voir parait-il la vie d’un œil meilleur. Une grande phrase à la con parmi tant d’autres.

« Je ne pense pas qu’essayer ton pouvoir soit vraiment une bonne chose pour moi, n’est-ce pas ? Cela dit, aussi bizarre que ça puisse paraître, je te crois. »

Mais Morgan tenait apparemment à ce que je boive, me dis-je d’un ton moqueur. Chacun avec une liste personnelle ? Je vois, en fait il fallait se méfier ici d’un peu tout le monde , j’avais l’habitude de faire ça, ça ne devrait donc pas poser finalement tant de problèmes que ça ! Certes le corps de Morgan était bizarre, cela dit, ça ne m’avais pas choqué plus que ça, bizarrement ! Mais je ne préférais rien ajouter à ce sujet, j’avais peur qu’il me prenne pour quelqu’un d’insensible. Cela dit, lorsqu’il me montra sa cicatrice, je fus malgré moi un peu choqué, comment s’était-il donc fait ça ? Et pourquoi avait-il prit aussi peu de soins pour quelque chose d’aussi important ? Beaucoup de questions, trop de questions me tourmentaient, mais je ne pouvais pas les poser, après tout, « cela ne me regarde pas ». Et il en rajoutait, paranoïaque, vu ces cicatrices, il y avait de quoi être paranoïaque, je le trouvai même un peu trop calme. Cela dit trop de pensées me parcourait l’esprit, je repris donc.

« Je sais que cela ne me regarde pas mais… Qui a donc pu te faire ça ? Et surtout pourquoi ? Enfin, je ne sais pas si je veux réellement connaître la réponse. Mais comment savoir quel est mon pouvoir ? Le mien ? Y a-t-il un contexte pour s’en rendre compte ou il vient par rapport à l’ancienneté ? »

J’avais l’impression d’être à un entretien d’embauche, mais peu importait, j’étais lancé.

« Tu vis donc seul ou du moins méfiant depuis si longtemps ? Quel est ton pouvoir ? »

Je me faisais honte, et cela devait se voir, trop de questions, je détestais poser les questions, il n’y a que les ignorants qui posent des questions. Je soupirai.

« Excuse-moi, oublie. Je veux bien reprendre quelques verres, sais-tu si une bouteille se trouve dans le coin ? Quelque chose peut-être ou tu serais d’accord de m’accompagner sans te forcer cette fois-ci ? »

Un léger sourire, complice ou pas, se dessinait à moitié sur mes lèvres, et j’allumais une cigarette.

Non, ce Morgan n’était pas si méchant qu’il en avait l’air, tout ce que je me disais n’était probablement rien d’autre que des idées. Le sourire qu’il avait porté en acquiesçant le prouvait plus ou moins. Et dire que moi, je n’avais rien fait d’autre que de le bombarder de questions. Je me sentais déjà plus confiant. Le jeune homme connaissait bien les lieux et ses habitants, et semblait donc être inoffensif/ne pas vouloir me faire de mal. Bien que l’endroit me semblait tout de même dangereux, je me sentais finalement bien ici, il faut dire que je n’en pouvais plus de ma vie en dehors de ce monde. Des faux amis, des faux sourires, des faux souvenirs, des faux rires… Beaucoup de choses qui n’étaient en fait que superficiels me revenaient en mémoire. Et bien qu’il soit fort possible qu’il se passe les mêmes choses ici, d’autres changeraient, c’est sur.

Malgré l’amusement de Morgan, je n’étais tout de même vraiment pas rassuré au niveau des pouvoirs, mais je voulais finalement voir comment il arrivait à les déclencher, peut être pourrais-je faire pareil ? Je ne savais pas quoi faire. Lui faire confiance ? A quel prix ? Se ridiculiser, se faire tuer, certes j’exagère…peut être pas. Enfin, je ne pensais pas que c’était les intentions du borgne mais tout cela était vraiment nouveau pour moi. Comme on dit, la curiosité est un vilain défaut. Je voulais savoir comment tout cela se passait.

« Oui… J’aimerais bien voir comment fonctionne ton pouvoir… Peut être. »

Tout cela était bien hésitant, mais il faut dire aussi qu’il y a seulement un petit instant, j’étais dans un monde qui se situait dans la catégorie « normal » et me voilà dans celui d’un inconnu bien étrange. C’était tout à fait normal pensais-je d’avoir ce genre de craintes. Du moins, pour moi. Quoiqu’il en soit je m’attendais à tout en ce qui concernait son pouvoir dont les effets m’étaient encore inconnus, de la chose la plus inoffensive, à la plus angoissante.

Lorsque Morgan se leva pour aller chercher de quoi se « réhydrater » j’en avais presque oublié l’envie de boire, ce qui ne m’était pas arrivé depuis un certains temps déjà. Il amena sur la table une bière qui était très bien venu. J’aurais tout le temps de boire des dizaines de vodka à moi seul plus tard. Je ne pus m’empêcher de sourire lorsqu’il dilua sa bière, ce n’était pas pour me moquer, loin de là, je trouvai que Morgan était un personnage bien étrange. Ce n’est pas tout le monde qui dilue de la bière. Quoiqu’il en soit, j’avais une grande soif ce qui me valut de descendre mon verre d’une traite, ce qui n’allait probablement rien arrangé, car certes la bière avait un taux d’alcool plutôt bas, mais n’en restait pas moins de l’alcool. Je me sentis bien bête et enviait Morgan avec son jus de fruit dans son verre.

D’après les explications de Morgan, cet endroit était plutôt anarchiste. Bonne chose ? Mauvaise chose ? Tout dépend du regard que l’on avait sur cet endroit. A priori, je dirais que c’est assez angoissant, surtout avec des pouvoirs tel que le jeune homme était en train de me les décrire. Ce n’était pas bien joyeux tout ça. Sur le fait qu’il ne pouvait pas m’éclairer sur mon ou mes pouvoirs m’irrita légèrement, enfin, ce n’était pas la faute de Morgan, mais je voulais savoir. Apparemment, lui métrisait déjà le sien, celui d’empêcher de parler. Effectivement ce n’était pas suicidaire de le subir. Mais neutraliser les cordes vocales restait quelque chose que je n’ai jamais vécu et ca me paraissait…étrange, particulièrement la sensation que ça devait faire.

Ce que me confie Morgan, prouvait bel et bien que j’étais différent ici que dans mon monde d’avant, ou du moins, avec ce personnage. Si quelqu’un m’aurait dit quelque chose de ce genre il y a peu, je lui aurais sans doute rit au nez, en montrant d’une façon ou d’une autre ma soi-disant supériorité. La, ce n’était pas le cas du tout, et je me dis finalement, que je n’étais pas si loin d’être le même. Solitaire, en apparence je ne le suis pas, mais au fond ? Qui m’apprécie réellement ? On se baigne dans des « Je t’aime », des « Mon chéri », mais au fond, ou est le sens la dedans. Qui pourra prouver la sincérité dans ces mots qui s’envolent dans le vent tel des feuilles mortes ? Enfin, ce n’est peut être pas si important, et je pense qu’au fond, beaucoup de personnes ressentent ce vide sans fond mais refuse de se l’avouer. Forcément, si tu ne souris pas, tu n’es pas drôle, tu es ennuyeux, c’est tellement plus charmant les personnes qui rigolent. Propagande imbécile pour être comme il faut. Bref, il y avait donc des personnes avec qui j’étais potentiellement capable de devenir ami, c’était une bonne chose, qu’il y ait des fêtards aussi d’ailleurs. Cela dit, Morgan m’avait accueilli, gentiment, c’était plus ou moins confié sur certaines choses et je ne comptais pas le laisser s’en aller aussi facilement à présent. Car bien que ca pouvait paraître rien comme ça, il m’avait déjà beaucoup aidé. Que ce soit dans mes façons de pensées que dans l’explication de ce lieu lui-même. Je lui lançai avec un sourire amusé de connivence.

« Ne t’inquiète pas, je sais faire la part des choses. »

Ma cigarette que je n’avais pas touché continuait à se consumer lentement dans le cendrier en verre et formait une cendre plus longue que ce qui restait à en fumer, je pris une profonde bouffée et soufflait un nuage de fumée, puis j’écrasai la cigarette sans même la terminer.

« Je comprends, tu sais, au niveau de la solitude, je suis probablement un peu pareil que toi… Finalement. »

Pour une raison qui m’échappait, je n’osai pas vraiment parler, étais-ce de l’angoisse, du bien être, de la fatigue ou autre chose ? Je n’en avais aucune idée. J’étais là, assis sur cette chaise, dans cette pièce que je ne connaissais pas, me demandant ce que je faisais ici. Toujours lunatique, toujours trop lunatique. Tant pis, ca me passera. Après un petit moment de silence je finis par lui poser une question, finalement primordiale.

« Et tout compte fait. Es-tu heureux d’être ici ? »

J’aperçu Koki, le petit léopard qui m’avait accompagné jusqu’ici dans le fond de la pièce me regardant droit dans les yeux, l’air joyeux. Je souris.

« Alors… Ton pouvoir ? »