Glamorous Space Muffin

« La situation est critique, mon amiral. Nous sommes envahis. »


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Se rendre à l’évidence. Accepter la situation saugrenue, sans issues, dans laquelle il se trouvait. Considérant tous les facteurs qui la composaient, son frère toujours à l’école, la lettre de Dominique qui trainait sur son bureau, ainsi que le panneau de mise en garde siégeant à l’entrée qui s’était bien vite vu accompagné d’une dame théâtrale, on pouvait juger cela impossible. Il fallait être sacrément prétentieux pour passer outre et se dire que tout allait bien se passer, qu’il fallait d’abord apprivoiser son nouvel environnement et garder les réflexions pertinentes pour plus tard, momentanément fermer les yeux sur le noyau problématique de la situation. En plus d’être prétentieuse, ce genre d’attitude ne convenait absolument pas à un professeur de littérature, qui se devait de promouvoir l’esprit critique et l’usage de la pensée en tout temps, qui devait se pourlécher de la possibilité d’intelligence et la prioriser à la possibilité de bien être.

Castiel, modèle exemplaire qu’il était, avait choisi de passer outre, quittant bien vite la jeune femme aux longs cheveux d’ébène qui l’avait accueilli pour partir en quête de distraction, pour aller explorer les tréfonds cet espèce de gros manoir vieilli semblant tout droit sorti d’un bouquin désuet. Dès lors avait-il dépassé l’arche qui menait hors du hall d’entrée jusque dans un labyrinthe de couloirs complexes qui semblaient s’enchevêtrer les uns contre les autres, se pressant et désorientant sans qu’on puisse y faire quoique ce soit, le jeune enseignant s’était donner pour mission de trouver les points de repères cruciaux de ce lieu sordide ; c’est-à-dire une source de nourriture, une source d’eau et un recoin tempéré où il ne se heurterait pas au froid. Les nuits devaient se faire glaciales dans un bâtiment aussi lugubre.

Sa ‘mission’, qui, nous en conviendrons, s’avérait davantage être une tentative de concentrer son esprit à des tâches immédiates plutôt qu’à l’échafaudage et l’extrapolation de théories et hypothèses qui le rendraient nerveux, avait rencontré un succès relatif lorsqu’il avait pénétré dans ce qui semblait fort bien être une cuisine. Une cuisine un tantinet crasseuse, mais paraissant comporter tous les artéfacts nécessaires à son bon fonctionnement, artéfacts qui possédaient, contre toute attente, une forme de modernité qu’on soupçonnait mal habiter le manoir. Un réfrigérateur jauni dont s’échappait un vrombissement tranquille, un four dans un état similaire, dont la lumière interne clignotait piteusement. Bon, oui, le tout présentait un portrait vaguement glauque, mais ça ferait l’affaire. Les gouttes d’eau tombant posément hors de l’extrémité du robinet qui trônait au dessus du lavabo révélaient la présence d’eau courante et le pain qu’on avait laissé traîné sur un bout de comptoir parlait de lui-même. Il y avait à boire, à manger et il pourrait se servir du four lorsque la nuit tomberait.

Le seul hic de l’endroit, un petit détail qui semblait faire une trentaine de centimètres de diamètre, s’avérait être un drôle de gâteau couvert de crémage dont la couleur oscillait entre le rose et l’indigo et dont la texture semblait terriblement huileuse, gélatineuse. On l’avait laissé, car il n’était pas arrivé là tout seul, reposer près du pain, un peu trop plus près du bord du comptoir que du fond.

Bon, à priori, une pâtisserie colorée n’avait rien de bien étrange ou dérangeant, le fait d’être à ce point criarde lui valait même des points, la rendait plus appétissante. En fait, ce qui perturbait Liliann était davantage le fait qu’elle semblait respirer, un son s’apparentant soit à un ronflement ou à un ronronnement s’extirpant doucement de ses confins. Il n’avait pas immédiatement tilté, avait passé de longues minutes à farfouiller tout autour, dénichant des œufs et du fromage dans l’un des électroménager, ainsi qu’un reste de bacon durci sur l’une des plaques du four, avant de s’arrêter devant le dessert. Il s’était penché vers l’avant, se moquant mentalement de sa crédulité et avait tendu l’oreille.

Ce qui nous ramène au regard perplexe qu’il lançait à la nourriture, non, à la chose, usant d’un vieux bout de bacon pour l’effleurer légèrement, testant les eaux, cherchant à savoir si elle était dangereuse ou non.

« Mais . . . qu’es-tu exactement, toi ? », murmura-t-il, absorbé dans sa contemplation.

Entre des caméléons dotés de paroles et les expériences farfelues régulièrement réalisées par ses élèves, Castiel estimait être difficilement surprenable. Pourtant, il devait avouer ne jamais avoir auparavant posé les yeux sur une telle créature.

Eh bien.