On était en été. Et Emily DETESTAIT l’été.
On pouvait lui concéder qu’une saison où le soleil se levait à 7h, se couchait à 21h et était quasiment omniprésent, cela avait de quoi l’énerver passablement (comme d’ailleurs à peu près tout, il fallait bien l’avouer : c’était assez rare qu’elle soit de bonne humeur, fraiche et dispose, surtout quand elle avait remarqué une affreuse tignasse blonde répondant au prénom de Nao le matin même).
Affalée sur le canapé, les jambes pliées sur le dossier, Emily songeait les rideaux fermés pendant que ses petits camarades barbotaient dans le lac gaiement. Juillet et ses foutues chaleurs. Elle agita sa main, pensive, et passa en revue toutes les crasses que Nao lui avait faites, tentant d’imaginer un e contre attaque – mais depuis qu’elle avait ruiné la chambre de Garry, elle n’éprouvait plus la même envie qu’avant. Elle s’était dégonflée au dernier moment, tentant d’obtenir l’absolution, et ça la révulsait. Cela l’avait vaccinée il fallait croire. Quoi que.
Ah douce Emily.

Bref, tout cela était bien emmerdant, et en plus elle s’ennuyait à en mourir une cinquième ou sixième fois – elle avait perdu le compte, que c’était difficile d’être vaguement immortelle sur les bords, hein, on perdait vite le compte des années. En plus depuis qu’elle était enfermée dans cette maison de fous, elle oublié où elle en était. Quel âge avait-elle déjà ? 18 ans ? 19 ans ? Quelque chose comme ça. Et le pire c’est qu’elle ne pouvait même pas se baser sur son âge biologique – retardement de croissance à la con, tiens.
AHHH tout ça l’énervait prodigieusement. Elle sentait ses pensées s’entrechoquer dans sa tête dans un mouvement affreusement aussi irritant qu’imprévisible, tellement elle passait du coq à l’âne en passant par le gorille et la mante religieuse par-ci, par là. Ô triste journée. Ô décadaaaaance. Elle agita ses petons d’un mouvement compulsif, comme si cela allait l’aider à chasser ces maudites pensées qui parasitaient son cerveau déjà fortement étriqué. Elle se retourna, et tapota contre le dossier.

« JE M’ENNUIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIE PUTAIIN. »

Elle aurait presque apprécié une visite quelconque. Même NAO. Ou Owen tiens. Ou même Garry, ça serait amusant. Mais tout sauf ce vide affreux qui la submergeait tel un oreo plongé dans un bol de lait. Au moins.



Comment j'ai trop écrit de la meeeeerde.

Nous étions en été. Et Nao ADORAIT l'été!
Déjà parce que c'était contraire à l'avis d'Emily, et tout ce qui est contraire à l'avis d'Emily est adorable. Mais surtout l'été, c'est la saison des petites jupes, des petites robes, des petits maillots, des jolies frimousses dénudées par une brise de chaleur, des grains de sable emmêlés dans les cheveux.
Malheureusement il n'y a pas de plage au pensionnat, et le seul aperçu qu'avait Nao de la belle saison c'est l'horrible odeur d'auto-bronzant de Garry, qui l'avait d'ailleurs plantée le matin même.
Il détestait que quelqu'un utilise sa salle de bain en sa présence, et cette idiote le faisait régulièrement, pour se venger il vidait les produits, et l'écoutait rager dans la douche quand elle ne trouvait plus de shampoing.
Aujourd'hui tout particulièrement il tenait à prendre soin de lui, changer un petit peu, la folie du mois de juin tout ça.
C'est pour cela que sieur Nao se promenait torse nu en jean dans les couloirs, des ciseaux de qualité à la main, une petite queue de cheval battant sur ses épaules à chacun de ses pas en ronchonnant "mais quelle pouffe, quelle pouffe." De plus il s'ennuyait, mais vraiment. D'habitude il y avait toujours une fille à draguer, une volatile paire de fesses à admirer en sirotant un soda allongé dans l'herbe, torturer Morgan ou un innocent dans le genre, même pourquoi pas dans le pire des cas accepter de jouer à mario avec Mail!
Et là rien.
Donc il arpentait les couloirs, à la recherche d'une salle de bain, d'un miroir, d'une coiffeuse même pourquoi pas. Ô miracle, il entendit une voix familière du salon!

S'élançant sur deux gracieuses jambes divines, Nao ouvrit la porte avec élan l'air affolé.

"MILYLADY!"

Nouveau surnom, approuvé merci au revoir. Le précédent andouille dont nous parlions se jeta par-dessus le bras du canapé, corps avenant à celui d'Emily, il se réceptionna sur les coudes posés de chaque côté de la demoiselle et la serra dans ses bras avec l'intention de l'étouffer.

"MOI AUSSI JE M'ENNUIIIIIIIIIIIIIIE"

Mais plus pour longtemps évidemment. Sa main fourra la paire de ciseaux dans la paluche d'Emily.

"Tu me coupes les cheveux? Sans m'égorger bien sûr? J'peux te faire confiance hein?"

Et le sourire éclatant du jeune homme refit apparition d'entre les morts, comme si on venait de lui annoncer que oui finalement on allait installer une plage au pensionnat.

Oh mon dieu elle lui avait tout coupé. Nao eut un petit hoquet de surprise en sentant ses mèches dégringoler le long de son dos, mais il sourit aussitôt le massacre terminé. Le problème c'est que maintenant il mourrait d'envie de voir ce que ça donnait, et se leva aussitôt d'Emily pour chercher un miroir dans la pièce.

"Oui merci, c'est vrai que ça doit te complexer de ne jamais ressembler à une fille malgré que tu te laisses pousser les cheveux, c'est bien normal que je puisse t'aider à te sentir moins coupable d'être une gueunon."

La fenêtre ferait l'affaire, Nao s'attarda sur son reflet en faisant quelques moues. Malgré ses cheveux récemment coupés à la va-vite, il lui restait un air toujours profondément androgyne qui ne lui déplu pas, en fait il se trouvait même un peu plus sexy qu'avant. Sur ce fait Nao réfléchissait à un nouveau moyen de pouvoir se faire l'amour à lui-même tellement il était beau, ça le subjuguait, quelle chance. Et pour le shampoing ça serait une bonne excuse pour le vider plus souvent, il paraitrait que des cheveux courts demandent plus de soin.
Et oui ça faisait à peine une minute que Nao avait changé de tête et tout son ego flamboyait de nouveau, c'est ça de vivre sans ennuis, on a jamais envie de tuer quelqu'un après s'être fait agresser par Jean-Louis David.
Tout en s'admirant il s'affaira tout de même à écouter Emily, et surtout à lui REPONDRE.

"La vie et bien écoute je lui ai dit bonjour ce matin ça allait, la famille, va savoir s'il y a une de mes progénitures cachés quelque part dans ce pensionnat, les amis, tu sais bien que j'en ai plein et qu'il m'aime tous car je les traite avec soin, la baise..."

Petit instant coupé d'une mini-seconde. Car la vérité c'est que oui, il n'avait pas eu le plaisir de gambader sur les plaines sacrées d'une femme depuis un petit bout de temps, pourquoi? Une question de timing peut-être, il était plus occupé à vider les produits de beauté exprès dans sa baignoire pour faire de la mousse.

"La baise est sympa elle aussi, et toussa je déteste ce mec tu le sais bien." Railla-t-il enfin pour terminer sa phrase. Il revint vers elle et s'affaissa sur l'un des fauteuils avec l'élégance d'un paresseux qui....d'un paresseux suffit comme métaphore.

"Et toi ma belle, comment vont tous ces gens chez toi? Je t'ai manqué hein?" Sourire arrogant combo petit clin d'oeil, Nao aurait définitivement pu jouer dans un soap en carton dans le rôle de Brandon le séducteur en slip kangourou.

"T'as un sérieux problème avec les noms d'animaux Mily, je sais que c'est dur pour toi encore de se ré-adapter de ta faune naturelle mais bon..."

Emily eut un petit temps de panne qu'il ne remarqua pas, durant lequel il en profita pour vérifier ses ongles et se demander si avec ses cheveux courts il arriverait toujours à imiter des mouvements l'oréal devant la glace.
Mais bon la fourbe avait la langue bien pendu, toujours, malgré tous les sentiments confus qu'elle ressentait à son égard, la pauvre rouquine aurait toujours besoin de railler Nao pour enfouir ce sentiment d'extase et d'idolâtrie et d'amour profondément douloureux à son égard (les dernières lignes sont sponsorisés par le dit Nao).

"Nom très moche? Garry?"

Dans un sens ça aurait pu être très vexant pour sa conjointe qu'il ait relevé de qui on lui parlait. Cette fois-ci il s'agaça un petit peu parce qu'il se rappela qu'elle lui tapait sur le système. Toujours à hurler, à se plaindre, à exiger ci et ça, à faire des soins aux concombres et s'étaler des tonnes de crème alors qu'elle fumait comme un pompier, elle parasitait la douche, la glace, même le lit! Pas que ça le dérangeait d'avoir une fille dans son lit, mais comme elle ne voulait pas faire quoique ce soit à cause de "ses colocataires tarés qui sont toujours là et qui même s'ils sont pas là ils pourraient venir et ça serait trop trop chiant tu vois". Donc même quand elle dormait nue elle restait couchée à pas d'heure et Nao devait la tromper dans d'autres chambres et ensuite rentrer SANS FAIRE DE BRUITS. Sinon il la réveillait et là elle recommençait à hurler à se plaindre et à exiger ci et ça "PUTAIN CONNARD TU M'AS REVEILLEE EN PLEIN SOMMEIL REPARATEUR JE VAIS AVOIR LE TEINT GRIS A CAUSE DE TOI, ET DES RIDES, DES RIDES! COMME LES VIEILLES TU TE RENDS PAS COMPTE?". Bref.

"Tu plaisantes? C'est moi qui la supporte cette pauvre cinglée! J'aime bien les pauvres cinglées c'est vrai mais là pfouuuuh, tu vois elle elle aurait même pas voulu me couper les cheveux comme tu l'as si gentiment fait."

Il lui lança un petit regard tendre, un faux bien sur, Nao est en toc ne l'oublions pas, excepté sa crinière.

"Elle me brime tu te rends compte? Bon moi aussi, mais c'est moins drôle en ce moment car elle est à court d'insultes."

« Bah oui Garry, avoue que c’est pas super sexy comme nom quand même. »

Elle écouta à moitié ses jérémiades, habituée comme pas quatre à l’entendre parler de lui, de lui, de lui et même parfois de lui ! Quoi qu’elle était mauvaise langue, parfois il changeait de sujet et parlait de ses cheveux et des divers produits de beauté qu’il utilisait. Elle attendait le jour où il lui parlerait épilation pour hurler de joie et dire qu’elle était fière de sa copine Nao-le-travelo-qui-s’assume-enfin. Bref passons (car il était presque sur qu’il s’assumait déjà). Elle fit la moue, visiblement peu réceptive aux plaintes de Nao.

« Pauvre chéri. Je te plains » fit-elle d’un ton tout à fait non convainquant, qui suintait l’ironie et l’hypocrisie aussi fort qu’un Big Mac sentait la malbouffe à plein nez. « C’est vrai que je suis la seule assez sympa pour te faire des coupes hyper sexy, tu crois quoi. Pff que ferais-tu sans moi en même temps ? »

Elle bailla et tapota l’épaule de Nao d’un geste consolateur.

« Allez t’inquiète, tu trouveras bien une autre abrutie à baiser et à emberlificoter – y’a suffisamment de meufs dans ce manoir à la con. Au pire prends des mecs, y’en a des touuuuuuuuuuuuuuuuuuuut doux. »

Elle s’appuya contre le dossier du canapé, et croisa les jambes sous ses fesses, l’air hagarde et profondément ennuyée.

« Bon, on fait quoi ? »

C'est pas qu'elle s'emmerdait à faire la parlotte, maiiiiiiiiiiiiiiiiiiis...

"Ce que je ferais sans toi? J'sais pas...j'emmerderai des géantes surement."

Oui c'est sûr qu'en l'absence d'Emily la vie de Nao perdrait un peu de piment, vu le nombre de facteurs dramatiques qu'elle apportait à ses jours.
Cela dit Garry était grande, et il se plaisait à la taquiner aussi alors qu'Emily existait. En même temps il aurait pu aussi la complimenter et être tendre avec, ce qui lui arrivait à la grande surprise de tous. Il l'aimait quand même après tout, enfin peut-être. Il aimait bien sa façon de prendre soin d'elle, ça lui plaisait de "posséder" une vraie femme, la plupart des filles du pensionnat n'étaient pas des starlettes, il y avait bien Chiara qui restait toujours présentable mais elle elle l'adorait. Et ça c'est beaucoup moins drôle pour Nao. Bien qu'il aimait Garry il ne la garderait sans doute pas si elle devenait aussi douce et aimante qu'une soeur.

"Ouais enfin c'est toutes des psychopathes, j'ai pas envie de forniquer avec des demoiselles qui pourrait avoir l'idée de me découper la peau à scalpel pendant que je m'applique à les déshabiller."

Oui bon bien sûr dans le quotidien de vie de Nao, s'approprier Garry ne rimerait jamais avec être fidèle, allez savoir s'il connaissait même le mot.

"Et les garçons...boarf un ou deux quand je m'ennuie." Ricana-t-il en songeant aux visages criblés de plaisir de Morgan lors de son petit viol improvisé. Il fallait bien tuer le temps.
Le jeune homme glissa de son perchoir vers Emily, et enroula un bras autour de ses épaules, ses doigts vinrent se promener dans l'une de ses mèches.

"Moi, j'ai une petite idée, toute petite."

Son index qui jouait avec un cheveu s'égara sur la joue d'Emily et la caressa discrètement, le regard vilainement appuyé sur sa très chère amie, il rapprocha son visage en souriant (insérez la musique des dents de la mer).

"Discuter par exemple, désormais c'était sa main toute entière qui passait gentiment sur la nuque de la jeune fille bientôt piégée, ça fait longtemps qu'on n'a pas discuté, il plaça ses jambes de chaque côté d'Emily de manière à la bloquer contre le dossier, inutile vu la force surhumaine de la petite, mais très significatif, depuis que tu as voulu énerver Garry en touchant à ses affaires en fait." Il prit cette fois la hanche, et la regardait désormais de haut en aggravant le rictus de ses lèvres. "Non?"

« Pff, tu sais très bien que les plus petites sont les meilleures. »

Elle retenait un ton amer en à chaque fois que ses paroles lui faisait penser à Garry (ce qui arrivait d’ailleurs presque tout le temps il fallait l’avouer) : elle ne la connaissait pas, mais elle la détestait quand même. Son principal défaut : s’être approprié NAO, soit ce qui est à elle. C’est d’ailleurs pour ça qu’elle détestait Petra, car c’était la seule qui avait réussi à s’approprier Morgan… Et ca ne lui plaisait pas, mais alors pas du tout. Du tout du tout. Elle n’aimait pas qu’on touche à ses jouets…

« Ahah ça me rappelle des doux souvenirs tiens… »

Geka et son scalpel. Ahah. Elle sourit lorsqu’il lui parla de garçons, et ne put retenir un rictus ouvertement moqueur en pensant à Nao et Morgan. Rictus qui se transforma très rapidement en expression de dégoût, car les images revenaient dans son esprit immédiatement – fouiller la tête de Morgan était une TRES mauvaise idée. Yurk.
Il se pencha ensuite vers elle, et ses lèvres s’étirèrent en un sourire entendu. Ce jeu, elle le connaissait par cœur.

« J’ai peur » soupira-t-elle, gardant son sourire, haussant les sourcils d’un air moqueur.

Elle sentit son index sur sa joue, glisser sur sa peau ; elle appuya son menton contre sa main, son coude appuyé contre le dossier du fauteuil. Elle entendit effectivement la musique des dents de la mer lorsqu’il s’approcha d’elle, continuant à débiter des âneries tout en s’approchant dangereusement d’elle. Hop la main derrière la nuque, pouf les jambes de chaque côté (comme si ça allait l’arrêter… il plaisantait ou quoi ?), et paf (le chien) sa main contre sa hanche. Et un rictus. Ah, ce rictus…

« Hm. C’est vrai. »

Elle approcha son visage, et laissa son sourire découvrir ses dents (pour mieux te manger mon enfant).

« C’est vrai que c’est toujours cool de discuter. »

Elle attrapa la lèvre inférieure de Nao avec ses dents, la mordillant avec douceur (non pas qu’elle voulait faire de l’effet, mais si elle lui plantait les crocs dans la lèvre, il allait lui en vouloir…) avant de la relâcher. Son regard se porta rapidement sur la main qu’elle lui avait dévorée au bal de noël, mais elle détourna la tête sans s'attarder.

« Et donc, tu veux parler de quoi ? » demanda-t-elle, un rictus moqueur sur son visage, histoire de masquer le trouble.

« Evidemment j’ai TOUJOURS raison. »

En réalité, il avait l’art et la manière de se donner raison, surtout dans ce type de situations où il se savait imbattable. Malheureusement du haut de l’arbre nommé "orgueil" où il était perché, Nao semblait oublier qu’Emily avait grandi.
Grandi et donc vécue, vécue et donc a été malheureuse, malheur égal douleur, douleur puis colère, colère et la fourberie vous accable et vous rend de plus en plus malin, en résumé elle venait de réagir avec brio avant même que le pauvre ait pu commencé un long discours graveleux qui aurait mis en scène la suite de l’action qu’il désirait amusante.

Il fut surpris ! Tout aussi surpris que ses lèvres qui par réflexe rattrapèrent la seconde en la happant, un très court baiser assez déplacé pour être mignon. Que diable de toute manière ces deux là n’avait jamais été mignon.

Nao eut tout de même besoin de réfléchir avant la suite (incroyable) ! Certes il était réduit à la vie sexuelle d’un moine mort ces temps-ci, et il y avait bien une aventure avec une ou deux écervelées de temps en temps ou des filles qui tout comme lui avaient quelques besoins naturels (non pas les toilettes merci). Ce quoi après Garry si elle le découvrait pouvait soit lui pourrir la vie, ou harceler la fille en question jusqu’à mort s’ensuive. Cependant la fille en question était Emily, nous affrontons donc plusieurs inconvénients : Emily ne risque pas de mourir étouffée par le rouge à lèvres Dior que Garry tentera de lui faire avaler en lui tirant les cheveux, Emily ne serait pas du genre coopérative pour cacher le méfait, Emily s’il se souvenait bien était maligne, et surtout Garry détestait Emily.

Elle la détestait peut-être plus même que d’avoir du sable dans les orteils, en l’occurrence il n’y a pas de sable au pensionnat, mais elle s’en plaignait quand même, enfin elle aurait été prête à brûler toute une aile du bâtiment juste dans l’espoir d’au moins lui cramer un bout de pied.

« Je veux parler de quoi ? »

Un autre problème, Nao lui n’aimait pas devenir subitement intelligent quand quelqu’un venait de le provoquer.
Il la tira contre elle brusquement pour l’embrasser, il n’en avait pas spécialement envie, c’était juste pour faire monter la tension, ses doigts se perdirent sous un pan de vêtement, effleurant juste son ventre. Sa deuxième main, la blessée, caressa avec cruauté sa joue du côté de la cicatrice, exprès ou non ? Il venait de retirer ses lèvres mais demeurait toujours le souffle aussi proche que celui d’Emily, du moins si elle en avait un.

« La flemme de parler avec toi, ça mène toujours aux insultes. »

Soupira-t-il en passant le bout de sa langue entre eux, oui Nao est très élégant on le sait, autant qu’une limace en rut (ça bave de partout).

AHAHA elle l’avait eu ! Il était surpris le petitou. Tellement surpris qu’il l’embrassa légèrement, de façon toute mignonne d’ailleurs, et Mily faillit s’étrangler – elle s’y attendait pas non plus, arroseur arrosé. En parlant de vie sexuelle, non en fait il vaudrait mieux taire celle d’Emily car elle était relativement aussi plate que celle de Nao à 11 ans (quoi qu’il ne faudrait peut être pas parier là-dessus, car on pourrait être affreusement surpris...), on se contentera donc de dire que les gens avaient du mal à forniquer avec une naine rousse suceuse de sang. Au bonnet A, qui plus est. Bref.

« Ben j’en sais rien moi, j’suis pas dans ta tête (encore heureux) ! »

Tout d’un coup, subitement, sans prévenir, Nao la tira vers lui et l’embrassa de façon inopinée. Elle laissa glisser ses bras le long du dos de Nao, attrapant sa nuque, tandis que l’une de ses mains s’égarait sur son ventre – frissons, et l’autre… sur sa joue. Elle sentit une irrégularité contre sa peau, et se figea totalement, jetant un coup d’œil en biais sur sa main. Le salaud. Elle sentait toute la tension redescendre d’un coup, bim comme une phrase malheureuse quand il ne faut pas. Il resta proche d’elle, l’incendiant légèrement et passant le bout de sa langue entre eux. Elle sourit, et l’attrapa avec sa propre langue (et oui Emily respire), la tripota quelques secondes, rapidement, avant de la laisser tranquille.

« Hééé, t’es injuste là ! continua-t-elle. Ca fait au moins 10 minutes que je t’ai pas insulté, et la dernière insulte c’était « sale pingouin », genre ça te fait maaaaaal dedans toi ! »

Elle fit la moue, ne cessant de jeter des œillades à la main mutilée de Nao. Elle tapota machinalement la nuque de Nao avec ses doigts, avant de tripoter ses cheveux du bout des doigts. Elle se remémorait sans cesse le Bal de Noël dès qu’elle voyait Owen (très peu souvent vu qu’elle l’évitait), Petra (très peu souvent vu que PETRA l’évitait), Nao (très peu souvent parce que… elle évitait Garry) ou Morgan (très peu souvent… ah non merde elle était sa seule amie, donc souvent). Elle grommela, et releva les yeux vers Nao.

« Okay, j’ai un sujet moi. Pourquoi le bal de Noël ? »

Ses mains s'étaient liées l'une à l'autre derrière le dos d'Emily de la manière la plus chaste possible pour Nao (cad : sans la toucher), mais c'en était pas moins pour cela qu'il ne songeait pas à continuer.
En effet le jeune homme plein de vigueur et de désir commençait à reconsidérer son projet, celui bien sûr de s'attaquer plus franchement à l'effeuillage de la charmante donzelle. Bien que Nao ne lui ait jamais précisé après des années de concubinage, il la trouvait charmante la petite, et pour cause : elle l'était de plus en plus.
Son air mutin d'enfant capricieux et intenable persistait sur les traits de son visage qui n'était pourtant pas moins dessinés avec générosité dans des lignes souples et régulières, son teint opale acceuillait poliment les mèches rouges bataillant sur son front et s'écoulant le long de ses joues. Il se mit à l'imaginer maquillée, avec du rouge brûlant ses lèvres par exemple, ou même un peu de rose sur les joues comme si elles s'étaient enflammés après une folle étreinte, et des vêtements plus aguicheurs peut-être. En fait Emily n'aurait pour rien au monde sans doute porter des vêtements "aguicheurs", ou ça aurait été dans son style, quelque chose de déchiré, court, sauvage, un mini-short et un débardeur moulant? Pourquoi pas de la lingerie même. Non tout cela ne lui plaisait pas finalement, c'était divertissant à imaginer mais pas plaisant, l'emballage après tout ça se jette, Nao préféra alors commencer à penser à la manière dont il aurait retiré n'importe quel vêtement entravant sa conquête du corps dénudé de la demoiselle. Oh oui ça tout de suite ça éveillait d'avantage l'imagination, Emily nue et offerte son air fier se décomposant, ou au contraire pressante et dominatrice.
A ce stade on peut se douter que Nao écoutait à peine ce qu'elle racontait même s'il en avait l'air, il passait déjà dans sa tête un très bon moment quand soudain...

"gnagnagna bal de noël?"

Hein quoi? Oh non...
Emily venait de tenir l'exploit de calmer les ardeurs imaginatives de Nao. Il la toisa soudainement agacé et ouvrit la bouche comme pour répondre. C'est vrai qu'il venait peut-être plus ou moins de la provoquer, il s'en voulu aussitôt car elle attaquait trop vivement dans le sujet. Ce maudit bal. Heureusement Nao, professionnel du masque et de la pirouette, fendit de nouveau son visage en un large sourire.

"Ta question ne veut rien dire ma petite chérie, il doit manquer un verbe non? C'est comme si je te disais : Pourquoi les bananes? On en sait rien après tout. Que voulais-tu dire? Pourquoi le bal de Noël était-il un pur moment de bonheur? Est-ce que j'ai aimé les petits fours? Combien de fois je suis passée aux toilettes pour me remaquiller? Est-ce qu'Eva et Ritchie ont finalement baisé dans les toilettes? Pourquoi personne n'a dansé avec toi? Est-ce que ça se mange? A quelle on dine? Non attends!"

Brusquement ses doigts se refermèrent sur la bouche de la rouquine, son regard se fit effrayé, il mimait avec virtuosité une terreur absurde déformant son beau faciès.

"Pourquoi c'était une soirée terriblement horrible pour moi, et est-ce que ça m'a vraiment fait mal de te voir arriver avec un pitoyable cavalier caricature exacte de l'élève modèle qui se masturbe en cachette sur des photos de petites filles ligotées se chevauchant sur des chevaux en fer et que par-dessus tout tu me manges à moitié une main et me laisse en plan pendant que je hurle de douleur dans ma chambre en me doutant que PEUT-ETRE éventuellement tu sois en train de te faire baver dessus et ensemencer par ton...petit ami? Alors que moi je pouvais à peine me branler car ma main se consummait à cause d'une morsure de sauvageonne? Voyons..." Il la ressera contre lui. " Non ça ne devait pas être ta question après tout!" Et son coeur que malgré tout il possédait le trahissait en sonnant à grand coup dans sa poitrine.

Emily écoutait avec un sourire la première partie du discours de Nao, bien qu’agacée. Elle sentait qu’il évitait ce putain de sujet, comme il le faisait toujours : il ne faisait que fuir. Elle aussi, elle fuyait, elle fuyait les hostilités au maximum… Sauf quand ça concernait Nao. Pour lui, ou plutôt pour elle, elle aurait découpé Garry en morceaux, elle l’aurait vitriolée rien que pour pouvoir le récupérer. Elle le voulait pour elle toute seule, ça tout le monde le savait. Parce que sans lui, elle était perdue, seule au monde, abandonnée, inutile dans ce maudit manoir. Ah, surprise ? Emily aurait elle un besoin maladif de Nao ? Non, vous croyez ? Elle était enchaînée à lui comme un sautoir à sa chaîne, comme une putain de fiancée qui attendant son amoureux à la guerre*. Elle fit taire cette maudite voix dans son esprit, qui la torturait avec des sentiments qu’elle ne voulait plus éprouver. Elle le voulait pour elle-même, par pur égoïsme, elle n’en avait pas besoin, voilà fin de l’histoire.
Il continuait ses conneries, ce débit insensé de futilités qu’il semblait ne pas pouvoir arrêter. Puis il attaqua enfin le vif du sujet. Violemment, Emily sentit tous ses mots marteler sa poitrine, sa cage thoracique, s’entrechoquer entre ses côtes et lui pincer les poumons. Elle avait envie de lui hurler dessus, de lui arracher son visage avec ses ongles, et puis tiens de lui ôter ses ongles un à un, pour les lui faire BOUFFER. Elle l’entendait insulter Owen, de plus en plus fort, mais ça elle s’en fichait ; maintenant, c’était elle qu’il insultait, comme si elle l’avait abandonné, comme si elle l’avait laissé mourir dans sa chambre, comme si elle n’en avait rien à foutre de lui…
Il la serrait contre lui, comme un amoureux transi, et elle sentait son cœur s’agiter comme un oisillon. Comme s’il l’aimait, comme s’il voulait se faire pardonner de ses paroles. Sauf qu’elle n’allait pas le pardonner.

« TA GUEULE ! » hurla-t-elle, jetant sa main libre contre sa joue, sentant ses doigts s’écraser contre sa peau d’albâtre.

Elle tremblait, secouée par les émotions, par ses sentiments qui s’engouffraient dans sa tête et violentaient son cœur, qui battait aussi rapidement que celui de Nao. Elle le serra contre elle, le plus fort qu’elle pouvait, l’empêchant de se dégager si toutefois il le tentait.

« Ta gueule, ta gueule, mais ta gueule putain ! Arrête de dire des conneries comme ça, t’es qu’un gros con qui m’a laissée tomber pour une pute blonde incapable de penser à autre chose qu’à son maquillage ! Et puis le coup du « oh mince je me suis entaillé la main en forme de cœur juste pour que tu me bouffes », c’est bon hein ! C’est de TA faute, la sauvageonne elle y est pour rien ! Va te faire foutre putain, j’en ai marre de tes conneries, j’en ai marre d’être la petite Mily aux surnoms débiles à qui c’est toujours la faute, j’en ai marre que tu me traites comme une gamine et qu’en plus ça soit toujours de ma faute ! T’es qu’un con putain ! A ton avis, ma soirée elle a fini comment hein ?! Owen il est allé se faire foutre, cet abruti même pas capable d’assumer que sa copine soit une foutue vampire MERDE QUOI ! Et l’autre con de Morgan avec qui tu couches et qui essaye de buter une autre abrutie, c’est cool, merde, je suis entourée d’abrutis, j’en ai marre, t’es le seul qui compte pour moi et pour toi je suis qu’un putain d’objet juste bon à t’amuser cinq minutes, MAIS VA TE FAIRE FOUTRE NAO PUTAIN TU M’EMMERDES J’EN AI MARRE DE TES CONNERIES ! »

Elle le serrait fort, fort, son étreinte se resserrant à chaque phrase, elle essayait de le retenir contre elle, pour qu’il ne s’enfuit plus, pour qu’il arrête de l’abandonner à chaque fois qu’il se trouvait une jolie fille pas trop chiante et avec laquelle il pouvait baiser tranquille.

« Me laisse pas tomber putain… »


(Long dimanche de fiançailles RPZ)

Et Emilya caressa avec tendresse la joue de Nao. Oui c'était bien une caresse comparé à l'afflux de violence des paroles qu'elle lui déversait à la figure. Il touchait sans y penser son visage comme si une quelconque douleur y persistait, mais en réalité toute son attention restait pour une foix portée sur les déclarations de son amie, si on pouvait appeler ça une amie. Ils passaient un temps fou à se condamner et à s'accuser tout de même, et la vérité ressurgissait toujours péniblement avec dégout de leurs lèvres qui se cherchaient encore depuis des années.
Nao vit la douleur s'élever en égérie sur le visage d'Emily, il percevait toute la peur s'entremêlant dans sa haine, et lui même eu soudain très peur qu'elle se mette à pleurer. Apeuré et surtout brûlant d'une colère qui lui fouetta le cerveau? Se foutre d'elle? Oui certes c'est l'impression qu'il avait toujours préféré lui donner, mais elle n'y croyait pas réellement tout de même? Les années défilèrent sous ses yeux, le seul instant de tendresse qu'il avait su donner à cette fille avait été un coït qu'elle ne voulait pas réellement, une étreinte égoïste et désespérée un jour où elle avait cru être délaissée.
Nao écouta sans broncher, son sourire ne se défit pas, mais son regard ne cillait plus, et malheureusement, il ne pu étouffer un rire.

"Un simple objet? Te laisser tomber? Mais enfin Emily je t'ai déjà abandonnée maintes fois."

Aucune tendresse, le mépris parlait pour lui, qu'elle était agaçante à vouloir toujours quelque chose de sa part, à répéter qu'il n'était qu'un salaud sans coeur et sans âme qui ne l'avait jamais considérée. Sa main se referma sur l'épaule de sa victime.

"Ouais je te traite comme une enfant tu ne vas quand même pas me le reprocher, c'est pas ma faute si tu ressemles toujours à une môme, et je supporte très mal les enfants, c'est pour ça que tu ne m'amuses pas plus de cinq minutes, c'est toujours la même chose tu finis toujours par péter un cable, t'avais qu'à trouver quelqu'un d'autre qui compte pour toi que le pauvre salaud que je suis. Tu sais très bien que j'en ai rien à foutre de toi et tu continues de me courir après, c'est ridicule." Nao débitait sans émotion transparaissant son visage, une impassabilité curieuse le revêtait, quelque chose n'allait pas. "Et l'autre t'as laissé tomber en plus? Franchement ça m'étonne pas, il avait l'air trop propre sur lui pour pouvoir te supporter plus de cinq minutes, je tiens un temps record en fait pour quelqu'un qui ne t'aime pas le moins du monde, c'est que ça reste marrant de se foutre de toi, et ..."

Et sa joue rougie par la gifle apaisait sa douleur sous la douce humidité de la larme qui venait de griffer le long du visage de Nao. Pas une en fait, plusieurs suivirent chemin. Et il fondit en pleurs.
Il n'y arrivait plus, il n'arriverait pas à finir sa phrase, le jeu était trop dur à tenir cette fois, il ne comprenait pas pourquoi. Sa tête s'écroula contre l'épaule de la jeune fille, sa voix se brisait en des sanglots inconnus à quiconque, horriblement sonores, il tremblait douloureusement.

"Putain tu penses vraiment tout ça?" Articula-t-il péniblement entre le feu qui lui barrait la gorge.

Des années à s’hurler dessus, à se haïr, à se pardonner, à se retrouver. Des années à s’aimer. Des années à l’aimer. Et il lui écrasait les morceaux de son cœur exsangue, par son rire moqueur. Il le lui brisait, il le lui arrachait. A chaque mot, elle sentait son orgueil mourir une énième fois, morcelé et détruit avec précautions par Nao, le seul qui pouvait la forcer à se haïr, à avoir des regrets, à avoir des remords. Il n’était pas si merveilleux, pourtant. Il n’était pas gentil, pas respectueux, pas loyal, et encore moins fidèle. Il l’avait abandonnée des milliers de fois, elle s’en était vengée autant qu’elle le pouvait, et pourtant elle était là, pendue à son cou comme à une bouée dans une mer déchaînée. Elle sentait sa main mordre son épaule, la contrôler, la manœuvrer. Ses poumons allaient exploser, elle le sentait, Emily sentait le nœud grossir et grossir jusqu’à prendre toute la place.
Elle ne pouvait plus respirait. L’air ne venait plus, et plus il continuait, plus elle tremblait. Fini le courage, finies les apparences, une nouvelle fois il avait tout déchiré comme il déchirait le vêtement des donzelles. Tout était fichu, et cette fois, elle le savait, elle n’arriverait plus à faire semblant de rire avec lui. Owen l’avait laissée tomber, mais ça elle s’en foutait, c’était lui qu’elle avait toujours voulu. Elle avait 19 ans, oui, ça faisait six putains d’années qu’elle n’arrivait pas à se détacher de lui. Et il était en train de l’assassiner.

Il s’arrêta net dans son massacre, stoppé par une goutte d’eau salée minuscule et inutile. Emily releva la tête, et elle ne vit que ça. Elle vit la deuxième, et puis toutes les autres, et elle vit sa fierté se détruire devant elle. Sa tête s’entrechoqua contre son épaule raide comme son corps, figée dans un moment qu’elle n’arrivait pas à comprendre.
Il pleurait, putain. Il pleurait.
Elle sentait ses joues la tirer, ses yeux la piquer, ses mains trembler, son cœur la lâcher. Putain, elle aussi, elle était en train de rejeter ces six ans de jalousie, d’orgueil, de tout ce qu’on voulait. Blottis l’un contre l’autre, ils ressemblaient à deux animaux en quête de chaleur, se serrant fort fort fort. Elle laissa glisser sa tête dans le creux de son épaule, sa poitrine serrée contre celle de Nao.

Est-ce qu’elle pensait vraiment tout ça ? Ou alors est-ce que ce n’était que des frissons d’égoïsme et de haine mal contrôlés ? Elle pleurait de plus en plus, incapable d’arrêter cette chute dans laquelle il l’avait entraînée, comme toujours. Ils se tiraient toujours mutuellement vers le fond.

« Non » laissa-t-elle échapper, incapable d’en dire plus, de s’expliquer, de n’importe quoi.

Elle voulait tout lui dire, qu’il comptait tellement pour elle qu’elle pourrait tuer Garry de jalousie, qu’elle était attachée à lui depuis six ans, six ans pendant lesquels elle avait essayé de l’oublier, de passer à autre chose, de s’amouracher de quelqu’un, de faire n’importe quoi qui pourrait la sauver. Tout avait échoué, ses tentatives de se persuader qu’elle pouvait l’oublier, qu’il n’était qu’un ami, qu’elle n’avait pas besoin de lui, qu’elle était indépendante, qu’elle pouvait se rire de lui sans arrière pensée, qu’elle pouvait le remplacer, ignorer leur rencontre, tout effacer, tout oublier. Mais que sans lui, ces six ans l’auraient tuée, son enfermement, la perte de tout le monde, qu’il était le seul à avoir toujours été là à sa façon, à la haïr peut être, à l’attirer dans ses filets dégénérés, à la déguster avec de la haine profonde, mais qu’au final, elle l’aimait putain, c’était lui qu’elle avait toujours aimé, haï, désiré, détesté, envié, jalousé, ignoré, que c’était pour lui qu’elle avait dépéri, pleuré, hurlé, vécu.
Mais ça, elle lui avait déjà dit une fois. Elle voulait l’entendre, putain, qu’elle était importante pour lui, qu’il l’aimait, n’importe quoi, que même si il couchait avec n’importe qui il pensait quand même à elle parfois, qu’elle n’était pas remplaçable, qu’elle était chiante mais que c’était elle, la gamine sans poitrine, l’égoïste, la fille détériorée qu’il préférait aux autres. Juste une fois. Qu’il lui dise, juste une fois.
Sa gorge était bloquée, elle n’arrivait pas à dire quoi que ce soit. Alors elle le prenait dans ses bras, avec une douceur maladroite, comme si elle n’avait jamais été enserrée par autre chose que de l’affection ou de l’amitié, passant ses doigts sur sa nuque.

« Aime-moi » lâcha-t-elle finalement, comme un ordre suppliant.

Non bien sûr elle ne le pensait pas. Il ne se sentit pas pour autant rassuré, d'ailleurs pourquoi paniquait-il? Son esprit se tortuait pour comprendre, mais la vérité lui échappait. A force de porter tant de masques et de désinvolture Nao ne distinguait plus le vrai du faux et le faux du vrai. La seule réalité en fait qu'il percevait en ce moment-même c'était cette jeune femme dans ses bras, l'accompagnant dans une scène des plus dramatiques orchestrée par des sanglots terrifiants. Finalement il avait bien réussi à la faire pleurer, mais les souvenirs se brouillaient dans sa mémoire, ça n'était sans doute pas la première fois non?
L'ordre fusa des pauvres lèvres blêmes d'Emily, supplique qui tira Nao de sa noyade occulaire, il eut un sursaut pour seulement deux mots.
Aimer? Savait-il seulement comment? Le cher narcisse n'avait aucune idée de s'il avait vraiment su un jour prouver une quelconque forme d'amour à une de ses conquêtes, de son couple avec Garry il ne faisait que ressortir magnifiquement les mauvaises joies du concubinage : les parfums des autres filles laissés sur sa chemise qu'il retirait négligemment sur le lit où était couchée une compagne qui ne voulait que très rarement lui abandonner son corps, et avec qui il préférait les joies de s'entre-détruire plutôt que le bonheur du havre de paix d'une union.
C'est ça qu'elle voulait peut-être Emily? Qu'il la traite plus mal encore? Il eut envie de lui poser la question mais se ravisa, pour une fois un semblant de raison lui parvint. La vérité c'est qu'il ne l'avait jamais bien traité, depuis six années et pas une seule fois il ne fut plus tendre avec elle que le jour où il la dépucelait égoïstement dans un temple car elle ne savait plus quoi lui donner pour le garder auprès d'elle. Il l'ignorait mais ne supportait pas qu'un autre l'effleure, elle lui appartenait non?

Nao saisit entre ses deux mains le visage épris de tristesse, il le dévisageait presque abasourdi. Les deux derniers mots prononcés par Emily résonnaient sourdement dans ses oreilles, elle posait là un sacré problème. S'il refusait il y avait de fortes chances pour que l'un d'eux finisse par passer à travers une des fenêtres, mais s'il acceptait, il n'aurait jamais su comment lui prouver son bon vouloir. Et oui car Nao était un fin comédien, mais comment voulez-vous mimer d'aimer quelqu'un si vous l'appréciez déjà de trop? Elle ne le croirait pas, il était profondément mauvais et ne pourrait s'empêcher de la torturer, il le savait et cette perspective le terrifiait. Bien sûr il n'avait jamais ignoré sa nature vicié qui ne cessait d'empirer au fil des années d'enfermement, le rendant de plus en plus libertin et immoral, mais tout de même, il ne pouvait se résoudre à l'idée de la consummer.

"Emily, je peux pas faire ça." Sa réponse frôlait le gémissement plaintif, sa respiration se calmait et de nouveau il lui faisait face calmement, les yeux encore rougis, son sourire tremblait encore un peu. "Je ne saurai jamais te donner ce que tu veux vraiment,d'ailleurs je n'ai jamais réellement donné quoique ce soit à personne, je n'ai aucune idée de comment le faire et..."

Oh ventre saint gris mais qu'est-ce qu'il racontait là? Un éclair de lucidité le ranima : il n'allait tout de même pas tourner la scène en mélodrame de série B. Non il ne s'en arrêterait pas là, il avait bien une dernière chose en tête pour ne pas tuer l'être tant adoré.

"Pardon."

On ne s'attardera pas sur cet événement incroyable qu'est le Nao s'excusant, oeuvre novatrice dans toute l'histoire du pensionnat et je me permets d'ellipser aussitôt sur la suite.
Ses doigts pressèrent son visage contre le sien, il l'embrassait encore, mais cette fois quelque chose avait changé. Ses lèvres se rattachaient sans cesse à celles d'Emily, entre ses baisers on entendait sa voix murmurer une excuse pour chacun d'eux, et ses bras l'enlaçaient si fort qu'on aurait pu penser que les corps allaient se confondre. Il cherchait sans doute dans cette étreinte, à la garder pour lui, elle devait lui revenir, elle était trop belle pour un autre, ça aurait été du gâchis. Il haïssait profondément en cet instant tous ceux qui avaient pu tenter de la lui dérober, il avait beau être le plus mauvais d'entre tous, jamais lui n'aurait voulu se débarrasser d'elle comme eux l'avaient ostensiblement fait. Et sans vous mentir, Nao n'avait jamais si bien embrassé quelqu'un de sa vie.

Elle se noyait. Dans le sel de ses larmes, qu’elle commençait à bien apprivoiser puisque Nao l’avait fait pleuré tant de fois qu’elle était incapable de savoir pourquoi à chaque fois. Elle se noyait dans ses propres poumons qui la brûlaient, qui l’étouffait presque, alors elle se recroquevillait sur lui, elle se noyait dans ses cheveux blonds. C’est alors qu’il prit son visage, et elle voyait son visage surpris entre ses larmes. Quoi ? Il ne s’y attendait pas peut être ? Il s’imaginait qu’une fille pouvait se laisser malmener pendant six années pour autre chose ? Elle avait eu son masque d’adolescente susceptible et goguenarde, mais c’était fini tout ça. Elle n’arrivait plus à le porter, il l’avait trop secouée, trop malmenée, c’était le point de non retour. Le point zéro. C’était là, maintenant, que tout se décidait, si l’un d’eux allait effectivement se défenestrer, ou si…

Je peux pas faire ça. Elle fut électrisée par ces mots et un frisson la parcourut. Il gémissait, mais il arrivait à se calmer, à lui sourire même. Elle non. Ses doigts saisirent ses épaules, et elle s’y cramponnait plus qu’elle ne les caressait. Elle s’en foutait de ce qu’il lui racontait, qu’il ne la rendrait jamais heureuse ou quoi que ce soit. Elle le savait, qu’elle ne devait pas attendre qu’il soit tous les soirs dans son lit, qu’il la traite comme une reine, qu’il l’enserre dans ses bras et lui demande pardon à chaque fois qu’il la maltraitait. Elle s’agrippa de toutes ses forces à lui, s’accrochant à celui qu’elle adorait.

Pardon. Surprise, elle relâcha totalement ses épaules, et larmes qui s’étaient taries naquirent de nouveau. Elle s’effondra contre lui, passant ses bras minces autour de son cou, l’attirant contre elle. Et puis ce fut lui qui la saisit, qui l’embrassa. Et entre chacun de ses baisers, il s’excusait, encore, encore. Si bien qu’elle pleurait de plus en plus, humidifiant leurs baisers qui prirent bientôt un goût salé, se pelotonnant contre lui à chaque mouvement. Elle savait que ce n’était pas pareil que d’habitude, qu’il était plus doux, qu’il était là, qu’il ne pensait pas à la prochaine fille qu’il prendrait dans ses bras. Il pouvait la prendre, la faire sienne tout de suite, elle n’aurait pas dit non. Elle reniflait entre chaque baiser, puis prit le crâne de Nao entre ses deux petites mains, l’écartant de son visage.

« Arrête. » Un ordre une fois encore, mais toujours suppliant et tremblant. « S’il te plaît, arrête de t’excuser, arrête de me fuir, si t’as jamais donné c’était quoi ça ? »

Une phrase sans insulte, sans moquerie, sans ironie, sans morgue. Elle avait oublié tout ce qu’ils avaient pu se dire auparavant, ses cris, sa haine, elle avait tout enfoui tellement profondément qu’elle ne savait même plus où c’était. Elle appuya son front contre le sien, les yeux baissés vers leurs cuisses entremêlées. Ses doigts chatouillaient les mèches de cheveux qu’elle lui avait coupées, et elle renifla une nouvelle fois.

« Nao, moi je t’aime. »

C’était dit. Tant pis, elle craquait encore une fois la première, et son visage se faufilant dans la nuque de Nao pour l’embrasser, la picorer, ne semblait pas regretter quoi que ce soit. Son corps se pressait contre le sien, contre ce corps qu’elle n’avait plus vraiment effleuré depuis des années, qu’elle n’avait vraiment connu que pour garder l’homme auprès d’elle. Elle avait toujours craqué avant lui de toute façon.
Elle remontait sa gorge avec ses baisers, et fini par l’embrasser encore une fois, s’accrochant désespérément à tout ce qui pourrait lui rester. Quoi qu’il se passe, elle aura été la reine pendant quelques minutes.

La sentence venait de tomber, quelques mots et c'en était déjà terminé de la relation qu'ils entretenaient depuis plusieurs années. Quelle idée suicidaire avait-elle de réduire à néant ses façades, en avouant bêtement l'inavoubale réalité, la vraie,comme si cela aurait pu être libérateur pour eux. L'avantage des mensonges c'est qu'il y en a toujours beaucoup à raconter, la vérité est solitaire, c'est pour ça que d'habitude elle reste discrète ou cachée.Par malheur Emily en ce moment-même avait jugé bon de la faire sortir de sa tour, dans l'attente d'une autre révélation pour l'accompagner.
Mais restons réalistes, voici comment les choses se déroulèrent :
Nao ne pipait plus un verbe, d'abord parce qu'il était trop occupé à faire jouer ses lèvres avec celles de sa camarade, ensuite parce que sa dernière phrase lui otait toute réplique. Le point de non-retour se présentait dangereusement sur sa voie, et tous les choix semblaient très mauvais. Elle l'aimait? Non ce n'était même pas ça, elle avait précisé que ELLE précisemment était amoureuse de lui, ce qui très inderectement lui demandait qu'en était-il pour lui. Honnêtement, il lui aurait été plus facile de promettre de ne pas respirer pendant une minute plutôt que d'oser lui répondre, il risquait beaucoup trop de phrases inutiles si jamais il s'y tentait.
C'était bien pour cette raison complètement bidon que Narcisse continuait inlassablement d'embrasser quelqu'un d'autre que son propre reflet, elle l'aimait? Cela signifiait qu'il la possédait encore plus qu'il n'aurait pu l'espérer, bien sûr qu'il n'ignorait pas totalement l'affection de la jeune fille pour lui, mais là elle venait de la lui confirmer, et étrangement il n'y ressentait aucun plaisir de victoire.

Les larmes du blond roulèrent à nouveau sur sa peau, pour une fois il souffrait. Souffrait à cause de la tendresse qu'il détenait malgré tout, qui lui rongeait actuellement les entrailles de culpabilité et d'un dégout de lui-meme. Dégout de son incapacité à l'aimer normalement, c'était presque pire que l'impuissance.
Tout se mélangea dans sa tête, dégoulinant sur ses pensées, la haine qui éclaboussait l'adoration, l'envie enveloppant le dégout, la douleur vomissant sur le désir, il eut une nausée intellectuelle.

"Attends." Sa bouche se dégagea de la sienne, encore une fois il la contempla de face. Ses doigts cependant glissaient audacieusement vers ses hanches, qu'il saisit impétueusement pour la rapproche de lui, leurs deux fronts collés. On emploie à tort et à travers l'expression "dévorer du regard", ici Nao l'illustrait avec brio; il souffla lentement. "Je ne te laisserai pas, je ne t'abandonnerai à personne car..." Son visage s'enfouit alors dans la chevelure vermeille d'Emily, il tenait reculé son torse du sien pour qu'elle ne puisse pas sentir son coeur marteler sa poitrine, les mots flottaient dans son esprit insaisissables, si bien qu'il ne pu terminer sa phrase qu'ainsi: "...Tu es à moi."

On ne saura pas si c'est qu'il désirait vraiment lui dire, mais son attitude ne prouvait pas le contraire : Nao promenait ses baisers le long de la gorge d'Emily, jusqu'a sa poitrine, et sa main serrait fortement son épaule tandis que l'autre se faufilait sur sa cuisse. Il bouillonnait, son cerveau lui brouillonait le peu d'informations encore compréhensibles : je te veux, je te veux complètement..."Ma Emily." ce furent les seuls deux mots qui s'échappèrent du désordre.

Il l’avait toujours possédée – elle n’avait jamais voulu l’admettre, elle disait que c’était lui qui était sien, mais au final c’était pareil. Ils s’appartenaient mutuellement, comme dans un couple, et ce depuis des années. Ils s’étaient déchirés à cause de ça, de leurs liens brisés par des pièces rapportées dans leur histoire, et ils s’étaient aimés. Maladroitement, parfois ils s’aimaient eux-mêmes plus qu’ils n’aimaient l’autre, mais c’était ainsi. Elle était appuyée contre le dossier du canapé, elle l’avait enserré de ses jambes et de ses mains, elle l’embrassait sur la joue, le cou, la bouche.
Et puis il pleurait, encore. Elle le faisait pleurer. Étrangement ça ne la rendait pas triste, pas curieuse. C’était presque une pointe de fierté, d’être celle pour qui Nao pleurait. D’être celle à qui il tenait, car il ne pouvait plus lui cacher à présent. Elle était toujours la reine.
Attends. Il rompit leurs baisers nébuleux, et la regardait encore. Ce n’était plus les regards dérobés de moquerie, les œillades mesquines ou complices : cette fois il la voyait vraiment. Elle se laissa guider, laissa son bassin se rapprocher du sien, leur front se rencontrer. Elle sentait son souffle, l’air qu’il expirait trop vite pour être calme contre son menton. Il se rapprochait d’elle, et son cœur devenait erratique, incapable de se contrôler. Elle le sentait s’agiter comme un oiseau s’agite dans une cage, et elle posa sa main sur son visage.

Je ne te laisserai pas. Tous ses muscles se tendirent, son visage pâle s’embrasa et la naufragée releva la tête vers l’avion qu’elle entendait au loin. Dis-le. Elle le laissa s’enfouir dans sa chevelure, se penchant en arrière pour accuser le choc. Dis-le. Elle plaqua ses mains sur son dos, la partie de son corps qu’elle voyait le plus souvent finalement, et s’y cramponna, tandis qu’il terminait sa phrase. Dis-le. Dis-le…
Mais elle le savait déjà. Elle était à lui. Elle le savait déjà… Ses muscles se raidirent, avant de s’abandonner à leur souplesse pour laisser sa tête glisser contre la sienne, ses cheveux touffus se noyant dans les siens. Elle avait envie de pleurer. Sa gorge se serrait, s’enflammait elle aussi, la brûlait de déception. Elle voulait hurler, mais le cri mourut dans le nœud de sa gorge. Qu’il baisait, qu’il voulait aimer pendant que ses mains partaient ailleurs. Elle les sentait sur son corps comme des hématomes naissants, et elle avait envie de les arracher, de lui hurler de la laisser tranquille.
Aime moi, aime moi, aime moi… Je t’en supplie, aime moi.

Abrutie par toutes les pensées qui s’engouffraient dans son esprit, elle n’arrivait même plus à pleurer. Elle voulait Nao. Elle le sentait contre elle, plus pressant qu’avant encore. Il la voulait, après avoir refusé de lui dire qu’il l’aimait. Il la fuyait, comme toujours.

« Arrête de me fuir putain… »

Les paroles se perdaient dans sa gorge, elle n’arrivait plus à réfléchir normalement, à aligner deux pensées vraisemblables dans son esprit embrumé. Elle ne voulait juste pas être une parmi d’autres. Elle voulait être autre chose.

« On va baiser, et après ? » Elle pleurait, ça y est. « On va faire comme la dernière fois ? » Maintenant elle plantait ses ongles dans son dos. « Tu vas partir en me laissant toute seule », elle n’arrivait plus à articuler, « et après on fera comme si de rien n’était ? »

Aime-moi.

« Dis moi que c’est moi que tu préfères… »

Visiblement le dramatisme de la scène ne s'en irait pas de si tôt. C'était bien sa faute, maintenant qu'il avait lâché prise quelques instants, il devait rester dans le filet poisseux et mélodramatique de cette scène encore un moment.
"Arrêter de la fuir", bon sang quelle égocentrisme, ce n'est pas elle qu'il évitait particulièrement, mais le monde entier. En effet, quel intérêt à attendre après quelqu'un? A toujours être honnête et plein de bons sentiments. Un jour ou l'autre on se lasse la gentillesse du saint et on souhaite que tout s'entre-déchire, que les voix vibrent, les murs tremblent, et qu'on se délecte de voir que le bête attachement qui nous lie permet de pousser de plus en plus loin la souffrance.
C'est l'avantage qu'il devait trouver à s'approprier Garry, pourquoi perdre son temps à s'endormir dans un état statique de tendresse alors qu'on inventait bien plus de tensions. Et il lui fallait rester honnête avec lui-même : il ne changerait pas, il n'y arriverait pas.
Cette perspective cependant était la raison de l’affaissement de son sourire normalement si railleur, également de son mutisme devant le débit hachuré d'Emily qu'il trouvait soudainement beaucoup plus raisonnée que prévu. Il retint un soupir par peur de la vexer. De la vexer? Il faisait donc bien attention à elle, pourtant il désirait n'en faire qu'à sa tête. Le choix à faire devenait de plus en plus éminent : se plier aux suppliques de la demoiselle? Ou reprendre son courage à deux mains et redevenir celui qu'elle aimait tant haïr?
Nao se mit à penser que s'il tentait de s'adoucir comme un agneau l'intérêt que Nao lui portait ne durerait pas de si longtemps, pourquoi irait-elle encore après lui courir après s'il venait de lui-même manger dans sa menotte. C'est sur cette idée remplie de mauvaise foi que le jeune homme commençait à établir sa pensée.

"Si tu n'étais pas celle que je préfère, je ne passerais pas mon temps à justement éviter de te traiter comme les autres." Siffla-t-il un peu agacé qu'elle le condamne autant, certes ces attentions ne se profilaient pas vers quelque chose de très pur, mais du moins il espérait encore qu'elle puisse croire qui le faisait pour un autre sentiment que celui d'assouvir ses pulsions. Tant pis pour la vérité, il lui claque la porte au nez et elle partit valser jusqu'aux tréfonds de son âme dans un sombre "pouf".

"Déjà arrête de t’agripper à moi comme ça, je ne partirai pas je te dis. Je n'ai pas énormément de moyens de te montrer ma bonne conscience. Mais tu peux t'appuyer sur le fait que je sois encore là alors je viens de m'effondrer sous tes yeux et que tes demandes auraient fait fuir n'importe quel athé." En même temps n'importe quel croyant aurait préféré se défenestrer en apprenant qu'une vampire se tenait auprès de lui, en fait Emily ne risquait pas d'attirer grand monde à part lui.

Il décroisa délicatement les grappins qu'elle avait planté dans son dos, et la fit s'allonger le long du divan en se positionnant au-dessus d'elle. Ils étaient proches, et ses mèches mal coupées taquinaient la peau de marbre de la jeune fille, il essuya ses larmes du bout des doigts. Elle rayonnait d'une d'une pâleur maladive, cela lui étreint la gorge, bien qu'elle prétendait l'aimer la seule émotion qui l'inspirait en sa présence ressemblait d'avantage à la pire des douleurs.

"On ne va pas baiser, j'en ai aucune envie." A ce stade les éventuels lecteurs et fervents suiveurs des aventures Naoesques pourraient s'insurger d'autant d'absurdités. Un Nao qui refuse de commettre l'acte de chair? Pourquoi pas un Pensionnat Interdit avec des sorties libres au marché le dimanche.
Pas de panique, il ne faisait que préparer la suite de sa phrase."Par contre j'ai très envie de te faire l'amour." Et son délicieux sourire de fourbe s'étendit -non pas sans difficultés- sur son visage. Etait-ce vrai? Balançait-il cette phrase emprunt d'un romantisme douteux dans un but moins reluisant. Personne ne le saura à part lui.

"Ne t'y trompe pas Emily, je ne me moque pas de toi, c'est vraiment ce que je peux te donner de mieux...je ne sais faire que ça de toute manière."

Ses lèvres se déposèrent sur son front, parcoururent le long de sa joue jusqu'à son oreille, les mots ne se bousculaient pas dans sa gorge, trop hésitants.

"Je ne ferai rien du tout si tu me le demandes." Par contre je ne ferai pas tout ce que tu me demanderas.