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| Du même côté du miroir [ Petra ] | |
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| Sujet: Du même côté du miroir [ Petra ] Dim 13 Déc 2009 - 22:42 | |
| Il se toisait, il était partout, placardé sur tous les miroirs de la pauvre salle qu'il n'avait jamais fréquentée. Il était partout, à se regarder sans se voir. Sans plus jamais vouloir se voir. Il ferma l'oeil, espérant dissiper les images que son esprit repassait en boucle pour mieux les assimiler. Lui qui voulait les oublier, pour que tout reprenne sa marche normale. Pour que tout soit comme avant. Ne s'était-il pas promis quelque chose, alors qu'il entrait dans sa chambre pour se changer ? Allez, c'est décidé ! Je le lui dis. Un look pas trop extravagant, pas trop sobre non plus... Un peu de couleur, peut-être ... Du parfum ? Un cadeau à lui offrir ? Trop cliché. Allez, c'est décidé, je me change, et je lui avoue. Dans le couloir, il mimait déjà les manières qu'il pourrait adopter pour le lui dire. Elle devait aimer l'excentricité, à moins que ce ne soit le spectaculaire, ou tout simplement le sobre? Allez, il ne dirait que les trois mots, ce serait déjà assez dur comme ça. Déjà qu'il avait mis longtemps à se figurer qu'il pouvait penser ces mots au sens propre du terme à propos de quelqu'un, plus qu'Emily, plus que tous ces autres humains sans importance. Petra, un peu limitée, Petra, un peu alcoolique, Petra, tellement compatissante, Petra, lui ayant redonné goût au sourire, Petra, tellement fascinante. Il l'aimait, voilà tout.
Et le miroir de l'illusion s'était brisé. Il avait vu. Il avait crié, desarçonné. Et il avait fui, parce que c'était la seule solution que ses jambes lui proposaient, même si son coeur aurait voulu rester près d'elle, et l'entendre dire que c'etait pour de faux, et la croire naïvement. Le miroir s'était brisé et les voilà par dizaines, intacts, devant ses yeux abîmés par les multiples erreurs de sa vie. Il s'était appuyé pour ne pas tomber, et il observait le miroir devant lui. Qu'avait-il entendu, pendant sa fuite? Son nom, non ? Ne l'avait-elle pas crié pour le retenir ? Ne voulait-elle pas lui dire quelque chose, justifier un acte, l'effacer, afin que tout redevienne comme avant. Sur son chemin. La charette avait fait une embardée, et avait terminé dans le fossé. Mais il voulait y croire. Il devait y croire. Ce qu'avait crié Petra en abandonnant la compagnie de l'inconnu dans le propre lit du borgne devait forcément être une justification.
Etait-ce un gage ? Etait-ce la meme situation que celle dans laquelle Nao l'avait plongé ? Il devait FORCÉMENT y avoir une solution. C'était obligé. Regarde ce miroir, il n'existe pas. Rien n'existe, d'ailleurs. Rien n'existe plus, dans le déni que Morgan essayait de tisser autour de lui, fermant les yex pour mieux se figurer qu'il n'avait fait qu'entrevoir Leonardo. Oui, voilà, c'était Leonardo. Ou Sindy. Ces mèches roses... Enfin, il avait du mal voir, de toutes manières.
Mais la porte s'ouvrit, et découvrit les mèches roses. Ses mèches roses. Comment l'avait-elle trouvé, ne faisait-ce pas des heures qu'il contemplait son regard vide dans les miroirs tout aussi creux de la salle la moins fréquentée du pensionnat ? A moins que cela ne fut des minutes. Ou des secondes. Le temps passe vite, quand on se morfond, pour changer.
« Petra... » dut-il articuler pour se rendre compte de la triste vérité. Sa lèvre inférieure trembla de peine, deformant la voyelle finale. Il ne fit pas vraiment part de ses sentiments à voix haute, gardant la déception, la jalousie et la colère sous jacentes pour lui, convaincu que si elle l'avait suivi, laissant cet homme insigifiant, c'est qu'elle avait choisi sa voie ! C'est qu'il avait plus de significaion que lui. C'est qu'il y avait une explication, et qu'il pourrait enfin prononcer les mots qui brûlaient ses lèvres. Il réussit même à esquisser un sourire de fierté et de dedain envers ce pauvre type qui n'avait pas réussi à lui soustraire Petra. Il avait la foi, Morgan.
Le pauvre borgne se redressa, bien sur ses deux jambes, ne voulant pas paraître trop pitoyable, trop dépité, trop déçu, ou trop déconcerté. Mais son oeil voulait tout dire. Pourquoi ? Que se passe-t-il ? N'as tu pas promis quelque chose, en m'embrassant dans la cave, ce jour là ? N'as-tu pas ouvert une possibilité ? L'aurais-je ratée ? Aurais-je fait un faux pas ? Mais quelque chose en lui savait bien que cela risquait de ne pas finir en un baiser timide ou passionné. Que la méprise et la haine avaient des chances de dominer les minutes suivantes. C'est effrayant ce que le monde est calme, avant.
« Tu ne retournes pas t'amuser avec ce type ? Vous sembliez... très bien partis, n'est ce pas ? Ca va, mon lit est confortable ? » maugréa-t-il. Tant pis, c'est le coeur, jaloux à en mourir, qui avait parlé.
Dernière édition par Morgan Poulenc le Mer 16 Déc 2009 - 20:17, édité 1 fois |
| | | Sectaire iguano-stellairienne Petra Traümer
+ Pseudo Hors-RP : Mooney • Age : 29 • Pouvoir : Persuasion • AEA : Marmotte la Marmotte • Petit(e) ami(e) : EMRYS SULWYYYYYYN <3 RP en cours : LA VIE EN ROSE (Claris Linden) Messages : 1647 Inscrit le : 09/11/2008
| Sujet: Re: Du même côté du miroir [ Petra ] Mer 16 Déc 2009 - 20:00 | |
| Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil. Quand il y a une bouteille d'alcool dans les environs, bien sûr. Sinon, les gens sont ternes, moroses, ennuyeux, totalement inintéressants. Mais une fois que l'alcool se mêlait à son sang, Petra les trouvait géniaux. Elle avait trouvé Noctim génial, par exemple, en le rencontrant. Elle l'avait aussi trouvé génial en parlant avec lui. Elle l'avait trouvé encore plus génial lorsqu'ils avaient réellement fait connaissance. Génial de A à Z. Merci qui ? Merci la palinka et ses copines ! Sauf que l'alcool, parfois, nous fait oublier. Des petites choses, des détails insignifiants. Sa veste, la couleur des cheveux de quelqu'un, l'endroit où se trouvent les clés. Mais il arrive que l'alcool décide de vous arracher des éléments importants. "Oh ! J'avais totalement oublié que j'étais mariée, quand je t'ai dragué hier soir ! Désoléééée" "Zut ! Le vase où j'ai vomi tout à l'heure a une valeur inestimaaaaable ! "Ah mince, on vient de faire shalala dans la chambre de Morgan !" Vous comprenez ce que je veux dire. Ce n'était pas la première fois que l'alcool avait joué avec les souvenirs de Petra. Il y avait déjà eu la cave, avec Morgan, passée au tip-ex par endroits. Il y avait toutes ces nuits où elle n'avait pas dormi, dont elle ne se souvenait pourtant pas. Il y avait aussi cet affreux vernis jaune bonbon sur les ongles de ses orteils. Il y avait aussi eu les sauts en parachute depuis la tour du château -mais ça, c'était plutôt à cause du choc occasionné par la rencontre de son crâne sur un tronc d'arbre. Mais jamais les plaisanteries de l'alcool n'avaient eu de telles conséquences. Un baiser en l'air, baiser dans les airs, beaucoup de dissolvant ou avoir mal au crâne durant plusieurs jours n'étaient rien en préparation de ce qui allait arriver à la petite Petra.
Elle avait mit du temps à réagir. Elle avait clairement vu la porte s'ouvrir, une silhouette y apparaître. Mais elle n'a rien fait. Elle n'a rien pu faire. C'est comme lorsque l'on voit un verre tomber de la table, durant un repas. On voit le drame venir, mais on n'a pas le temps d'agir. Pas le temps de réfléchir. On voit tout, mais quand on se précipite pour tenter d'arranger les choses, c'est déjà fini. Ce fut la même chose pour Petra. Elle vit Morgan. Alors qu'elle était en train de faire ce qu'elle faisait avec le grand balafré. Mais aucune réaction, sur le coup. Ce n'était que lorsqu'il cria puis quitta la chambre en courant qu'elle commença à agir. D'abord, un cri. "Morgan". Le voile que l'alcool couvrait sur son esprit venait de se déchirer, brusquement. La vision de son meilleur ami, profondément choqué par son comportement, avait eu l'effet d'une véritable lame de couteau sushilandais. Puis elle se leva du lit du borgne et se mit à courir à sa poursuite. Sans prendre la peine de se rhabiller. Elle n'eut que le temps de prendre le grand drap blanc et de l'enrouler sous ses aisselles, pour s'improviser une robe de fortune, qui trainait derrière elle, ne s'arrêtait pas de glisser sur sa peau nue, se défaisait sans arrêt. Mais elle n'avait pas le temps pour trouver autre chose. Elle hurlait dans les couloirs.
"Morgan ! Morgan ! Attends ! Je vais tout t'expliquer ! Je suis désolée !"
Cela ne servait à rien au fond. Il était en train de la semer, et il ne voulait pas se retourner de toute façon. Putain de putain de putain de putain. C'était son meilleur ami. Et c'était franchement deg' et pas lol d'avoir fait shalala dans son lit, avec un autre type. Mais putain, ce n'était pas non plus un drame, quoi. Dans quelques mois, peut-être même quelques semaines seulement, elle en était sûre, ils riront bien, ensemble, de cette histoire. "Et c'est comme ça que Petra a couché dans mon lit, mdr !" Mais le Morgan avait franchement l'air de le prendre très très très très mal, pour le moment. Putain de putain de putain de putain.
Petra aurait bien fait un crochet par la cave à vin, prendre un peu d'alcool, pour tenir le coup. Des arcs-en-ciel de peace-and-love se seraient alors déployés sur les tapisseries glauques du pensionnat, et la situation lui aurait parut beaucoup moins désespérée qu'alors. Mais elle ne pouvait pas. Elle ne devait pas. Il y avait des choses bien plus importantes, pour le moment, que ses foutues boissons. Dont une, avec un seul œil, qui se barrait quatre à quatre dans les escaliers. La jeune fille aux cheveux roses le vit bifurquer peu après être arrivé au deuxième étage dans une pièce, sans doute choisie au hasard. Il fallait qu'elle le rattrape. Mais elle était épuisée. A force de crier le nom du jeune homme, ses poumons s'étaient trop vidés. A force de détaler pour suivre Morgan, son cœur battait trop vite. Elle n'en pouvait plus. Juste quelques minutes, quelques secondes de repos. Rien que ça. Petra s'arrêta, se mit dos au mur et se laissa glisser au sol, comme une masse. Elle respirait fort, trop fort, pour faire face à la confrontation avec Morgan qui approchait d'elle au galop. Elle suffoquait presque. Oh qu'elle avait mal. C'était une douleur terriblement physique, celle d'avoir couru trop longtemps et trop vite, dans une tenue absolument inappropriée. Mais aussi une douleur psychologique, vive, brûlante. Morgan souffrait. Par sa faute. Et ça lui faisait mal. Putain de putain de putain de putain. Fallait qu'elle arrête l'alcool.
Une fois à peu près remise de sa course, Petra se releva, réajusta le drap qui couvrait son corps et commença à marcher vers la porte où étais passé Morgan. Elle n'était jamais allée derrière celle-là. Elle était dans le coin des portes cheloues : celles où il y avait des choses bizarres derrière, parfois traumatisantes. La jeune fille y touchait pas. Oh, qu'elle avait peu envie de pénétrer dans cette pièce. Elle ne voulait vraiment pas savoir ce qui allait la trouver. Et elle n'avait pas envie de faire face à Morgan. Elle avait peur de sa réaction, de ses paroles. De ses pensées même. Elle avait peur de lui. De son meilleur ami. Allez, on va faire un détour par la cave à vin se chercher une bouteille de courage à 90° ! Non ! Pas d'alcool ! Pas maintenant ! Allez, si... Ce n'est pas si compliqué et ce sera plus facile... Non non non ! La conscience et les envies de Petra se déchiraient... L'adolescente fit un pas en arrière, un pas en avant, posa sa main sur la poignée en métal doré de la porte, l'enleva. Un pas en arrière, un pas en avant. Sa main sur sa poignée, sa main plus sur la poignée... Ce cirque dura dix minutes. Dix minutes cruciales où Petra hésitait, de plus en plus terrorisée par ce qui allait lui arriver. Elle finit par inspirer un grand coup et abaissa la poignée. Elle allait y aller calmement, s'excuser auprès de Morgan, nettoyer les draps trois ou quatre fois puis refaire son lit. Et ce serait fini. Ce n'allait pas être si dur au fond. Après tout, c'était son meilleur ami. La porte s'entrouvrit, lentement. Petra poussa légèrement le bois dont elle était constituée pour pouvoir entrer. Pouned. Elle ne s'attendait pas à cela. Des miroirs. Que des miroirs. Des milliers de miroirs. Un dédale de miroirs. Et Morgan était quelque part à l'intérieur. Elle commença à explorer la pièce, tâtonnant, en quête du borgne. Et elle finit par le trouver.
"Morgan, je..."
Pas le temps d'aller plus loin. Le jeune homme se leva et la fixa de son unique œil. Son terrible unique œil, rempli d'un elle-ne-savait-quoi affreux. Une sorte de mélange de haine, de jalousie, de dégoût et de désespoir passés au shaker. Et il lui parla. Petra cru qu'elle allait se briser en mille milliards de morceaux. Le ton était désagréable. Il n'étais pas particulièrement agressif, mais il était désagréable. Vraiment désagréable. Et ses mots. Ses mots terribles. Chaque mot était une pointe acérée qu'il envoyait en direction du cœur, de la conscience et de l'âme de Petra. Et ce n'était que le début. Elle le sentait.
"Morgan, je... je..."
Tout le beau discours qu'elle avait préparé avant de pousser la porte de la Salle des Miroirs éclata en morceaux. Elle se sentait soudainement démunie face au regard et aux mots de Morgan. Son meilleur ami... Putain de putain de putain de putain. Elle s'effondra au sol. Comme ça. Sans crier gare. Elle n'était pas évanouie, non. Juste qu'elle n'en pouvait plus. Déjà. Elle avait retrouvé le jeune homme il y a à peine cinq minutes, que déjà, elle craquait. Que pouvait-elle répondre à ses mots ? Que pouvait-elle répondre à ça ? Alors ses jambes avaient craqué et l'avait fait tomber sur ses genoux, au sol. Des larmes commençaient à apparaître aux coins de ses yeux. Son meilleur ami. Elle s'enfouit le visage dans ses mains. Elle ne voulait pas qu'il la voie pleurer. Pleurer, c'était lui montrer sa faiblesse. Pleurer, c'était montrer que ses affreux mots gagnaient sur elle. Mais de toute façon, ça ne servirait rien : il remarquerait bien qu'elle pleure. Dans un sanglot, elle finit pas dire quelques mots. Ces mots, elle les dit plus pour elle-même que pour Morgan. Elle les dit même que pour elle, au fond. Elle ne les dit pas très fort, elle ne les dit pas de façon audible pour que le borgne l'entende et la comprenne. Non. C'étaient plus des pensées qui traversent votre bouche car vous voulez les rendre concrètes, comme pour faire une promesse à vous-même.
"Faut vraiment que j'arrête l'alcool." |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Du même côté du miroir [ Petra ] Mer 16 Déc 2009 - 23:01 | |
| Vu que c'est tout ce qu'il était capable de faire, Morgan crachait son venin, pénible serpent qui ne fait que vous paralyser les jambes et dont on a tôt fait de se débarrasser. Son esprit embrouillé transcrivaient des mots aussi clairs que l'eau de roches, articulés avec la précision robotique dont il s'enveloppait chaudement lorsqu'il n'avait plus les idées claires, et lorsque les mots pouvaient toujours tenir lieu d'apparence. C'était pratique, dirions nous. Ses paroles, jetées à la figure de Petra comme on jette un cadavre à la mer, brisèrent le regard que la jeune fille lui lança en entrant dans la pièce. Les regrets gravés sur ses pupilles s'imprima sur la sienne. Elle n'était pas venue pour rien. Elle n'était pas venue en accusatrice. Elle était venue en fautive, en coupable, en connaissance de cause, et il l'empoisonnait plus que de raison. Elle était venue pour lui.
Il la regarda, partagé entre culpabilité et animosité. Leurs regards se croisèrent un instant, mais ni l'un ni l'autre ne sembla avoir la force nécessaire de soutenir celui de l'autre et se détournèrent en même temps, en même temps que la conscience de Petra s'écroula, en même temps que celle de Morgan vacilla, emportée par son choc. Elle balbutiait des débuts d'explications, sans trouver quoi que ce soit d'évident, sans dire la formule magique qui aurait tout arrangé. Allez, dis moi que c'était une erreur, que tu es désolée, que tu ne recommenceras plus ! Je pourrai te pardonner, je pourrais enfin conclure ! Trouve quelque chose. N'importe quoi. Même la plus improbable des excuses. Mens. Et je te croirai. Et je vivrais dans cette ombre, dessinée contre l'oubli.
Il l'encourageait en sourdine à briser cette ambiance qui ne faisait que lui en rappeler d'autres, douloureuses à sa mémoire. Et encore une fois, il était celui qui cherchait la solution miracle, quand les motivations étaient bassement humaines, inexplicables, inexcusables. Quand tout n'était que stupre, inconscience, bêtise, de sa part ou de celle des autres. Les mêmes qui avaient gâché tant de choses qui auraient pu porter les fruits des valeurs propres à sa misanthropie. Les mêmes qui avaient gâché sa vie. Encore une fois, il était le naïf. Petra, vaincue par sa colère froide et par son incapacité à y répondre, s'agenouilla. Brisant toute lueur d'espoir. Il n'y avait bel et bien pas d'explications valables. Même les plus décevantes. Elle aurait pu dire aimer cet homme. Elle aurait même pu dire attendre Nao pour faire un plan à trois dans la chambre deux. Elle n'avait rien dit.
Le borgne assista à son effondrement, n'ayant pas la force d'esquisser le moindre geste vers elle. Qu'avait-il choisi ? Qu'avait-il fait ? Pourquoi elle ? Pourquoi ses mèches roses, sa bêtise, sa luxure, son alcoolisme, sa superficialité, son humanité, pourquoi elle, pourquoi pas une autre, et pourquoi pas personne ? Mille personnes auraient pu satisfaire son coeur, malgré leurs imperfections. Et elle, concentré de ce qu'il haïssait, ressemblant de plus en plus au Nao qui avait arraché le peu de fierté qui lui restait, à la Kim lâchant leur promesse mutuelle pour des batifolages, à la mère trahissant son enfant. Et toujours, il s'éprenait des pires personnes. Et il leur appartenait. Et il commençait à tout leur pardonner. Comme il pardonnait Petra de boire, de se conduire comme une idiote, d'être une idiote. Comme il pouvait de nouveau la pardonner, d'avoir commis quelque chose qu'il ne pouvait même pas appeler adultère. Elle ne devait pas comprendre grand chose à sa colère. La seule faute qu'elle aie réellement commise était d'avoir pris son lit pour une maison close. Il allait peut-être un peu loin dans la crise de nerfs en solitaire. Peut-être avait-il un peu tort...
Morgan hésita, avant de se baisser légèrement. Une courbette de roseau, se penchant jusqu'à mimer le familier saule pleureur, avant de redevenir petite grenouille. Accroupi devant la victime de son ire, il garda ses distances, incapable de tendre une main vers elle. Suspicieux. Encore méfiant. Sachant, au fond, que mettre du scotch sur une voile n'empêcherait pas le bateau de sombrer. Petra, le visage entre les mains, sanglotait, murmurant des mots qu'il ne comprit pas. Des explications, peut-être, de vaines explications trop tardives pour être crédibles, même dans son coeur, transi d'amour aveugle. Sa tignasse rose, emmêlée, était déjà, de vue, souillée par le contact purement matériel de cet homme qui en tous points lui était étranger. Elle sentait le vice, elle respirait son odeur, à lui. Un instant, le fier Morgan vacilla. La meilleure solution serait peut-être de renoncer à tous ses principes, de s'emparer de son épaule nue, de l'embrasser, de s'emparer de ses lèvres et de faire en sorte que cette horreur qui imprégnait son corps disparaisse. Une fois ses pensées clairement formulées, il les nia en bloc, renonçant à son droit de parenté. Avant de les accepter. Ce n'était plus comme avant, semblait-il. Il fallait s'y faire. Même si la possibilité qu'il venait d'envisager était à exclure. Le borgne focalisa son regard sur son visage, évita soigneusement le tracé courbe de sa poitrine. Le temps de l'innocence était bel et bien terminé.
Il posa la main sur l'épaule, conformément au plan cité plus haut, dans un but bien plus innocent. Plus imprécis, aussi. Peut-être se revoyait-il avec elle, dans la cave, après qu'elle l'aie fait rire, à lui débiter des niaiseries sans nom, à lui jurer qu'un lendemain existait, et a la forcer à sourire à son tour, elle qui fut grisée par le mal du pays. Sa pauvre main anormale, sa pauvre main maigrelette dont les six doigts effleuraient timidement la peau de la triste élue de son coeur. Perdu.
Le silence s'éternisait, à présent. Si il ouvrait la bouche, il avait bien peur que mille serpents en sortent de nouveau. Si il restait silencieux, il avait bien peur que la situation ne s'enlise définitivement. Et le voilà de nouveau à ne pas savoir que faire, à choisir entre deux routes, à freiner les pulsions humaines, désir comme violence qui souhaitaient parler à la place de sa raison, encore vaillante. Il n'était plus en face de Nao qui faisait ce qu'il voulait de lui. Il était en face de … Il ne savait plus. Allez, il allait pardonner. Ce n'était pas grave. Cela pouvait être réparé. Il attendrait simplement quelques jours, semaines ou mois de plus avant de déclarer sa flamme. Il essaierait d'autres moyens pour la convaincre, pour lui faire comprendre qu'il pouvait être l'homme idéal pour elle ! Qu'il fallait lui laisser sa chance. La main du misanthrope serra affectueusement l'épaule de Petra, comme pour la rassurer, avant de la retirer doucement. Il regarda la jeune fille, comme si c'était la dernière fois. Il ne comprit pas bien ce sentiment, mais eut tôt fait de le saisir lorsque, mue par son inconscient, la gifle partit, colorant la joue de Petra d'un feu des plus vifs. Il resta hébété un instant. A ne pas comprendre la signification de son geste. Il était partit tout seul… Il n'avait pas… Et Petra qui allait… Il fallait se donner une contenance, et en un stupide reflèxe de fierté, Morgan se redressa, surplombant son amour de toute sa hauteur.
« E…Espèce d'idiote ! »
C'est tout ce qu'il trouva à dire pour justifier son geste. Oui, bon, une petite engueulade, un coup, ça n'avait jamais fait de mal à personne. Il aurait simplement dut abstenir ses sentiments de s'exprimer par la suite. Il aurait simplement dut taire son ego et excuser son geste.
« T.. Tu ne respectes rien à rien ! Tu t'amuses, hein ? Ce type, c'était qui ? Tu viens de le rencontrer, il te plaisait, du coup, une petite partie de jambes en l'air, c'est ça ? Est-ce que tu connais son nom, au moins ?! Ah, il te l'a peut-être dis, mais tu étais trop bourrée pour le retenir, c'est ça ? Espèce d'inconsciente ! Tu es complètement abrutie, ou quoi ? Ou aveugle, c'est ça, aveugle ? Le vin t'es monté a la tête ? Ta copine Sindy, sinon ? Ou alors ta teinture ? Tu… tu ne remarques rien, tu ne vois pas que… que ça peut faire mal ?! E-E-enfin moi ca fait rien mais.. mais il y a des gens qui… Crétine ! »
Il devait avoir craqué. Ces mois étaient de trop. Ces mots étaient de trop. Ce geste était de trop. Morgan avait débuté bas, avant de finir par crier, comme il ne criait jamais, comme il n'avait jamais crié, laissant libre cours à toutes les frustrations, en se dévoilant plus qu'à moitié, en se dénudant, misérable, présentant à la face du monde le pauvre hère rendu fou d'amour qu'il était devenu. Agressant des questions du mari jaloux et de la femme trompée la pauvre Petra.
« Et dans MA chambre, en plus ! Qu'est ce que tu attendais… Qu'est ce que tu voulais… Je… je dois comprendre quelque chose dans cet amas de... de... de cette maudite lubricité, qui me suit PARTOUT ?! »
Sa mère. Kim. L'enfermement. Le bal. Nao. Petra. Quelque chose s'était cassé. La chaîne de son malheur était loin d'être terminée, mais les maillons cèdaient, faibles. Lointaines étaient les paroles qu'ils échangeaient à la cave. Déjà lointain était son sourire, car il avait franchi le point de non retour.
Souris à la vie ! Sois heureux ! Allez ! disait-elle. Souris, et tu verras, tout ira déjà bien mieux, disait-il.
Tout était déjà hors de portée. |
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| Sujet: Re: Du même côté du miroir [ Petra ] Jeu 17 Déc 2009 - 22:14 | |
| Tout le monde il est moche, tout le monde il est méchant. Petra avait besoin d'alcool. Vite. De l'alcool, beaucoup d'alcool. Elle avait envie d'oublier ce qui était en train de lui arriver. Que tout s'efface. Que tout disparaisse de son esprit. Que la rencontre avec Noctim se dissolve dans de la boisson, que le choc dû à la venue de Morgan se fasse ronger par les enzymes de son ventre, que ce moment terrible dans la Salle des Miroirs soit broyé par des images plus joyeuses. De l'alcool. Elle donnerait n'importe quoi pour de l'alcool. Même la plus immonde piquette. Tant qu'il y avait de l'alcool. C'était tout ce qu'elle désirait. De l'alcool, de l'alcool, de l'alcool. Seul l'alcool pourrait lui faire oublier sa douleur. Seul l'alcool pourrait lui faire oublier les origines de sa douleur. Seul l'alcool pourrait lui faire oublier que c'est l'alcool qui a causé tout cela. Et bientôt, un enfant un peu naïf pourrait venir la voir et lui demanderais : "Pourquoi bois-tu ?" Elle ne pourrait alors que répondre : "Pour oublier". "Oublier quoi ?" "Oublier que je bois."
Morgan s'était approché d'elle. Oh, par pitié, qu'il vienne lui dire qu'il ne pensait pas ce qu'il sous-entendait durant ses paroles, qu'il ne pensait pas ce qu'il pensait. Oh, par pitié. Qu'il la prenne dans ses bras, la réconforte, lui fasse cesser de pleurer, la raccompagne à sa chambre pour qu'elle se rhabille puis l'emmène à la cuisine grignoter quelque chose. Qu'il la prenne dans ses bras suffirait, même. ... Il posa sa main sur son épaule. Sa main chaude sur l'épaule froide de Petra. Elle n'avait pas réalisé jusque là qu'elle avait si froid. Cette pièce n'était pas chauffée, elle avait peu de vêtements sur elle. Et elle était si seule. Mais plus maintenant : Morgan était là. Son meilleur ami. Sa main signifiait tout ce qu'elle voulait. Qu'il était désolé de la mettre dans un état pareil, que ce n'était pas si grave que cela, que ce n'était pas la fin du monde, que tout allait bien se passer et que, dans quelques temps, ils riront en effet de tout cela et pourront dire : "Et c'est comme ça que Petra a couché dans mon lit, mdr !" Qu'il était son meilleur ami. Et que rien ne pourrait détruire ce lien. Pas Noctim, pas de naine bouffeuse de main, pas d'alcool. Rien. Il y eu un grand silence. Petra voulait s'excuser auprès de Morgan. C'était le moment idéal. Allez, rassemble les morceaux de ce que tu lui avais préparé, Petra. Rassemble-les, assemble-les et montre-les. Et tout sera réglé. C'est ton meilleur ami. ... Non. Il n'y avait rien. Ses petits mots insignifiants ne l'excusaient pas. Elle n'avait absolument aucun argument pertinent qui pourrait justifier son acte. Rien. Les morceaux tombèrent des mains de Petra et se rajoutèrent aux mots de Morgan qui avaient percé son âme. Que cela faisait mal. Oh, Morgan, vas-y, parle en premier. Elle n'avait pas la force de commencer. Allez, toi, tu pourrais faire disparaître tout cela. Tu pourrais sauver cette amitié si précieuse. Tout redeviendrait normal. Cet accident serait oublié pour l'éternité. Morgan savait trouver les paroles qui consoleraient Petra, elle en était sûre. Il avait déjà réussi dans la cave, durant l'un de ses rares morceaux de souvenirs de la cave. Mais Morgan ne dit rien. Cependant, sa main était toujours sur l'épaule de la jeune fille. Sa main douce, rassurante, affectueuse. L'adolescente releva le visage et commença à cesser de pleurer, esquissa une amorce de sourire. Cette main était merveilleuse. Leur amitié existait toujours. Elle était désolée de ce qui s'était passé. Il était désolé de ce qui se passait. Et tout allait bientôt être terminé. Sans alcool. Puis... la surprise, le trouble, la douleur. Et sa main vive, effrayante, cruelle. Morgan l'avait... l'avait... Sa main... Et la douleur sur la joue de Petra. Il l'avait... Il l'avait... Non. Ce n'était pas possible. Non ! Ce n'était pas possible ! Non ! C'était fini. Tout était fini. Finie, la main réconfortante. Finie, leur amitié. Fini, ce qui poussait Petra à se lever à son réveil. Fini, fini, fini. Fini. En miettes. Et il s'amusait à piétiner les miettes. Une pluie d'insultes tomba sur Petra. C'était même pire que de la pluie : de la grêle. De la grêle affreuse qui frappait l'adolescente dix, vingt, trente, cent, mille fois. "Idiote" "Inconsciente" "Bourrée" "Abrutie" "Aveugle" "Crétine"... Et ce n'étaient que les mots, isolés. Une fois assemblés en phrases cohérentes, c'étaient des flèches enflamées que Morgan tirait vers la jeune fille. Pire que ses sous-entendus, pire que le silence épuisant, pire que la douleur de n'avoir aucune excuse, pire que la gifle. Son meilleur ami. Foutaises : son pire ennemi. Petra saignait de l'intérieur. Aucune blessure physique, la douleur provoquée par la main du sale borgne se dissipait déjà. Mais à l'intérieur d'elle, c'était une hémorragie affreuse. Elle sentait sa vie s'écouler par de nombreuses plaies immatérielles, contre quoi elle ne pouvait rien faire. Morgan continuait de cracher des gerbes de méchancetés, sans lui laisser une seule chance. Il lui hurlait les pires choses qu'il pouvait lui hurler. Il lui posait des questions auxquelles elle ne pouvait répondre, il lui posait des questions dont les réponses lui faisaient trop honte. Elle n'avait qu'une envie : creuser un immense trou dans un endroit désolé et vide de monde et s'y enterrer. Petra ne souriait plus. Petra ne pouvait plus sourire. Quels muscles fallait-il contracter pour sourire ? Dans quel ordre ? Oh... Comment souriait-on ? Elle ne savait même plus. Ce geste était pourtant si simple, elle le faisait si bien, d'habitude. Et en face d'elle, Morgan qui la fixait toujours avec son œil unique. Ignoble œil unique. Elle ne voulait plus le voir. Elle détourna son visage vers un côté. Les miroirs. Ces centaines de miroirs. Ces infinités de reflets. Ces infinités de Morgan. Ces infinités d'œil inquisiteur. Il était partout. Partout autour d'elle. Inévitable. Où qu'elle regarde, il était là. Petra baissa la tête, courba le dos, se recroquevilla sur elle-même. C'était la seule façon de ne pas le voir. Elle ferma ses yeux embués de larmes et balbutia quelques mots qui sortirent péniblement de sa gorge.
"P... P... Pourquoi ?"
Pourquoi une réaction si affreuse, pourquoi un comportement si cruel, pourquoi autant de douleur, pourquoi tout ne pouvait pas être simple, pourquoi tant de pourquoi ? Petra avait besoin d'alcool. Vite. De l'alcool. Beaucoup d'alcool. |
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| Sujet: Re: Du même côté du miroir [ Petra ] Ven 18 Déc 2009 - 17:11 | |
| Le pire, c'est que la situation était ridicule. Un mot, une phrase suffiraient à les concilier. Une pensée, une émotion finirait de les calmer. Mais cela ne se passait jamais comme ça, dans le feu de l'action. Chacun avait raison, chacun avait ses raisons que la raison ne connaît pas. Au moment ou la main du borgne avait quitté l'épaule de Petra, au moment ou il l'avait frappée, les possibilités de calmer la situation s'étaient considérablement réduites. D'abord conscient que ce qu'il lui crachait à la figure était aussi injuste que stupide, il se convainquit peu à peu des raisons subconscientes le poussant à sa débauche de violence. Le droit de crier, de se rendre ridicule d'un énervement stérile et puéril, le droit de ne pas penser, de ne pas réfléchir. Le droit de retomber un enfance, de réclamer de l'attention, le droit d'imposer un peu de force dans ce monde où il était toujours le faible. D'exploser. Au mauvais moment. Avec la mauvaise personne.
Ponctuant ses mots d'une gestuelle aussi limitée que névrotique, Morgan avait vidé une partie de son sac, sachant qu'il n'allait pas arrêter, ne marquant que le calme avant la tempête. Il pourrait en dire, des choses, en crier, il aimerait en hurler des choses, pas forcément sur Petra, sur le monde, tout le monde, en balançant des objets sur son chemin, en finissant par s'affaler, dans un coin, enfin en paix, les cordes vocales brisées. Tout ça pour la goutte d'eau qui avait fait déborder le vase, après les quelques semaines où il avait pris goût à la vie, à la foule, à l'être humain. Les quelques semaines où il s'était voilé la face, oui. Mais il s'était calmé, le temps d'un instant.
Une seconde. Une seconde où il put voir Petra, se recroquevillant, se ramassant sur elle-même, disparaissant au creux de ses hanches repliées. Une seconde où il caressa d'une étreinte de papier de verre la peau nue de celle qu'il aimait. Ses cheveux lui paraissaient plus beaux qu'ils n'avaient jamais été, enlaçant ses joues humectées de nuages. Ses yeux qui s'effacèrent sous ses paupières, ultime rempart, ultime abri, lui paraissait plus profonds qu'ils n'avaient jamais été, sous l'emprise de l'alcool. Car, non, elle n'était plus ivre. Et ce fut ce simple détail qui le fit consentir à se calmer, à écouter ses paroles, à observer ses lèvres suppliantes murmurer les syllabes auxquelles il n'avait pas tellement de réponse.
« Pourquoi ?! »
En répétant la question, il espérait en trouver la réponse. Les sourcils froncés, figé en façade automatique. La même façade qu'il avait proposé à sa mère, ou à Kim. La façade qu'il proposait à ceux qui ne se présentaient pas sous ses critères. Ou renvoyaient son image. Il demeura silencieux une seconde, observant Petra de haut en bas, toujours inconsidérément troublé par sa semi-nudité, et profondément irrité par sa propre réaction. Toujours retourné par la fragilité inhabituelle sous laquelle elle se présentait, et qu'il s'empressait de briser. Toujours amoureux.
Pourquoi quoi, d'abord ? Pourquoi ses cris, pourquoi sa jalousie, pourquoi mettait-il ses erreurs en valeur ? Le borgne pinça les lèvres, dédaigneux, méprisable personnage. Il pencha un peu la tête sur le côté, gêné, cherchant ses mots, avant de répondre, se détournant à moitié de la femme qui le trahissait sans même connaître la nature des sentiments qu'il avait pour elle.
« Je crie sur mes amis de la même manière, lorsqu'ils commettent des erreurs ! Ce ne serait qu'hypocrisie de laisser ma colère pour moi et de laisser des gens que j'aime s'égarer, non ?! Ce... Enfin... Je me suis emporté, mais je n'attendais pas ça de toi ! Je n'en peux plus, de te voir évoluer ainsi ! L'alcool, les jeux dangereux, et à présent la débauche gratuite, tu t'attends à quoi de ma part ?! Tu m'en demandes trop ! Les humains, tu sais... »
Morgan voulut conclure ici sa tirade ratée, ponctuée d'hésitations et fort peu percutante. Les humains. Oui, les humains, ces maudits humains qu'il avait tour à tour haï et méprisé. Ces dernières semaines, peut-être que l'aveuglement avait tiré un trait sur leur grossièreté, il avait vu le monde l'entourant comme on pourrait le voir, si on aimait son entourage. Avec ce qu'il avait vu aujourd'hui, il ne savait pas si c'était un aveuglement de plus stupides, ou une part de vérité cachée sous le sombre tableau qu'il avait dressé de son espèce.
« N.. Non, oublie, c'est stupide, c'est faux, ce que je dis. C'est hypocrite, c'est juste... Tous ces beaux discours, toutes ces belles phrases, les seules que je sais sortir, enfin... »
L'affreux borgne, comme le décrivait Petra dans ses pensées, s'approcha un peu de la jeune fille, dont il s'était un peu éloigné durant son discours, et s'agenouilla, cette fois, près d'elle, ne s'avançant pas assez pour qu'elle soit révulsée par sa présence auparavant hostile, et toujours terriblement possessif envers une personne qui ne lui appartenait même pas.
« Tu es en tort. Tu as fait, et tu fais encore de terribles conneries, c'est pour ça que je suis en colère contre toi, comme je serais en colère contre Emily ! »
Il soupira, trembla. C'était la deuxième fois qu'il devait prononcer ces mots. Mais ce n'était pas aussi naturel qu'avec Kim, et ce n'était pas aussi facile. C'était encore plus incertain.
« J-je suis aussi furieux contre l'alcool, contre mon fichu tabac, contre ces insupportables raclures blondes qui parasitent ma chambre, et surtout, surtout ce foutu type, cet espèce de... Ce... Il... Si seulement j'étais un peu moins faible, peut-être que j'aurais... Enfin... »
Morgan fut parcouru d'un désagréable frisson. Il le calma en attrapant le bras de Petra.
« Je.... »
Il en fut incapable. Incapable de prononcer ces simples mots. Il serra un peu plus fort le bras de Petra, irrécupérable, retenant les soupirs de dépit qui commençaient à couler sur les rougeurs de son visage abîmé. Il n'était vraiment bon à rien.
Imbécile. |
| | | Sectaire iguano-stellairienne Petra Traümer
+ Pseudo Hors-RP : Mooney • Age : 29 • Pouvoir : Persuasion • AEA : Marmotte la Marmotte • Petit(e) ami(e) : EMRYS SULWYYYYYYN <3 RP en cours : LA VIE EN ROSE (Claris Linden) Messages : 1647 Inscrit le : 09/11/2008
| Sujet: Re: Du même côté du miroir [ Petra ] Lun 21 Déc 2009 - 23:31 | |
| Le monde de Petra s'écroulait. Il y avait d'abord eu le cri de Morgan, dans la chambre, qui en avait ébranlé l'architecture. Puis il y avait eu ces mots qui étaient sortis de la bouche du borgne : on envoyait des obus dessus. Enfin, il y avait eu cette gifle. Cette gifle terrifiante. Petra n'avait jamais été giflée de sa vie. Les gifles, pour elle, c'étaient les punitions que l'on donnait aux moutards insolents. Cette gifle avait eu l'effet d'une bombe atomique, sur le petit monde joyeux de Petra. Finis, les rires, finies, les grandes joies, finies les folles conversations. Il ne restait que la douleur causée par la perte de son meilleur ami. Tout partait en ruines.
Petra s'enfermait dans une bulle. Elle ne voulait plus en sortir, plus en bouger. Allez, on appuie sur le bouton OFF, on débranche les câbles. Et tout s'arrête. Allez. Cela n'avait pas l'air si complexe de mourir. La jeune fille pouvait sans doute le faire mille fois. Elle voulait le faire mille fois. Elle sentait dans toutes les fibres de son corps qu'elle le méritait. Les garces de son genre ne méritaient que cela. Sans qu'elle s'en rende compte, elle s'était comportée comme une véritable Skrabubonliahk. Oui, au fond, elle n'était que ça. Et ce n'était qu'aujourd'hui qu'elle s'en rendait compte. Elle était corrompue par une foule de vices. Luxure, colère et paresse arrivent en premier. A côté d'elle, Morgan qui serrait si fort son bras, était déchiré entre plusieurs états d'esprit. Un coup, il était en colère contre le monde entier, l'autre contre elle seulement. Un coup, il était furieux contre la jeune fille uniquement, l'autre contre plein de petites choses qui allaient de travers dans sa vie. Mais qu'est-ce qu'elle voulait qu'elle fasse ? Non, elle ne pouvait pas régler ses putains de problèmes de clopes, elle ne pouvait pas faire disparaître les colocataires de sa chambre, elle ne pouvait pas faire d'Emily une sainte, elle ne pouvait même pas faire d'elle-même quelqu'un de propre. Petra n'était qu'une pauvre gamine larguée qui était dépendante à l'alcool. Elle l'admettait, enfin. Elle ne pouvait pas vivre sans. Elle avait menti au monde entier quand, quelques mois plus tôt, elle avait assuré à Morgan qu'elle pourrait très bien arrêter quand elle le voudrait, au fond d'une cave. Mais maintenant, tout était clair. Elle voyait parfaitement l'état dans lequel elle était. Au bord du gouffre. Elle n'était qu'une fille qui voulait jouer aux dames en consommant de l'alcool. Elle n'était qu'une fille qui voulait jouer aux dames en risquant chaque jour un coma éthylique. Elle n'était qu'une fille qui voulait jouer aux dames en ayant probablement déjà fait un coma éthylique. Elle n'était qu'une gamine. Il était tant de grandir. Morgan pouvait continuer autant qu'il voulait son blabla ridicule de gosse indécis. Elle, elle comptait se dresser et enfin avoir dix-sept ans. Elle se déplia légèrement. Releva la tête. Plongea ses gigantesques yeux bleus auréolés de maquillage noir dégoulinant dans l'œil unique de Morgan. Le répugnant oeil unique de Morgan.
"Lâche mon bras. Tout de suite."
Elle avait prononcé ces mots en écartant bien chaque syllabe des autres, d'une voix très neutre, sans émotions. Elle ne voulait montrer aucune émotion. Si elle se risquait à faire ça, Morgan risquait de découvrir la douleur qui avait prit Petra en otage et plaquait un pistolet sur sa tempe. Elle pourrait perdre ses moyens facilement, dans cette situation... Elle se releva. La jeune fille se tenait droite, ferme, solide. Les vraies grandes personnes prennent cette posture, alors elle devait la prendre. Allez, soit une grande personne, enfin, ma Petra. Maintenant, on va s'excuser auprès du borgne, comme toute grande personne, le temps qu'il faudra. Tu le perdras sans doute, mais au moins, tu te seras comportée en grande personne. En te comportant en gamine, tu le perdras aussi. De toute façon, avec cette gifle, tu auras du mal à ne pas le perdre... Donc, maintenant, tu t'excuses. Tu t'excuses. Tu t'exc... Dérapage.
"Tu te crois parfait, tu crois pouvoir donner ton avis sur tout ! Mais t'es pas mieux que nous, Morgan ! Tu es aussi con que nous ! T'es aussi banal que nous ! Tu vaux rien de plus ! Tu vaux même moins, Morgan ! Tu fais ton petit puritain mais tu fumes comme un pompier ! Et tu ne veux même pas l'assumer ! Tu vaux rien Morgan Poulenc ! Tu vaux rien ! Pas étonnant que t'aies eu que de la merde dans ta vie, avec ta Kim et toute la clique ! Pas étonnant !"
Petra déversait un flot de venin sur Morgan de façon intarissable. Qu'il crève en enfer, le chacal. Qu'il brûle dans les limbes, le cafard. Ah, que ça faisait du bien de balancer tout ce qu'elle avait dans le cœur à cette larve répugnante, de lui hurler ses tares qu'elle-même s'était cachée par amitié.
"Si tu crevais aujourd'hui, je suis sûre que personne ne te pleurerais ! Tu n'es qu'un monstre, uniquement capable de juger et de détruire les autres ! Incapable de construire autre chose ! Tu n'es qu'un monstre ! Un monstre ! Un monstre !"
Ils auraient pu régler ça tout simplement. Elle aurait pu terminer ça tout bêtement. Un simple "Je suis désolée..." suivi de quelques excuses, puis tout aurait pu rentrer dans l'ordre. Un simple "Je suis désolée..." Elle avait tout envoyé en l'air.
Puéril. |
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| Sujet: Re: Du même côté du miroir [ Petra ] Mar 22 Déc 2009 - 22:46 | |
| Ce qu'il y avait de pratique, lorsque l'on détestait tout le monde, c'est que c'était facile. Très facile. On ne s'implique jamais vraiment, lorsque l'on déteste. Morgan avait bien sur impliqué sa propre personne dans le rayon de son mépris, mais jamais il ne descendait de son petit nuage. Il était bien, là haut, à toujours donner son avis sur tout, à mépriser le moindre soupir, le moindre geste, la moindre pensée, inaccessible big brother qui surveille tout, et impose sa parole à quiconque veut ou non l'écouter. C'était pratique, de haïr. On peut être faible comme il l'avait été, on peut être lâche comme il l'avait été, on peut perdre, comme il avait perdu, mais jamais il n'avait laissé cette justification. Certes, il avait cédé, fléchi, capitulé, mais il avait toujours ce pauvre prétexte qui l'isolait de tout. Il haïssait. On est bien moins critiqué lorsque l'on clame haïr que lorsqu'on affirme aimer. Je hais tout le monde, ces humains me répugnent, j'espère valoir plus que ce ramassis de vermines, j'espère à un avenir plus grand, bande d'ignares, bande d'ignorants, bande de lâches ! On pouvait penser ce qu'il voulait, le mépris était empereur et l'amour gueux, et toute marque d'affection qu'il avait montré par erreur s'était toujours retrouvée au coeur de ses plus grands échecs. Qu'en tirer, sinon que l'aversion était toujours plus protectrice ? Ses pires ennemis, ses plus proches amis, Nao, Emily, n'avaient pu percer cette solide couche de haine qui le maintenaient hors du monde, hors de portée. Mais ce qu'on est seul, lorsqu'on hait, et ce qu'on est faible, lorsque l'amour nous atteint. Le seul fait d'aventurer le petit doigt hors du cocon qu'il avait tendrement filé de malveillance lui valait mille chaos. Petra avait percé le navire, et au lieu de calfeutrer méticuleusement la brèche, il s'était aventuré aux bras de la sirène.
Le voilà bien tremblant, l'amoureux transi, docile comme ceux sur lequel il ne cessait de cracher, entouré du masque avilissant de l'affection. Il haïssait Petra, pour tout ce qu'elle représentait. La bêtise humaine, la superficialité bestiale, ou l'alcool qui rongeait le moindre pore de sa peau, comme il avait rongé la raison de sa mère. Ces liqueurs qui retiraient d'une vague tout ce qu'un amour profond avait tissé entre la mère et le fils, et tout ce qu'une folie avait brodé autour de lui et de l'adolescente. Car il l'aimait, pour toutes les illusions qu'elle avait pu lui procurer, chimères qui semblaient si tangibles dans le monde tressé autour d'eux ces derniers mois. Les sourires qu'elle avait pu dessiner sur sa face malade étaient bien réels. D'un marqueur grossier, elle avait tracé un arc de cercle dirigé vers le ciel sur la figure maussade du saule pleureur. Enchaîné à elle par cette empreinte imprimée sur ses lèvres comme on marque au fer les esclaves, son cocon de haine n'était plus qu'un souvenir rauque. C'était pratique, de haïr. Mais aimer semblait ouvrir tant de lendemains... C'est pourquoi il murmura, espérant que le regard de Petra rencontrerait bien le sien, se mettant à genoux devant elle, plus faible qu'il ne l'avais jamais été.
« Je t'ai... - Lâche mon bras. Tout de suite. »
Morgan ne réagit pas tout de suite. Son chuchotement désolé s'était perdu dans les rigoles de l'incompréhension. Le ciel bleu que portait Petra au sein de son regard s'était mué en voûte craquelée, et l'ordre avait fusé, comme le maquillage avait coulé le long de ses joues d'enfant. Irréel. Dur. Incontestable. A peine eut-il eu le temps de l'entendre que ses doigts, un à un, desserrèrent l'étau qu'ils avaient pressé autour de son bras, à contre temps, à contre coeur, à rebours.
Petra se leva, surplombant sa silhouette ramassée, à genoux devant l'Eternelle qui allait soumettre son jugement. Sa stature ne pâtit pas de l'intimidation qu'elle exerçait sur son être en attente, mais son regard où avait pointé une part d'affection tardive s'était mu en oeillade craintive. De là haut, elle le regardait d'une manière si... Et puis ces yeux... Non, ce regard ! ... Pourquoi le regardait-elle ainsi, lui qui n'avait finalement fait que maladroitement chercher à declarer sa flamme ? Son amour était-il une faute, à moins que cela ne soit ses mots ? Il n'avait pourtant rien fait de mal à ses yeux, hormis la malmener un peu. Il n'avait rien fait de mal. Lève toi, lève toi et marche, petite inconsciente ! Les larves et les mécréants qui nagent dans leur crasse ne pourront que te regarder passer. L'oeil de Morgan était en effet scotché à cette grande personne. Les lèvres pliées en attente. Et tout vola en eclats.
Morgan était de ces enfants gâtés qui n'avaient jamais fait face à l'injustice d'une méchanceté purement gratuite. Des claques, il en avait connues. Les critiques, les disputes, les injures, tout cela faisait partie intégrante de sa vie... Mais c'est lui, et lui seul qui les proférait. C'était sous couvert de sa sacro-sainte vision des choses, il pouvait se le permettre ! Cela ne ferait qu'ouvrir les yeux de ces pauvres larves. Son regard laid et meprisant sur le monde ne pouvait que le faire progresser en déterrant ses horreurs, voyons ! Les critiques à sa personnes étaient monnaie courante, mais il s'en fichait bien. C'était sans fondement. Ce n'était que de piètres personnes rencontrées sur le vif, et qui n'aimaient pas sa manière de voir. Ce n'étaient que les victimes aveugles de ses jugements. Les disputes, il en avait connu, mais Emily faisait toujours progresser les choses, lui faisait ouvrir les yeux, le faisaient avancer, le faisaient pour son bien. Jamais on ne lui avait fait mal pour lui fait mal. Jusqu'à ce que cela arrive, jusqu'à ce qu'il soit enfin jeté du haut de son inaccessible piedestal, enfin piétiné, enfin. Au moment où il s'y attendait le moins. Trahi par celle qui venait de refuser son amour, celle qui demeurait son amie. Poignardé dans le dos. D'en bas, la vue était terrifiante.
Incapable de détacher son regard des lèvres gueulantes de Petra, il s'effritait sous le poids de son souffle, de chacune de ses inspirations, et s'envolait un peu plus à chacune de ses expirations démentes, de plus en plus nu, de plus en plus mort. Il ne se tassa même pas, relâchant ses épaule d'hébétitude. Eh oui, Morgan. Ce ne sont pas toujours les mêmes.
Arrête. S'il te plait, arrête, par pitié, arrête... Kim n'a rien à faire ici... Ni lui, il n'avait rien fait, il n'avait qu'essayé... Pourquoi.. Etait-ce mauvais, avait-il blessé Petra ? Avait-il fait un faux pas? Aveugle de ses propres maladresses, son esprit se fletrissait sous les impitoyables vérités qui retombaient sur lui, devant ses yeux. Tiens, les voilà, tes vérités, tes propres évidences, que tu caches honteusement en prônait l'ultime sincérité. Par pitié.... En avait-il seulement jamais eu de pitié, lorsqu'il crachait impitoyablement ses flammes envers ceux qui lui déplaisaient? Famille, amis, amour, ennemis, jamais il n'avait fait la différence. C'est pourquoi il les avait tous perdus. Un monstre. Un monstre. Un monstre.
C'était fini. Elle avait arrêté. Pas même attendrie par ses supplications. Ayant juste tiré la léthale conclusion de ce qui se tenait assis devant elle, la fixant, torpide sur son lit de caprices. Passant abasourdi du rêve raisonnable pour plonger dans l'absurde cauchemar de l'éveil.
« ....... »
Voilà. Pour la première fois, les mots lui échappaient, s'enfonçant dans le silence de son âme. La bouche entrouverte, exprimant mille protestations sourdes, mille supplications qu'il n'avait jamais pu étouffer, mille ordres de se taire qu'il n'avait jamais pu matérialiser, il était impuissant. Muet. Incapable même de pleurer. Si le langage de son corps ne trahissait aucune faiblesse, son seul regard, au vert des plus sanglants, témoignait des brisures que rien ne colmateraient jamais. Pour Morgan qui jamais n'avait connu la passion, voir mis en pièce de manière aussi violente cet amour aussi irrationnel que fanatique était la pire chose qui pouvait lui arriver. Qui pouvait leur arriver.
Il avait proposé autre chose que la haine, pour une fois. Il avait proposé de construire quelque chose, sans forcément passer par le mepris. Il avait mal commencé, il avait dérapé, il avait tendu une main. Si elle la refusait, il n'y avait pas de problème. Si ce n'était pas main dans la main, c'était côte à côte qu'ils auraient pu se tirer de cette coque malsaine. Mais elle crachait dessus. Le poussait. Le piétinait. Elle le disait très bien, il n'était qu'un monstre. Les monstres sont rancuniers. Les monstres n'ont aucune conscience. Aucune notion de bien ou de mal. C'était pratique, d'être un monstre. Encore plus pratique que d'être un vulgaire être humain qui meprisait son monde. Plus pratique encore que la haine. Il se leva d'une trombe, le regard blessé, la démarche mourante. Un instant, ils resta silencieux, face à la traitresse qui devait bien savourer sa victoire sur le puéril garçon entravé par ses croyances. Qui tour à tour, se réduisaient en miettes. Que restait-il de Morgan sans ses pretextes? Le monstre.
« T-T'es... T'es contente... ? » Sa voix tremblait. Il se sentait flancher. Non, pas maintenant ! Pas là ! Non, il ne pleurerait pas ! Il ne faiblirait pas, pas cette fois ! Il n'était pas la victime, il devait être le coupable, voulait être le coupable, être le méchant, celui qui blesse, celui qui tue. Pas cette loque que Petra avait trainé par terre. Il essuya d'un mouvement rageur ses yeux humides, prit les deux paquets de cigarettes dans sa poche, en jeta le contenu sur le sol et le piétina.
« Fais donc de même, arrête donc avec ton foutu alcool, arrête de te rendre grotesque de beuverie ! Je fume comme un pompier, mais toi alors, toi, tu t'assassines ! Tu ne t'en rend peut-être même pas compte ? Peut-être qu'à ton siècle, il n'y avait aucune campagne ? Ou ne serait-ce que Mademôaselle se croit au dessus de tout cela ? Au dessus de la bêtise, du ridicule, du danger ?! - Mais tu crois que t'es mi... - LA FERME, PETRA TRAUMER. »
Son pouvoir fut utile, pour une fois. Il l'activa brutalement, contractant les cordes vocales de l'adolescente à en vouloir les lui arracher.
« Non, je suis pas mieux, je suis pire, c'est bien ce que tu dis, non ? En fait, je sais parfaitement contre qui je suis en colère. Si je hais l'humanité entière, ça doit être à cause de gens comme TOI. Tu dois être le degré supérieur du concentré de connerie humaine que constitue cet endroit ! Une espèce d'éponge visqueuse qui absorbe tout ce qu'on vient à lui proposer qui lui fait fuir la connaissance ! On en vient à celle qui ne sait pas son alphabet et qui s'épanche dans l'alcool pour unique repère, pour unique ami, puisque les autres, elle les piétine ! Puisqu'elle les hait, et puisqu'elle les traite de monstres ! Va, Petra Traümer, réussis donc dans ce qui te reste de vie, avec ce qu'elle t'as apporté, l'air con et la bouteille, puisque même l'amour te répugne ! »
Il était resté statique, ne ponctuant son monologue que par sa verve furieuse, mais alors il s'activa, esquissant un pas, un geste, vers cet amour qu'il froissait, déchirait, jetait au feu. Mu par ce désir qui devenait violence. Il attrapa le drap qui cachait le corps de l'adolescente et l'utilisa pour la plaquer contre un des miroirs qui tapissaient la salle.
« Tu sais ce qu'ils font, les monstres ? Parce que j'en ai connu, des êtres monstrueux. » Il coinça ses doigts contre la gorge nue de l'adolescente. « Non, ils ne tuent pas forcément... Trop définitif. » Coinçant les jambes de Petra, mouvant ses doigts en dessous des clavicules, il titilla le drap, cet unique drap qui faisait barrière entre lui et la peau nue de la jeune fille « Si c'est vraiment tout ce que tu cherches... »
Il agressa ses lèvres, prenant possession de ce qui ne lui appartiendrait jamais, mordant presque cette chair rosée au décadent arrière goût d'alcool, lui faisant partager ses pauvres cendres de nicotine, de goudron, et de haine, baladant sa main là où sa morale l'interdirait. Sa morale ! Bonne blague ! Il la repoussa soudain contre la vitre, sans aller plus loin, avant d'eclater d'un rire caustique
« C'est quoi, cette tête ?! Je ne fais que te rendre ce que tu m'as donné, Petra ! Ca ne te plait pas ? Tu n'avais qu'à pas me promettre des chimères ! Tu ne t'en souviens pas, n'est ce pas ? L'alcool te joue des tours, encore une fois, il efface tout ce que tu juges superflu ! Comme ce baiser qui m'a fait espérer n'importe quoi. C'est pratique, d'oublier, non ? Non, ne t'inquiètes pas, tu n'as pas fait plus, je ne te fais pas plus, ça ne plairait pas à ton cheeeeer père, coincé de l'autre côté de ces portes ! Il préfèrerait mourir de honte plutôt que de voir l'immondice que tu es devenue ! Non... Je crois qu'il se pâme de rire avec ses amis, plutôt. Bon débarras, de cette atroce enfant pourrie gâtée, c'était pas trop tôt qu'elle fugue, ce putain de pot de colle abusif ! »
Il conclut sur cette note malsaine. Ultime obscénité, Morgan osait parler d'un parent, osait s'attaquer à un parent, osait attaquer Petra sur l'amour obsessif qu'elle pouvait vouer à son père, la figure maternelle étant depuis longtemps absente. Lui qui n'en menait guère large, lui qui n'avait toujours pas etouffé le complexe d'Oedipe qui lui pendait à la gorge, le ramenait aux plus bas stades de son existence, avant de le pousser à nier en bloc sa part d'erreur et de désir dans ce qui lui était arrivé. C'était sur elle que tout retombait. Parce qu'elle le méritait. Même si elle ne le méritait pas. Il était un monstre, après tout, non ? |
| | | Sectaire iguano-stellairienne Petra Traümer
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| Sujet: Re: Du même côté du miroir [ Petra ] Mer 23 Déc 2009 - 22:46 | |
| Le monde de Petra s'effondrait. Elle avait voulu régler ce conflit de façon douce, soyeuse. Le problème aurait vite disparu, et Morgan et elle seraient resté meilleurs amis. La vie aurait pu être facile. Trop de conditionnel. Surtout que, à la place du fleuve de tendresse, ce fut un cobra qui jaillit de la bouche de la jeune fille. Un cobra de méchanceté, de cruauté et de souffrances. Un cobra qui faisait face à celui que Morgan avait craché. Ces deux serpents s'affrontaient malgré la volonté de leur maître dans un terrible combat à mort. Le venin d'un cobra tue sa victime en deux à dix heures, selon la dose injectée et l'endroit. Ces deux cobras, de plus en plus gigantesques, balayaient les ruines du monde de Petra, détruisaient tout sur leur passage, tuaient la vie en quelques instants. Morgan était monstrueux envers elle : il la blessait. Elle était monstrueuse envers lui : sa conscience la tuait. Tout n'était que miettes.
En larmes, il avait recommencé à lui balancer des horreurs si vraies et qu'elle ne voulait pas entendre. Oui, elle était alcoolique, totalement pendue à des bouteilles de joie éphémère. Oui, elle ne pouvait pas le nier ! Elle s'était voilée la face jusqu'à aujourd'hui... Aujourd'hui, l'alcool lui faisait regretter tous ses actes. Tout était dû à l'alcool. C'était l'alcool qui avait rendu Morgan bourré, lors de leur rencontre, au bal de Noël. C'était l'alcool qui avait guidé l'esprit de Petra durant toute leur relation. C'était l'alcool qui l'avait mené dans le lit du borgne, mais avec un autre jeune homme... L'alcool avait dirigé à la baguette toute la misérable existence de la jeune fille depuis bientôt un an. Et l'alcool avait caché tous les défauts que Petra avait refusé de voir durant tant de temps. Elle le croyait sérieux et calme ; il était hystérique et fou. Elle le croyait bien : il était mauvais. Elle s'était voilée la face jusqu'à aujourd'hui. Elle voulut réagir, répondre. Elle commença une phrase... qui s'etouffa dans le vide. Morgan lui avait gueulé de se la fermer. Elle ne comptait pas lui obéir, elle avait commencé sa phrase, elle la terminerait. Elle allait continuer de lui balancer ses quatre vérités, elle allait continuer de répandre du venin sur lui. Elle s'en voulait, elle s'en voulait. Mais elle ne pouvait pas faire autrement. Son esprit était trop faible pour encaisser toutes ces attaques sans broncher, sans rien dire. Alors elle s'enrageait et devenait, à son tour, infecte, dégueulasse, monstrueuse.
"..."
Rien ne sortait. Rien. Elle s'égosillait, mais aucun son ne sortait de ses lèvres. Elle... elle... Elle était parfaitement muette. C'était... C'était... Le pouvoir de Morgan. C'était sans doute ça. C'était très probablement ça. Petra ignorait le sien, ignorait celui de pratiquement tout le monde. Dont celui de Morgan. Elle ne s'était jamais attendue à cela. A vrai dire, elle n'avait jamais réfléchi au pouvoir qu'il avait... Et maintenant, elle était prise au piège de cet étau qui serrait ses cordes vocales, qui empêchait sa voix de fuser hors de sa bouche. Elle voulait lui dire que lui aussi la tuait par ses paroles meurtrières, qu'il ne pouvait pas comprendre ses raisons... Mais rien. A la place, elle devait encaisser d'autres blâmes infects. Il la traitait de tous les noms, la rendait responsable de tous ses maux... Non, elle n'était pas une éponge visqueuse. Elle était juste une fille malheureuse depuis un an, et qui avait tout tenté pour se le cacher. Mais il ne pouvait pas la comprendre. Il ne pouvait pas comprendre que l'alcool, ses jeux dangereux et le sexe comblaient les vides de sa vie. Il ne pouvait pas comprendre que, sinon, elle ne serait pas capable de sourire, de se relever lorsqu'elle tombe, de ne pas s'évanouir en entendant un coup de tonnerre, de rire aussi facilement, de se lever le matin... Sa vie avait perdu tout son sens. Alors elle avait choisi d'en faire au moins quelque chose d'agréable à vivre. Et elle avait réussi cela par ces actes fous et dénués de sens. C'était affreux, c'était dégueulasse, mais elle avait trouvé dedans une raison de vivre, bien que ridicule et insipide. Il aurait peut-être mieux fallu qu'elle meure très vite après son arrivée dans le pensionnat. Oui, qu'elle se suicide, qu'elle se pende, qu'elle se taillade les veines, qu'elle ingurgite une trop grande dose de somnifères, avant qu'elle rencontre trop de monde, avant qu'elle aille au bal, avant qu'elle ne se lie d'amitié avec Sindy, avant qu'elle ne rencontre Morgan. Ce fut alors qu'il la plaqua contre un miroir. L'adolescente n'avait pas eu le temps de réagir : il s'était mit dans une position telle qu'il entravait tout ses mouvements. Mais là n'était pas le pire. Le pire était dans les pensées du jeune homme, clairement lisibles. Les mots qu'il employait l'indiquaient clairement. Putain. Son meilleur ami. Un fou. Un monstre. Un violeur. Son meilleur ami. Il happa ses lèvres avec violence. De nouveau, elle n'avait rien pu faire. Petra était désemparée. Elle n'était qu'un corps amorphe, qui se laissait pelotter. Les mains des Morgan passaient sur sa poitrine, ses hanches, son cul. Elle les sentait, les haïssait, ne désirait que les voir disparaître. Mais elle ne faisait rien. Ne pouvait rien faire. Il allait la violer, c'était une évidence même. Il n'avait aucunes valeurs, aucun honneur, aucune morale. Petra recommença à pleurer. De longs sanglots et des fleuves de larmes. Elle mourrait de peur. Chaque cellule de son corps frémissait à l'idée de ce qui allait lui arriver. Les caresses obscènes de Morgan la plongeaient dans un état d'effroi terrifiant. Bien des fois, elle avait été désespérée. Mais jamais elle n'avait jamais eu aussi peur. Son ventre était noué d'angoisse. Ses jambes flageolaient, son buste tremblait. Le venin de Morgan allait pénétrer dans ses parties intimes pour mieux se répandre dans son organisme et la tuer. Petra avait entendu à plusieurs reprises d'histoires louches de personnes violées, dans le pensionnat. Elle n'avait jamais eu les noms exacts. Ce n'étaient que des rumeurs qui couraient. "Oui, il parait que les bruits qu'on entend dans le grenier, c'est une agression sexuelle... T'y crois toi ?" "J'ai entendu des trucs bizarres venant des toilettes, l'autre jour, tu penses que c'est l'un de ces viols dont on parle ?" "J'ai entendu dire par Machin qui le savait de Truc qui avait apprit ça par Bidule, que y'a une gamine de douze ans qui s'est fait agressée par un type de dix ans de plus..." Ces ragots que l'on se dit, que l'on colporte, sans vraiment y croire... Bientôt, Petra et Morgan ajouteront une pierre à l'édifice, et les gens pourront chuchoter "Il paraît que Petra, tu vois, la garce aux cheveux roses, s'est fait violer. Mais on sait pas par qui, et elle veut pas en parler et pia pia pia..." Morgan finit par s'écarter d'elle. Il rit. Sans doute ne lui laissait-il qu'un bref instant de répit. Il allait réattaquer sans doute dans la minute suivante et enfin accomplir ce que la jeune fille redoutait tant. Il réattaqua en effet, mais pas comme Petra le pensait. Il avait recommencé ses discours enragés et ravageurs. Il avait empoigné d'autres flèches couvertes du venin de cobra, qu'il envoyait sur elle. Il était bon au tir à l'arc. Mais cette fois-ci... il y avait quelque chose de différent. Il parlait de quelque chose qui avait eu lieu, visiblement, mais dont elle ne se souvenait pas. Un baiser ?
"..."
Putain. Tout revint à la surface, dans l'esprit de Petra. La bataille de polochon contre la fameuse hallebarde, l'arrivée de Morgan, son sourire, le sien, les leurs, la virée dans la cave, l'alcool, la clope et... le baiser. Putain. Les pièces du puzzle se mettaient en place. Oui. Tout un tas de petites choses auxquelles elle n'avait pas prêté attention, mais qui signifiaient tant. Par exemple, le regard qu'il avait eu lorsqu'elle s'était fracassée à sa fenêtre, il y a quelques semaines, alors qu'elle faisait du saut à l'élastique depuis le toit. Certaines paroles, aussi. Certains sourires sans raisons. Enfin, sa réaction, en la voyant au lit avec un autre... Par sa faute, par son entière faute, Morgan s'était fracassé à la muraille des illusions ruinées. Oh, si seulement il s'était arrêté là ? Parce évidemment, il continuait de balancer ses horreurs. Et il finit par en dire une des plus ignobles. Pire encore que l'idée du viol.
"Mon père m'aimait !"
Elle croyait que Morgan avait fait le tour de toutes les pires infamies possibles. Mais non : il avait trouvé pire. Le point faible de Petra. Celui qui la démontait en quelques secondes. Son père. Il osait dire qu'elle lui ferait probablement honte ou même qu'il était content de s'être débarrassé d'elle. Non ! Ce n'était pas vrai ! Ca ne pouvait pas être vrai ! Son père l'aimait, et elle aimait son père ! Elle n'était pas la fille idéale, certes, mais il l'aimait. Son père lui avait donné une quantité infinie d'amour, qu'elle n'avait cessé de lui rendre, et qu'elle distribuait à tous ceux qu'elle pouvait.
"Tu ne sais même pas ce qu'est l'amour, imbécile ! Ta mère mourrait de douleur en voyant quel fils elle a mit au monde ! Tu n'es qu'un monstre dénué de cœur, incapable d'aimer qui que ce soit ! Tu ne peux que haïr ! Haïr ! Haïr ! Je suis sûre qu'elle t'aimait de tout son mieux, et que tu n'as pu que la faire souffrir en haïssant, puisque tu ne sais faire que ça ! Je suis sûre qu'elle t'aimait, elle ! Sans doute la seule et unique personne au monde à t'aimer !"
Ah, tiens, elle avait retrouvé sa voix. |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Du même côté du miroir [ Petra ] Ven 25 Déc 2009 - 1:13 | |
| Petra souffrait, il gagnait des points, prenait de l'avance. Il trichait en lui ôtant la parole, mais avait-on jamais parlé d'un jeu loyal ? Il n'y avait même plus de but, il ne souhaitait même plus la détruire, ce n'était qu'un vaste mécanisme macabre qu'ils avaient déclenché, et qu'ils n'étaient pas sûrs de pouvoir arrêter. Il n'y a pas de logique, dans la colère. Il n'y a jamais eu de logique, dans sa colère. Les paroles s'enchaînaient dans un enchaînement naturel, laissant couler le flot de tout ce qui s'était tu jusqu'alors, échappant aux mains impuissantes de celui qui espérait contenir d'un garrot toutes les émotions humaines. C'était comme essayer de vaincre un raz de marée avec ses mains seules. On finit forcément par être englouti. Il avait forcément fini par déraper, laissant éclater la folie que les années avaient tassée dans son être maladroit. Se réveillant si violente qu'il n'y pouvait plus rien.
Il ressentait encore sous ses doigts difformes les contours du corps de Petra, infraction à ses éternels principes. Et puis quoi encore, des principes ? Il les avait reniés en cédant bien volontiers aux avances de Nao. Il les avait tous perdus, un à un, les égrenant sur sa route comme un petit poucet qui ne retrouverait jamais les miettes de pain qu'il avait semées, dévorées par les oiseaux de la perdition. Il ne ressentait même plus de honte, peut-être effacée par le ressentiment, ou la folie. A quoi bon chercher à échapper à quoi que ce soit ? Tout n'était que décadence, en ce monde pourri de l'intérieur, tout n'était que vanité. Autant l'espérance d'un amour, autant l'attente d'un homme meilleur, autant les grandes valeurs portées par les hommes d'intellect. L'évidence naissait sous le brouhaha qui sévissait sous ses cheveux blanchâtres. Il était inutile de résister, sous peine de perdre pour toujours ce qui lui restait de conscience. Il ne pouvait plus s'aveugler comme ceux qui l'entouraient. Mais à quoi bon chercher à les hisser ? Une fois sur la marche du savoir, on n'est entouré que de vide.
Morgan ne prit pas conscience tout de suite qu'il avait relâché l'étau de son pouvoir. Seule la voix de Petra le lui en avertit. Et il eut beau tenter de raffermir sa prise, il n'y parvint pas. Pourquoi ses mains tremblaient-elles ainsi ? Pourquoi Petra se relevait-elle, menace après menace, atrocité après atrocité ? Va, fais plutôt la morte, on t'ignorera bientôt, à la recherche d'un autre mourant à achever. Masochiste ou courageuse, elle ne s'en tint pas à ces mots, tenant à faire entendre sa voix. Cette discussion n'avait plus aucun sens. Elle tournait en rond, autour de la puérilité d'adolescents dont la tête ne tournait plus dans le bon sens depuis longtemps. Mais plus rien n'avait de sens, lorsqu'on se plongeait dans la monstruosité. Sinon la douleur.
Cri d'amour, d'auto-persuasion. Cri de fierté blessée, d'ego piétiné, d'illusions effacées. Déclaration de vie. De survie.
Le retour du boomerang, Morgan. Cette perche était tellement facile à saisir. Tu as amorcé toi-même la bombe qu'elle te lançait au visage. Plaisir masochiste ou inconscience désincarnée ? Boum. elle t'explose à la figure, et tu fais celui qui ne s'y attendait pas. Eternelle victime.
« …… »
Un pas d'avance. Un point d'avance pour Petra Traümer. Morgan hors-jeu ? Le jeune homme se figea dès qu'il entendit les mots fatidiques, observant avec horreur les lèvres de Petra associer les mots qu'il redoutait le plus entre eux, avec une innocence meurtrière. Haine, passons. Amour, oublions. Mère… Mourrait-elle de douleur ? Elle n'avait qu'à crever. Bien des fois durant ces années passées au pensionnat, il fut sur le point d'accorder virtuellement son pardon à celle qui lui avait tout ôté, après lui avoir tout donné. Mais alors que la haine pouvait se tasser avec les années, le ressentiment grandissait avec l'ombre qu'elle projetait. Même dehors. Loin de lui. Cette ombre qu'il traînait comme les chaînes d'un fantôme absent ne faisait qu'amplifier ses formes menaçantes en l'absence du coupable, ou du complice de leur vice. Les incertitudes se creusaient. Les fissures s'élargissaient sur la pureté prônée par le pécheur, s'épanouissant en une fleur pourpre dont les racines finissaient par émietter tout ce qu'il avait réussi à cultiver.
« ……. »
Morgan voulait trouver les mots à lui hurler a la figure. Il voulait toujours être en colère. La détruire assez pour que jamais elle ne se relève. Pour que jamais ses lèvres ne prononcent des mots pareils, ravivant les pétales semi-fânés de la mauvaise herbe qui l'anéantissait. L'asservissait, jour après jour, quoiqu'il fasse, peu après après quoi il coure.
« T.. Tu… »
La chevelure blonde de Nao ne lui rappelaient-elles pas ses mèches délacées, lorsqu'elle était revenue ? Ses boucles d'oreille, n'était-ce pas les siennes ? Ses yeux verts, n'était-ce pas leur jumeaux ? Sa violence, n'était-ce pas ses gestes, décalqués au sexe opposé ? Péché. Les gestes d'Emily, ne lui rappelaient-ils pas les gestes fusionnels, aimant, coupables qu'il entretenait avec elle lorsque tout allait pour le mieux ? N'était-ce pas sa main sur ses épaules, ses baisers sur son front ? Leur promesse de ne pas s'aimer n'était-il pas le pacte muet qu'elle aurait pu lui faire signer, pour mieux le transgresser ? Affection. La faiblesse de Petra, n'était-ce pas la sienne, conjuguée à une force aussi hasardeuse qu'imprévisible ? N'étaient-ce pas eux, ses yeux, son regard, sa joie artificielle, lorsqu'aux bras de l'alcool elle se reposait ? Confrontation. N'était-ce pas elle qui avait guidé sa vie ? N'était-ce pas elle qui l'avait détruite ? N'y avait-il qu'elle, au sommet de sa chaîne alimentaire, surveillant d'un oeil distant ce que son fils faisait, ne pouvant plus poser sa main sur lui, mais guidant inconsciemment tous ses gestes ? Le rendant esclave persuadé d'être libre. Pantin captif de souvenirs. Cadavre assujetti à ses remords.
L'oeil verdoyant de Morgan exprimait pour deux le chaos sans espoir qu'il ressentait, clignant à peine, fixant Petra comme si il s'agissait de la pire des horreurs. Il ne voyait plus que son visage. Partout. Et les miroirs les regardaient. De partout. Son iris s'agita, cherchant une sortie, cherchant la porte, ne retrouvant que son propre regard. A chaque confrontation, son visage, sa copie, son double, riant de ses déboires, ou regrettant d'avoir rendu son fils complètement fou. La retrouvant toujours. Quoi qu'il fasse. quelle que soit la direction qu'il aie choisi de prendre. Dans les miroirs où se reflétait à son tour le jour où un morceau de verre lui avait ôté l'usage de son oeil. La boucle était bouclée.
Il perdait.
Morgan aperçut Petra et s'y accrocha, seule âme tangible qu'il aie trouvé dans cet amas de miroirs. La retrouvant encore dans ce regard ou la douleur se mêlait au courage. Tout était vain. Et c'était de sa faute. Les autres pouvaient très bien vivre. Il n'avait qu'à dépérir, laissant flétrir dans un coin de sa conscience la fleur de son propre vice. Mais porté spasme de sa conscience, il chercha à contrôler la situation. Ou Petra. Ou simplement quelque chose. Il devait au moins contrôler une chose. L'oeil hagard de Morgan s'accrocha au visage insolent de la jeune fille. Attrapa une mèche de ses cheveux, si vacillant que les tenir revenait à les tirer violemment. Serra l'épaule de Petra de son autre main. Il devait contrôler quelque chose. Imposer quelque chose. Les mots ne venaient plus. Il avait lâché tout ce qu'il avait à dire. Il finissait par comprendre que tout était de sa faute. Si l'objet de son désir n'était qu'une idiote alcoolique, si il n'était même pas capable de l'aider, si il ne désirait que l'anéantir.
Il n'avait plus de mots. Lassés de lui, ils avaient quitté ses lèvres si loquaces, n'y laissant plus que des murmures brouillon de pensées contradictoires.
« La seule personne… »
Son oeil fixe s'anima d'une flamme glacée.
« Les autres sont donc inutiles… Je la hais aussi... Ils .. »
Ils n'existent même pas. Tout ce pensionnat n'était qu'invention de son esprit déréglé. Un silence. Il appuya sa prise sur l'épaule, lâchant ses cheveux. C'était stupide. Tout était foutrement stupide. Il n'arrivait pas à en pleurer. Un rire déséquilibré ébranla sa colonne vertébrale, alors qu'il récitait la soupe de mepris qu'il avait toujours servi au monde.
« Ils sont stupides. Ces stupides, bas, vulgaires humains. »
Le misanthrope glissa ses doigts sur la base de son cou, appuyant son corps afin de la bloquer comme il le pouvait, perdant cependant tout sens logique. Il avait le contrôle. Il avait la situation en main. Bien en main. Aveuglant le fait que Petra avait définitivement gagné, il cherchait à appuyer son assise. A reprendre les rênes. L'ultime recours.
« Autant les effacer, en fait. »
Il serra l'étau de ses doigts. Espérant vainement se libérer de l'obsession qui dirigeait sa vie. Espérant voir d'un coup sec s'effacer toute sa peine. Une fois un pied en dehors de son sanctuaire, régnait l'insanité. |
| | | Sectaire iguano-stellairienne Petra Traümer
+ Pseudo Hors-RP : Mooney • Age : 29 • Pouvoir : Persuasion • AEA : Marmotte la Marmotte • Petit(e) ami(e) : EMRYS SULWYYYYYYN <3 RP en cours : LA VIE EN ROSE (Claris Linden) Messages : 1647 Inscrit le : 09/11/2008
| Sujet: Re: Du même côté du miroir [ Petra ] Lun 28 Déc 2009 - 20:33 | |
| Mort : personnification de la vie qui s'arrête Meurtre : homicide volontaire Morgan : meurtrier
Morgan l'aimait. Cette évidence devenait de plus en plus claire aux yeux de Petra. Comment avait-elle pu ne pas s'en rendre compte durant autant de temps ? Pire que le voile qui couvrait ses yeux lorsqu'elle buvait de l'alcool. C'était une couverture plaquée contre son visage. Il était borgne ; elle avait été aveugle. Mais elle, elle connaissait l'amour. Elle avait connu cet amour paternel qui l'avait bercé durant toutes ces années. Et elle savait l'exprimer. Elle savait s'exprimer. Elle savait montrer ses émotions autrement que par la rage, la haine, elle. Morgan, lui, ne les montrait pas normalement. Il n'était pas normal. Il était monstrueux. Sa réaction quand Petra mentionna sa mère le montra bien. Elle le plongeait dans un état terrible. Incapable d'aligner des syllabes, des mots. Même elle, il n'arrivait pas à l'aimer convenablement, dans les formes. Sa mère. Qu'est-ce qu'il avait bien pu traverser comme merdes pour être ainsi ? Oh et puis non, elle n'avait pas envie de le savoir. Le savoir l'attendrirait. Or, il ne méritait aucune tendresse. Il l'avait engueulé, giflé, menacé. Il avait été à deux doigts de la violer. Il avait perdu son amitié. Elle l'avait perdu. Ils avaient perdu. Mais elle ne voulait pas essayer de retourner en arrière. Trop peur. Peur de ce qui était arrivé, peur de ce qui risquait d'arriver. Et s'il mettait ses menaces à exécution ? Oh, pourquoi était-elle donc venue dans cette salle, déjà ? Il parait que c'était parce qu'elle voulait s'excuser, parce qu'à l'époque l'espoir existait encore, lueur flamboyante. Mais maintenant, tout s'était éteint. Il y eu un long silence, puis l'œil de Morgan irradiait de méchanceté. C'était mauvais signe. Très mauvais signe. Petra regretta ses paroles. Elle avait trouvé les mots qui lui permettaient de gagner, mais elle n'avait pas songé aux conséquences. Elle n'avait pas imaginé la folie qu'elle déclencherait chez Morgan. Elle aurait dû se la fermer, dès le début. Elle aurait dû partir dès les premiers instants. Dès qu'elle s'était effondrée. Tant pis, il n'y aurait pas de tentatives d'excuses, de justifications ridicules. Elle n'aurait eu qu'à partir, sans rien dire. Elle avait perdu dès cette seconde où ses jambes avait craqué. Elle aurait dû le comprendre. Mais à la place, l'adolescente s'était obstinée. Cela n'avait rien arrangé, au contraire.
Elle perdait.
Morgan recommençait à parler, mais Petra ne saisit pas complètement le sens de ses paroles. L'enchaînement logique qui les liait dans l'esprit du jeune homme n'était pas exprimé. Ce n'était que des bribes de pensées dites à voix hautes, sans aucun doute. Mais rien que ces bribes de pensées suffirent pour faire comprendre à la jeune fille ce qui allait se passer. Ces bribes de pensées et le regard de Morgan. Cependant, quand elle comprit, c'était déjà trop tard. Les mains du garçon à la base de son cou avaient été trop rapides. L'adolescente essaya bien de se débattre, de se défaire de son étreinte meurtrière. Mais à part quelques coups dans le vide, elle ne pu rien faire. Elle avait toujours considéré les scènes où les personnes qui se font étrangler sans réagir, au cinéma, comme peu crédibles. Comment pouvait-on se laisser faire tuer ainsi ? Aujourd'hui, elle comprenait. Elle chercha du regard un quelconque secours dans la pièce. Peut-être que quelqu’un aurait entendu leurs cris et serait entré dans la salle ? Mais il n’y avait que les miroirs, où se reflétaient l’image abominable de Morgan qui serrait son cou, l’empêchait de respirer, son sang d’alimenter le haut de son corps. Multipliée par mille. Mille mises à mort. Tel était le prix pour avoir fait l’amour à un gars. A un gars sans importance dont elle avait déjà oublié le prénom. A un gars qu’elle n’aurait jamais revu, même si elle n’était pas allée voir Morgan. Allez, ce n’était qu’une connerie ! Une bêtise appartenant au passé ! Ce crime méritait-il un tel châtiment ? Mille mises à mort. Partout, où que le regard se pose. Quel crime pouvait mériter une telle horreur ? Elle aurait préféré un million de fois le viol. Là, elle voyait parfaitement la fureur de Morgan, parfaitement les larmes qui coulaient sur son visage, parfaitement la vie qui filait entre ses doigts froids. Ca y est. C’était bientôt la fin. On lui avait dit que, en entrant dans le pensionnat, sa vie serait plus que sûrement éternelle. Le seul avantage. En miettes. On l’assassinait. Sa vision devint trouble, elle avait mal à la tête, elle se sentait faible, et surtout elle avait une douleur de dingue à la base du cou. Elle aurait tant aimé une mort différente. Mourir de vieillesse n'était pas possible, dans le pensionnat. Mais il y en avait tant d'autres. Overdose de somnifères, comme les stars. Blessure, comme les héros. Accident, comme ceux qui profitent de la vie. L'étranglement, c'est la mort de... de... de ceux dont on veut se débarasser sans laisser de traces, de ceux qui ne méritent pas de mort plus glorieuse, de ceux que l'on peut tuer aussi facilement, de ceux qui ne sont pas aimés. Petra avait cru être aimée. Par ses anciens amis. Par son père. Par ses amis actuels, dont Morgan. Mais ce dernier rependait le trouble. Son père ne l'aimait peut-être pas. Elle aurait aimé clamer que ce n'était qu'un mensonge, mais elle n'avait aucune preuve pour se justifier. Oui, lui aussi n'avait peut-être été qu'hypocrisie. Oh, et puis ses anciens amis, aussi. Et Sven, et Sindy. Et Morgan. Morgan. Il l'aimait ou il la haïssait ? Ses actions n'avaient pas de sens. Il se comportait comme un amant jaloux, fou d'amour. Il se comportait. Pourtant, il se comportait aussi comme un type qui ne peut plus la blairer, fou de haine. Sa façon de penser était un puzzle que Petra ne résoudrait jamais. Jamais. Son corps inerte finit par échapper aux doigts du garçon. Tomba au sol, face contre terre.
Morgan. Mort-gagne. La Mort gagne. |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Du même côté du miroir [ Petra ] Mar 29 Déc 2009 - 10:59 | |
| Morgan ne se doutait pas de recéler autant de force, n'ayant utilisé cette part animale de l'homme uniquement pour transporter quelques piles de livres ou se maintenir en forme. Contre Nao, elle avait été totalement inefficace. Pathétique. Il semblait que les maigres atouts du mâle avaient finalement quelque effet. Il n'avait même pas demandé à sa pensée de faire le moindre effort. Il avait plaqué Petra contre le miroir, et avait étranglé de la force de ses douze doigts le souffle maudit qui avait prononcé les paroles l'ayant précipité dans l'abîme. C'était facile, en fait, d'outrepasser les règles, d'appuyer sur la détente, de resserrer la corde. Que racontait-on donc dans les films ? Les héros hésitent toujours une seconde de trop, se posent trop de questions, croient pouvoir y échapper. Mais finalement, priver l'autre de sa vie semblait tout aussi naturel que de respirer. Pas une once de regret en voyant Petra se débattre, sinon le regret de la machine rouillée et de la lenteur de son agonie. Quelque chose s'était perdu, qui reviendrait, boomerang qui finirait forcément par le mettre à terre.
« P.. Plus vite... » grinça-t-il, inconsciemment lucide que sa détermination ne serait pas éternelle, foutue girouette déréglée qu'il était, ne cessant de tourner, même lorsque le vent ne souffle pas. Mais la culpabilité ne le rattrapa pas, lorsque les larmes de Petra devinrent flot, lorsqu'elle fut certaine de ne pas en réchapper, lorsqu'il appuya un peu plus fort sur ses artères. Perdant toute notion. Vie, mort, qu'importait, quelle était la différence, dans l'éthique ? Il ne voulait que la faire taire. Son pouvoir ne marchait plus, ses doigts marchaient mieux. Elle ne respirait plus ! Elle ne parlait plus ! N'était-elle pas mieux, sans ces paroles qui l'enlaidissaient ? Petra devrait prendre exemple sur elle. Elle, quand elle ne parlait pas, elle était belle. Il l'avait toujours trouvée belle. Depuis ses premiers pas au fatidique instant. Même après lorsque brisée, elle s'accrochait à lui pour expier ses fautes. Mais Petra n'était pas aussi sage. Petra était forte, était dangereuse, faisait mal. Mais elle se calmait, maintenant. Elle était plus belle, à présent. Ces stupides humains n'arrivaient pas à comprendre que leurs bruits ne menaient à rien. Le silence était tellement plus appréciable. Moins terre à terre. Tellement plus beau. Petra semblait le comprendre, maintenant. Il n'avait plus qu'à la lâcher.
Le corps de la demoiselle s'abattit comme une masse sur le sol. Face contre terre, elle ne bougeait plus. Ses yeux vides semblaient déjà avoir perdu toute once de vie, lorsqu'ils s'étaient fermés, lorsqu'il la tenait encore. Elle ne bougeait plus. Et une seconde, le silence se fit. La chevelure rose coulait du crâne de la jeune fille comme autant de sang d'un cadavre, acidulé par un amour mort dans l'œuf. Elle ne bougeait plus. Pas le moindre nerf ne faisait tressaillir ses jambes. Pas la moindre respiration. Le borgne contempla sans triomphe la forme gisante de sa bien aimée. Bon, il attendait la suite. Elle avait compris ce qu'il y avait à comprendre, elle avait cessé de lui faire du mal. Maintenant, elle pouvait se relever, et le faire silencieusement sourire. Puisqu'elle avait compris la leçon.
« Alors. »
Un petit appel, une piqûre de rappel. Lève toi, et marche, et sourit, maintenant. Tout est fini, maintenant. J'ai gagné, et tu as capitulé ! N'est ce pas la moindre des choses que de vivre comme avant, maintenant que les torts étaient posés sur la table, en évidence ? Il attendit une poignée de secondes, avant de s'accroupir, et de retourner le corps immobile. Elle ne réagit pas. Ses yeux bleus entrouverts n'étaient pas très gracieux, aussi fixes, aussi vitreux. Il ferma ses paupières d'un geste méthodique. Là, ça allait mieux. Il s'assit près d'elle, guettant le moindre de ses mouvements. Elle devait dormir. Ou attendre, elle aussi. Il haïssait auparavant cette débauche de mouvements inutiles, cette débauche de paroles, dont il était aussi la victime. Le silence s'était doucement installé. Il respirait à peine, espérant ne pas briser leur douce harmonie. Elle était magnifique, Petra. Il comprenait peut-être pourquoi il était tombé amoureux d'une femme aux allures si différentes de lui. Peut-être avait-il compris le délicieux potentiel dont elle était capable. Il sourit naïvement. Là. Pourquoi s'en faire, pourquoi s'enfuir, lorsque tout redevient enfin comme avant, au temps des sourires ?
Morgan effleura le bras blanc de la jeune fille. Elle était auparavant si inutilement forte. Et elle était couchée à présent avec une telle sobriété, celle qui ne l'avait jamais connue, ou ne l'avait jamais reconnue, la fuyant toujours, la trompant aux bras de l'alcool. Si seulement elle, l'autre, avait pu le reconnaître. Si seulement ça avait été elle. Qu'attendait-elle pour ouvrir les yeux ? Peut-être voulait-elle qu'il la rejoigne dans son refus de contemplation du monde meurtri qui les entourait. Il n'avait qu'à fermer les yeux, et imaginer que c'était elle. Tout allait bien, désormais. Il se redressa lentement, faisant l'épargne du moindre bruit, du moindre son, du moindre mouvement inutile. A genoux, il put plus aisément se pencher sur le corps immobile, vide de toute énergie, de toute vie. Il ferma l'unique oeil que la vie lui avait laissé, que le verre brisé avait daigné lui épargner, au moment de sa stupide chute, lorsqu'il croyait encore que le mouvement était essentiel. Le seul mouvement qu'il avait à faire était en fait de faire prendre conscience à ceux qu'il aimait de la vanité du moindre de leurs mouvements. Il ferma l'oeil, et ce fut elle qui gisait à ses pieds, à sa merci, à la merci de toutes les misères qui ne lui tomberaient plus dessus.
Morgan effleura son épaule nue de la main, la posa délicatement sur son cou. Plus un mouvement de recul. Plus un seul refus, et plus aucune barrière. C'était elle. Il la retrouvait enfin, meurtrie, brisée par les brimades de son fils, son absence, son retour. Petra n'était plus. C'était elle désormais. Il caressa malhabilement sa joie, tremblant de folie, attrapant son menton, pour y déposer un baiser. Ses lèvres étaient rondes et tendres. Il ne restait de l'alcool qu'un parfum sucré. Ce n'était plus le baiser rêche qu'il avait arraché à Petra. C'était la douceur qui lui avait tant manqué, à laquelle il s'était si bêtement dérobé.
« Tu es revenue... » murmura-t-il, pour lui seul, souriant, après ces trois ans de mépris. Il haïssait toujours les humains. La colère naissait en lui rien qu'à la pensée de ce qu'avait pu lui faire Petra. Mais il avait de quoi se réfugier, à présent. N'ouvrons pas les yeux. Il embrassa de nouveau le corps endormi, attrapant tendrement ses épaules découvertes, rattrapant le drap à l'aveuglette pour en couvrir son corps. Mais quelque chose n'allait pas, dans cette étreinte correspondant pourtant à ce qu'il avait envie. Et il découvrit vite pourquoi, lorsqu'il remarqua que le souffle de la femme gisant près de lui ne se mêlait guère au sien. Il rouvrit l'oeil, se séparant lentement d'elle.
« … »
Pris d'un doute, il attrapa le bras de la jeune fille, et le secoua. Secoua ses épaules, dans l'espoir qu'elle s'éveille. Mais ses efforts furent vains, et la force lui manqua peu à peu, lorsqu'il en arriva à l'évidence. Cette femme était morte. Et ce n'était pas elle, c'était Petra Traümer. L'adolescente aux mille abus gisait sans espoir de retrouver vitalité un jour. C'était encore elle. C'était de sa faute. Elle n'avait rien compris à ce qu'il avait voulu lui faire comprendre ! N'avait-elle pas retenu la leçon ? Ce n'était plus le silence qui sévissait entre eux, mais les cris muets de la mort venue recueillir son âme. Les hurlements du drame. L'absurde procession de la culpabilité qui venaient le chercher pour le soumettre à son propre jugement. Mais ce n'était pas de sa faute, clamait-il. Ce n'était pas de sa faute, si elle ne l'avait pas compris. Et elle continuait à lui faire du mal, même immobile, même muette ! Elle avait évaporé son illusion, et projetait un terrible futur à celui qui venait d'ôter une vie. Petra était la cause de tous ses problèmes. Il voulait la faire taire. Elle s'était tue, le menaçant d'autres maux. Elle n'était vraiment que la fille de l'insanité. Il crut voir sur ses lèvres un sourire, le condamnant depuis l'au-delà. Le souffle court, les idées embrouillées, la haine ressurgissant envers ce cadavre qui l'avait tant de fois trompé... Il ne put retenir plus longtemps les tremblements apeurés qu'il comprimait au mieux. Peur de quoi ? De tout. De l'extérieur. D'elle. De lui. De ce qu'il avait pu faire, pour la faire taire. Il l'avait tuée, voilà tout. Il l'avait tuée. Et sa lucidité le rattrapa un instant, pour lui faire comprendre qu'il avait dépassé toute limite. Enfreint toutes ses belles règles sur les humains. ?Un homme meilleur, hein ?... Pacotille.
Il resta immobile. Un instant seulement. Retombant dans le chaos. Il l'avait tuée. Qu'avait-il pu faire, qu'avait-il pu penser... C'était de sa faute si elle l'avait fait souffrir, mais, pourquoi, pourquoi ses mains avaient attrapé son cou, la condamnant à mort ? Il l'avait tuée. Il avait tué aussi bien Petra que tout ce qu'elle representait inconsciemment pour lui. Il l'avait tuée, elle. Et il avait tué tous les sourires qu'ils avaient pu partagé, etranglant les chimères brodées autour de la fille aux cheveux roses. Elle était morte, alors ? Il n'avait pas trouvé de souffle. Il ne voulait pas prendre son bras pour vérifier son pouls. Il ne voulait pas que ce soit vrai. Il craignait que ce soit vrai. Elle était morte ? Petra était morte ? Mais... Mais il l'aimait, non ? Avant que tout n'explose. Avait-il oublié ? Les miroirs lui refléchissaient le monstre. Il croisa son propre regard, et n'y trouva pas de culpabilité. Ne réalises-tu pas ce que tu viens de faire, abomination ? Ne ressens-tu pas le poids de la responsabilité qui t'incombes ? Rien. Il ne trouvait rien dans son regard. Son oeil vert ne répercutait rien.
« Monstre... »
Son reflet fronça les sourcils, l'accusant. Il l'avait tuée ! Assassinée ! Il n'était qu'un meurtrier ! Il n'était pas mieux que toutes ces raclures, lui qui prétendait s'élever plus haut. Lui qui cherchait la bonté en l'être humain, il n'était rien d'autre qu'un tueur. Morgan Poulenc, tu ne vaux plus rien, regarde toi ! Tu n'es que l'ombre d'un homme, ecrasé par des remords antiques, à peine effleuré par le présent. L'ombre de celui qui avait un jour crû que les hommes seraient meilleur. Cette ombre qui ne renvoyait plus rien, fuyant toute lumière. Terne.
« T-tais toi... » Morgan usa de son pouvoir. Le miroir le lui renvoya. Il relâcha sa prise, reessaya, reessaya de faire taire cette lueur maligne dans le regard d son double, qui se moquait de lui, qui cherchait à le faire culpabiliser, qui lui faisait porter toutes les peines du monde, lui reprochant ses penchants, ses envies, son comportement, son meurtre.
« Tais toi ! » hurla-t-il, frappant le miroir, brisant son image qui se reflechit en mille petits morceaux à terre. Sa main resta en suspens. D'autres images le regardaient.
« Taisez vous, toutes ! »
Il frappa à l'aveuglette, guettant son regard, pour le réduire au silence. La douleur le réveilla. Trois miroirs brisés, il s'arrêta, les doigts en sang. Il s'affala contre le miroir, regardant d'un oeil fatigué le cadavre de Petra. Les larmes coulèrent. Etait-ce les bris de glace ou la vision de celle qu'il s'était pris à aimer ? Il ne savait pas, il ne savait plus. Il ne supportait plus. Il essuya ses larmes, et fuit, manquant de tomber à chaque pas, chancelant, tremblant. Morgan s'enfuit, courut au travers le pensonnat, fuyant ces atroces visions, fuyant tous ces affreux êtres qu'il croisait sur sa route. Bousculant ceux qui se mettaient sur son chemin. Sortant, dans le froid que l'hiver soutenait sur le pensionnat. Chutant lorsque ses jambes refusèrent de le porter une seconde de plus. Se repliant, tremblant, sanglotant. Il en avait bien pour vingt et un ans de malheur de plus, non ? |
| | | Sectaire iguano-stellairienne Petra Traümer
+ Pseudo Hors-RP : Mooney • Age : 29 • Pouvoir : Persuasion • AEA : Marmotte la Marmotte • Petit(e) ami(e) : EMRYS SULWYYYYYYN <3 RP en cours : LA VIE EN ROSE (Claris Linden) Messages : 1647 Inscrit le : 09/11/2008
| Sujet: Re: Du même côté du miroir [ Petra ] Jeu 14 Jan 2010 - 19:43 | |
| Petra avait des fourmis partout sur le corps. Elle détestait cette sensation. Surtout lorsqu'elle était aussi forte. Quand ce n'était qu'un simple picotement qui vous arrive à un pied, durant un cours, ça va, ce n'est rien. Mais quand c'est mille scarabées qui galopent sur votre épiderme, c'est terriblement affreux. On se lève, on a mal. On essaie de marcher, on trébuche, on a mal. On bouge, on a mal. On ne bouge pas, on a mal. Cette douleur qui ne veut pas s'arrêter, contre quoi on ne peut rien faire. Cet engourdissement qui vous entrave, vous immobilise, vous paralyse. Quel mal de chien. En plus, son cerveau tambourinait dans sa boîte crânienne. Un tam-tam assourdissant et épuisant. L'adolescente allait devenir neurasthénique, si ça continuait ainsi. C'était plus fort qu'une gueule de bois normale. Oh, et... elle avait bu de l'alcool quand, précisément, récemment ? Elle buvait régulièrement, oui, mais là, elle ne revoyait absolument pas la scène. Oulah. Et elle était où, là ? Le sol dur, sous elle, ce n'était pas son lit, ce n'était pas un canapé, ce n'était pas un tapis, ce n'était pas le parquet des couloirs. Un carrelage, très dur, très froid. Elle se serait carrément endormie dans la cuisine ? Oulah. Bon, elle avait du consommer vraiment une énorme dose de boisson. Arf. Et c'était quoi, cette douleur à la base du cou ? ... .. . .. ... Merde. Petra ouvrit les yeux. Tout lui revenait. Les images défilaient dans son esprit. Elle revoyait toute la rencontre, dans le couloir, avec ce gars, un grand brun... Rah, c'était quoi son prénom, déjà ? Noctus ? Puis le décor changeait et c'était la chambre de Morgan, la terrible chambre 2. De nouveau avec Noctus -?-, ils étaient en train de ... Puis Morgan. Là, le rythme s'accéléra. Un crétin avait dû appuyer sur le bouton "Avance rapide". Les images de la course derrière Morgan, puis de leur dispute dans la Salle des Miroirs, arrivaient dans son crâne pour remplacer les tam-tam. S'imprimaient, se gravaient. Et là, la vitesse redevint normale. Le crétin avait trouvé le bouton "Play".
"Autant les effacer, en fait"
Oui. Non. Oui. Non. Si. C'était bien ce qu'elle craignait. Morgan l'avait... l'avait... Oui. Non. Oui. Non. Si. Ca ne pouvait pas être vrai. C'était un cauchemar. Ce n'était pas possible. Morgan n'avait pas pu... Oui. Non. Oui. Non. Si. Elle était... Elle était... C'était indubitablement la vérité. Une sale vérité-coup de tonnerre. Petra s'était toujours imaginée ça de façon plus majestueuse. Elle s'était attendue à la venue théâtre d'une grande dame sous une grande cape, avec une grande faux et un grand sablier, dont le dernier grain de sable tombe exactement au moment où son arme vous traverse. A la place, elle avait eu le droit à... à... à ça. A cette vision terrible de Morgan qui... qui... Et en plus, le crétin qui avait la télécommande n'arrêtait pas de faire "Retour en arrière" puis "Play", puis "Retour en arrière", puis "Play"... Les merveilles fantasmagoriques avec le grand ténébreux avaient été très vites effacées par les horreurs crachées par Morgan et par... par... Et là, elle était allongée, là, dans la Salle des Miroirs. Et là, elle avait mal. Etait-ce réellement ça, mourir ? Elle n'était plus qu'un... une... plus que... Rien. Du vide. De l'air. Du rien. Du vide. De l'air. Une morte. Un spectre. Elle se releva, malgré les fourmis et les scarabées. Elle avait toujours mal. Elle ne pensait pas que ça faisait mal, la mort. On doit souffrir sur le coup, puis plus aucune sensation, non ? Et puis on n'est pas censé rejoindre un ciel ridicule avec des angelots ridicules et d'autres morts ? On n'était pas censé trouver le repos éternel et n'exister sur Terre plus qu'à travers le "R.I.P. Machin" gravé sur la tombe et les photographies ? Alors pourquoi ?! Pourquoi avait-elle aussi mal ?! Pourquoi était-elle encore là ?! Pourquoi n'avait-elle pas déjà rejoint ce putain d'au-delà tant promis ?! Ce putain d'au-delà où l'on passe son temps, béat, assit sous un platane avec ceux que l'on aime ?! Putain. Si c'était ça, sa mort, sa punition pour ce qu'elle avait fait à Morgan. Putain. Tout ça parce qu'elle avait couché avec un gars, tout ça parce qu'elle avait bu un peu trop d'alcool. Tout ça parce qu'elle avait été lâche en se cachant sa dépression derrière l'ivresse. Elle avait envie de frapper tout ce qui passait à sa portée, de massacrer ce qui l'entourait. Elle avait mal, si mal. A son corps qui n'en était plus un. A son âme qui ne comprenait pas et qui comprenait à la fois. Il y avait des choses si claires, d'autres si sombres. Il manquait tant de pièces, il y en avait tant qui ne s'emboitaient pas. Et dans les miroirs, son reflet. Son reflet qui se reflétait dans un autre miroir, et ainsi de suite. Ses reflets. Ses milliers d'image de jeune fille morte. Brisée. Foutue. Morte. Elle ne voulait plus se voir. Se voir lui faisait mal. Elle ne voulait qu'arrêter de penser, de disparaître. Elle avait envie de prendre un marteau et de détruire tous ces miroirs, de détruire tous ces reflets, de détruire toutes ses images. Se détruire. En finir. Pour de bon. Mais pas de marteau près d'elle. De toute façon, elle ne pourrait même pas le saisir. Elle ne pourrait même pas toucher les miroirs. Elle les traverserait, puisqu'elle était... Fantôme. Morte. Vide. Air. Rien. Tout ce que vous voulez. Elle poussa un hurlement de rage. La douleur physique -si on pouvait encore parler de physique- s'estomper pour ne laisser place qu'aux souffrances mentales. C'était ça, la mort. Pas une vieille femme mal fringuée avec une faux et un sablier. Non : des tam-tam de folie dans la tête et l'incompréhension totale. Elle était morte. De la main de Morgan. Son meilleur ami. Bien qu'elle savait que ça ne donnerait rien, elle serra le poing et le projeta violemment sur le verre réfléchissant d'un miroir. ... .. . .. ... Un choc. Une main douloureuse. Une toile d'araignée creusée sur la glace. Et du sang. Du sang. Du sang ? Du sang ! Les morts ne saignaient pas. Elle... elle... Non, ce n'était pas possible ! Elle était... elle était... Elle était ! Elle porta sa seconde main à son cou. Oh, putain, pourquoi n'y avait-elle pas fait attention ? Là, dans la jugulaire, ça battait. Et pas du tam-tam. Elle était vivante. Elle poussa un cri de joie. Des larmes de bonheur dégoulinaient de ses grands yeux bleus. Elle était vivante, vivante, vivante ! Son corps battait, son sang circulait, elle existait. Elle n'était pas que du vent, elle était de la vie. Elle avait envie de courir à travers les couloirs du pensionnat, d'hurler sa joie, d'exprimer son euphorie, d'aller voir Morgan et aller lui raconter ce qui lui était arrivé dans cette salle des miroirs avec Mo... Merde. Non. La joie lui avait fait oublié, un court instant, la terrible réalité. Elle était peut-être en vie, mais on avait essayé de la tuer. Et c'était ça, le plus important. Morgan pourrait très bien recommencer. Morgan recommencerait s'il apprenait que Petra avait survécu. Plus rien ne serait comme avant. Mourir une fois était déjà suffisant. Paria : c'est ainsi qu'elle allait devoir se comporter pour survivre. Personne ne devait la savoir vivante. A part Sindy, bien sûr, à qui elle expliquerait un minimum de choses sur la situation. Paria : c'était sa seule chance. Se tenir à l'écart de la société, jusqu'à ce que ça se règle. Même si ça ne se règlerait probablement jamais. Vivre recluse, coupée des autres, cachée.
Au fond, c'était comme si elle était morte. |
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