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Un enfer. Un véritable calvaire. Qui m'aurait dit qu'un jour je devrais traîner un petit ange déchu de la piraterie dans mes bras à travers les couloirs d'un manoir magique, pour rejoindre un piment habanero ambulant? Qui aurait prévu que je prête ma veste à un inconnu plus si inconnu que ça?

D'accord, je la lui ai tendu, je devais bien m'attendre à ce qu'il la prenne; il ne pouvait pas rester dans ce vieux manteau poisseux. D'ailleurs, étrangement, il avait laissé aller son habit humide trop facilement, considérant qu'il avait conservé son vêtement avec hargne quelques instants plus tôt. Mais bon, Fallen Angel ne se débrouillait pas trop mal ; il avait ramassé son chapeau et s'était relevé. Okay, il devait s'accrocher à moi, mais au moins il réussit à tenir debout, quoiqu'il avait un pas plutôt chancelant. Le tenant pour éviter qu'il ne se blesse, je ramassais son manteau mouillé, et ces lambeaux qui lui servaient de chemise, tout crasseux, que Tomato avait eu comme aberrante idée de démolir pour en faire une compresse, si sanitaire.

Justement, il sortait de son moment d'immobilité, et il s'aventurait dans les escaliers.

«Perdu ?»

Eliot semblait ailleurs, sauf que toujours conscient. Quoiqu'il ne le resterait pas pour très longtemps; la poigne qu'il avait sur mon épaule diminuait lentement pendant que je le guidais dans cette immense jungle de marches sauvages.

Pourquoi je suis ici? C'est quoi le fuck? Le karma decide finalement de me faire chier parce que j'ai joué à ...

«Guess Who ...»

Peut-être Eliot avait-il entendu ces paroles divines, cette messe basse si enjôlante, mais little-red-kind-of-riding-hood, définitivement pas. Ces mots me faisaient du bien; même dans une merde aussi monumentale qu'était cette situation, ce petit mantra m'emmenait vers l'importance du monde, Petit Ange, et instaurait en moi une radiation chaleureuse de plénitude.

«Cependant, je vous préviens messieurs que je n’ai vu trace d’un quelconque médecin ou assistant en ces lieux.»

«Pourriez-vous ralentir, s'il vous plait? Et pourriez vous répéter vos paroles, si vous et vos cordes vocales le pouvez, bien entendu?»

En toute franchise, ses paroles ne parvenaient pas jusqu'à moi. Je n'avais pas entendu plus que quelques vulgaires variantes monstrueuses de syllabes. Eliot marchait toujours, s'appuyant de plus en plus à mon cou, mes épaules. Cette scène éveillait un merveilleux sentiment, face à un souvenir que j'ai cru voir disparaître ... Ça me rappelait une fois où j'avais ramené Petit Ange à sa maison, lui qui était - pardonnez l'expression - complètement bourré. Ahhhhhh, memories ...

... Et puis je riais, là, tenant un Eliot mourant, pensant à mon défunt ami / amant / colocataire / frère de coeur ... Un rire fort à l'intonation claire, vide de mes vices naturels, sonnant quelque peu ludique par son emploi dans la situation, mais quand même ... Au même moment, j'entendais une voix insinuant quelque mots, cette fois bien clairs, entre mes sereins éclats de rire.

«J’espère que vos connaissances en domaine de médecine sont plus accrues que les miennes, car je ne connais guère que des bases et que plusieurs des articles de cette infirmerie ne sont point de mon époque.»

Souriant, je continuais d'avancer en le suivant, de plus en plus rapidement, pressant quelque peu le moussaillon angélique déchu et égaré par l'océan et le temps. Le matelot divaguait envoyant des fragments de phrases dans le vide, vide si près de moi et si loin de l'autre que je ne sais pas s'il a bien compris.

«Je suis un … un pirate. Je … c'est pas ça qui va me tuer … Seb ...»

Plus tôt, j'avais prévu sa perte de conscience, et bien voilà. Il serra plus fort mon épaule, perdit pied après un léger mouvement représentant un malaise vertigineux. Dans sa descente flagrante vers l'horizon qu'était le plancher, je me penchais agilement devant lui pour le soutenir de mon torse et de mes bras.

«Woah! Attention, Baby Doll.»

Par chance, ou par malchance, décidez donc, le trio que nous sommes était posté, comme par miracle, près de la merveilleuse porte de l'infirmerie, que Red Boy s'empressait d'ouvrir, libérant à ma vue de magnifiques matelas d'hôpitaux, différentes fioles, des vieilles armoires et ... des pillules. Déjà là, je ne rie plus, quoique c'est drôle ce que blondinet baragouine pendant son sommeil; pas très compréhensible, mais très hilarant.

«Nous y voilà.»

La pièce était envahie par la lumière, dans toute sa splendeur, aussi splendide peut être un endroit pour les éclopés, mourants et amputés. J'avançais en direction d'un lit, et y déposais doucement l'ange déchu agonisant, lui retirant ma veste, quelque peu tachée de liquide sanguin. Je laissais tomber le tout (restant de chemise, manteau, tricorne à plume et veste) au pied du lit en regardant le guide aux épis capillaires sanguinolents dans les yeux, le gratifiant d'un sourire.

«Bien entendu que je peux lui prodiguer des soins, mais j'aimerais que tu me rendes un immense service, pourrais-tu? Cela te plairait d'être d'une plus grande utilité pour nous?»

«Perdu ?»

Avais-je eux l’air si égarer? Surement puisqu’il m’avait posé cette question. Mais, j’avais décidé de ne pas en tenir compte. À quoi bon de toute façon?
L’auteur de cette question s’était penché pour se saisir de son chapeau, s’agrippant au bras de la tierce personne à la chevelure… originale? Puis, nous nous sommes mis en marche. C’était à ce moment que j’avais prononcé une phrase qui dû les surprendre car elle exprimait presqu’un non-sens :

- Cependant, je vous préviens messieurs que je n’ai vu trace d’un quelconque médecin ou assistant en ces lieux.

Mais, elle n’avait pas bien été entendu puisque je reçu comme réponse :

«Pourriez-vous ralentir, s'il vous plait? Et pourriez-vous répéter vos paroles, si vous et vos cordes vocales le peuvent, bien entendu?»

Aussitôt, mon pas s’était ralenti. Le blesser marchait lui aussi et, je dois bien l’admettre, cet état de stress, d’inquiétude et de malaise dans lequel j’étais à ce moment-là me fessait accéléré un peu trop le pas. Puis, j’avais répété ma phrase :

- Je ne fessais que vous prévenir, messieurs, que je n’avais encore vu trace d’un quelconque médecin ou de son assistant en ce lieu. … J’espère que vos connaissances en domaine de médecine sont plus accrues que les miennes, car je ne connais guère que des bases et que plusieurs des articles de cette infirmerie ne sont point de mon époque.

Puis, un rire doucereux s’était élever, un rire qui malgré sa douceur était totalement déplacer, abject. Un rire qui avait et qui continue d’emplir mon âme de méfiance. Était-il sain d’esprit? Peut-être, mais si cela n‘était pas le cas, ce jeune homme devait être une bien vil personne. Ce rire, je l’avais pris en horreur et j’avais senti naître en moi un sentiment de répulsion pour ce jeune homme. Ho, Dieu sais comme il est impossible pour l’homme d’aimer tous et chacun, mais je me sentais bien obliger de conserver ma courtoisie. Une habitude due à mon travail peut-être. Une phrase qu’Eliot avait échappé était venu interrompe mes pensé au moment même où je m’étais aperçu qu’Adrien avait accélérer le pas, lui qui, quelque instant plus tôt, me demandait de ralentir :

«Je suis un … un pirate. Je … c'est pas ça qui va me tuer … Seb ...»

Le pauvre, il avait perdu trop de sang, il avait commencé à divaguer et devait être fiévreux. Seb… Sébastian? Avait-il prononcé le nom du même homme qui me vint alors à l’esprit? Je l’ignore toujours. C’est alors qu’elle était survenue : la perte de conscience. Sur un «Woah! Attention, Petite Poupée.» , un terme plutôt paradoxal puisque la "petite poupée" était un beau pirate, Adrien rattrapa celui qui allait à la rencontre du sol.

-Nous y voilà, dit-je sur un ton où filtrait mon inquiétude.

Adrien avait déposé le blesser sur un lit et laissé tomber ce qui lui encombrait les bras tandis que le jeune homme allongé laissait s’échapper des noms.
J’avais tourné le dos à eux deux pour ouvrir une armoire et en sortir des bandages propres et Il ne pourra rien redire sur ceux –ci, avais-je pensé en constatant le blanc immaculé des morceaux de tissus. Puis, les noms résonnèrent distinctement à mes oreilles.

« Ed’… Priscilla… Al’… »

Al’, je m’étais retourné prestement. Avait-il réellement prononcé mon nom dans ses délires? Me connaissait-il comme j’avais l’impression qu’il connaissait Alice, qu’il était peut-être même de sa famille? Non, ce ne devait pas être ça, cela ne se pouvait!
Mon geste avait peut-être été trop brusque, mais dans le doute j’avais refreiné mon envies de me précipiter à son chevet. Puis, mon regard accrocha celui d’Adrien, lui non plus ne devait pas avoir grand sentiment positif à mon égard.

«Bien entendu que je peux lui prodiguer des soins, mais j'aimerais que tu me rendes un immense service, pourrais-tu? Cela te plairait d'être d'une plus grande utilité pour nous?»

Lui aussi avait choisi la carte de la courtoisie, avais-je pensé.

-S’il est de mon pouvoir de m’avérer utile, je ferais mon possible pour vous apporter mon aide.

Ma réponse avait probablement laissé filtrer de la méfiance et si cela n’était pas le cas mon regard, lui, devait m’avoir trahi. Je ne savais pas ce qu’il attendait de moi à ce moment, mais je l’aurais fait, à la condition que cela était dans les limites du raisonnable, et si cela aidait Eliot en plus, j’en aurais été satisfait.