Besvar… !
Solo
a porte s’entrebâilla, laissant entrer une giclée de l’air froid du monde extérieur, et une silhouette menue se glissa dans l’ouverture avant de refermer derrière elle. Adossée au battant, Leia soupira et passa une main dans ses cheveux d’un rouge profond, pestant intérieurement contre la pluie qui l’avait poussée à entrer là alors même que l’heure tardive et les bonnes manières interdisaient toute intrusion dans la demeure de parfaits inconnus.
La jeune femme resta contre la porte un moment, écoutant le tapotement de la pluie à l’extérieur du bâtiment en tentant de percer l’obscurité de la pièce par une succession de coups d’œil. Elle n’avait pas très envie de ressortir ; après tout, ce qui l’avait conduite ici n’était rien d’autre qu’une profonde envie de fuir. Si elle rentrait chez elle maintenant, que dirait-elle à ses parents ? A ses frères ? Que pourrait-elle se dire à elle-même, en croisant son reflet dans un miroir ?
Au mieux un mensonge, comme toujours. Affirmer que tout allait bien. Tout allait toujours bien.
Malgré tout, elle ne pouvait pas rester là, dans une propriété privée dont le détenteur ne manquerait pas de la chasser à vue. D’ailleurs il était étonnant que son intrusion n’ait encore déclenché aucun système d’alarme. Etonnant que la porte ait été ouverte, tout simplement. Il était certainement plus prudent de ressortir, quitte à affronter l’averse ; elle ne manquerait pas de trouver refuge ailleurs.
Forte de cette décision, Leia s’écarta de la porte et se retourna pour l’ouvrir… mais à la pression de sa main sur la poignée ne fit écho que le bruit du loquet poussé. La Norvégienne la secoua plusieurs fois en vain, puis s’écarta d’un pas pour contempler la porte. Fermée. Avait-elle déclenché un mécanisme de sécurité en l’ouvrant ? Si elle ne pouvait plus sortir, cela allait poser problème.
Elle allait devoir s’adresser au maître des lieux. Super.
« Il y a quelqu’un ? » Leia s’arrêta dans sa volte-face et porta une main à sa bouche, alors qu’une fois de plus sa langue demeurait désespérément sourde à ses appels. Comme morte, dès qu’elle voulait prononcer un mot. Et à chaque fois, la jeune fille avait l’impression que la phrase rejetée allait dégringoler dans son estomac comme une lourde pierre. Elle ne s’y ferait jamais.
L’adolescente fit quelques pas dans la pièce et les lumières s’allumèrent… comme par magie. Elle promena son regard sur tout le décor, découvrant avec surprise un environnement ancien auquel elle n’était pas du tout accoutumée. Leia tourna deux fois sur elle-même, repérant plusieurs portes, et s’interrogeant sur la marche à suivre. Puis son regard tomba sur le panneau d’affichage, tranchant par son austérité sur le reste du décor, ce qui semblait clairement indiquer qu’il n’était pas là par hasard. Faute de mieux, et espérant y trouver un indice, Leia s’en approcha et parcourut les différents messages des yeux. Chaque ligne qu’elle lisait lui parut plus invraisemblable que la précédente, et à la fin de sa lecture elle ne pouvait que convenir que toute cette histoire était absolument délirante.
Mais cependant, avec un certain étonnement, elle ne parvint pas à ressentir plus de déni que cela. Juste un sentiment d’acceptation assorti d’une grande lassitude. Elle aurait dû se révolter, elle se connaissait assez pour le savoir… mais en cet instant, elle était juste pleine de fatigue et de pessimisme.
Si c’était ainsi, et malgré l’énormité de la chose elle n’arrivait pas à en douter, alors que pouvait-elle faire ? S’il était impossible de s’échapper, alors elle n’avait plus qu’à rejoindre ceux qui avaient été pris au piège ici et chercher une solution avec eux. Si tant est qu’elle veuille ressortir bien entendu… après tout, ne s’agissait-il pas plutôt d’une opportunité pour tout recommencer à zéro ?
Leia chassa cette idée de son esprit avec un sourire. Non, les souvenirs ne s’effacent pas si facilement. Les mensonges non plus. C’était ainsi, cela ne changerait pas. Peut-être même que cette nouvelle mésaventure n’était encore qu’une punition bien méritée.
Enfin. Si elle continuait ainsi, elle allait finir par se retrouver persuadée qu’un inéluctable destin régissait son existence. Ce n’était pas vrai, n’est-ce pas ?
En attendant, faute de mieux, la jeune fille fraîchement prisonnière jeta un dernier regard à la porte close et se dirigea vers l’escalier, dans l’intention de rejoindre les étages et tenter de trouver quelqu’un pour lui expliquer ce qui allait désormais lui arriver.