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 Simple affaire de curiosité. [Libre]

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Simple affaire de curiosité. [Libre] _
MessageSujet: Simple affaire de curiosité. [Libre]   Simple affaire de curiosité. [Libre] Icon_minitimeDim 4 Sep 2011 - 2:23

Liz ne savait pas ce qui l'avait poussée à entrer dans cette propriété. La faim? Non il lui restait quelques barres chocolatées dans sa vieille sacoche raccommodée. Alors le froid? Non plus, la jeune fille avait prévu en conséquence, ce n'était pas sa première fugue et elle n'oserait jamais franchir les limites d'un propriété privée dans le seul but de se réchauffer.

Donc ce serait... la curiosité? Oui, c'était sûrement ça. Une envie irrésistible de comprendre la présence de ce manoir au centre d'Hyde Park à Londres. Un oubli momentané de tous ses principes qui l'avait conduite dans le piège qu'elle avait elle-même refermé sur sa propre personne.

Dès que le claquement sourd de la porte résonna dans le gigantesque hall, Liz réalisa son erreur. Elle avait pénétré une propriété privée qu'elle ne connaissait pas, en pleine nuit alors qu'elle était en fugue. Comment expliquerait-elle cela si elle venait à croiser quelqu'un? Elle n'avait aucune excuse valable pour justifier sa présence. Elle n'avait rien à faire ici, sa seule option était de ressortir et s'éloigner le plus possible de cette immense bâtisse.

Elle tendit sa main vers la porte pour attraper la poignée quand un horrible pressentiment l'envahit. Il se retrouva justifié une seconde plus tard alors qu'elle tentait tant bien que mal d'ouvrir la magnifique porte ouvragée qui refusait de se mouvoir d'un centimètre. Liz sentit les larmes monter à ses yeux tandis qu'elle usait désespérément de toute la force qu'elle possédait dans l'espoir de .

Ses muscles la lâchèrent rapidement, et n'ayant plus la force de faire quoi que ce soit, elle laissa glisser son dos contre le bois minutieusement taillé et vernis de la porte jusqu'à se retrouver assise sur le sol. Les larmes coulaient à flots, trempant les manches de sa vieille veste bleue avec lesquelles elle essuyait ses yeux rougis. Liz cédait rarement à la panique, mais lorsqu'elle le faisait, il devenait presque impossible de la calmer, la seule solution était d'attendre patiemment que le torrent de larmes ne s'estompe.

Après un temps qui lui sembla interminable, Liz consentit à se reprendre. Son premier réflexe lorsqu'elle leva ses yeux irrités fut d'observer consciencieusement la pièce inconnue. Si elle devait rester coincée ici, autant connaître son environnement.

Hostile? Non. Le hall d'entrée démesuré dans lequel elle se trouvait n'avait rien d'angoissant, bien au contraire, l'aspect était plutôt apaisant.

De faibles lueurs provenant de chandeliers illuminaient la pièce, permettant de distinguer les différents éléments composant la pièce. L'immense escalier de marbre auquel menait un tapis rouge, semblable à ceux que Liz avait vu à la télé lors des avant-premières de cinéma, s'accordant aux tapisseries colorées donnant un aspect accueillant à la pièce. Tout semblait avoir été réglé au détail, richement ornementé de boucles sculptées dans le bois, des rampes d'escaliers aux des cadres accrochés au murs - ceux-ci intéressant particulièrement Liz qui avait rarement l'occasion de voir les œuvres d'autres personnes ailleurs que sur internet.

Une seule chose faisait tâche dans le climat majestueux : un simple panneau de bois recouvert de petits papiers punaisés négligemment accroché au mur à la droite de Liz.

Intriguée, elle daigna finalement se lever, ses larmes ayant à présent séché, et se dirigea vers le-dit panneau afin d'y lire les messages inscrits. Elle dût cligner plusieurs fois des yeux afin de percevoir le texte éclairé par la faible lueur des flammes, puis commença sa lecture. Elle s'arrêta à plusieurs reprises, haussant un sourcil devant les affirmations qui lui semblaient grotesques. Prisonnière? Oui, elle s'en était rendu compte. Par la magie? Un pouvoir qui nous est propre? Intéressant. Un alter Ego Astral? Que cela pouvait-il bien être?

Lorsqu'elle eut fini sa lecture du premier message, elle entama les autres. Un fantôme dans la forêt? Elle s'intima de d'éviter ce lieu, particulièrement en hiver.

Elle ne laissait plus aucune émotion transparaître, ayant repris son masque d'indifférence dans le cas où un « autre pensionnaire » débarquerait. Elle savait à présent qu'elle n'était pas seule et que personne ne lui reprocherait d'être entrée sur sa propriété, et même si elle ne se l'avouerait jamais, cela la rassurait énormément. L'idée d'être prise en flagrant délit d'intrusion la révoltait plus que celle d'être l'une des éternels captifs des murs de cette immense bâtisse.

Un peu ébranlée par les différentes informations qu'elle devait assimiler, elle laissa ses jambes la conduire jusqu'aux marches de l'imposant escalier sur lesquelles elle s'assit distraitement. Elle espérait que tout ceci n'était qu'un cauchemar, qu'elle se réveillerait dans son sous-sol humide, la tête reposant sur son bureau poussiéreux, entourée de tout ce qu'elle avait toujours connu.

Une pensée pour son père lui traversa l'esprit. Il allait s'inquiéter. Appeler la police. Culpabiliser. Mais Liz ne s'en moquait, il l'avait cherché. Il l'avait frappée. Et elle s'était enfuie. Elle ne lui pardonnerait jamais de s'être comporté ainsi, cet abruti d'alcoolique impulsif. Du moins elle le pensait, à cet instant.

Liz se demanda alors ce qu'elle allait faire. Rester ici jusqu'à ce qu'on la trouve ne semblait pas une bonne solution, mais ses longues heures de marche l'avaient épuisée. Elle opta donc pour une courte pause au bas des marches de marbre du plus grand hall d'entrée qu'elle n'ait jamais vu peut-être suivie d'une éventuelle visite des lieux.

Adossée à la marche supérieure, elle soupira bruyamment, s'abandonnant à son destin de prisonnière éternelle du Pensionnat Interdit.
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Hans Hackermann
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MessageSujet: Re: Simple affaire de curiosité. [Libre]   Simple affaire de curiosité. [Libre] Icon_minitimeDim 4 Sep 2011 - 10:24

[Je me permets de répondre puisque c'est libre et que t'écris bien et que j'aime bien Liz.~]
S’il y avait bien une chose qu’Hans détestait, ce devait être de devoir courir après ses affaires. Or, cela ferait bientôt vingt minutes qu’il scrutait le sol à la recherche de son lecteur MP3 ; mais dans cette baraque aux allures de maisons hantées, c’était autant chercher une aiguille dans une botte de foin…, en clair, il sentait que c’était peine perdue. Résolu pourtant à ne pas passer le « temps indéfini mais sûrement pas éternel qu’il passerait ici », selon ses propres termes, sans sa précieuse musique, il arpentait les couloirs, fouillait les pièces susceptibles de renfermer l’objet. Hélas, sans grand succès. C’était donc empreint d’une passable mauvaise humeur qu’il s’était dirigé vers le hall d’entrée. Près de cette conasse de putain de porte de merde qui, évidemment, refusait de s’ouvrir ! S’il avait auparavant tenté de la défoncer, force avait été pour lui de constater que la première chose à se fracasser ne serait pas le battant, mais plus probablement son épaule. Ou son pied, c’était selon. Peut-être l’avait-il fait tomber ici ? Y avait plutôt intérêt, songea-t-il avec amertume. Parce que sans ça, ça voulait dire qu’il ne l’avait pas perdu, mais qu’on le lui avait pris ; là, ça ne laissait pas une montagne de choix non plus ! Ce crétin avec ses chemises hawaïennes pourries lui apparaissait comme le coupable idéal, sinon le seul qui lui vint à l’esprit tout court.

Hackermann repoussa machinalement une mèche de cheveux lui obstruant la vue puis poussa un soupir excédé : il était maudit, c’était pas possible… Avec son expression peu amène, sa veste noire ouverte sur un T-shirt anthracite et son jean noir, il ne devait pas donner envie d’engager la conversation mais, très honnêtement, c’était bien là le dernier de ses soucis. Qu’est-ce qu’il en avait à foutre, de ces types ? Il les connaissait pas, et c’était aussi bien comme ça ; ça lui convenait parfaitement. Ils n’avaient qu’à penser ce qui leur chantait, c’étaient pas ses affaires de toute façon. Hans n’avait jamais pris la peine de faire semblant de s’intéresser aux inconnus et ne comptait pas commencer maintenant, sous le fallacieux prétexte qu’il serait prétendument sensé rester enfermé avec eux dans ce soi-disant pensionnat. En cage, comme un animal ? C’est ça, se dit-il, cours toujours, connard… Y avait beau avoir un tas de bons côtés à la situation –il n’avait plus à contempler cette lassante pièce de théâtre qu’avaient été les disputes de ses parents, ni à rentrer et filer en courant presque dans sa chambre, histoire qu’une mère bourrée ne vienne pas le bassiner avec des histoires sans queue ni tête, plus le souci de payer ses doses de plus en plus chères ou même de faire acte de présence au lycée au moins une fois toutes les deux semaines– il refusait de rester parqué comme un bon petit chien. Se résigner à son sort équivalait à accepter de crever ici, et ça, c’était juste pas possible. Même pas en rêve. Enfin, se reprit le berlinois, cauchemar en l’occurrence, mais c’était du pareil au même.

Il avisa enfin le tableau, la descente des escaliers : il avait beau régulièrement passer par là, ce luxe, cet étalage de richesse le mettait toujours aussi mal à l’aise. Comme elle était loin, la petite maison où le chauffage n’était qu’une utopie, les murs moisis d’humidité et la peinture écaillée ! Passer aussi brusquement de l’un à l’autre lui avait fichu un sacré choc, commenta Hans. Quoiqu’il rejetât d’emblée cette perspective, il savait au fond de lui qu’il ne s’en remettrait sans doute jamais. Pas même une fois dehors. S’il se permettait de lever les yeux, c’était qu’il était quasiment certain de ne pas trouver son MP3 ici : ses soupçons reposaient presque tout entiers sur cet imbécile de T.J. Il comptait pourtant vérifier, plus pour la forme qu’autre chose.

A regarder partout sauf devant soi, on finit par se planter ; et c’est précisément ce qui manqua d’arriver au blond. Il avait amorcé la descente des escaliers lorsqu’il avisa, un peu tard sans doute, une fille assise sur les marches. Il s’arrêta aussitôt, à peine deux marches au-dessus. Songea qu’il avait frôlé la catastrophe ; savait-on jamais, vu les types qui trainaient dans les couloirs, les flingues de certains, les couteaux d’autres, il lui semblait un peu trop souvent que bousculer quelqu’un serait une raison suffisante pour lui aérer le cerveau… Alors trébucher dessus ? Merde, c’était pas normal de penser ça ! Pas normal du tout. Il leva les yeux au ciel et serra les dents, pestant contre la musique qui le suivait jusque dans ses moindres mouvements : elle avait l’air de se foutre de lui, et de lui seul puisque pour autant qu’il en savait, elle n’était jouée que pour ses oreilles. Maudit, ouais… Il devait être maudit.

« Putain, c’est dangereux de se planter là ! T’as qu’à aller dans le salon, lâcha-t-il avec son habituelle politesse et son étonnante, brillante affabilité, si t’es crevée. Y a pas idée, quoi… »

De dos, il ne distinguait que des cheveux châtains, pas vraiment longs –comparé aux chevelures interminables et plus colorées qu’un stand de bonbon que certaines arboraient, en tout cas. La silhouette lui paraissait toutefois chétive, et s’il avait été de meilleure humeur sans doute ses lèvres se seraient-elles étirées en un sourire ironique : c’était la deuxième fois qu’il rencontrait une petite anorexique, ici. Quelle chance il avait, dites donc… En y repensant, il fut pris d’un doute : après tout, ils étaient dans l’entrée, c’était crédible. Aïe, dans ce cas, il avait peut-être, il insistait bien sur le peut-être, parlé un peu trop vite. Elle venait pas de rentrer, quand même ? Il s’appuya nonchalamment à la rambarde, toujours derrière elle, avant de poser la question qui le taraudait :

« Dis, t’es là depuis un moment ou tu viens d’entrer ? »
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MessageSujet: Re: Simple affaire de curiosité. [Libre]   Simple affaire de curiosité. [Libre] Icon_minitimeDim 4 Sep 2011 - 23:48

[Désolée pour le temps qu'a pris ma réponse, on m'a traînée partout aujourd'hui DD:]

Après plusieurs minutes d'inactivité à fixer la porte d'entrée depuis le bas des marches, le menton reposant sur ses genoux serrés contre sa poitrine, Liz entendit des pas derrière elle. La panique s'empara vivement d'elle, faisant trembler ses bras frêles qui enserraient étroitement ses jambes flageolantes. Elle ne se retourna pas, espérant au plus profond d'elle même que quiconque soit derrière elle, il ne la remarquerait pas. Ce qui était stupide dans la mesure où elle était assise en plein milieu du chemin par lequel l'inconnu était susceptible de passer.

Elle se refusa cependant à bouger, feignant l'indifférence, les pensées fusant dans son esprit embrouillé. Son instinct lui commandait de fuir, de se cacher aux yeux du simple passant peu importe son identité comme à chaque fois qu'elle devait être confrontée à une présence humaine, mais elle n'en fit rien, même si elle sentait dans les pas résonnant derrière elle que le visiteur n'était pas d'humeur bienveillante et que sa présence pouvait déclencher ses foudres.

Et elle ne s'était pas trompée. Les pas qui s'approchaient de plus en plus de son dos s'arrêtèrent vivement à peine quelques marches au dessus d'elle, et ce fut seulement à ce moment qu'elle daigna se retourner pour faire face à l'étranger. Oh que oui, il semblait furieux. Il la regardait, une expression profondément exaspérée peinte sur le visage. Liz revint immédiatement à sa position initiale, la tête sur les genoux, fermant hermétiquement les yeux en s'attendant à un explosion de colère qui ne se fit pas attendre :

« Putain, c’est dangereux de se planter là ! lui reprocha-t-il. T’as qu’à aller dans le salon, si t’es crevée. Y a pas idée, quoi… »

Il semblait avoir fini. Elle attendit quelques secondes, la tête toujours enfouie dans ses bras tremblants, puis, méfiante, se retourna à nouveau vers son interlocuteur.

« Je.. hm.. je... bredouilla-t-elle, pas très sûre de ce qu'elle allait dire. »

Comme la plupart des personnes de ce monde, elle supportait mal qu'on lui crie dessus. Pour elle qui détestait toutes manifestations de sentiments, c'était littéralement devenu un phobie, c'est pourquoi, pressentant l'orage qui allait l'accabler, elle s'était recroquevillée sur elle-même. Repoussant quelques mèches raides de sa frange trop longue qui lui tombaient devant les yeux, elle dévisagea l'inconnu qui semblait s'apaiser peu à peu du coin de l'œil.

C'était un jeune homme plus âgé qu'elle - peut-être trois ou quatre ans de plus – qui la dominait de toute sa silhouette élancée. Il semblait mûr pour son âge, son visage marqué de cernes noirs d'encre tranchant avec sa peau livide qui témoignait de la fatigue accumulée, typique de ceux qui ont traversé de nombreuses épreuves. Ses cheveux atteignaient aisément ses épaules, probablement coiffés de la même manière négligée que ceux de Liz : avec les doigts juste histoire de démêler les nœuds importants. La couleur en demeurait néanmoins mystérieuse ; des cheveux blonds délavé recouverts de quelques mèches aléatoires noires de jais. Etait-ce naturel? Non, bien sûr que non.

L'étranger s'était à présent appuyé à la rampe finement sculptée et la fixait de ses yeux d'un bleu intense.

« Dis, t’es là depuis un moment ou tu viens d’entrer ? »

Elle secoua à nouveau la tête, afin d'évacuer toute mèche de cheveux lui obstruant la vue, et se tourna définitivement vers son interlocuteur. Elle hésita à lui répondre, ouvrant et refermant la bouche à plusieurs reprises, ne sachant comment s'y prendre. L'expression neutre sur visage de la jeune fille contrastait avec les quelques marques dévoilant la panique qu'elle cherchait de dissimuler en vain, ce qui donnait un spectacle étrange.

« ..'juste d'entrer, marmonna-t-elle, d'un voix à peine audible. »

Elle ignorait si le jeune homme l'avait entendu, c'est pourquoi elle s'éclaircit la gorge et prononça a nouveau :

« Je viens à peine d'arriver. Je ne sais pas ce qu'il m'a prit d'entrer ici... je... c'est vraiment un piège? Je suis...coincée ici pour toujours? »

Elle se sentit rougir et s'empressa de baisser les yeux afin que l'autre ne puisse pas le voir. Ces paroles étaient probablement la plus longues qu'elle n'ait jamais adressées à un inconnu, maladroites et timides, ce qui contrastait avec ses habituels grognements maussades. Elle ce sentait liée à cette inconnu, d'une certaine manière. Si le panneau disait vrai, ils resteraient coincés jusqu'à la fin de leurs jours. Ils étaient dans le même bateau. Et tous deux finiraient forcément par se recroiser un jour, non? Alors, autant éviter de se le mettre à dos, particulièrement s'il était déjà de mauvaise humeur.

Le regard concentré sur ses doigts jouant distraitement avec la fermeture éclair déformée de sa sacoche, elle reprit un nouvelle fois la parole :

« Je m'appelle Liz. Et toi? »
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Hans Hackermann
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MessageSujet: Re: Simple affaire de curiosité. [Libre]   Simple affaire de curiosité. [Libre] Icon_minitimeLun 5 Sep 2011 - 10:41

[Ah, pas de problèmes, c'est déjà rapide je trouve...XD]
Lorsque la jeune fille s’était tournée vers lui, Hans ne s’était pas gêné pour scruter son visage, ne s’embarrassant comme toujours pas d’une politesse factice. La première chose qu’il remarqua fut ce qu’il n’y avait pas à remarquer : ni fourrure sur le corps, ni troisième œil percé dans le front, ni, de ce qu’il en voyait du moins, d’oreilles pointues ou autres inepties du genre. Putain, se dit-il, c’est quand même grave d’arriver à se réjouir d’un truc pareil. Hackermann évitait les créatures soi-disant « mystiques » du pensionnat tels des lépreux. Au-delà de la barrière physique et culturelle, il n’arrivait juste pas à déterminer s’ils étaient réellement ce qu’ils prétendaient ou de simples acteurs à l’époustouflant maquillage à la solde du vieux connard qui devait se fendre la gueule à les regarder s’agiter comme des fourmis… Le Berlinois se sentit d’emblée plus rassuré par une présence tout à fait humaine : ces fringues ressemblaient à celles qu’on pouvait trouver dans n’importe quel magasin, quoique, ironisa-t-il, ça aurait aussi bien pu sortir d’un vide grenier. Elle devait être jeune, plus que lui en tout cas, avec des yeux aussi verts que les siens étaient bleus.

Hans fronça les sourcils lorsque l’inconnue marmonna il ne savait trop quoi, si bas qu’il l’entendit sans le comprendre. L’inutilité profonde de son pouvoir se rappela à son bon souvenir : oh, tant qu’il y était, il n’aurait pas pu avoir des oreilles bioniques capables d’entendre n’importe quoi, quelque chose comme ça ? Ça aurait au moins servi à autre chose que lui pourrir ses journées. Manifestement hésitante, un brin inquiète peut-être –qui ne l’aurait pas été après avoir lu les messages punaisés sur le panneau de liège ? Ce vieux taré n’avait pas lésiné sur le décor, ce manoir mettait mal à l’aise– la fille reprit la parole, distinctement cette fois :

« Je viens à peine d'arriver. Je ne sais pas ce qu'il m'a prit d'entrer ici... je... c'est vraiment un piège? Je suis...coincée ici pour toujours? »
Les lèvres du blond s’étirèrent en un sourire que l’amertume rendait acide : coincé ici ? Pour toujours ? Jamais ! Il ne croyait pas une seconde à ces histoires mal foutues de magie et autre conneries du style, et ce en dépit des preuves accablantes : comment aurait-on eu connaissance d’un animal qu’il avait lui-même jeté aux oubliettes, là, parmi tous les débris de l’enfance et les illusions cassées ? Comment des gens pourraient-ils marcher sur les murs, sauter de dix mètres sans se blesser, devenir invisibles, jeter des objets par la pensée ? C’était délirant ; Hans avait été jusqu’à songer à une école style X-men. Ça ou autre chose…
En tout cas, il comptait bien sortir, et fissa. Le défaitisme qui lui seyait si bien avait déjà commencé, à son insu, son travail de sape : ses affaires avaient quitté son sac pour son armoire, il avait laissé tomber la piste « bibliothèque » sans plus chercher que ça, sans parler de certains…, problèmes qui s’aggravaient dangereusement.
Mais malgré tout, il voulait lui dire que non, elle non plus, si elle ne voulait pas, ne resterait pas là. Il n’y avait pas de raison : on ne les prendrait ni pour des cons, ni pour des chiens ou du bétail…
« Je m'appelle Liz. Et toi? »
Elle avait baissé les yeux, tandis que lui gardait son regard rivé sur elle. Liz, ça sonnait quoi ? Américain ? Français ? Anglais ? Mais merde, pesta-t-il intérieurement, elle aurait pas pu s’appeler Abdoul ou Marie-France ? Là au moins, ça aurait été facile de pas se planter… Ne connaissant pas la moitié des pays de l’U-E, sans parler du reste du monde, Hans songea que de toute façon, y avait de grandes chances que son pays, il ne le connaisse même pas de nom. Nouveau froncement de sourcils : pourquoi fallait-il qu’il regrette d’avoir assidûment séché la géographie en permanence, ici ? A croire que ce vieux sénile de prof avait su tout ça ! Crétin, crétin. Quand il reviendrait chez lui, il quittait Berlin et ce lycée pourri, résolut-il sans y croire une seconde.
« Hans. Et c’est un peu tard pour te demander pourquoi t’es entrée, maintenant. Pour te répondre, apparemment personne serait jamais sorti mais j’y crois pas trop, lança-t-il en jetant un coup d’œil mauvais à la grande porte. Faut pas se laisser avoir par cette…, cette mise en scène merdique. »

L’animosité se disputait au doute dans sa voix. Lui aussi avait été « nouveau », lui aussi avait eu peur. Il savait ce que ça faisait –et il savait aussi que donner de l’espoir quand on n’était pas sûr qu’il soit fondé était mal. Cette…, Liz devait être mal à cet instant. D’un autre côté, il la connaissait à peine : il n’allait pas porter sur son dos tous les malheurs du monde non plus, il avait déjà assez à faire avec les siens et ceux de ses « amis ». Il tendit tout de même la main à la jeune fille trop mince pour l’aider à se relever. Ça n’engageait à rien, après tout, il le pensait sincèrement : à rien.
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MessageSujet: Re: Simple affaire de curiosité. [Libre]   Simple affaire de curiosité. [Libre] Icon_minitimeLun 19 Sep 2011 - 22:51

[Egfgfhg... Je sais j'ai été longue, je suis impardonnable. ;A; Liz était total OOC et avec la rentrée au lycée itou... Enfin, j'espère que ça vaut le coup, même si je suis pas très fière de moi.]


« Hans. Et c’est un peu tard pour te demander pourquoi t’es entrée, maintenant. Pour te répondre, apparemment personne serait jamais sorti mais j’y crois pas trop. Faut pas se laisser avoir par cette… cette mise en scène merdique. »

Mise en scène, hm? Ce Hans ne semblait pas avoir accepté l'idée d'être enfermé ici. Et Liz ne comptait pas s'y soumettre non plus. Si elle avait été inquiète, elle venait de retrouver un semblant de courage en entendant ses paroles, toutes les possibilités n'avaient sûrement pas été envisagées, il y avait forcément un moyen de s'enfuir.

Qui s'amuserait à ensorceler un immense manoir afin d'y enfermer n'importe quel curieux ayant osé traverser ses portes? Certainement un fou furieux. Un magicien dément.

Liz ne s'acharnerait pas à trouver la sortie. Maintenant qu'elle y réfléchissait, elle n'en avait pour l'instant aucune raison. De retour à Londres, elle n'aurait nulle part où aller. Son père serait probablement fou de rage si elle osait rentrer, et rien ne changerait. Il continuerait à boire, à la frapper, et leur famille coulerait, laissant les problèmes s'accumuler. La maison finirait par s'effondrer, ses camarades de classe seraient toujours aussi indifférents en sa présence, les dernières choses auxquelles elle s'était attachées disparaîtraient elles aussi... il n'y avait rien qu'elle souhaitait retrouver.

Et puis, de toutes manières, elle s'en fichait. Cette endroit à l'aspect fastueux cachait de lourds secrets dans ses murs et l'avait enfermée au milieu d'eux, qui la concernaient peut-être directement selon le panneau d'affichage avec ces histoires de pouvoir, mais cela ne la gênait pas le moins du monde. Elle était ici, point. Elle s'y habituerait. Et si ce manoir n'était qu'une « mise en scène » et qu'eux, ceux désignés comme pensionnaires éternels, n'étaient que des pions desquels on se jouait, elle s'en moquait. Elle serait un pantin parmi les autres.

La panique avait disparu, remplacée par un sentiment inexplicable de confiance en elle.

Reprenant ses esprits, elle attrapa la main qu'on lui tendait et se releva.

Cette aide aurait pu être considérée comme amicale si les regards que les deux concernés échangeaient l'avaient été, or tandis que celui d'Hans était teinté d'une passable animosité renforcée par la différence de taille, celui de Liz avait retrouvé toute sa neutralité empêchant quiconque de deviner le fond de sa pensée. Elle scrutait éhontément le visage de son vis-à-vis, tentant de se faire une idée de sa personnalité qui, pour l'instant, lui semblait impulsive, froide et renfermée. Une vision péjorative influencée par l'humeur particulièrement exécrable du jeune homme à cet instant, bien qu'elle se soit améliorée depuis le début de leur conversation.

Liz s'éloigna du garçon après l'avoir vaguement remercié, ne sachant plus comment agir. Engager la conversation afin de mieux le connaître? Non, ce n'était pas du tout son genre, et Hans ne semblait lui-même pas quelqu'un à qui on parlait facilement. Elle lui avait demandé son nom, ce qui formait déjà un exploit en soi.

Repoussant une énième mèche décolorée qui lui tombait sur le visage, elle se détourna vers la porte de bois qui la retenait dorénavant prisonnière.

« Je me demande à quoi ressemble la vie ici, marmonna-t-elle pour elle-même, mais suffisamment haut pour qu'Hans puisse l'entendre. Peut-être n'est-ce pas plus mal? »

Du moins, elle voulait y croire.

Ses jambes flageolantes la guidèrent sur le tapis rouge sur lequel elle manqua plusieurs fois de se prendre les pieds et de s'étaler de tout son long sur les dalles froides qui recouvraient le sol. Elle ne savait pas réellement ce qu'elle faisait, regardant autour d'elle, imaginant ce lieu comme étant sa maison. Non, décidément, elle ne s'y sentirait jamais chez elle. La jeune fille avait été habituée aux lieux pittoresques, sales et étroits ; le contraire même de ce qu'elle avait sous les yeux. L'élégance, le raffinement... tout cela était superbe mais ne lui ressemblait en rien.

Un sentiment de malaise la prit lorsqu'elle ressentit le contraste entre son tee-shirt trop large, glissant négligemment sur ses épaules osseuses, son jean élimé, ses baskets usées et la pièce somptueuse parfaitement agencée qui l'entourait. Elle savait pertinemment que cette sensation ne la quitterait plus jamais.
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MessageSujet: Re: Simple affaire de curiosité. [Libre]   Simple affaire de curiosité. [Libre] Icon_minitimeSam 24 Sep 2011 - 13:13

[J'aime grave pas mon post, moi non plus. Mais j'ai pas vu de problème dans le tien, si ça te rassure. Quant au lycée je te comprends, j'ai le même problème : ça craint. ]

La fille, Liz, s’était écartée sans ajouter un mot après l’avoir longuement dévisagé. Hackermann la suivit du regard, observant ce silence qui lui seyait si bien. Il aurait pu repartir : de toute façon, il ne trouverait rien ici, à part de mauvais souvenirs et du temps perdu. Un étau d’ironie lui enserra le cœur : du temps perdu ? Allez, on leur avait à tous promis l’éternité, il allait pas non plus chipoter pour une dizaine de secondes ! Il s’était de nouveau appuyé à la rambarde, son regard trainait ici et là, s’attardant peu sur les détails qui le premier jour l’avaient tant impressionné. Il se demanda si ç’avait été le cas pour tout le monde. Les immeubles aux façades lépreuses, les murs suintant d’humidité, le papier-peint aux couleurs passées déchiré par endroit et noirci de moisissure ; rien de tout ça, ici. De la poussière parfois, une sale impression qui vous collait à la peau dans certaines pièces, un frisson de temps en temps, mais rien de plus. Une vieille baraque que la vie aurait quitté et où elle refuserait de revenir, pas comme leurs vieux trois-pièces bien vivants mais moribonds. Il s’en était fait la réflexion, plusieurs semaines plus tôt : maintenant il n’y pensait plus, essayait d’avoir la tête à autre chose. Peut-être ces pensées traversaient-elles la tête de Liz à cet instant ? Pour ce qu’il en savait… Et merde, songea-t-il, c’est pas mes affaires. Chacun sa merde, je m’en fous.

Il s’apprêtait à repartir lorsqu’il entendit la voix de la nouvelle, des paroles en l’air, lancées comme ça, sans préambule, sans fioritures, sans rien du tout :

« Je me demande à quoi ressemble la vie ici. Peut-être n'est-ce pas plus mal? »

Hans se figea, les sourcils froncés et les traits empreints de dégoût. Pas plus mal ? On les parquait comme des vaches dans un enclos, et c’était « peut-être pas plus mal » ? Il fallait sortir, bon sang, il fallait se secouer ! Quitte à crever, autant que ce soit à Berlin, dans un parc ou sur une route ou n’importe où ! Je veux pas rester ici, se répéta-t-il encore et encore, tentant de s’en convaincre tant que c’était encore possible. Avant que tout ça devienne normal pour lui. Je veux me barrer, je veux me barrer, je veux me casser de cet endroit glauque, je veux pas crever ici, je veux pas vivre ici, je veux voir personne ici, je veux rien de ce qu’on me donne, je veux pas, je veux pas.

Sans s’en rendre vraiment compte, il transposa sa propre situation sur celle de cette fille : il fallait sortir, point barre. Elle devait penser ça, elle aussi ! C’était ce que tout le monde aurait dû penser. Ce soi-disant « pensionnat », une main tendue ? Une gentillesse, un abri ? Que dalle, conclut Hans, c’était rien de tout ça. C’était être mort, c’était s’enterrer. Oh, pour sûr, mort on n’a plus aucun souci ! Mais tant qu’à faire, il voulait une tombe. Même en bois et sans fleurs, c’était pas ce qui comptait. Il n’était pas croyant, pourtant. Mais il y avait bien une personne qui ne se foutrait pas qu’il ne soit plus là, une personne à prévenir.

La vie ici ? La mort chez soi, oui… Non, il ne fallait pas rester. L’Allemand ne l’aurait jamais avoué, mais plus que tout le reste, plus que ces histoires de forêt, de pouvoir, que ces gens étranges, que ces fantômes et qu’une overdose, c’était la résignation qui lui faisait peur. Qui le terrifiait. Il avait pas le droit de rester, pas vrai ? Il devait rentrer. Rentrer où ? se demanda-t-il. J’ai nulle part où rentrer.
« N’importe quoi, lâcha-t-il d’une voix plus hésitante qu’il ne l’aurait souhaité. C’est comme d’être mort, être ici. Pourrir ici ou crever là-bas, faut choisir ! »
Comme toujours, il s’emportait. La fille, un peu gourde, avait de peu manqué d’aller embrasser le sol froid. Il regarda ailleurs, mais ses yeux se tournaient inéluctablement vers la porte qui ne s’ouvrait que dans un sens. Peut-être que s’il attendait que quelqu’un arrive, il pourrait se glisser entre les battants avant que ceux-ci ne se referment ? Je suis plus à ça près, argua le blond sans conviction.
« Les gens sont pareils partout. T’as raté ta vie chez toi ? Super, dans ce cas, tu vas la rater ici aussi ! Si c’est pas plus mal ce sera pas mieux non plus ! »

Putain, songea-t-il avec une vague amertume, pourquoi est-ce qu’il faut toujours qu’il agresse les nouveaux venus, comme ça ? Ça a pas aidé pour Kaas, ça a même aidé pour personne… A croire que se faire détester était un hobby, chez lui. Peut-être, peut-être seulement, que si personne ne le regrettait ici il pourrait partir sans se retourner. Quelques visages s’imposèrent à l’esprit d’Hackermann : c’était un peu tard pour s’y mettre.
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