Pensionnaire Romeo Hercolani
+ Pseudo Hors-RP : Never • Age : 28 • Pouvoir : Altération de la voix dans une conversation 'officiellement' engagée (en gros, si vous lui dites bonjour, vous êtes dans les ennuis). • AEA : Tortinette, la tortue tricorne et tricéphale. La tête qui concerne Romeo est celle du milieu. Elle a une corne qui brille, c'est trop super. • Petit(e) ami(e) : Uniquement si ça se mange. RP en cours : • Romeo fait la tortue ninja par là.
Messages : 35 Inscrit le : 26/08/2012
| Sujet: HERCOLANI Romeo {Terminé} Ven 12 Oct 2012 - 12:43 | |
| * Romeo Hercolani *nom – Hercolani *prénom – Romeo *age – 16 ans *né le – 22 Juillet 2003
| ♋ |
Pouvoir 'Ca Va BIen CHEz toI ?' Romeo a le pouvoir de changer l'intensité de la voix d'autrui dans une conversation 'officiellement' engagée. C'est à dire que s'il vous salue et que vous le saluez en retour, son pouvoir fera immédiatement effet et votre voix jouera au yoyo, passant d'une faible intensité à une forte intensité dans une seule phrase. L'effet dure tant que la personne visée et Romeo n'ont pas pris congés l'un de l'autre, et autant dire qu'il est parfois difficile d'obtenir un simple 'au revoir' de sa part dans ces conditions. Vous voir passer du chuchotement au cri en un quart de seconde, ça l'amuse beaucoup. Heureusement, il finit toujours par céder au bout du compte. Sinon, ce ne serait plus drôle à force. Alter Ego Astral "Hein ? Mais j'ai jamais croisé le mien ! Enfin je crois. Euh... J'avais inventé quoi déjà ?"Malgré ce 'euh' très éloquent, Romeo a bel et bien croisé son AEA, et à plusieurs reprises. Peut-être que vous même avez remarqué cette pauvre tortue à trois têtes qui passe parfois dans les couloirs, tantôt paisiblement, tantôt poursuivie par trois énergumènes décidés à se l'approprier et à en tirer fortune. C'est que Romeo et ses frères ne se sont pas encore rendus compte que la tortue leur appartient, butés dans leur idée qu'ils n'auraient jamais imaginés un ami aussi 'petit et moche'. Tortinette, malgré tout, est l'ami imaginaire des triplés. Tortue tricorne et surtout tricéphale, la tête correspondant à Romeo est celle du milieu. Petit, il l’appelait Leonardo et prétendait que la corne qui se trouve sur son front brillait de mille feux une fois la nuit tombée. Maudites paroles; En effet, la corne de son ami brille effectivement comme un phare en pleine tempête durant la nuit. Elle est la première à s'en plaindre. Du reste calme et sympathique, bien loin du semblant d'hyperactivité de son créateur, on peut noter toutefois chez elle un goût prononcé pour Leonard de Vinci, une passion pour l'escalade et pour le McDonald's. Aussi, cette tête là ne parle d'elle ni au féminin ni au masculin, passant régulièrement de l'un à l'autre sans que ça la dérange. Passions Romeo aime le vert, marcher, il aime Rome et il aime les glaces parfum chocolat et pistache. Il voue un culte aux restaurants McDonald, aime les frites et les hamburgers, et si faire l'idiot était un sport national il y excellerait sans le moindre doute. Même si monsieur n'écoutait jamais rien en cours et était le némésis de toute la classe enseignante, il aimait bien les mathématiques malgré tout (ça au moins, c'était pas trop dur en comparaison du reste). Par dessus tout, Romeo aime être heureux et rire; vous ne le verrez jamais triste, ja-mais. Il aime aussi ses frères, en dépit des surnoms peu glorieux dont il les affuble régulièrement. Ah, oui, il aime aussi être confondu avec ses frères. Ça l'amuse énormément de perdre et mystifier ses interlocuteurs. On peut aussi noter une tendance à courir dans les lieux publics, parler à un débit incompréhensible pour le commun des mortels et escalader les arbres quelle que soit la saison. C'est cool, les arbres. J'ai oublié de préciser qu'il était accro aux tortues ninjas ? Maintenant, c'est fait. N'aime pas / Phobies Romeo n'aime ni avoir mal, ni avoir peur, ni être triste. Il n'aime pas non plus le sport sous quasiment toutes ses formes (à part la course et l'escalade) et l'école ne lui plaît que très moyennement. Sinon, il déteste ce qui n'est 'pas fuuuuun', sachant que selon le contexte cela peut être un peu tout et n'importe quoi. Oh, et le citron. Le parfum citron, ça le rebute, même s'il en mange parfois (ne cherchez pas à comprendre). Il n'a pas d'affection particulière pour les félins et les panneaux publicitaires pour les meubles l'offensent.
|
« Excusez-moi, mais vous auriez pas vu passer un de mes frères ? Ils sont comme moi, en fait, mais en plus petits et plus moches. » |
Histoire
« Ma mère, elle a séduit mon père en le battant au poker. Si ! »
Septembre 2011, Rome
« Romeo, arrête de bavarder. Il n'y a qu'une seule personne dans cette classe qui soit autorisée à parler, et c'est le professeur.
-Mais monsieur, c'est pas moi Romeo. »
La classe laissa s'échapper un rire sourd. Le professeur fronça les sourcils et ses yeux rencontrèrent ceux du petit garçon, qui affichait une mine amusée en totale contradiction avec ses propos. Néanmoins, il était impossible de savoir s'il disait vrai. Il aurait fallut les marquer au fer rouge pour les reconnaître, ces trois sales gosses.
« Si tu n'es pas Romeo, alors qui es-tu ? » Demanda-t-il, une fausse note de patience dans la voix, le cahier toujours ouvert dans une main et le crayon dans l'autre. Tout le monde savait que Monsieur Tadiello faisait très bien semblant; Après tout, il faisait aussi le théâtre après les cours. Mais tout le monde savait aussi que les triplés ne se souciaient pas le moins du monde de la personne qu'ils avaient en face d'eux. Quand ils décidaient de faire leur petit numéro, le sévère Monsieur Tadiello, la placide Madame Gennaro ou la nerveuse Madame Conti, rien ne les arrêtait. Pourvu que cela lui fasse perdre quelques minutes de cours, la classe se prêtait sans broncher à ce jeu de qui est-ce grandeur nature.
« C'est Lorenzo, monsieur ! »
Le cri n'était absolument pas parti du petit garçon interrogé au premier rang, mais d'un autre au visage semblable, au fond à droite. Avant que le professeur ait pu rétorquer quoi que ce soit, ce fut une troisième voix en provenance de la gauche qui vola à travers l'air et perturba un peu plus l'ambiance qui virait à l'orage.
« N'importe quoi, c'est toi Lorenzo !
-Et comment tu pourrais le savoir, hein ?
-Parce que lui c'est Aurelio !
-Pas possible, c'est toi Aurelio et moi je suis Romeo ! »
Le professeur passa lentement une main sur son visage. Derrière lui la classe s'agitait, se désintéressait complètement des calculs qu'il essayait vainement de lui faire rentrer dans la tête depuis une semaine. Il en fallait peu pour dissiper des enfants, et les Hercolani étaient bien pires qu'un simple 'peu'. Il avait déjà eu l'année précédente la joie de devoir leur faire cours, et n'avait jamais réussi à les faire se tenir tranquilles sur leur siège plus d'un quart d'heure. La même comédie se répétait cette année. A ce niveau là, ils doivent aller consulter un médecin, avait-il dit à leur mère; le nécessaire avait été fait et le docteur les lui avait rendu le lendemain 'en pleine forme, avec juste le besoin de se dépenser'. Christian Tadiello n'était pas un monstre, il n'avait pas espéré qu'on leur diagnostique une tumeur ou un quelconque cancer. Presque pas. Le fait est qu'il était à 'ça' de conseiller à leur mère de les jeter dans le Tibre.
« STOP. On se calme, ou j'envoie tout le monde réciter sa leçon chez le directeur ! (Les derniers murmures s'étouffèrent vite à cette menace, tous sauf ceux des trois jumeaux, qu'il foudroya sans retenue du regard car il se pensait dans son bon droit) Est-ce que je dois appeler votre mère afin qu'elle puisse venir me dire qui est qui, puisque de toute évidence vous n'avez pas pris les places que je vous ai assignées à la rentrée ?
-Si monsieur, mais lui c'est...
-S'il était à sa place, il se nommerait Romeo Hercolani, et pas Lorenzo ou Aurelio. Je me trompe, oui ou non ? »
Un professeur qui commençait à crier, c'était toujours mauvais signe. Soudain studieux, tous les élèves louchèrent avec application sur leurs cahiers, exception faite là encore des triplés. Le petit garçon du premier rang ne semblait absolument pas désolé de tout le remue-ménage que sa remarque avait créé; au contraire, il leva la main comme si le cours n'avait pas été interrompu.
« Oui ? »
Et que le professeur ait l'air de vouloir l'étrangler n'était qu'un détail bien futile à ses yeux verts.
« Monsieur, c'est vrai qu'ils vont tous mourir au Japon à cause des réacteurs ? »
La porte de la classe claqua violemment dans leur dos, laissant les trois enfants seuls dans le couloir doucement éclairé. Une, deux, trois secondes de silence; trois comme eux. Comme trois sourires et trois rires semblables.
Ils se regardèrent avec dans les yeux l'immense satisfaction d'une bêtise accomplie. Le petit garçon du premier rang prit alors la parole. Ou peut-être était-ce un de ses frères ?
« J'ai réussi à nous faire sortir ! »
Les mains claquèrent sous des exclamations victorieuses.
« Bravo Romeo ! La prochaine fois c'est moi qui nous fait sortir !
-Et après ce sera moi ! »
BANG. Les trois petits se retournèrent vers la porte contre laquelle on venait de taper un grand coup.
« Moins de bruit, ou je ne me contenterai pas de vous mettre dehors.
-Oui monsieur ! »
Pour une fois dans leur vie, les triplés obtempérèrent et s'assirent à même le sol en réduisant leurs gloussements au maximum. Les élèves et le personnel qui passèrent par là ne furent pas étonnés de les voir devant la porte de la salle dans laquelle ils étaient censés avoir cours de mathématiques: certains levèrent les yeux au ciel devant cette bêtise chronique, d'autres leur adressèrent un signe complice. On connaissait les Hercolani, oui, dans tout le bâtiment. Dans tout le quartier. Ils étaient la terreur de la boulangère, les gamins trop turbulents, la bête noire des professeurs. Ils ne se tenaient jamais tranquilles, et Dieu qu'il était difficile de les reconnaître ! Il n'y avait guère que leurs parents pour réussir cet exploit.
Et si on était indulgent avec eux dans le fond, ce n'était pas pour leurs beaux yeux – qui n'avaient d'ailleurs rien de si exceptionnel. Rendez-vous compte ! Des triplés, ça restait rare, et de véritables triplés encore plus. Quand on les voyait courir, répliques identiques, on en restait coi. On ne voyait pas ça tous les jours. On était stupéfait, étonné.
Dommage pour vous que la naissance sur un million savait exactement comment jouir de son statut de curiosité et était pleinement consciente de l'effet qu'elle produisait chez de nouveaux interlocuteurs.
Des démons je vous dis ! Des démons avec un grand sourire. Et trois pour le prix d'un en plus de ça !
Adele tapotait le volant, ses yeux noisettes tournés en direction de l'entrée de l'école, par où sortaient des vagues et des vagues d'enfants. Ceux-ci partaient en courant dans la rue, rejoignaient des voitures voisines à la sienne ou sautaient dans les bras des parents qui les attendaient devant la grille. Tous autant qu'ils étaient, les petits poissons quittaient le corail pour rentrer chez eux se reposer. Tous, sauf ses enfants à elle. Évidemment.
Quand un gamin haut comme trois pommes lui fit signe à travers la fenêtre, elle baissa la vitre et lui adressa un sourire. Elle reconnu Carlo, un des rares amis des garçons, qui suivait les mêmes cours qu'eux. Ce n'était pas la première fois que cette scène se produisait, et Adele pouvait presque deviner les mots que s'apprêtaient à former les lèvres du petit garçon à lunettes. Elle en était blasée et honnêtement, cela lui fit peur.
« Bonjour Madame Hercolani ! Monsieur Tadiello m'a dit de vous prévenir qu'il vous attend dans la classe avec Lorenzo, Romeo et Aurelio. »
Elle soupira profondément. Tant pis pour ce moment de faiblesse, on lui devait bien ça.
« Tiens tiens, comme c'est étonnant. Qu'est-ce qu'ils ont fait, cette fois-ci ?
-Euh... Comme d'habitude ? »
Le petit garçon lui sourit de toutes ses dents. Adele hocha la tête, lui fit signe de partir; et avec une dernière salutation, Carlo rejoignit son père qui l'attendait sur le trottoir d'en face.
Le soleil se reflètait joliment sur la carrosserie noire de la belle voiture d'Adele, qui passa une main dans ses cheveux châtains. Sa seule consolation, alors qu'elle posait un talon sur le sol pavé, était que cette fois-ci au moins, ses fils n'avaient pas répandu de colle liquide sur le bureau du professeur, ruinant cours et contrôles dans la foulée. Parce qu'on avait beau dire, c'était difficile de garder un visage sérieux et courroucé devant un amas de feuilles, de stylos et de trombones confondus. Et elle n'aimait pas qu'on l'accuse d'encourager les bêtises de sa progéniture.
« Mais mamaaaaan...
-Je ne veux rien savoir. Vous avez été très méchants. Vous méritez cette punition. »
Les petits garçons gémirent dans un bel ensemble, néanmoins coupés quelques secondes plus tard par le moteur de la voiture qui démarra brusquement et s'engagea sur la route. Assis sur la banquette arrière, ils tapèrent des pieds, vexés de s'être fait réprimandés. Pas par le professeur; ça, ils l'avaient cherché, et toutes les lignes qu'ils devaient recopier ne les dérangaient pas. Par contre, être privés de gâteau au chocolat, c'était tragique. Leur mère le savait bien; elle avait soigneusement choisit sa sanction derrière ses airs placides.
« On voulait juste jouer ! Ça vaut pas un gâteau !
-Vous ne jouez pas, vous perturbez la classe. Ça, ça vaut un gâteau. Aurelio, attache-toi tout de suite ! »
La voiture prit un tournant serré, et les trois passagers à l'arrière s'effondrèrent les uns sur les autres. Leur mère jura, se préoccupant bien peu des 'ooooh' faussement outrés qu'ils lui adressèrent. Adele conduisait vite, avait toujours conduit vite. Les triplés le savaient.
« J'arrive pas à y croire. Attachez-vous immédiatement, tous. Juste quand votre père rentre, vous êtes impossibles. C'est fort quand même.
-Papa rentre aujourd'hui ?!
-Quand, quand ?
-Ce soir à 22 heures. Je suis presque tentée de vous laisser à la maison le temps que j'aille le chercher à l'aéroport, désobéissants comme vous êtes. »
La menace eut l'effet escompté. En plus de trois claquements simultanés indiquant le bon port de la vitale ceinture de sécurité, les petits garçons observèrent sur le champ un abrupt silence religieux. Silence que leur mère se décida à briser après trois minutes de course à travers Rome.
« C'est bon, vous avez la permission de venir. MAIS, ajouta-t-elle immédiatement pour couper court aux effusions trop bruyantes de joie auxquelles ses fils étaient régulièrement sujets, vous devez me promettre d'être sages et de ne pas voler les valises des gens qui attendent leur avion. Promis ? »
Pas le choix. Lorenzo, Romeo et Aurelio n'avaient pas besoin de se consulter pour s'exclamer à voix haute la même réponse. Jouer, ça ne valait pas un gâteau, mais se jeter dans les bras de leur père ça valair toutes les restrictions du monde. Sans surprise, la réponse vola avec un triple enthousiasme débordant.
« Promis !
-Bien. »
Les bavardages reprirent de plus belle. Adele écoutait avec un sourire les remarques de ses fils, ponctuées d'éclats de rire et d'imitations. Elle les aimait, elle aimait les entendre discuter, ce qui ne l'empêchait pas de temps à autre de souhaiter qu'ils perdent l'usage de la parole par un triste hasard. Mine de rien, quand on avait tente-deux ans, un travail, un mari souvent absent et trois énergumènes sur les bras, l'accumulation pouvait s'avérer vraiment usante. Mais Adele n'aurait pas su ce que le bonheur signifiait sans ces petits désagréments qui rimaient avec vie de famille. Elle ne s'en plaignait donc jamais – ou presque.
Dans le rétroviseur, trois jolis sourires. Le reste, ça vient après.
Lorenzo s'appuyait inutilement sur les épaules de Romeo, qui lui même s'accrochait à Aurelio pour tenter de percer le mystère de la foule compacte de l'aéroport. Comme les trois enfants faisaient la même taille, ils finissaient par se bousculer et chahuter, du moins jusqu'à ce que leur mère les rappellent à l'ordre d'un regard sévère. Quand une tête brune familière se diriga enfin vers eux, Adele n'essaya même pas de retenir ses fils qui partirent en courant et poussant des cris de joie, manquant de glisser avec la précipitation.
« PAPA !
-Eh, vous avez l'air en forme ! Doucement, doucement ! »
Roberto délaissa ses lourdes valises pour prendre ses enfants dans ses bras. Ils avaient beau ne pas être très grands ni très gros, il peina à les soulever tous les trois; y parvient quand même sous les vivats des concernés qui levèrent bien haut les bras.
« Bravo papa !
-T'es le plus fort !
-Ouais ! »
Plusieurs personnes se retournèrent vers eux, certains amusés par la scène, d'autres agacés par le bruit. Adele s'avança vers sa famille, se saisit d'une valise qui pivota sur ses roulettes et en tira le manche. Elle croisa alors le regard vert et amusé de son mari, qui lui dit, comme une confidence:
« Ces gens sont jaloux de moi. Ils n'ont pas d'aussi beaux enfants et une aussi belle femme.
-Roberto, voyons ! »
Sourire faussement courroucé, qui eut le mérite tout comme la remarque de tirer des gloussements amusés aux triplés que leur père reposa à terre, dans la joie et la bonne humeur.
Roberto, le père de Lorenzo, Romeo et Aurelio, était un homme connu et apprécié. Archéologue de profession, il se plaisait également à œuvrer pour diverses associations. Il aimait se rendre utile et il était arrivé qu'il intervienne dans des écoles, notamment celle dans laquelle étaient scolarisés ses enfants, ce qui avait quelque peu rattrapé le comportement insupportable de ses rejetons. On le connaissait aussi parce que sa famille était riche et que son père avait de son vivant eu la réputation d'un vieil excentrique: il s'était fait construire une villa en pleine campagne, dans laquelle il avait exposé toutes ses collections et où il avait fini par s'enfermer. Il y était d'ailleurs mort d'une chute, et aurait assurément pu être sauvé si quelqu'un s'y était trouvé. Mais il en avait interdit l'accès jusqu'à ses deux fils, prétextant que seul la compagnie de sa défunte femme lui aurait été agréable. Le vieil homme ne s'était en effet rendu compte qu'à la mort de cette dernière, avec laquelle il s'était constamment disputé, qu'il l'aimait. Cette constatation avait contribué à le rendre amer et plus misanthrope encore. Roberto plaisantait souvent sur le fait que ses fils avaient tout hérité de leur grand-père. Certains y voyaient néanmoins plus le reflet de l'éducation de leur mère, elle aussi particulièrement expressive et énergique. Les parents d'Adele niaient évidemment tout cela avec une grande ferveur, car si problème il y avait, il venait forcément de l'autre côté de la famille, n'ayant jamais digéré le fait que leur fille unique ait épousé un homme de dix ans son ainé. Leurs petits-enfants, aussi, leur faisaient peur. Ils venaient le moins possible.
Les triplés ne faisaient que conforter l'opinion générale sur la famille Hercolani. A savoir; une famille d'excentriques un peu bizarres. Roberto et son frère avaient appris à en rire, Adele aussi. Les petits garçons, eux, n'y voyaient aucun mal, allant même jusqu'à trouver la chose amusante.
A huit ans, tout nous semble amusant. Pour les triplés, tout est toujours amusant.
« On a toujours été heureux chez nous. Toujours. Il y a juste eu cette fois là, où... Le XX Octobre 20XX ? Ou bien... ah, je sais plus. Ça ne devait pas être si important que ça de toute façon, non ? On s'en souviendrait, sinon. Hein ? Si c'était important, on s'en souviendrait forcément. Je vois pas l'intérêt que j'aurais à vous cacher quoi que ce soit. »
Driiiiing, fait le téléphone dans le salon. Il est tard, qui ça peut bien être ? Quand le téléphone sonne à des heures incongrues, ce n'est jamais bon signe, jamais.
« Allô oui ?
-Madame Hercolani ?
-Elle-même. Qui êtes-vous ? Il est tard pour passer un coup de téléphone.
-Je sais, et je suis désolé de vous déranger, mais c'est urgent. Je m'appelle Francisco, je suis un collègue de votre mari. Je suis venu quelques fois chez vous.
-Désolée, je ne me rappelle pas de vous. Qu'est-ce que vous voulez ? Il s'est passé quelque chose ?
Inquiétude à peine masquée. Peut-être qu'elle aurait mieux fait de raccrocher.
« A vrai dire, c'est... Je n'aime pas avoir à vous l'annoncer, mais... »
Si on l'ignore on pourra encore en rire. On oublie la date, on oublie tout et on fait comme si, d'accord ? On ne va pas plus loin.
« Votre mari a... »
Tais-toi, je n'aime pas les histoires qui finissent mal. C'était censé être notre fin heureuse à tous les cinq. Alors chut. Ne va pas plus loin. Croix de bois, croix de fer, si je mens je vais en enfer. T'avais promis. Juillet 2012, Rome
« BOUH. »
Carlo sursauta, manqua de tomber à la renverse dans la ruelle pavée. Un petit garçon vêtu de vert se moquait de sa frayeur, juste à l'angle du mur, la bouche courbée en un sourire hilare. Le gamin surpris lui lança un regard agacé à travers le verre de ses lunettes rouges; agacé la fois par sa plaisanterie stupide et par sa réaction.
« Tu t'es encore fait avoir ~ »
Et inutile de lui rappeler que ça avait aussi été le cas les vingt dernières fois. Il était irrécupérable. Désireux de changer rapidement de sujet, Carlo embraya sur la raison de sa présence à leur point de rendez-vous habituel avant que son ami puisse le charrier de nouveau. Il sortit de son sac un énorme paquet de bonbons, qu'il n'eut pas à agiter longtemps devant les yeux de son interlocuteur pour qu'il s'en saisisse avec une exclamation ravie.
« Bon anniversaire ! Je savais pas trop ce que tu aimerais alors je me suis rabattu sur des valeurs sûres.
-Des bonnes valeurs sûres. Merci. Il faut qu'on montre ça à Romeo et Lorenzo. »
Carlo adressa au garçonnet qui avait déjà entamé le paquet un regard interloqué.
« Ben, ils sont pas avec toi ?
-Non, on était en mission secrète juste avant que tu arrives. »
Voyant que son ami n'avait pas l'air de comprendre de quoi il parlait, celui qui s'appelait en tout logique Aurelio daigna l'éclairer sur la nature de leur jeu du jour.
« On teste notre lien mental de la fraternité, donc on s'est séparés pour voir si on arrive à se retrouver par la pensée. »
Un rire échappa à Carlo sans qu'il puisse le retenir, mais Aurelio n'eut pas l'air de s'en soucier plus que ça.
« Mais c'est débile ! Ils vont juste carrément se perdre... Rome, c'est pas comme ton jardin, tu sais. »
Le sourire du garçon aux yeux verts s'agrandit et il y avait comme une pointe de mystère indéchiffrable dans cette grimace affable. L'éclat de celui qui sait mais qui ne peut pas expliquer – pauvres mortels, si peu prêts à recevoir l'ultime révélation. C'était un secret qui ne se partageait pas. Il s'engagea dans une ruelle à sa droite, le pas léger et presque dansant, Carlo à sa suite.
« C'est pas très différent. Ça manque juste un peu de vert en fait... Heureusement que je suis là pour tout égayer. (il tira sur son tee-shirt avec ce qui ressemblait à de la fierté) Je suis comme un sapin. Tout vert.
-Ah bon ? Je croyais que t'étais vert 'comme une tortue ninja', la dernière fois ?
-Et pourquoi on pourrait pas être les deux ? »
Le duo cessa brusquement sa marche, juste à temps pour ne pas rentrer dans la copie conforme du 'sapin' qui venait de sortir de sous une porte cochère. La main sur le cœur, Carlo protesta tandis que les deux jumeaux se tapaient la main bien haut et bien fort.
« On a réussi, on a réussi !
-C'est quoi cette manie de sortir des endroits les plus improbables ? J'ai eu peur !
-J'attendais que Lorenzo me trouve, c'est tout. Et il a réussi, en me localisant par la pensée ! »
-Lorenzo ? Eh, mais, je croyais que... »
Petit silence. Pensif pour Carlo, satisfait pour les deux autres qui le regardaient avec ce sempiternel sourire qui ne quittait jamais leurs lèvres, comme s'il y avait été collé à la glu à leur naissance. Depuis qu'il les connaissait (depuis l'école maternelle, donc), Carlo n'avait jamais vu les triplés faire la tête, jamais. Ce qui ne l'empêchait pas de connaître par cœur leurs travers. Cette joie que leur apportait la confusion de leur identité était le pire de leur défaut: c'était agaçant, stressant, et en plus il n'était pas en mesure de les contredire puisqu'il ne pouvait pas les différencier. Personne ne pouvait savoir combien c'était frustrant de subir ça au quotidien.
« Vous êtes lourds avec ça, vous savez ? » finit par lâcher le brun dans un soupir plus résolu que contrarié.
« C'est parce qu'on est surentrainés.
-C'est important pour les tortues ninjas de garder leur identité secrète. »
La vision furtive de ses amis avec des carapaces sur le dos arracha un sourire au petit garçon à lunettes, qui retrouva un visage plus détendu.
« Pourquoi des tortues ninjas, d'abord ? Elles sont quatre, et vous vous êtes trois. »
Le mouvement à sa droite aurait dû l'avertir de la présence indésirable; pourtant, quand on lui pinça les côtes, il poussa malgré tout un cri surpris qui résonna entre les murs de pierre de la petite rue.
« Quoiiii, tu n'as jamais entendu parler de Tortinette ? »
Trop occupé à grogner quelques malédictions à l'égard du troisième frère, Carlo ne répondit pas immédiatement. Aurelio/Lorenzo/et peut-être Romeo pour ce qu'il en savait écarta les mains d'une bonne vingtaine de centimètres.
« Elle s'appelle Tortinette et elle est grosse comme ça. C'est une tortue qui parle.
-Même qu'elle a trois têtes.
-Et une corne sur chaque tête.
-C'est une tortue ninja cachée. »
Dans un bel ensemble, les triplés hochèrent la tête dans un mouvement satisfait. Carlo, pour sa part, fronça les sourcils et poussa un 'eeeeeh' peu convaincu, les yeux rivés vers la forme imaginaire que formaient toujours les mains du garçon.
« Vous êtes pas un peu vieux pour avoir un ami imaginaire ? »
Triple protestation aux accents amusés.
« Tortinette est réelle !
-Elle nous aide à combattre le crime. »
Bien que Carlo se demandait de quelle sorte de 'crime' pouvaient parler ses amis, il préféra se taire pour ne pas les lancer dans un débat sans fin, et aussi pour ne pas s'imaginer une tortue tricorne et tricéphale parlante. Trop tard. Désireux d'évincer de son esprit la bête qui s'était, il ne savait pas pourquoi, retrouvée affublée d'une cape et d'une lance, il demanda aux frères qui se passaient le paquet:
« Après vous vous étonnez que personne veuille vous parler à l'école... Et qu'est-ce que vos parents vont vous offrir pour votre anniversaire ? »
Les trois haussèrent les épaules à la même exacte seconde, dans le même geste nonchalant et rapide qui leur était coutumier.
« On sait pas. Ils veulent pas nous dire et on arrive pas à lire dans leurs pensées.
-Mais papa nous a promis que quand on serait grands il nous emmènerait voir ce qu'il fait à son travail !
-Parce qu'il a dit que pour l'instant on est trop jeunes. »
En effet, la veille, ils l'avaient supplié de les emmener avec lui durant son prochain voyage. Pour les calmer, Roberto avait du leur faire cette promesse et jurer une douzaine fois qu'il ne mentait pas. Croix de bois, croix de fer, si je mens je vais en Enfer. La perspective d'un purgatoire brûlant était assez effrayante selon les triplés pour ne pas vouloir s'y rendre volontairement; ils ne remettaient pas sa parole en doute. Carlo connaissait l'admiration que ses amis portaient à leur père. Cette promesse était presque comme un cadeau d'anniversaire à elle toute seule.
« J'espère que vous aurez grandis d'ici là, parce qu'il se doit voyager avec quatre tortues ninjas, il va la regretter, sa promesse. »
Les Hercolani arrêtèrent soudain de piocher dans le paquet et partirent dans un conciliabule de murmures étouffés. Étonné par ce brusque revirement d'attitude, Carlo les regarda faire, hébété. Quand finalement les trois paires d'yeux se reposèrent sur lui, il sut qu'il aurait mieux fait de prendre la fuite. Il fit un pas en arrière, juste au cas où.
« Il nous insulte, là.
-Il insulte les tortues ninjas.
-Et Tortinette aussi. »
La conclusion se noya dans un pseudo cri de guerre aigu.
« On l'attrape ! »
Finalement, il avait bien fait de reculer. Dans un bruit de cavalcade qui s'accrocha aux pavés de longues minutes après qu'ils eurent quittés la rue, les quatre enfants prirent d'assaut les allées de Rome, bousculant les pauvres vendeurs qui avaient eu la malchance de s'installer là dans une partie de chat effrénée.
Doucement, les rires finirent par s'estomper; mais ils ne disparurent jamais tout à fait.
« Rome c'est un peu comme notre maison et notre jardin. On la connaît par cœur, on peut pas s'y perdre. On y vit et on y rit, vous voyez ? Rome c'est notre maison et c'est quelque chose qu'on ne peut pas nous enlever. »
Romeo était en équilibre sur une corde, une corde aussi fine qu'un fil qui tremblait au moindre de ses gestes. Il n'y avait rien à quoi se raccrocher – ni à gauche ni à droite, et la chute semblait inévitable. Il ne se rappelait pas avoir regardé en bas, pourtant il connaissait par cœur ce gouffre noir et sans fond, aussi sûrement que s'il avait soutenu son regard vide et froid. Il avait peur. Il tremblait, la corde tanguait, et s'il se laissait balancer à son rythme il craignait de tomber. Alors il restait immobile. Il ne voulait pas tomber. Il voulait appeler ses frères, appeler ses parents, mais ses lèvres étaient closes et refusaient de s'ouvrir sur sa plainte angoissée. Il voulait pleurer. Et la corde continuait de se balancer sous ses pieds.
C'était toujours sur cette bouffée de terreur que Romeo ouvrait les yeux, souvent au beau milieu de la nuit, souvent dans le noir le plus complet. Là, il se taisait et laissait se respiration reprendre un rythme normal, ses yeux quasi-aveugles suivant les contours des quelques objets qui se détachaient de l'obscurité. Quand enfin il reprenait son calme, il réalisait; et souriait. Il n'était pas debout sur une corde, son lit était stable et chaud. Il ne risquait pas d'en tomber, et s'il le voulait il pouvait appeler ses frères qui dormaient juste à ses côtés. Dans la chambre voisine, il pouvait entendre les ronflements caractéristiques de son père dont sa mère se plaignait tant le matin.
Il était à l'abri, en sécurité, la voix ne lui manquait pas et ne lui manquerait jamais. Rassuré, il remontait les couvertures jusqu'à son menton et fermait les yeux. Ces nuits douces amères avaient le goût des jours qui ne se terminaient jamais, un goût délétère d'éternité dont on ne vient jamais à douter.
Parce que justement, on ne pense pas un seul instant que tout ça puisse s'arrêter un jour. Erreur. Il avait peur d'être seul.
« Pourtant, tu as bien pleuré quand ta mère vous a dit qu'il était mort, n'est-ce pas ? »
Romeo fixe l'homme à travers ses mèches vertes. C'est infime mais son sourire est un brin plus tendu. Infime, oui. Mais un brin plus tendu. Tellement infime que même lui ne le remarque pas.
« Je ne vois pas de quoi vous voulez parler. »
Octobre 2014, Rome
« Je t'ai eu !
-Aaaaah, nooooon... »
Romeo se laissa tomber sur les draps défaits du lit avec un geignement, les bras écartés et la DS dans une main. Aurelio, à ses côtés, brandissait la sienne comme un trophée – et puisqu'il venait de battre son frère à la course, c'en était techniquement un. Romeo supporta dix secondes la danse de la victoire de son jumeau avant de l'envoyer rouler sur le lit avec lui, éjectant couvertures et oreillers dans une vague de rires et de cris étouffés pour ne pas se faire repérer. Il était vingt-trois-heure douze précisément, et cela faisait longtemps que les triplés auraient du plonger entre les bras de Morphée. Seulement voilà, ils avaient onze ans et tendance à se targuer de pouvoir passer la nuit sans dormir et ne pas s'écrouler en cours le lendemain. D'ordinaire, leur mère passait toutes les heures dans le couloir pour vérifier que tout était silencieux, mais elle n'était pas passée depuis un moment. Ils ne s'en étaient pas inquiété, bien au contraire; si maman restait dans le salon à regarder la télévision, ils pouvaient jouer aux jeux-vidéos plus tard.
Sauf que...
Romeo et Aurelio cessèrent de se balancer les oreillers à la figure quand Lorenzo revint dans la chambre avec son verre d'eau. Les petits garçons sentirent que quelque chose n'allait pas avant même de le regarder, et se tournèrent vers lui avec des mines surprises. Lorenzo serrait un peu trop fort son verre. Il avait l'air soucieux, aussi. Où était passé son sourire ? Deux sur trois, ce n'était plus assez.
« Maman pleure en bas. Je sais pas ce qu'elle a. »
Les triplés se consultèrent du regard, incertains. Leur mère n'était ni émotive ni fragile, pas le genre à pleurer, pas le genre à se laisser aller. Ce qu'ils pensaient surtout, et qui les rendait si perplexes, c'était qu'ils ne l'avaient jamais vu pleurer. Ils ne savaient pas ce qui pouvait se passer. Qu'est-ce qui pouvait faire pleurer les mamans ? Ils n'eurent pas le temps (pas l'envie ?) de répondre à cette interrogation muette et commune. Ils se levèrent et, en silence, descendirent les escaliers qui menaient au rez-de-chaussée.
La porte entrouverte de la cuisine laissait filtrer un rai de lumière qui combattait vaillamment les ténèbres environnants. Comme une échappatoire salvatrice, à la différence près que leurs oreilles ne bourdonnaient pas de soulagement mais d'appréhension. Lentement, les sanglots se firent plus distincts et douloureux. Entre deux hoquets, leur mère monologuait et ils devinèrent qu'elle était au téléphone. Je crois bien qu'on a réveillé le monstre. On ne devrait pas rester là à écouter. On devrait faire demi-tour et faire comme si rien de tout ça ne s'était passé et peut-être que...
Ils restèrent près de la porte, serrés les uns contre les autres. Ils restèrent écouter leur mère et les mots qui peinaient à sortir de sa bouche, comme si elle devait faire un effort incommensurable pour les arracher de sa gorge et les moduler.
« Non, je ne leur aie pas dit. Ils dorment, ils ont école demain, et... et je ne veux pas les réveiller pour ça. »
Adele devait souvent s'arrêter pour reprendre un souffle ou un courage qui semblait lui manquer. L'interlocuteur anonyme, à l'autre bout, lui répondait des morceaux de silence que les triplés ne pouvaient pas saisir.
« Je sais, je sais. Mais pas maintenant, d'accord ? Demain, je... non, je dois réfléchir. Je veux dire... comment veux-tu... »
Un temps d'arrêt, un blanc qui s'étira et cessa aussi brusquement qu'il avait commencé.
« Comment est-ce que je peux dire à mes fils de onze ans qu'ils ne reverront jamais leur père ? »
La maison silencieuse retint sa respiration; alors les petits garçons l'entendirent aussi distinctement que les paroles de leur mère.
Le bruit du cœur qui se casse. Du rouage qui se grippe.
« Qu'est-ce qu'elle voulait dire par 'qu'ils ne reverront jamais leur père' ? »
Ils étaient remontés sans un bruit et sans un mot. Assis en cercle sur le lit d'Aurelio, ils se questionnaient du regard, cherchaient à saisir dans leurs prunelles semblables l'ombre d'une erreur, d'un mot mal interprété. Une opinion différente pour pouvoir s'y raccrocher comme un naufragé s'agrippe à sa bouée. Mais les trois regards avaient le même éclat terne et ils savaient. Ils avaient compris tous les trois. Les bouches restèrent pourtant obstinément fermées par peur de la réalité. Le dire à voix haute, c'était l'admettre et l'accepter, c'était tracer un trait sur leur bonheur actuel. Et ça, aucun d'eux ne pouvait le supporter. Ils y tenaient à leur bonheur. Trop pour le laisser s'échapper. Avaient-ils le choix ?
Romeo vacilla. Ses pensées s'affolèrent. Je ne veux pas, je ne veux pas, je ne veux pas. Je ne veux pas pleurer, je ne veux rien regretter, je veux continuer à rire. Je ne veux pas que ça change.
Le cœur au bord des yeux, il le pensa jusqu'à en avoir mal au ventre. Dans la tête de ses frères ricochaient les mêmes angoisses – comme toujours. Un, deux, trois... Et si on ne peut plus compter par cinq, on ne compte plus du tout. La solution était si simple, si tentante.
« Peut-être qu'elle voulait dire qu'il allait être absent très longtemps. »
Aussitôt les deux autres têtes se redressèrent, une lueur d'espoir au fond des yeux. Il ne leur en fallut pas plus pour renchérir avec empressement, comme si chaque seconde perdue pouvait diminuer la crédibilité de cette hypothèse, la réduire à néant et ne plus leur laisser aucune porte de sortie.
« C'est vrai, c'est un peu comme un voyage définitif s'il revient dans très longtemps. Les grandes personnes exagèrent toujours.
-En plus, il nous a promis qu'on viendrait avec lui un jour. Les papas tiennent toujours leurs promesses. »
Donc il ne pouvait pas être mort. C'était impossible, tout bonnement impossible. Ce mensonge destiné à se voiler la face et gommer la souffrance était conscient. Mais ils étaient trois. Avec le temps, ils s'en persuaderaient et le fictif s'effacerait de leur mémoire.
« Papa n'est pas un menteur. »
Vas-y, dis le.
« Il reviendra. »
« Pardon ? »
Adele regarda tour à tour ses fils, sidérée. Elle prit le plus proche par les épaules et le secoua très légèrement, l'urgence presque palpable dans sa voix tremblante.
« Qu'est-ce vous racontez ?
-On sait que papa est parti pour longtemps, mais c'est pas la peine de dire qu'il est carrément mort.
-Oui, tu sais, il finira bien par revenir. »
Adele laissa ses mains retomber sur les bras du petit garçon. Son visage marqué par les larmes n'était qu'incompréhension et inquiétude.
« Votre père est mort, il n'est parti... »
La petite main qui se posa en retour sur son épaule, rassurante, lui meurtrit la chair. Les enfants se mirent à rire, joyeux et innocents, comme si rien ne s'était passé, comme s'ils ne l'avaient pas écoutée.
« On a l'habitude d'attendre longtemps. Tu verras, il rentrera et on pourra regarder la TV ensemble ! »
Les yeux d'Adele s'embuèrent, reflets d'un cri de détresse impuissant.
Devant la pierre tombale, durant l'enterrement, ils ne versèrent pas une seule larme. Parce que tout simplement... Qu'y avait-il à pleurer ? Qui avaient-ils à pleurer ?
A ce moment-là, ils ne se souvenaient même plus que quelque chose n'allait pas. Ils ne voulaient plus s'en souvenir.
« Votre mère s'inquiète pour vous.
-Maman s'inquiète toujours. Où sont mes frères ?
-Je pense que tu sais très bien de quoi je parle.
-Où sont mes frères ? »
L'homme aux mèches grises soupire, tout en ôtant ses lunettes pour les essuyer.
« Ils sont dans la pièce d'à côté. Mais c'est avec toi que je parle, pour l'instant.
-Je ne répondrai pas à vos questions si mes frères ne sont pas là. »
Malgré son grand sourire, son ton ne laisse pas place à la discussion. Il n'est pas l'adulte ici, ce n'est pas lui qui décide. Encore et toujours, on refuse à ses frères la porte d'entrée.
Août 2016, Rome
C'était un de leur jeu favori depuis qu'ils étaient tout petits, depuis qu'ils s'étaient aperçus que ça marchait. A la sortie du McDo, ils s'étaient séparés sans un mot et avaient pris une direction différente, destination un lieu de rendez-vous inconnu. Sans la moindre indication, sans le moindre indice, Romeo savait pourtant où se rendre précisément. Il savait aussi que, quelque part loin de lui, les pas de ses frères les menaient doucement mais sûrement au même endroit. Dans sa tête, la petite fontaine gargouillait joyeusement. Ce n'était plus qu'une question de temps avant qu'ils se retrouvent.
Le jeune garçon chantonnait un air de son invention, ses chaussures ne provoquant qu'un léger frottement contre les pavés usés par des siècles et des siècles d'utilisation. Rome n'était pas comme leur jardin, lui avait un jour dit Carlo; et c'était vrai. C'était bien plus grand, biens moins vert, moins familier. Pourtant, ils ne s'y étaient jamais perdus; avaient toujours réussi à se retrouver.
On teste notre lien mental de la fraternité...
Comme répondant à un signal inaudible, le corps de Romeo pivota vers la droite, s'engagea dans une ruelle déserte. Au dessus de lui, le soleil à l'agonie suivait le déclin de la lumière qui inondait le ciel. Cette vision le fit sourire. Depuis toujours, la course du soleil était la même, elle obéissait à un rythme régulier qui ne changeait jamais. C'était rassurant. Un oiseau passa en trombe devant lui et le fit sursauter; un feu d'artifice de rires résonna dans son esprit. Il se remit à sourire, augmenta la cadence. Juste derrière le mur.
Il déboucha finalement sur une petite place, et le bruit de l'eau se mua de brefs échos en un bruit réel et tangible. Assis sur les murets de pierres humides, ses frères lui adressèrent un sourire victorieux.
« T'as perdu, Romeo.
-Tu vas avoir droit à un gage. »
Le garçon haussa les épaules, vint s'asseoir entre Lorenzo et Aurelio. Il passa sa main dans l'onde claire. Elle était froide.
« Allez-y, balancez le défi.
-Tu dois... »
Les deux jumeaux se consultèrent du regard, la malice y brillant comme les étoiles dans le ciel les nuits les plus claires.
« Manger cinq maxi menus la prochaine qu'on ira au McDO. »
Romeo plissa les yeux, perplexe.
« Vous voulez que je devienne obèse, c'est ça ?
-Bha, fit remarquer Lorenzo sur un ton qui respirait la plaisanterie, tu l'es déjà presque, autant y aller carrément. »
La giclée d'eau qu'il se prit dans la figure le fit crier d'indignation. Bien vite, la discussion dégénéra en une bataille d'eau de laquelle ils ressortirent tous trois trempés jusqu'aux os.
Et alors qu'ils s'éclaboussaient en hurlant, sans se soucier du savon que leur mère allait leur passer quand ils rentreraient, qui aurait pu se douter que quelque chose clochait ? Tant qu'ils étaient tous les trois, tout allait bien. Tant qu'ils se retrouvaient, où qu'ils soient, tout allait bien. Tant que papa revenait la semaine prochaine, tout allait bien.
Tout allait bien. Je vous assure.
« Franchement, monsieur, j'ai l'air d'être en deuil ?
-Non, et c'est bien ça qui nous inquiète. »
Mai 2017, Rome
La boîte dégringola de l'étagère, éjectant son contenu sur le sol fraichement lavé. Adele profita de l'absence de ses fils pour pousser un terrible juron, et se baissa pour ramasser les photos éparpillées, délaissant momentanément son chiffon. Tout en écoutant son programme à la TV allumée juste à côté, elle laissa ses prunelles noisettes glisser sur les visages qui passaient entre ses doigts fins. Un sourire triste se peignit sur ses lèvres quand celui d'un homme d'une trentaine d'années, une toute jeune femme dans ses bras, surgit du paquet de souvenirs. Comme si la scène datait d'hier, elle sentait encore le parfum des fleurs et la sensation de l'herbe sous ses bras nus. C'était il y avait plus de dix-huit ans, pourtant. Au tout début de leur relation, quand elle et Roberto pensaient encore que ça ne durerait pas, que c'était juste une petite idylle sans conséquences. La photo qui suivait montrait trois petits garçons debout sur des balançoires. Elle rit. Regarde où elle nous a portés, cette partie de Poker. Mon orgueil, ton orgueil. Nous.
L'étudiante, l'air supérieur, adressa un sourire à son interlocuteur. Celui-ci regardait, incrédules, les cartes étalées sur la table.
« Je vous avais dit que j'étais très bonne à ce jeu. »
Des rires accueillirent cette déclaration, et les amis de Roberto filèrent au perdant de grandes claques dans le dos. Jamais Adele n'avait été aussi fière d'elle.
« Elle t'a complètement écrasé, vieux. Je crois que tu lui dois des excuses.
-Et un verre, aussi. Hey, un verre pour la demoiselle ! »
Roberto haussa les épaules, regarda ses amis s'éloigner vers le comptoir. Finalement, il se retourna vers la jeune fille. Elle souriait toujours, et le nœud qu'elle avait dans les cheveux ne lui paraissait plus si stupide, à présent.
« Je suis désolé de vous avoir jugé sur votre apparence et votre âge. Je vous présente mes excuses.
-Excuses acceptées. J'espère que vous ne recommencerez plus.
-Aucune chance, avoua-t-il avec un soupir, plus on avance, plus les jeunes sont effrayants. »
Elle rit; et sursauta quand il lui tendit la main par dessus la table.
« Roberto Hercolani. J'espère que nous pourrons repartir sur de meilleures bases. »
Elle lui prit la main, et sa poigne était forte et franche. Il était sincère.
« Adele Casarotti. Ravie de vous rencontrer, Monsieur Hercolani. »
Et quand il lui renvoya son sourire, c'était comme si elle avait gagné plus qu'une partie. Tellement plus.
Adele rangea la photo, une boule à la gorge. Il lui manquait tellement.
« Maman, on est rentré !
-Bonjour, Madame Hercolani ! »
La jeune femme se dépêcha de remettre les dernières photos en ordre et remit la boîte sur l'étagère. Son chiffon en mains, elle entreprit de dépoussiérer les derniers recoins.
« Attendez cinq petites minutes, je termine le ménage. Alors dites moi, ça c'est bien passé ?
-Très bien, s'exclamèrent en chœur les trois frères, on a eu juste ce qu'on voulait !
-En fait, hum... Je crois que vous devriez voir, Madame. Je suis pas sûr que... »
Le ton de Carlo incita Adele à donner un répit à la poussière; qu'elle profite bien de ces quelques minutes, parce qu'après elle ne lui ferait pas de quartier. Elle ferma le placard, et se tourna vers les quatre enfants.
« Qu'est-ce que je devrais v-... OH MON DIEU ! »
Carlo soupira, le pouce sur l'arrête de son nez. Les jumeaux, eux, continuaient de jubiler, indifférents au fait que leur mère avait arrêté de faire le ménage pour les fixer comme des bêtes de foire.
« C'est super cool, non ? Grâce à ça on ressemble encore plus à des tortues ninjas !
-Ou à un sapin de Noël qui parle.
-Ou...
-A des guignols avec des cheveux verts ? »
Adele n'entendit ni la remarque de Carlo, ni la protestation véhément de ses fils. Elle était restée bloquée sur le sapin de Noël parlant et ses yeux ne voulaient plus quitter la couleur verte qui avait masqué le châtain clair naturel de ses enfants. Et si elle ne se mit pas en colère, ce fut uniquement car elle était trop stupéfaite pour ça.
« Mais vous, vous... Vous m'aviez dit que vous ne vouliez que quelque mèches, balbutia-t-elle, espérant de toute ses forces s'être endormie devant la TV et avoir été plongée dans un cauchemar dont elle allait très bientôt se réveiller.
Romeo passa une main dans ses cheveux couleur gazon.
« Oui, mais les tortues ninjas sont entièrement vertes, alors on a changé d'avis. »
Adele posa le chiffon sur une commode, un peu trop brusquement. Quatre paires d'yeux se tournèrent vers elle.
« Je vous avais autorisé quelques mèches, pas une teinture complète.
-Te fâche pas maman, c'est pas si grave !
-Si, c'est grave ! Vous avez les cheveux... verts.
-Nous on trouve ça cool.
-En plus on pourra la montrer à papa, je suis sûr qu'il trouvera ça cool aussi. Il aime les tortues ninjas. »
On pourra la montrer à papa. Le masque de colère d'Adele se fendilla, et elle s'appuya sur la commode avec une grimace. Lorsqu'elle releva la tête, elle vit Carlo regarder les adolescents qui babillaient avec la même inquiétude. Elle se mordit la langue jusqu'au sang. Elle devait faire quelque chose. Elle ne savait pas quoi, et ça la torturait.
Pitié, au secours.
Le deuil comprend cinq étapes généralement retenues. La première est le choc, le déni; la seconde la colère; la troisième le marchandage; la quatrième la dépression; et enfin la cinquième l'acceptation. Il arrive que l'endeuillé fasse des allers et retours entre les différentes phases, ou passe d'une à une autre sans passer par celles intermédiaires. Il arrive aussi qu'il reste bloqué sur un état et n'arrive pas à s'en détacher. Il arrive que la perte soit inacceptable au point qu'il ne puisse plus continuer à vivre; la dépression peut durer toute une vie. La culpabilité peut s'installer, comme marquée au fer rouge dans son esprit. Il peut accepter mais ne jamais oublier. Le deuil et la mort sont des affaires personnelles. Ils ne suivent pas un ordre linéaire précis. C'est l'affaire de chacun. On réagit tous de manière différente face à la perte d'un proche. Le déni est toujours une étape assez courte, puisque la réalité reprend très vite le dessus. Malgré tout, il arrive qu'il ne passe pas. Et s'il dure plus de quelques semaines, plus de quelques mois...
Plusieurs années, alors il faut songer à faire quelque chose. Parce que quelque chose ne va pas. Pas du tout.
« Notre père est en voyage, on attend juste qu'il revienne.
-Romeo, tu sais qu'il n'est pas en voyage.
-Il est en voyage.
-Tu t'en es convaincu, mais tu sais que c'est faux. Ta mère vous l'a dit. Vous avez été à son enterrement. »
Le garçon lance au psychologue un regard qui crie tout ce qu'il pense de lui. A savoir: qu'il est stupide, ou bien fou. Un des deux. En tout cas, d'eux deux, songe-t-il, ce n'est pas moi qui ai besoin d'être suivi, c'est lui.
« On aurait été à son enterrement s'il avait été mort. Mais il est juste en voyage. Il reviendra bientôt, peut-être la semaine prochaine. »
L'adolescent fait tourner un crayon à papier entre ses mains, et il ne regarde pas le psychologue. Il chantonne. Le spécialiste reste de marbre. Ça fait deux mois qu'il dit – qu'ils disent – que leur père rentre 'la semaine prochaine'. Même avec toutes les preuves devant les yeux, ils refusent encore d'admettre que leur père est mort et enterré depuis cinq ans. Quelque part, le rouage est grippé, et pour qu'ils l'acceptent il faut le réparer, le débloquer. Une entreprise ardue, mais pas impossible, surtout nécessaire pour que les choses n'empirent pas. Ils ont juste besoin de temps; il connaît son travail.
« Dis moi, comment tu te sens, Romeo ? »
Le garçon relève la tête, lui sourit de toutes ses dents.
« Très bien. »
Ce n'est pas un mensonge, il est heureux. Le petit garçon qui avait peur d'être seul s'est muré dans son propre monde, un monde où tout va toujours très bien, où Madame la Marquise rentre chez elle et retrouve son mari et sa jument. Où jamais rien de grave n'arrive, où les problèmes s'évanouissent comme par magie.
Où la corde ne tangue plus et où il peut se reposer en tout sérénité. Un monde sans cauchemars.
Alors même quand il se réveille la nuit et qu'il n'entend pas les ronflements de son père, il se dit qu'il est toujours en voyage. Même si ça fait cinq ans qu'il se dit ça chaque nuit, tant qu'il sait que ses frères dorment à ses côtés, il n'en doute jamais. Même si tout le monde lui dit le contraire, il n'en démord pas.
Il a peur d'être seul, il a peur d'être triste. Le déni n'est jamais la bonne solution, mais c'est la seule qu'ils aient.
Janvier 2020, Rome
Les trois garçons sortirent du bâtiment en s'étirant. Le vent froid de janvier fit voler leurs écharpes et, les yeux plissés, ils contemplèrent un instant les voitures qui se précipitaient sur l'asphalte avec un bruit de tonnerre. Le ciel était gris, il allait peut-être neiger; et comme ils avaient terminé en avance, leur mère n'était pas encore là.
« Ça me plaît moyen d'attendre une demi-heure dans le froid qu'elle arrive, fit Romeo en se tournant vers sa gauche. On a qu'à aller au McDo en l'attendant. Au moins, on aura chaud.
-Je te suis. En plus, ce rendez-vous était épuisant.
-Il est trop stupide, ce psy. Il devrait se soigner lui-même avant de penser à soigner les autres. » Tous approuvèrent avec un ricanement commun, et longèrent le trottoir jusqu'au restaurant. Romeo vit Aurelio sortir son portable et taper quelque chose, sûrement un SMS à leur mère pour la prévenir, ou peut-être à Carlo s'il voulait les rejoindre après. Il reporta son attention sur un chat noir et blanc qui avait sauté d'une fenêtre pour aller se réfugier sous une voiture, et qui lorgnait un pigeon étonnamment gras. Romeo mima un coup de pied qui le fit s'envoler à tire d'ailes.
Désolé le chat, moi j'aime bien les pigeons.
Le vent, mordant, leur fit augmenter la cadence. Arrivés devant la porte, ils laissèrent Lorenzo la pousser et s'engouffrèrent dans le McDo à sa suite. Un à un. Ils ne la fermèrent qu'une fois qu'ils furent tous rentrés.
Clac.
« Euh... »
L'odeur des frites avait disparue pour laisser place à celle du bois et du renfermé. En silence, les triplés observèrent le hall dans lequel ils venaient de mettre le pied. Madame la Marquise...
« Waw, je savais pas qu'ils avaient changé de décoration à McDo ! »
Tout va très bien, tout va très bien.
Caractère
« Les lunettes, c'est pour la mafia. Ouais, la mafia italienne ! »
Romeo rit souvent. Il sourit aussi tout le temps, tellement que ça en devient vite agaçant. Vous vous demandez ce qu'il peut bien avoir, à vous regarder de la sorte, le sourire pendu aux lèvres; Vous pensez qu'il se moque peut-être de vous. Mais rassurez vous, il n'en est rien. Romeo est juste dans un état euphorique permanent qu'il ne quitte pour ainsi dire jamais. Dans son monde à lui, tout est beau, tout est rose, et rien ne vient jamais gâcher cette belle peinture. Le gens sont gentils et puis, même s'ils sont méchants, ce n'est pas grave. Rien n'est jamais grave dans l'esprit de ce jeune homme sans cesse agité.
Il n'y a rien de plus perturbant que parler avec Romeo. Essayez de suivre sa conversation sans vous perdre ou froncer les sourcils, vous aurez droit à une médaille d'or. Propos décousus, parfois incohérents, qui partent dans toutes les directions, girouette exposée aux quatre vents en plein orage, le garçon change d'idée de seconde en seconde. Inévitablement, le sujet abordé lui fera penser à autre chose, qui lui fera penser à autre chose encore, et le lien n'est évident que dans la petite tête de l'Italien. Ceci, ajouté au fait qu'il ne se soucie absolument pas de perdre ses interlocuteurs (à moins qu'il n'assume qu'ils le suivent toujours ?), on a tôt fait d'abandonner la discussion pour passer à autre chose. Et puis, ce que Romeo parle vite ! Un véritable TGV. Comme s'il avait peur de ne pas avoir le temps de tout dire, il aligne les mots à une vitesse impressionnante, quasi spectaculaire. Et ne songe pas qu'on puisse ne pas avoir compris ce qu'il raconte. Romeo ne répète jamais. Si vous lui demandez, il fera semblant de ne pas vous avoir entendu. Ou ne vous entendra vraiment pas. L'un dans l'autre, le résultat est le même. Avec ses frères, la scène est trois fois plus fatigante. Les triplés se comprennent et rebondissent sur des expressions inconnues du reste du monde. Coincé entre eux trois, vous vous demanderez dans quoi est-ce que vous vous êtes embarqué exactement. Quelle galère.
Avec ça l'impression dérangeante que même s'il est devant vous et vous répond, il ne vous écoute pas vraiment. Qu'il est ailleurs. Loin, dans un autre monde.
Romeo rit, oui; Il rit à n'importe quoi, même si ce n'est à première vue pas risible. Dites lui ce que vous avez mangé au petit déjeuner, il rira. Comme un réflexe, il le laisse s'échapper de sa bouche courbée en un éternel sourire. Jamais il ne pleure ou fait la tête. Jamais. Comme si dans cet univers coloré dans lequel il évolue, c'était formellement interdit. Romeo est un jeune homme extraverti à l'extrême, semble-t-il. Il va vers les autres, leur saute dessus quand l'envie lui en prend, pour les assommer de récits improbables. Il ne déteste personne, n'évite personne, traite tout le monde pareillement (en apparence). Si vous avez besoin d'aide, il ne refusera pas de vous prêter main forte. Seulement, il peut être terriblement maladroit, volontairement ou non. Ses plaisanteries ne sont pas toujours drôles. Ajoutez à cela un petit côté kleptomane qui se fait ressentir de temps à autre; Et vous n'aurez bientôt plus envie de son aide. Derrière ses yeux et ses sourires malicieux, beaucoup de 'pourquoi' qui ne trouvent pas de réponses, beaucoup de gestes que personne ne comprend. Même pas lui. T'es bizarre, tu sais. Pourquoi t'as fait ça ? Je sais pas, j'avais envie. Je crois. Eheh.
Avec Romeo, il n'y a pas de conjugaison au passé, pour la simple et bonne raison que rien ne se termine jamais. Il n'y a pas de drames non plus; Vous n'arriverez pas à tirer de sa bouche la moindre mélancolie. La vie est un chemin amusant, sans pierres, sans tronc d'arbre en son travers. Il y tient, lui et ses frères y tiennent plus que tout, à ce petit confort, à cette sensation de sécurité et de joie qui colle à la peau. Son esprit efface chaque larme versée pour ne pas qu'il ait à en souffrir.
Déni de sa situation. Jamais il ne mentionne le fait d'être bloqué au pensionnat, de ne pas pouvoir sortir. Information définitivement supprimée. Déni de la mort aussi. Vous allez souvent l'entendre parler de son père qu'il adore et qui est archéologue. Son père qui est formidable, qu'il aime, qui leur raconte souvent ce qu'il fait sur le terrain. Vous ne saurez jamais, par contre, que ce père est mort il y a cinq ans durant des fouilles d'une crise cardiaque. Parce que pour les triplés, on ne parle jamais au passé et qu'il n'y a jamais de drames. Leur père, mort ?
Quelle drôle d'idée.
Physique
« C'est quoi, le plus classe ? Une tortue ninja ou un sapin de Noël qui paaarle ? »
« Il n'est pas bien grand, ce jeune homme qui vient de vous passer à côté; Pas très musclé non plus. Un visage qui accuse, les jours de grand soleil, une trop longue cavalcade dans les rues de Rome, des cheveux témoins d'une originalité ou d'une excentricité qui ne manquent pas de faire froncer le nez, et un sourire perpétuellement amusé. Vous auriez bien été en mal de dire duquel des trois triplés il s'agissait. Il est parti si vite, sans demander son reste, ses bottes foulant le pavé comme le sabots d'un cheval lancé au galop ! Ils se ressemblent trop, ces sales gosses, il faudrait leur coller une étiquette sur le front pour pouvoir les reconnaître.
Mais voilà que le vent, joueur, vous fait une faveur: Il se lève et sur un coin de l'écharpe verte du jeune homme, on peut lire, soigneusement brodé, le prénom 'Romeo'. Oh, ça ne change pas grand chose que ce soit lui plutôt qu'un de ses frères. A peine. Mais celui qui porte le nom du héros tragique de Shakespeare pourrait vous citer si vous lui demandiez mille et uns détails qui le différencient de ses frères, les plus récurrents étant que: Ses frères, eux, sont plus petits et plus moches que lui. Évidemment. Très précis aussi, n'allez vous pas manquer d'ajouter.
Du haut de son mètre soixante et onze, Romeo n'a jamais été et ne sera assurément jamais un très grand garçon. Ça lui va, il ne s'en plaint pas, son attitude pourrait même laisser penser qu'il aime se jucher sur un tabouret pour attraper des livres; Il le fait sans en avoir besoin. Des manches de ses manteaux en hiver sortent des bras fins -un peu trop fins même, accentuant l'impression d'avoir face à vous un garçon plus jeune qu'il ne l'est en réalité. Et s'il vous regarde, vous ne le verrez jamais faire la tête; vous apercevrez un sourire espiègle, fripon, qui semble vous mettre en garde contre la prochaine bêtise que ce voyou prépare. La boulangère n'aime pas ce sourire, c'est le sourire qui indique qu'il a encore réussi à lui voler des bonbons. Planté là au milieu de ce visage dont la peau passe du foncé au clair selon les saisons, deux yeux verts. Pas verts émeraudes, ni verts quoi que ce soit; Juste verts, brillants de malice comme son sourire. Devant ces orbes tombent souvent des mèches vertes elles aussi, fruit d'un des accès de désobéissance chroniques des triplés Hercolani. Ce qui ne devait être à la base que quelques mèches sur ses cheveux s'est transformé en une teinture complète, occultant le blond foncé d'origine. Et si vous regardez cette couleur avec trop d'insistance, Romeo vous dira qu'il a toujours rêvé d'être une tortue ninja. Ou un sapin.
Et ajoutera que l'un dans l'autre, ce n'est pas si différent, avant de disparaître au coin de la rue. Ses jambes ont beau être fines, elles le portent avec une aisance et une endurance étonnantes ! Ce qui n'empêchera pas l'intéressé de bouder toute autre forme de sport.
Du vert, du noir, du blanc; Parfois une touche de couleur, placée là sans chercher à ce qu'elle s'accorde avec quoi que ce soit. Romeo se vêt exclusivement comme il le souhaite, ignorant la mode ou les courants. Si c'est joli, il l'enfile, point. Ses goûts différant radicalement en général de ceux des autres, il a une allure étrange la plupart du temps, petit pantin sur lequel on s'attarde avec curiosité. Mais vous savez quoi ? Il vous dira, nouant les lacets de ses bottes, qu'il a une classe que jalousent les plus grandes stars.
Comme si, hein ? Mais ça le fait rire. »
Informations Hors-RP Avez-vous bien lu les règles ? code okay (by Kogenta). Où avez vous trouvé ce forum ? ... Est ce votre premier perso... ♦ ...Dans un forum RP ? Naon ?♥ ♦ ...Dans ce forum ? AHAHAHAHAHA.
|
Dernière édition par Romeo Hercolani le Sam 9 Mar 2013 - 17:23, édité 35 fois |
|