Jason me laissait toute seule. Seule. Seule au monde. Dans ce long couloir, cette obscurité, j’avais tellement peur. Maintenant que Jason était parti, mon imagination s’accélérait, de même que mon pou et ma respiration. Je ne voyais plus rien, ni même le plancher, les murs.. Et encore moins Jason qui avait fait demi tour. Je l’avais vexé. Oh non. J’allais mourir, je n’aurais pas dut. Je fis un pas, deux pas, les mains en avant à la recherche de quelque chose à toucher pour me repéré. Je m’imaginais les mains se posant sur un monstre de poils qui grognerait à mon contact, puis remis mes mains tout contre mon corps, me faisant toute petite dans ce corridor envahi de ténèbres. Je reculai un peu, tâtant légèrement où devait être un mur. Je l’effleurerai, timidement, puis je passai ma main dessus sans me gêné et je m’y adossai. Mon regard continuait de scruter l’obscurité si épaisse qu’elle semblait vivante. Je ne voyais rien, aucun mouvement, aucunes lumières, que de l’inconnu.

Je contrôlais difficilement ma respiration, cherchant de l’air qui se faisait rare, mais faisant de mon mieux pour prendre de grandes inspirations et laisser tomber de longues aussi. Je me laissai glisser contre le mur, me retrouvant accroupie avec les genoux contre ma poitrine, sentant les larmes embuées mes yeux. Je l’avais choqué, Jason, mon sauveur, et je ferais n’importe quoi pour qu’il revienne. Je ne voulais pas être seule, je ne savais même pas où aller, et puis il me fallait quelqu’un pour me montrer où aller. J’étais perdue. J’entendais les claquements de doigts de Jason dans l’obscurité, cela semblait venir de loin, mais je savais que je pouvais le retrouver.

Je me mis à 4 pattes et tenta de suivre le bruit des claquements de doigts, priant pour qu’il ne se décide pas à arrêter. Je progressais dans le noir total, ne voyant même pas ce qu’il y avait devant moi. C’est pourquoi, bientôt, je me heurtai contre un plier qui semblait avoir quelque chose comme une sculpture ou un vase dessus. Il vacilla, je retins mon souffle en sentant son mouvement dans les ténèbres, et me roulai en boule en l’entendant fracasser le sol, alors que ce qui était fragile éclatait en milles morceau. Les larmes naquirent cette fois totalement dans mes yeux et roulèrent sur mes joues rouges. Je reculai à nouveau vers le mur, m’adossant, m’entourant de mes bras et laissèrent toutes ces émotions m’envahirent. La peur, le désespoir, tous ce genre de sentiments. Mes brides d’espoir me firent mal au cœur lorsque je m’en souvint, le départ de Jason augmenta ma tristesse. J’espérais mourir. Avant d’avoir trop mal, de trop pleurer, je voulais mourir. J’abandonnais, je ne voulais pas vivre, que personne ne vienne me sauver. Je ne voulais plus voir mes parents, tant pis, il était trop tard, je voulais mourir.

Comment expliquer ce que je ressens ? Comment décrire ce que l’on ressent lorsqu’on crois sa dernière heure arrivée ? Car c’est bien ce que je crois, j’en suis convaincue, la mort m’attends, rode autour de moi, s’approche un peu plus.. Je retiens ma respiration alors que je sens du mouvement et que j’entends du bruit. Si ça se trouve, c’est ça qui va me tuer. Ça devient encore plus proche, alors que les yeux fermés je refuse de voir mon destin tragique qui approche. Adossée contre le mur, j’appuie mon front contre mes genoux et prit pour la première fois de ma vie. Je pris pour qu’on m’achève vite, que ce qui m’attends ne soit pas trop douloureux, que la mort soit douce, et qu’au-delà de la mort il y aura quelque chose de plaisant. Je pris un Dieu auquel je n’ai jamais crut, et aujourd’hui alors que je m’apprête à rendre mon âme au ciel, je demande sa pitié, moi la petite âme qui n’a jamais sut avoir foie en lui. Mais tout cela ne sert à rien..

On me souleve de terre, alors que je garde les yeux clos et que je détourne la tête, en attente d’une douleur subite sur n’importe quelle partie de mon corps. Les secondes défilent lentement, je veux que ce soit rapide, oh seigneur ! pourquoi était-ce si long ? Les larmes continuent de se frayer un chemin au coin de mes yeux et de venir glisser sur mes joues qui ont perdu toutes couleurs, glissant sur mon menton et terminant leur course dans mon cou. Je sens des mains se poser sur mon corps, m’attiré contre la chose qui voulait me tuer. J’ai peur qu’on ne veuille jouer avec moi avant de me tuer, qu’on me torture autant psychologiquement que physiquement. La douleur dans ma tête est déjà beaucoup plus puissante qu’on ne pourra jamais m’infligée. Je peux sentir son souffle sur ma peau, je frémis alors que je cherche quelque chose auquel me raccroché pour supporter les derniers instants qu’il me reste.

« Chuuut... Je suis là, calme toi... » sont les mots que j’entends sans en comprendre le sens. Pourtant, j’analyse que la voix me dit vaguement quelque chose, et l’impression s’intensifie alors que sa voix chatouille mes oreilles. Ses mains dans ses cheveux continuent de me dorloter, alors que je cherche encore ce que peut bien me rappeler cette voix. Puis je pense à Jason, qui ne devait pas être loin, peut-être va-t-il mourir lui aussi ? Peut-être a-t-il été alerté par le bruit de vase qui tombe et est-il parti avant qu’il ne lui arrive malheur. Je lui souhaite, vraiment. Il voulait juste m’aider, après tout, et moi j’ai tout gâché. J’ai totalement fait fuir mon dernier espoir de survivre dans ce pensionnat, et j’allais en subir le prix dans quelques minutes.

Le temps était long, très long, qu’attendait-il pour me tuer ?

Je m’impatiente, pas que je veux mettre fin à mes jours, mais j’en ai plus qu’assez de souffrir de cette attente de la mort qui viendra de toute façon. C’est long. Mes mains cherchent quelque chose auxquelles se raccrochées dans le vide et, sans que je ne le veuille, attrapent les vêtements de Jason, et je tire, pour trouver une emprise solide dans la réalité, pour me convaincre que je n’étais pas déjà morte de peur. Ma deuxième mains attrape aussi son chandail, que je tire vers moi, pour me défendre, j’en sais rien, mais je dois mettre fin à cette attente, j’en peux plus de ce supplice.

« Tuez-moi. »

Le monstre me prit dans ses bras, probablement pour que je ne m’enfuis pas. Je n’aurais pas put, de toute façon, puisque mes jambes étaient molles, avaient peines à me soutenir, comme si elles étaient déjà morte. Je laisse la chose affreuse faire, alors que le contact de ses doigts sur ma peau me déplait, me donne le tournis. On dirait qu’il est tendre avec moi, comme s’il apprécie toute cette peau qu’il se fera un plaisir à détruire ensuite. Ses mains sont douces, pour des mains meurtrières, je sens presque de l’affection dans ses gestes. Une affection pour sa proie. Il essuie mes larmes, que je ne produis plus, à court de force, puis m’embrasse. Non, en fait, il m’effleure les lèvres, doucement, alors que je prie pour que mon premier baisé ne se termine.

« Ella... C'est moi... Jason ! » Je tressaille juste à entendre ce nom. Il m’a abandonné, le traitre, il m’a laissée dans ce couloir sombre en sachant probablement que des monstres se cachaient un peu partout. Une vague de tristesse me parcouru et je tire plus fort sur les vêtements de mon agresseur, cherchant cette fois-ci à le provoquer pour qu’il m’achève encore plus vite. Je n’ai qu’une idée en tête : mourir. En finir, partir de ce pensionnat, m’évader de cette vie de misère. Parce que, oui, peut-être que de mourir serait mieux que de rester ici, loin de tout ce que j’aime, des gens qui me sont chers, de mes passions. Puis, une lumière frappe mes paupières, que j’ouvre d’instinct, puis me rends aveugle. Cependant, j’arrive bien à discerner le visage de Jason, près du mien, qui me regarde avec un air inquiet. Mon esprit s’embrouille, se perds, je ne comprends absolument plus rien. Est-ce que c’est Jason qui veut me tuer ? Ça aurait du sens, au fond. La traitrise me fait mal, alors que la tristesse devient encore plus grande, plus forte, et que j’ai peine à rester debout.

Jason me soulève de terre et me mets sur son dos. Mon cœur se serre. Où m’emmène-t-il ? Probablement dans une salle. Pour me torturer ? Ou peut-être pour que j’y attende sagement mon tour ? Une image de cachot s’impose dans mon esprit et mon corps se raidit de dégout. Comment quelqu’un à qui j’ai put donner ma confiance, en qui j’ai put croire, quelqu’un qui a ravivé mon espoir me trahir autant ? Ce que le monde pouvait être dégoutant. Le cœur m’en lève, je veux descendre, vomir mon mal. Non, finalement, je souhaite vraiment mourir. Les pas de Jason se sont arrêtés et je crue desceller un pilier et un vase cassé dans l’obscurité. Était-ce moi qui avais fait ça ? Non, je ne crois pas. Jason avait dut le percuter, faire ce bruit qui m’avait alertée de sa présence. Je le vis pousse du pieds des morceaux et je fronçai les sourcils. Ce geste me semble bizarre, décalé, presque suspect.

Puis Jason repris sa marche et je tentai de m’orientée, cherchant à voir quelque chose dans cette noirceur quasi-totale qui me donnait toujours la chair-de-poule, mais toujours moins que ce traitre de Jason. Je ne me débats pas alors que dans ma tête tout bouge vite, s’active, crie mon désespoir. J’aurais voulut crier, le frapper, le mordre, me sauver, mais en réalité j’en étais incapable, je veux vraiment en finir maintenant, tout de suite. Puis, une lumière se fait présente, se rapprochant, comme la lumière au bout du tunnel qu’on traverse vers le paradis. Je prie fort pour y aller, au paradis. Jason s’arrête à nouveau alors qu’on a rejoint ce couloir éclairé, et je le laisse me poser au sol. J’évite son regard comme je le peux, cherchant à le fuir, je ne voulais pas voir la victoire dans ses yeux alors qu’il m’avait eue.

Jason me caresse à nouveau le visage, comme tout à l’heure, et je me demande s’il ne va pas recommencer son manège. Je détourne un peu la tête, honteuse de le laissé posé sa main sur moi, puis l’entends me parler normalement, affectueusement, presque amoureusement. J’en ai la nausée.

« Que vas-tu faire de moi maintenant ? »

Je regrette immédiatement mes paroles, me demandant si cet affront va me couter cher. Je baisse le regard à mes pieds, devenant rouge. Je souhaite qu’il puisse me tuer maintenant, d’un regard, d’une caresse sur mon visage. Mes mains attrapent son chandail, alors que je suis comme dans un état second, et approche son visage du mien.

« Han, dis-moi, que me feras-tu ? Tu n’en as pas marre de jouer avec moi ? Vas-y, fais-le. J’attends juste ça, moi ! Arrête de t’amuser avec moi, de me torturer dans ma tête. »

Je me rends compte que j’ai crié, assez fort, et que ce couloir porte mes paroles en écho. Je me suis emportée, beaucoup même, et je ferme les yeux pour réprimer ces larmes qui pointent le bout de leurs nez dans ce moment inopportun, puis fatiguée de les retenir, je les laisses couler à flots.

« Je t’en supplie.. » ajoutai-je dans un chuchotement.

Je semble choqué Jason, si c’est bien son vrai nom. Après mes paroles si crues, mes exigences purement égoïste, il semble comprendre toute l’ampleur du drame qui m’habite. Mais un assassin ne peut pas, d’un seul coup, en une seule phrase, comprendre la nature de ses actes. S’il est vraiment ce que je pense, il ne peut être qu’en train de jouer la comédie. Tente-t-il de m’amadouer, pour mieux m’attraper ? Décidemment, il aime beaucoup jouer avec mes émotions, me faire douter puis me donner raison. Il a un don pour me rendre l’espoir, puis me l’enlever sans pitié. Je souffre à l’intérieur de le voir si découragé, mais je sais qu’il ne fait que jouer. Je peux le voir, dans ses yeux, qu’il y a une part qu’il ne me dit pas, qu’il garde pour lui. Évidement qu’il me trompe, attendant une réaction de ma part toute proche de l’attendrissement. Il veut que j’aie pitié de lui, que j’aie honte de m’être trompée, et qu’alors je le suivre partout. Il veut que je me sente coupable, que j’aie l’impression de lui devoir quelque chose pour l’avoir crut assassin. Mais quel genre de créature peut bien être si cruelle, aimer autant jouer avec les émotions ? Mais, moi, il ne m’aura pas.

Jason tombe vers l’arrière, s’étendant de tout son long sur le tapis. Mon envie de me précipitée à son chevet est grande, et ma honte de m’être trompée grandit encore plus en moi. Que fais-t-il, là, sur le sol, à se couvrir le visage de ses mains. Je souhaiterais me pencher sur lui, me confondre en excuse. Et, encore plus terrifiante comme envie, je souhaite posée ma main sur sa joue, y dessiner des gribouillis, juste pour sentir sa peau sous mes doigts. Je souhaite mettre sa tête sur mes genoux et me pencher au dessus de lui, caresser ses cheveux et lui chuchoter que tout va bien. J’ai envie de lui sourire même si j’ai tout perdu, mes parents et mes rêves. J’ai envie de partager avec lui un moment, même si tous mes espoirs sont morts lorsque la porte du hall d’entré s’est refermée..

Ce que je suis sotte. Il m’a eu, tout au fond de mon être. Il a capturé ce qui restait de mon âme et l’a attirée vers lui en pitié. Je me suis faite avoir. Ce que je me déteste. Je dois repousser ces envies, que dis-je, ces besoins. Si je me laisse attrapée dans ce nouveau guet-append, je suis faite, il m’aura à sa merci. Je serais foutue si je me penchais au dessus de lui. En fait, je suis foutue, car peu importe ce qui arrivera ensuite, il restera toujours une part de moi qui ne pourra pas se méfier de lui. Ce que je me déteste en ce moment. Je reste immobile alors que mon conflit intérieur fait rage. Jason, lui, semble m’avoir oublié, étendu là au sol, même si je sais très bien qu’il me surveille du coin de l’œil. Je le déteste, mais je me déteste encore plus. Ce que je suis sotte.

Jason mets ses mains sur son visage et je dois me mordre la lèvre pour ne pas me précipiter à son chevet. Je bouille d’impatience de me réconciliée avec lui, même si je sais que ce serait la plus grosse – et dernière – bêtise de ma vie. Je sais que maintenant je suis totalement convaincue, puisque je dois me faire violence pour ne pas bouger. Après quelques instants à observer l’homme au sol, celui-ci ouvre enfin la bouche et articule des mots qui, au plus grand désespoir de ma raison, me blesse énormément. « Pars d'ici. Si c'est vraiment ce que tu ressens, fuis et ne reviens jamais me voir. » Mon corps tout entier se tends, je ne bougerai pas, j’en suis tout simplement incapable. C’est ridicule d’attendre patiemment sa mort lorsqu’on peut se sauver à toute jambe, surtout lorsqu’on connait ce que la vie nous réserve si l’on reste là.

Malgré tout ce qui se passe dans ma tête, je ne bouge pas, le regard toujours fixé sur Jason. Je voir bien la réalité en face, à présent. Je cours à ma perte, j’en suis consciente, mais je ne peux faire qu’autrement, car si je fuis, j’aurai toujours une pointe de remords et de doute quand à ses intentions qui ne me quittera jamais. Je le regarde se lever, alors qu’il ne me regarde même pas et commencer à marcher. Ce qu’il semble désœuvré, Jason. J’ai mal, très mal à mon cœur qui me crie de le poursuivre, de l’attrapé par le bras, de le regarder dans les yeux et de lui donner la salut de mon âme. Et puis merde ! Tant pis pour ma vie, je n’en ai déjà plus avec la mort de mon ancienne vie. Autant prendre ce risque..

« Attends-moi. »

Crie-je avant de m’élancer contre l’homme qui commençait à être drôlement loin. J’arrive à sa hauteur à bout de souffle, complètement épuisée autant mentalement que physiquement et je lui attrape le bras, le forçant à se retourner vers moi. S’il savait tout ce qui se passe dans ma tête, ce qui se chamaille avec une telle férocité. Je le regarde dans les yeux, les fouilles des miens pour trouver une réponse. Mais il ne semble pas n’en avoir. Comment savoir ce qui est la vérité…

« J’ai besoin de toi. Pas seulement pour me montrer la chambre, mais pour vivre.. » Puis, trouvant mes propos chargé d’un trop grand sens, je rajoute, « ici.. »

Je tente de lui sourire alors que ma bouche se tord plutôt en une grimace. Ma mâchoire tremble, je veux pleurer, c’est plus fort que moi, mais cette fois-ci, plus question de reculer, de m’abaisser à vouloir mourir. Je vais marcher droit vers ce qui m’attends et en subir les conséquences, même si ça présuppose la mort..