Sonja observa la grande salle dans laquelle elle venait de pénétrer, après avoir gravi un imposant escalier de marbre, avec un sourire absent, les yeux dans le vague. Une pensée formulée effleura son esprit – « Oh. C’est joli… » - puis disparu, laissant place à son habituel fourmillement de pensées fugitives sans réel sens. Elle nota le lustre brillant mais qui distillait une lumière trop faible, les lourdes tapisseries aux teintes sombres, les décors austères, quelques meubles de bois sculpté et vernis contre le riche papier peint du mur, des œuvres qu’elle ne reconnut pas, d’auteurs sans doute talentueux mais oubliés. Un chuchotement la traversa, une idée qui n’était pas d’elle qu’elle n’aurait pas formulé en temps normal : « On les a oubliés car ils sont venus ici… ». Un tableau d’affichage, qui ne collait pas avec le
reste de l’aménagement du lieu, attira son attention – si on peut nommer attention le peu d’intérêt qu’affiche une personne tant ancrée dans ses pensées. En vérité, elle voyait à peine le monde extérieur, trop flemmarde pour réellement s’y intéresser. La seule personne qui perçait son esprit, la seule personne paressant réelle, c’était Phil, son fiancé – parce qu’il était comme elle.
Elle s’approcha à pas lents et feutrés de la paroi et lu le message épinglé au tableau.

« Si vous lisez ces lignes déposées sur ce misérable
bout de papier, c’est que vous venez de commettre une grossière erreur,
certainement la plus grosse de votre vie. »

Oh ?, se dit Sonja, sans se départir de son sourire rêveur. Elle se demanda vaguement ce que cela signifiait, et conclu immédiatement qu’il lui fallait lire la suite du texte pour comprendre.

« Je vous souhaite la bienvenue, en tant que pensionnaire, dans votre
nouvelle et éternelle demeure. Ceci n’est nullement une farce de mauvais goût,
je n’ai aucunement le temps de plaisanter, ni l’envie de rire. Vous allez
bientôt vous rendre compte que cet endroit maudit vous retient prisonnier. Est
–ce de la magie ? La réponse à cette question est oui. Si vous ne me croyez
pas, tentez d’ouvrir la porte, n’hésitez pas, j’ai comme vous, désespérément
tenté de sortir des centaines de fois, en vain. »

Vraiment ?, se demanda de nouveau la jeune fille, sans la moindre trace d’inquiétude. C’était peu crédible, mais quel serait l’intérêt de l’auteur à faire une
plaisanterie si facilement vérifiable… ? Elle sentait vaguement une chose en elle bondir d’excitation, mais elle savait que l’excitation était une mauvaise chose qui menait toujours à l’effort physique ou moral et donc au travail et elle fit taire cette chose.

« Alors ? Convaincu(e) ? Bien…

Pour éviter une perte de temps colossale, je vais retracer pour vous les
grandes lignes de votre nouvelle existence. Sachez que ce pensionnait étant
magique, il va falloir vous résoudre a croire à tout, même aux faits les plus
invraisemblables.
Ne paniquez pas si jamais vous faites vous-même des choses inexplicables : en
entrant dans ce pensionnat, vous vous verrez doté(e) d’un pouvoir qui vous sera
propre.
De plus, vous allez retrouver dans l’enceinte de cette prison, un ami que vous
aurez oublié depuis quelques temps déjà, n’ayez donc aucune crainte si un
animal vous parle, cela ne sera que votre alter ego astral. »

Elle prit le temps d’analyser ces paroles, pesa vaguement le pour ou le contre afin de savoir si elle y croyait ou non. Ne pouvant se décider, elle se déclara intérieurement qu’il suffisait de vérifier, tout d’abord en poussant cette fameuse porte. Elle verrait ensuite. Elle parcourut rapidement les derrière lignes et nota le nom – Periple Skye – apposé en guise de signature, et parcourut l’escalier en sens inverse. Foulant des pieds le grand tapis rouges, elle se dirigea vers la porte de bois sculpté aux motifs fins et en pressa le battant des paumes. Comme celui-ci ne semblait pas vouloir bouger, elle chercha une poignée. Puis elle prit conscience d’une chose, éveillant une seconde pensée consciente en elle : « Il n’y a pas de
poignée intérieure ». Pourtant, elle en avait vue une à l’extérieur. Elle décida qu’elle croyait la lettre. Finalement, elle s’appuya contre le battant nonchalamment et prit la décision de réfléchir – un peu.

Quand Alejandro avait poussé – un peu brutalement, il est vrai – la porte de son épaule, il s'était tout de suite rendu compte que ça devait être une porte assez imposante. Style porte d’église, peut-être, oui. Pas comme celle de chez lui, en tout cas. Il avait pénétré dans le bâtiment, avait laissé la porte se refermer derrière lui sans s'en inquiéter le moins du monde, et avait porté son portable à son oreille droite. Pas de tonalité. Pas de Miguel. Instantanément, la peur l'avait envahit. Parce qu'il était tout seul, dans un endroit qu'il ne connaissait pas, et qu'il n'avait vraisemblablement plus de moyens de communiquer avec l'extérieur. Il avait 'observé' alentours, observé le noir complet qu'il voyait depuis plusieurs années, et poussé un soupir rageur. Il ne s'agissait pas de pleurer, en plus. Il devait déjà avoir l'air suffisamment idiot comme ça. Mais tout de suite, dès qu'il avait laissé la porte se refermer, il avait bien senti qu'il n'y avait personne. Il était seul dans cette pièce, dans cet endroit, c'était presque une certitude. Peut-être que quelqu'un l'observait dans un coin, silencieux, mais il n'avait aucun moyen de le savoir ; aussi avait-il chassé cette idée de son esprit, rangé son portable dans sa poche, ravalé amèrement sa fierté et avait tendu ses bras devant lui. Avait fait quelques pas incertains sans rencontrer d'obstacles, tout en prenant bien garde de compter le nombre de ses pas. Un, deux, trois, quatre, cinq...
Au bout d'un moment, son pied avait rencontré quelque chose de dur. Il s'était baissé prudemment, avait tâtonné la chose en question, et en avait conclu que ce devait être un escalier. Il avait posé sa main sur la rampe, avait grimpé doucement les marches, toujours en les comptant. Avait demandé deux trois fois, à voix haute, s'il y avait quelqu'un. Seul le silence lui avait répondu. Il était vraiment complètement seul, et n'avait pas la moindre idée de l'endroit dans lequel il était entré. Pas une église, en tout cas, ça n'y ressemblait vraiment pas. Pas d'escaliers, dans une église. L'idée qu'il ait pu rentrer dans une maison lui glaça le sang, mais il fit de son mieux pour ne pas paniquer. Il n'aurait qu'à expliquer qu'il s'était perdu, qu'il était aveugle. Ça devrait passer. Ils ne pourraient pas lui en vouloir.

Alejandro avait marché un moment, après avoir atteint ce qu'il imaginait être le premier étage, et s'était même arrêté près d'un mur, sans savoir où il était exactement. Il crut entendre quelqu'un passer près de lui, à un moment, mais à peine eut-il le temps d'élever la voix que la présence s'était évanouie. Il devait halluciner. S'il était bien chez des particuliers et qu'il avait croisé quelqu'un, cette personne aurait sûrement cherché à l'arrêter. A le mettre dehors. Or la présence qu'il avait entendue, qu'il avait sentie passer à sa droite, elle avait poursuivie son chemin sans même lui poser de questions. Un établissement public, peut-être? Mais il devrait y avoir un accueil, dans ce cas. Et personne ne l'avait arrêté, quand il avait commencé à grimper les escaliers.

Ça faisait maintenant deux minutes, peut-être plus qu'il était prostré près de ce mur, les doigts crispés sur la lanière de son sac, quand il décida de faire demi-tour. Revenir à l'entrée, sortir. Comme ça, il aurait à nouveau du réseau, il retrouverait Miguel et ils iraient faire des trucs marrants ensemble. Voilà tout ce qu'il voulait faire. Il descendit les escaliers, sans un bruit, et se dirigea à pas lents vers la porte. Qui devrait être..., là.

Mais quand il tendit son bras pour chercher la poignée, ses doigts se refermèrent sur du tissu. Une épaule. Une épaule?

Il recula immédiatement, l'air aussi gêné que confus. Quelqu'un était-il rentré, le temps qu'il fasse sa petite promenade?

« Oh, excusez, je, excusez moi! s'exclama-t-il un peu trop rapidement, essayant de fixer son regard là où il imaginait que la 'personne' se trouvait, sans se rendre compte qu'il regardait plus au-dessus de la jeune fille que la jeune fille en elle-même. Je ne vous avais pas..., eh, vu. »

Il faillit rire de sa propre idiotie, mais sa gêne l'emporta et il se contenta d'une grimace embarrassée. Parfois, il aurait aimé avoir les yeux un peu opaques. Ainsi, sa cécité aurait été flagrante. Mais ses yeux noisette étaient parfaitement normaux, comme ceux de la personne en face de lui, sans doute, et il n'était pas évident de dire qu'il était aveugle. Il espéra que la personne l'aurait remarqué, pour ne pas avoir à le préciser, et toussota. Histoire de se redonner une contenance.

« Vous..., habitez ici? »

Pourquoi pas. Oui, pourquoi pas, tenta-t-il de se convaincre, les doigts crispés sur la lanière de son sac en bandoulière, qui reposait contre sa cuisse.

La porte s’ouvrit avec brutalité et, sous la surprise, Sonja tomba par terre la tête la première. Un peu sonnée, elle s’appuya contre le mur et massa son crâne. Elle avait un peu de mal à réfléchir. Finalement, elle leva les yeux vers la personne qui venait d’entrer. C’était un garçon brun qui d’un pas hésitant, les mains tendues devant lui, marchait vers l’escalier. Il ne semblait pas l’avoir vue. Elle pensa d’abord qu’il dormait et qu’il était somnambule. Mais ça ne collait pas : il avait les yeux grand ouvert et ses gestes n’étaient pas illogiques. Elle le suivit du regard jusqu’à ce qu’il disparaisse dans le hall. Peu après, elle entendit une voix demander s’il y avait quelqu’un. C’est alors qu’elle comprit : ce jeune homme était un aveugle, et il habitait ici. D’une manière ou d’une autre, il s’était rendu compte de sa présence – avait-elle laissé des marques que seul un habitant de l’endroit pouvait voir – et la cherchait à présent. Se rendant compte de son avantage, elle décida de s’échapper avant qu’il ne la trouve et ne se mette à la réprimander pour son intrusion. La porte ne s’ouvrit pas plus lorsqu’elle tenta de la faire s’entrebâiller. Pourtant, le garçon venait d’y entrer et il n’avait eu aucune difficulté à le faire. Il devait y avoir un mécanisme intérieur qu’elle avait sans le faire exprès actionné en entrant. Quand au papier, ce n’était qu’une mauvaise blague. Elle se détendit et se mit à chercher un bouton ou quelque chose du même genre sur la paroi de la porte. Soudain, une main agrippa son épaule.
C’était le garçon qui était revenu et qu’elle n’avait pas entendu arriver. Elle frissonna et se dit qu’elle allait encore se faire gronder…
« Oh, excusez, je, excusez-moi ! Je ne vous avais pas… eh, vu. »
C’était une plaisanterie ? Elle se mit à douter de ses conclusions. Elle se remit à sourire béatement en se rendant compte qu’elle ne risquait rien. Le jeune homme fixait de ses yeux noisettes au regard vide un point situé un peu plus haut que son crâne.
« Vous… habitez ici ? »
Ainsi, il n’était réellement pas l’occupant des lieux. Et ils étaient vraiment enfermés tout les deux ici. Super, se dit-elle, bravo, Sonja ! Enfermée dans un endroit glauque et bizarre avec un aveugle et un papier qui informe bien trop peu. Génial.
Elle prit le garçon par la main.
« Bon, je crois qu’on est enfermé ici tous les deux. Cette porte s’ouvre pas, et… Enfin, y’a un papier pour expliquer ça, mais il est pas écrit en braille, alors… Enfin, je peux te le lire, quoi. »

Sonja réfléchit un instant, l'air songeur, mais son sourire absent toujours solidement ancré sur ses lèvres. Finalement, elle répondit :
"Ouais, ça se peut que ça soit une blague, mais perso j'y crois pas trop. Ca parait assez réel. Enfin, tu jugeras pas toi-même, j'vais te lire le papier."
Elle le mena, à travers l'escalier marbré au tapis rouge, jusqu'au devant du tableau d'affichage de liège clair et posa son doigt sur la feuille un peu chiffonée et jaunie où l'écriture soignée à l'encre bleue du - ou de la ? - dénommé Periple Skye était déposée. Elle lut l'intégralité de la lettre, d'une voix assurée et sans émotion, comme à son habitude, avant d'ajouter :
"Et c'est signé Periple Skye."
Puis elle se rappela que, peut-être, le garçon n'était pas Useless, qu'il était peut-être choqué par ce qu'il venait d'entendre, qu'il était peut-être même mortellement inquiet. En fait, chez les gens qui croyaient en l'avenir et la mort, la perspective d'une éternité d'enfermement était assez terrible. Pour un Useless, ce n'était qu'un jeu, chaque péripétie n'était qu'un peu d'amusement ajouté à la vie. Tentant de prendre l'air compatissant, elle ajouta :
"Pas trop choqué, j'espère ? Je sais que ça doit être plus difficile à entendre pour ... Enfin, pour les gens normaux."
Elle se rendit alors compte qu'elle croyait tout ce qui était dit dans cette lettre. C'était vrai. Elle allait rester toute sa vie enfermée là-dedans et elle ne reverrait plus jamais son fiancé ni personne de sa connaissance. Elle ne s'inquiéta pas plus qu'autre chose. Elle se rappela de pleins d'autres choses. Valtimore, sa peluche en forme de paresseux, qui avait disparu elle ne savait comment. Ses parents, Useless convaincus, qui l'avaient élevée selon leur doctrine et permit de vivre comme elle vivait. Les gens qui la rejetait, considérant tous les Useless comme de dangereux terroristes extrémistes. Alors qu'elle prônait la paix et la liberté, la mentalité de son mouvement culturel souffrait d'une vision très négative suite à l'attentat des tours jumelles. Elle-même avait souvent été martyrisé, mais elle l'avait également vécu comme un jeu. Elle était fière d'être comme elle était, et ...
Ce fut cet instant que Valtimore choisit pour se présenter. Elle l'aperçut, crut-elle, la première, car il était trop lent et silencieux pour être perçu par les oreilles du jeune homme. Un paresseux, un bébé paresseux, plus exactement, avançait vers eux. Elle le contempla longuement, se demandant d'où il sortait.
"Bonjour", lança l'animal d'une voix aiguë et lancinante. Elle la reconnut immédiatement. Lorsqu'elle était petite et solitaire, son meilleur ami, sa peluche, parlait ainsi. Et il se tenait là, bien vivant.
Elle se souvint de ce que disait la lettre et lâcha la main de son compagnon d'infortune pour se précipiter vers la bête.
"Valtimore ? Valtimore, c'est toi ? Dingue, ça ! Il s'en passe des choses aujourd'hui, dis-donc. Dis-moi, paresseux, depuis quand les animaux parlent ?"

"Ouais, ça se peut que ça soit une blague, mais perso j'y crois pas trop. Ca parait assez réel. Enfin, tu jugeras pas toi-même, j'vais te lire le papier."

Le jeune homme serra les dents et haussa les épaules. Oui, ça se pouvait, parfaitement. Il pensait plutôt que c'était elle, qui risquait de lui faire une mauvaise blague, mais elle ne sembla même pas considérer l'idée plus d'une seconde. Elle n'avait même pas l'air de comprendre que c'était elle qu'il accusait ; et à cette idée, il se détendit. Si elle s'était effectivement moquée de lui, sûrement se serait-elle défendue. Enfin, il imaginait. Il espérait. Il cligna des yeux, surpris, quand il sentit qu'elle l'entrainait plus loin, mais la suivit sans broncher. Ce n'était pas vraiment comme s'il avait le choix, de toute façon. Puis ils s'arrêtèrent, et la voix de l'inconnue coupa court à ses questions. Mieux valait se concentrer sur ce qu'elle disait.

Il écouta attentivement tout ce qu'elle dit, jusqu'à ce qu'elle ajoute d'une voix monocorde que c'était signé Periple Skye. Peri...ple? Periple? Il resta bêtement planté là, sa main serré dans celle de la fille, et tenta de donner un sens à ses paroles. Ils étaient enfermés. Enfermés. Se résoudre à tout, même aux choses les plus incroyables. Un animal, un pouvoir. Bien. Bien. Soit il était officiellement fou, soit il s'était endormi, soit il était mort. Il ne voyait pas d'autres possibilités. Il ne pouvait tout simplement pas y en avoir d'autre. Comment pourrait-il être enfermé ici, sinon? C'était impossible à croire. Et il n'avait aucune envie de croire ça. Il allait se réveiller. Bientôt.

"Pas trop choqué, j'espère ? Je sais que ça doit être plus difficile à entendre pour ... Enfin, pour les gens normaux."

La voix de la jeune fille le ramena sur terre, et il secoua sa tête de gauche à droite d'un air absent. Il releva à peine le 'pour les gens normaux', vu l'absurdité de la situation. La porte ne s'ouvrait pas, hein... Il n'avait pas essayé de l'ouvrir de nouveau après être entré, remarque. C'était peut-être faux. Quelqu'un se serait-il amusé à les enfermer là? Ou peut-être que cette fille, là, s'amusait à lui faire croire qu'il était enfermé là. Ça n'expliquait pas comment elle aurait pu 'lire' d'une manière aussi fluide sans rien devant les yeux, ni où il était exactement, mais c'était mieux que rien.

Il y avait forcément une explication rationnelle, et il allait la trouver.

Alejandro sursauta violemment en entendant la voix aiguë qui venait de résonner ; il ne l'avait pas entendu venir, qui qu'il soit, et c'était suffisamment inquiétant comme ça. Il tourna sa tête de droite à gauche, tentant de percevoir l'origine du bruit, et fut surpris de sentir la main de l'inconnue lâcher la sienne, vraisemblablement pour aller à la rencontre de la voix. Il sortit machinalement son portable de sa poche, et tenta en vain d'appeler Miguel. Rien à faire.

"Valtimore ? Valtimore, c'est toi ? Dingue, ça ! Il s'en passe des choses aujourd'hui, dis-donc. Dis-moi, paresseux, depuis quand les animaux parlent ?"

D'accord. Cette fille est complètement folle, songea-t-il avec une pointe d'amertume. Elle est dingue, et quoi qui ait parlé, ça ne peut pas être un animal, parce que bon Dieu, les animaux ne parlent pas, justement, et qu'il n'était absolument pas prêt à croire un truc pareil. Il rangea calmement son portable dans sa poche, réellement persuadé d'avoir affaire à une désaxée, et ébaucha une..., une sorte de sourire crispé. Peut-être qu'on l'avait drogué. Il ne voulait pas savoir.

« Hm, qui est, Valtimore? demanda-t-il sans se départir de son ébauche de sourire. Un..., ami à toi, peut-être? Comment il a pu rentrer, si la porte est fermée? »

Et toc. Voilà. Persuadé d'avoir mis le doigt sur quelque chose d'important (imbécile) il en oublia presque l'histoire des Alter ego, des pouvoirs et de toutes ces choses invraisemblables.

« Oh! Je m'appelle Alejandro, ajouta-t-il subitement, cherchant plus à gagner du temps pour réfléchir qu'autre chose. Je connais le nom de, Valtimore, mais pas le tien. Alors, c'est...? »

Sonja resta un instant à divaguer intérieurement, affichant un sourire vide, quand elle se rendit compte qu'il lui parlait.
-Ah.... Ah ? Ah, moi c'est Sonja.
Elle avait vraiment l'air d'une toxicomane en puissance.
-Valtimore c'est euh... Un paresseux, quoi. Tu veux le caresser ?
Elle posa la tête du bébé paresseux contre la main du garçon et sourit béatement. Valtimore s'accrocha au bras d'Alejandro et décida de piquer un somme contre lui. Elle le regarda, attendrie.
-Hey, Valtimore, c'est pas le moment de dormir, sinon j'm'en vais sans toi.
Aucun doute, elle avait l'air complètement tarée. Le genre de personne sans cesse sous l'emprise de stupéfiants.
-Comment il est rentré ? Mais... Il est pas rentré, il arrive de ... Euh, ce couloir, là-bas, je crois. Hey, Valtimore, t'habites ici ?
L'animal dodelina de la tête et grommela une réponse inintelligible qui semblait parler d'une longue attente et de souvenirs oubliés. Sonja lui répondit d'arrêter la coke et le prit dans ses bras.

Flash-back.
Oh, Valtimoooore ! Valtimore, t'es mon meilleur ami !
-Sonja... C'est une peluche, ma chérie. Valtimore ne peut pas t'entendre, tu comprends ?
La fillette se tourna vers sa mère, un air boudeur sur son visage de bambin encadré de boucles claires.
-Valtimore est MON copain. Tu ne peux pas savoir s'il entend ou pas !
Elle courrait vers le jardin, la peluche serrée dans ses bras, et le père posait une main sur l'épaule de sa femme.
-Chérie, c'est une petite fille. Elle vit encore dans un monde de rêve. Laissons-la en profiter, la vraie vie sera suffisamment dure plus tard.
La petite, qui n'avait rien entendue, était désormais allongée dans l'herbe. Personne ne l'écouta murmurer "Moi, je sais qu'il entend tout..."
Fin du Flash-Back.

-Ahaaaa, j'avais toujours dit que tu savais parler ! Allez, on y va ?
Ignorant soudainement le jeune homme, elle se détourna de lui et commença à s'éloigner.