Je crois que ma vie n'est pas tout à fait fascinante. Je suis née un beau matin de février, mes parents étaient – et sont toujours – aimants, ils m'ont élevée dans la plus pure tradition suédoise. Je n'ai jamais été malheureuse et n'ai absolument pas souffert dans mon enfance. Au contraire, j'étais une enfant plutôt mignonne, gentille et dans la moyenne concernant les résultats scolaires. Peut-être un peu turbulente, je vous l'accorde, mais rien de bien méchant. J'ai toujours été tellement excitée par certaines choses qui me rendaient heureuses que je n'ai jamais pu retenir mon agitation. Oh, je n'en étais pas pour autant hyperactive, mais dès que quelque chose me plaisait, j'en devenais toute contente et je n'arrivais plus à me concentrer sur autre chose. Je me souviens une fois, en classe, je devais être à l'école primaire. Nous avions un animal de compagnie, un hamster, et chaque jour, un élève devait se charger de le nourrir. Le jour où notre professeur m'a choisie, j'étais tellement réjouie que j'ai presque failli laisser s'enfuir la bestiole en lui donnant à manger, tant je me concentrais sur ma joie au lieu de faire attention à ce que je faisais. Je sautillais sur place, je faisais de grands gestes. Deux heures après je ne tenais toujours pas en place.

Tous les matins, en me rendant à l'école, je passais devant un clochard qui faisait la manche pas très loin de là où on habitait avec papa et maman, et tous les matins, il me saluait chaleureusement. Je lui rendais bien entendu la pareille, si bien qu'au bout de quelques mois, un lien s'était noué entre nous. Il m'arrivait parfois de lui offrir un café et nous discutions pendant quelques minutes avant que je m'en aille. Je me souviens, j'avais 13 ans. Parfois, lorsque je me trouvais avec lui, les gens nous dévisageaient comme s'ils se demandaient ce que nous faisions ensemble. Parfois, certains le regardaient comme s'il faisait quelque chose de mal et me lançaient des regards de pitié, mais je m'en fichais. Du moment que je pouvais lui apporter un peu de réconfort, je me sentais bien. Au fond, je ne sais pas ce qui me liait à lui mais je sentais que ce que je faisais était ce qu'il fallait faire. Que c'était bien.

Un jour, comme à l'accoutumée, je lui ai offert un café. En ressortant de la petite échoppe, alors qu'il se trouvait devant moi, je l'ai vu s'avancer pour traverser. J'ai aussi vu la voiture qui arrivait bien trop vite.

« Attention ! »

J'ai voulu le retenir mais il était trop tard. La voiture l'avait percuté de plein fouet. Je le voyais, étendu sur le bitume. Je ne pouvais y croire. Pourquoi fallait-il qu'un homme comme lui meure alors qu'il ne le méritait pas ? Je me suis approchée de lui, des larmes coulant silencieusement sur mes joues.

« Ma petite... Ne sois pas triste. Profite de tous les instants que la vie t'apporte... Vis comme si c'était ton dernier jour et ne regrette rien. Je n'ai aucun regret... Je pars en paix. »

Ces mots m'ont marquée à jamais, et je me suis promise dès lors de suivre ces conseils. Ma vie est devenue un vrai bazar mais au moins je n'en perds pas une miette. Parce que j'ai décidé de profiter de tout. De devenir quelqu'un d'autre. De faire ce que j'avais envie de faire quand j'en avais envie. Sans entraves. J'ai ainsi commencé le piano et puis j'ai arrêté au bout de deux ans, lassée. Puis je me suis pris de passion pour la cuisine ; je regardais maman faire et traînais tout le temps dans ses pattes pour l'aider, mais j'ai vite arrêté. J'ai aussi rencontré Carl et je l'ai trouvé tellement rigolo que j'ai voulu passer tout mon temps avec lui, mais au bout d'un moment il ne m'a plus amusée du tout, alors je suis partie. Et puis j'ai rencontré Anja, Johan, Linnea et Astrid, mais chacune de ces amitiés a fait son temps.

J'ai maintenant vingt-deux ans, et qu'est-ce que j'ai fait de ma vie ?

Il y a un an, j'ai décidé de partir explorer le monde. Je ne me voyais pas rester en Suède toute ma vie. Oh, j'aime bien mon pays, mais j'ai toujours rêvé de voyager, de découvrir de nouvelles cultures, de nouveaux visages... J'étais dans un village d'Allemagne quand ça s'est passé, je crois. Je cherchais juste un hôtel pour dormir, et je suis tombée sur une grande bâtisse, plutôt vétuste. A première vue, elle ne m'a pas vraiment inspiré confiance mais j'étais là, et il fallait bien que je dorme. Alors je suis entrée.

Majken est sans aucun doute atteinte du syndrome de Peter Pan. Elle ne veut pas grandir. Elle considère que le monde de l'enfance est un monde merveilleux. Etre un enfant, c'est regarder le monde avec curiosité, c'est ouvrir de grands yeux ébahis et émerveillés devant quelque chose qu'on ne comprend pas mais qui nous attire, nous étonne, nous passionne. Etre un enfant, c'est vivre sans penser au lendemain. C'est être innocent et pardonné de tout. Etre un enfant, c'est vivre avec simplicité. Bien sûr, la jeune femme est consciente qu'elle n'est plus une enfant mais elle aimerait parfois retrouver cet état de grâce, c'est pourquoi elle agit quelquefois comme si elle avait encore huit ans, se mettant à sautiller sur place, à courir pour rejoindre un endroit en riant ou encore à étirer les mots comme un enfant le ferait. Il lui arrive même de bouder et de rester dans son coin quand quelque chose ne lui plaît pas.

Curieuse, Majken s'intéresse grandement aux autres. Elle aime les observer, savoir qui ils sont, ce qu'ils font, ce dont ils rêvent. Rien qu'en les regardant, elle sait. Elle imagine.

Majken n'aime pas la médiocrité. Elle est entière et ne veut pas vivre une vie faite de regrets et de remords. Elle profite de tout ce qui lui est offert tant qu'elle le peut, et jouit de tout avec excès. Si quelque chose lui plaît, une activité ou un être humain par exemple, elle n'hésitera pas à passer tout son temps à faire cette activité ou avec cette personne jusqu'à s'en lasser. La demoiselle est aussi excessive qu'elle se lasse vite : ses jouets font leur temps puis elles les abandonnent au coin d'une rue, comme s'ils n'avaient jamais existé. Elle le fait toutefois sans méchanceté ni préméditation aucune. Elle ne veut pas faire de mal, mais elle agit sans réfléchir aux conséquences. Sa spontanéité peut donc lui jouer des tours.

Enfin, Majken est utopiste et optimiste jusqu'au bout des ongles et ne supporte en aucun cas le pessimisme de ses congénères. Après tout, la vie est belle, ne la gâchons pas. Cela ne l'empêche toutefois pas d'avoir quelques moments de mélancolie, mais ce ne sont que des moments éphémères, elle le sait. Elle n'en veut pas.

Avenant, c'est sans doute le mot qui caractérise le mieux le physique de Majken. La demoiselle passe son temps à sourire à tous les individus qu'elle croise et sa manière de marcher, sautillante, presque enfantine, fait souvent sourire. De plus, son visage se transforme selon ses expressions : qu'elle soit grave et son visage prendra un air sérieux, la vieillissant immédiatement ; qu'elle rie aux éclats et son visage prendra des traits enfantins. La demoiselle peut à peine cacher ses émotions, son visage très expressif les délivrant immédiatement à son interlocuteur.

De taille et de corpulence moyennes, Majken n'est pas jolie, elle a du charme. Son air malicieux et ses yeux verts pétillants y sont sans doute pour beaucoup, mais elle n'en a absolument pas conscience. Par dessus tout, elle est naturelle. Il n'y a qu'à voir ses cheveux. Oui, elle en prend soin, mais elle ne fait pas de chichis avec. Pas de coiffures extravagantes, la jeune femme préfère laisser ses cheveux détachés. Ca lui donne une certaine, ces cheveux lui arrivant dans le bas du dos.

Concernant sa tenue vestimentaire, Majken n'est pas vraiment difficile. Son armoire comporte de tout : des robes, des pantalons, des jupes, des chemises... La Russe n'a pas de style particulier, elle s'habille même parfois un peu n'importe comment, enfilant les premiers vêtements lui tombant sous la main, ce qui peut lui donner un style... original.