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 « Dans les cuisines, même le majordome n'a pas son mot à dire. » [Aarne]

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Maël Lionwhyte
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« Dans les cuisines, même le majordome n'a pas son mot à dire. » [Aarne] _
MessageSujet: « Dans les cuisines, même le majordome n'a pas son mot à dire. » [Aarne]   « Dans les cuisines, même le majordome n'a pas son mot à dire. » [Aarne] Icon_minitimeLun 17 Sep 2012 - 16:31

Tribulations vectorielles de l'araignée qui se déplace sur sa toile.
En diagonale, premièrement.

« Faim ? Comment je pourrais avoir faim, là, explique ? A part défoncer la porte d'entrée, j'ai absolument rien envie de faire ! »

J'explosais de rire, absolument charmé par l'humour des plus vindicatifs du jeune homme. Quoique cela n'était peut-être pas particulièrement une bonne idée que de me moquer d'un être mesurant trois têtes de plus que moi. Amusé, je courais me réfugier près d'une table, dont le rebord en bois blanc m'arrivait aux yeux, ce qui même par rapport à moi, était une unité de mesure assez importante. Mes doigts se crochetèrent sur, et me soulevant avec force, je me hissais. Mes jambes battirent une seconde dans le vide, sous l'effort inopiné, et enfin, essoufflé, me calais confortablement, veillant à ne pas me tâcher les doigts avec la graisse saupoudrant la quasi totalité des lieux. Je reportais mon attention sur Aarne, ensuite, gesticulant avec mes doigts, comme pour éviter que par une obscure raison, ceux-ci s'enlisent entre eux. Arrrrh, horrification. Horreur. Sombre et malsaine.

« Mais fais-donc, mon cher. Il n'y a personne qui t'en empêche. »

Personne. Surtout pas moi, parce que je savais à quel point ça faisait du bien de se calmer les nerfs sur quelque chose de dur, et si possible, d'immobile. Un mur, un arbre, une porte, quelle pouvait-être la différence ? Un sourire espiègle étira mes lèvres, et secouant mes mèches blanches, j'étudiais du regard les profondeurs dans lesquelles nous avions sombré. Angoissantes, effrayantes, répugnantes ou amusantes, dans leur décadente saleté ? Je ne parvenais pas à m'approprier la cuisine avec des mots, et la simple vision de cet endroit aussi dévasté que travaillé et sculpté par le massacre culinaire me suffisait. Du moins, c'était ce que je pensais. Peut-être n'avais-je pas raison ? J'ignorais absolument ce qui était vrai, ce qui était faux, ce qui faisait partie de la réalité et du mensonge, de toutes manière. Peut-être que le simple fait de rencontrer un humain me suffisait : je n'étais pas seul, j'étais incapable de l'inventer totalement, et je savais qu'il existait. Alors peut-être que je ne voulais pas savoir plus ?
Mm.


« Quoi que.  Y'a peut-être des couteaux ou des trucs comme ça. »

Mes doigts accrochèrent le carrelage poisseux de mon support, et je me levais sur la table graisseuse. Quelques pas spongieux, qui me conduisirent jusqu'à l'extrémité de la cuisine, sans même que je touche le sol. Mon regard violet traversa la salle comme un oiseau pris au piège, avant de revenir se calquer sur l'énorme armoire me bloquant le passage. Au vu de son positionnement, je songeais qu'elle était certainement pleine d'ustansile dont l'utilisation devait être facile et à partiée de main, surtout. Proches du feu. Et de ces espèces de plaques. Gazinières ? Mes sourcils arquèrent une expression dubitative. Puis, violemment, je frappais du revers du pied dans les flancs de l'armoire en bois. Le fracas soudain de la porte explosant, suivi dans les secondes précédentes par l'amoire en question, qui perdant l'équilibre ; alla s'écraser au sol. Le vacarme me laissa figé, trois secondes infinies, mon sang glacé. Puis, fou rire.

« Wow ! »

Je sautais au sol, pliant les genoux pour amortir ma chute, et m'approchant de l'armoire éventrée, observais son contenu répandu sur le sol. Des couteaux, des fourchettes, des spatules et des poëles. J'attrapais un long couteau, servant certainement à découper les volailles. Mes doigts refermés autour de la fusée, je fixais une seconde mon reflet, d'un regard moqueur, avant de chercher Aarne du regard.

« Eyh, Aarne ! Regarde ça ! Je suiiiis Jaaaaaack ! Jack l'Eventreur ! Muhahahaha ! … Tu sais, avant que je ne rentre ici, et bien Jack sévissait à l'extérieur. Je me trouve plutôt chanceux : imagine que je sois un jour tombé face à lui. Il m'aurait égorgé en moins de temps qu'il n'en faut pour le... Oh ! Qu'est-ce que c'est que ça ? »

Lâchant le couteau qui heurta le sol en résonnant, je me précipitais vers les débris de l'armoire, en fouillant parmi l'argenterie. La couleur avait accroché mon regard, et lorsque mes doigts se posèrent dessus, je sus que l'engin relevait du même avancement que le portable dans ma poche, de Aarne. Je tirais d'ailleurs ce dernier des plis blancs du pantalon, pour comparer. L'objet n'avait pas la même forme. Un éclair assombrit mon regard, tandis que je le tournais entre mes doigts, pour essayer de comprendre. Cela ressemblait à une petite boite à cigare, en beaucoup plus léger, mais faite avec un matériau des plus étrange. Le battant s'activait et laissait apparaître deux écran, accompagnés de certains boutons. Tout en blanc. Je lus « power » sur un de ces derniers. Appuyant avec une certaine méfiance sur ce dernier, je vis apparaître avec stupéfaction des couleurs et des formes sur l'écran du haut et du bas, en écho avec une petite musique des plus aiguës. Ébahi, j'assistais à la mise en place des lettres sur l'écran, et je lus à voix haute « démarrer le jeu GBA » …



« C'est quoi un jeu GBA ? »

Sans attendre particulièrement de réponse, j'effleurais du bout du doigt la surface de l'écran du haut, puis voyant que ça ne marchait pas, essayais avec l'écran du bas. Il y eu une nouvelle explosion de couleur, et une musique résonna soudain dans les cuisines. Les lettres, à la dorure finement ciselées apparurent, formant le mot « Pokémon ». Suivie d'une créature volante, aux formes d'oiseau. Le « truc » m'échappa des mains.

« Ohmondieumondieumondieumondieumondieu ! Mais c'est un cocatrix ! »

Puis, avec lenteur, je récupérais l'engin blanc entre mes doigts.

« Est-ce … ça peut sortir de la boite ? » Demandais-je en me tournant vers Aarne, le regard suppliant.


Dernière édition par Maël Filipoudille le Mer 10 Avr 2013 - 14:36, édité 3 fois
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Aarne Kinnunen
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« Dans les cuisines, même le majordome n'a pas son mot à dire. » [Aarne] _
MessageSujet: Re: « Dans les cuisines, même le majordome n'a pas son mot à dire. » [Aarne]   « Dans les cuisines, même le majordome n'a pas son mot à dire. » [Aarne] Icon_minitimeMar 25 Sep 2012 - 17:06

Yeux plissés en direction du gamin, Aarne se fait la promesse de le tuer la prochaine fois qu'il rit. Ou la prochaine fois qu'un son sort de sa bouche. Bref, quand il en aura envie – donc si cette petite chose blanche continue de sourire et de s'extasier trop bruyamment, sa vie pourrait bien s'en retrouver sacrément écourtée.
Heureusement pour eux, Maël décide d'aller s'installer sur une table – ou plutôt de grimper dessus, vu sa taille – et, quoi qu'il en soit, ce geste coupe court à l'envie de meurtre qui avait envahi le finnois. Il la ravale, grimace ; soupire entre ses dents. De un, il ne peut pas tuer quelqu'un : c'est une des choses qui le sépare certainement des cas psychiatriques, et il espère encore avoir assez de contrôle sur lui-même pour ne jamais en arriver là. De deux, aussi énervant soit-il, ce garçon est encore et toujours son seul repère dans cette bâtisse. Pour l'instant au moins, il se doit de le garder à l’œil.
Tant qu'à faire, le petit albinos peut aussi servir d'éclaireur. Vu la simplicité avec laquelle il s'installe sur une table qui ne lui appartient pas, il ne devrait pas avoir trop de scrupules à fouiller un peu partout.

« Mais fais-donc, mon cher. Il n'y a personne qui t'en empêche. »

Personne ne peut l'en empêcher, plutôt. Mais il ne répond pas. A la place, il passes ses doigts sur la surface d'un des meubles. Poussière et saleté se pressent contre sa peau claire, et nul doute que les microbes ne se gênent pas non plus ; difficile de croire que quelqu'un voudrait faire à manger là-dedans. Il s'essuie machinalement sur un chiffon qui traîne là, énervé par habitude à la simple idée d'avoir les mains sales, et se tourne d'un bloc vers la petite silhouette debout sur la table.
Ben voyons ; fais comme chez toi.
Aarne délaisse volontairement le manque de manière du garçon – c'est à sa mère de lui faire ce genre de remarques, pas à lui – puis se concentre sur l'allure générale de la pièce. Ça n'a pas l'air abandonné, bien au contraire : ça a juste l'air négligé. Les produits d'entretien qui traînent près de l'évier, des paquets ouverts... Cet endroit est utilisé, il en est certain. Son regard clair, analytique, méthodique, cherche des indices dans cet amas de tout et de n'importe quoi. C'est impressionnant, ce calme qui règne dans ses pensées. Il est tellement concentré qu'il en oublie d'être énervé.
Ses muscles tendus, pourtant, s'en rappellent parfaitement.

– BAM.

Il pourrait mettre ses mains sur ses oreilles, fermer les yeux, protéger son visage avec ses bras. Mais non ; non. Son premier et seul réflexe est de battre brièvement des paupières. Rien que ce geste infime, juste le temps de laisser l'information parvenir à son cerveau.
Pas de douleur.
Ses semelles crissent sur le sol quand il se tourne vers la source du bruit, encore plus tendu qu'avant. Une fourchette plus téméraire que les autres vient finir sa course à ses pieds ; peut-être que, s'il n'était pas si préoccupé par l'armoire, il prendrait le temps de l'envoyer valser plus loin. Mais le bruit de la chute, violent, continue de résonner au fond de ses tympans – BAM – et à chaque fois c'est une nouvelle entaille dans ses nerfs fragiles.
Son regard croise celui de Maël qui, un couteau dans les mains, observe son reflet.
Il. Va. Le. Tuer.
Tant pis pour l'éthique, la prison, tout – il le tue et il verra ensuite.

« Eyh, Aarne ! Regarde ça ! Je suiiiis Jaaaaaack ! Jack l'Eventreur ! Muhahahaha ! » Même passer sa main sur son visage ne traduit pas assez son expaseration. «  … Tu sais, avant que je ne rentre ici, et bien Jack sévissait à l'extérieur. Je me trouve plutôt chanceux : imagine que je sois un jour tombé face à lui. Il m'aurait égorgé en moins de temps qu'il n'en faut pour le... Oh ! Qu'est-ce que c'est que ça ? »

Peut-être qu'une fourchette fera l'affaire. Il considère l'idée, le regard fixe, quand le futur mort lâche son couteau sans douceur. Trop sonné encore par le fracas de l'armoire contre le sol, il ne met pas en pratique : la possibilité reste malgré tout ancrée dans un coin de sa tête. Pour plus tard, disons. Il n'est pas encore prêt à admettre que le garçon vient d'une époque reculée et, franchement, il ne fait aucun effort pour le croire. Jack l'Eventreur, il repassera.
La fourchette subit finalement ses foudres ; dans un vif bruit de métal, son coup de pied l'envoie glisser sous un meuble.

Peu désireux de se pencher pour observer le contenu de l'armoire, Aarne fit demi-tour. Quelqu'un va bien finir par arriver, vu le boucan qu'ils ont fait.

« démarrer le jeu GBA »

Hm ?
Les mots, familiers, le font se tourner de nouveau. La main sur la poignée d'un placard, il jette un coup d’œil inquisiteur à la trouvaille de l'albinos. Pour un amateur de jeux-vidéo, la musique et la forme de l'appareil ne sont pas très difficile à reconnaître ; l'âge que peut avoir ce truc, en revanche, le laisse relativement perplexe.
Il ne prend cela dit pas la peine d'expliquer, trop énervé encore pour se risquer à élever la voix. Au mieux, il lâcherait quelques mots incompréhensibles pour l'autre sur un ton cassant ; au pire, il l'insulterait. Comme pour l'instant il veut juste comprendre où il a atterri, il juge pouvoir leur épargner ça.
Rien dans ce placard. Rien dans l'autre. Rien nulle part, si ce n'est quelques boites ou paquets de nourriture auxquelles il préfère ne pas toucher.
A sa droite, le garçon panique.

« Est-ce … ça peut sortir de la boite ? »

Le regard qu'il lui adresse, incrédule et agacé, reflète au mieux sa pensée. Qu'il puisse poser une question aussi stupide ne lui était même pas passé par la tête.

« Peut-être bien, qui sait ? » Sa voix, loin du sarcasme, est aussi pesante que menaçante. « Tout peut arriver, avec ce genre de trucs. »

Et dans un sens, il n'a pas tort : tout pour arriver, avec les vieilles technologies. Ses jeux-vidéos à lui, au moins, ne ressemblent pas à des amas de pixels à peine crédibles.

« Tu ferais mieux de chercher un truc utile, au lieu de jouer avec cette vieillerie. Comme une perceuse. Ou un plus gros couteau que ça. »

Du pied, il pousse le couteau avec lequel Maël s'amusait à imiter Jack l’éventreur. Il leur faudrait le même en trois taille au-dessus, pour vouloir ouvrir quoi que ce soit.
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MessageSujet: Re: « Dans les cuisines, même le majordome n'a pas son mot à dire. » [Aarne]   « Dans les cuisines, même le majordome n'a pas son mot à dire. » [Aarne] Icon_minitimeMar 30 Oct 2012 - 22:59

« Peut-être bien, qui sait ? Tout peut arriver, avec ce genre de trucs. »

Mes yeux effleurent l'objet, comme si du doigt, je venais caresser l'incrustation de la pince d'un crabe, pince menaçant de se refermer sur ma peau. Mais au lieu de la douleur qui jaillit, c'est cette musique qui fuse et qui me perfore les tympans de par son étrangeté. Qu'est-ce que c'est que ça ? Je concentre, avec la sensation de faire la pire des imprudences, mon regard sur Aarne, et je le fixe, désespéré. Il faut qu'il me mente, cette chose n'a pas le droit de m'attaquer ! Il est hors de question que je me fasse manger par un cocatrix, de toutes façons. Refermant mes poings avec fermeté, je m'agenouille, presque assez bas pour que mes rotules viennent toucher le sol. Peu importe si mon pantalon blanc est tâché par ces immondices qui encrassent le sol, je veux être absolument certain que cette chose ne sortira pas de sa boite. J'observe, avec effroi, les déplacements de l'énorme oiseau. Ses ailes rouges et or qui battent l'air, mais sans bruits, et sa gorge déployée, avec un bec tout grand ouvert.
Il me paraît étrange.
Je perçois les faits et gestes de Aarne, à côté de moi, dans des déplacements qui me paraissent trop naturels et calmes pour qu'il soit réellement inquiété par le Cocatrix. Bon, et bien, il semblerait que ses dires relèvent du sarcasmes. Une vague sensation de colère coule dans ma poitrine, et l'idée de vengeance naît, tandis que du bout des doigts, je viens effleurer une des deux surfaces de l'objet. Je peux remarquer que les paysages que survole l'oiseau semblent se répéter. Et cela n'est pas normal. Sitôt le contact entre mon doigt et l'écran qui s'assouplit, la luminosité change, et l'image de l'oiseau disparaît, remplacée par un écran bleu, avec un cadre à l'intérieur. Dans ce cadre, il y a des lettres et des mots affichés, que je découvre avec une stupeur admirative. Aarne devait se moquer de moi ; il doit connaître cela. Alors ceci est une technologie très poussée ! Je pousse un sifflement ravi. Puis des deux mains, je m'empare de l'objet, et le faisant tourner entre mes mains, l'étudie sous toutes les coutures. Un gloussement satisfait résonne dans ma gorge quand je comprend qu'en tapotant avec les doigts sur l'écran tactile, j'obtiens un enchaînement d'image. Jusqu'à un certain moment, où l'écran me fixe sur une vue aérienne d'un petit bloc. Petit bloc qui se déplace. Mes doigts vont et viennent sur l'écran ; tandis que la musique scande ses symphonies dans la cuisine sale.


« Tu ferais mieux de chercher un truc utile, au lieu de jouer avec cette vieillerie. Comme une perceuse. Ou un plus gros couteau que ça. »

« Hm ? »

J'observe le « ça » en question. Couteau m'étant totalement sorti de la tête. Mes yeux embrassent la pièce, avant de, piteusement, revenir à l'écran de la vieillerie. Vieillerie, comme a dit Aarne. Donc, il doit connaître des choses encore plus évoluées. Mes yeux s'arrondissent d'une joie furieuse, et je referme d'un claquement, l'objet en deux. Il ressemble à ces petits livres que l'on vous donne à la messe. Mais en nettement plus intéressant, marmonnais-je. Secouant la tête, je regarde les couverts par terre. Non... on ne trouvera pas de plus grands couteaux par là. Et c'est normal. Lorsque j'allais dans les cuisines, -quand je ne me faisais pas prendre par Père-, je savais que le cuisinier avait une planche, clouée au mur, et qu'y étaient accrochés les multiples couteaux. Couteaux qui m'avaient toujours impressionnés quand je les voyais s'abattre d'un claquement sur la volaille déplumée. J'arque un sourcil moqueur, et mes lèvres s'étirent en un sourire.

« Tu es bête. On ne va pas les trouver par terre, les « gros » couteaux. »

M'esclaffant, je sautille entre les débris entassés au sol, et contournant une épaisse gazinière, je trouve ce que je cherche, sous l'ombre d'un large placard. Sauf que c'est trop haut pour moi. Un peu résigné, je tourne le visage, mon regard scrutant la cuisine à la recherche de Aarne, pour lui demander de venir décrocher un des couteaux que je ne peux pas atteindre. Quand soudain, la porte claque une nouvelle fois contre le mur, me glaçant le sang.

« Dites-donc ! Ça vous dérangerait de m'expliquer pourquoi vous faites autant de raffut, là ?! »

Sidéré, je m'écarte du placard, pour observer un homme, à la haute stature, dans l'entrebaillement de la porte. Il porte des binôcles aux montures particulièrement étrange, et ses cheveux sont d'un violet fushia. Ma mâchoire se décroche, et je tourne vers Aarne tout mon espoir de survie. Faites que cet homme ne soit pas un ogre, faites que cet homme ne soit pas un ogre.
L'ogre en question semble attendre une réponse.

« Et bien ? Comment ça se fait que la commode ait été renversé ? »

Fulgurant, je tends mes doigts vers Aarne.

« C'est lui ! »

L'ogre tourne son visage vers Aarne, tandis qu'un décompte se comptabilise lentement dans ma tête. Dès qu'il foncera sur Aarne pour le dévorer, je bondirais vers la sortie. Je me cacherais dans un endroit trop petit pour qu'il puisse y accéder, et j'attendrais que, lassé, l'ogre disparaisse.
Voilà. C'est exactement ce que je vais faire.
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« Dans les cuisines, même le majordome n'a pas son mot à dire. » [Aarne] _
MessageSujet: Re: « Dans les cuisines, même le majordome n'a pas son mot à dire. » [Aarne]   « Dans les cuisines, même le majordome n'a pas son mot à dire. » [Aarne] Icon_minitimeLun 3 Déc 2012 - 3:23

Au moins le jeu a-t-il l'air de le tenir tranquille ; mais ça ne va pas durer, Aarne s'en doute. Comme si, hein. Mieux vaut ne pas trop en demander à Dieu, si seulement il veut bien se donner la peine d'exister pour une seconde ou deux. Ce gamin n'est rien d'autre qu'une sale boule de mauvaises idées sur pattes – avec, tant qu'à faire, un surplus d'énergie dont il a visiblement décidé de se débarrasser tout de suite et maintenant. Merveilleux. Pourquoi on fait des enfants, déjà ?
Ah, oui. Toucher les allocations.
Même lui, qui trouve une forme de contentement dans la douleur, ne peut s'imaginer endurer pareille torture juste pour... Pour le plaisir d'élever un gosse ? Rien à faire, il ne comprend pas. Et tiens : déjà Maël, comme pour lui donner raison, se lasse de son nouveau jouet pour plutôt suivre son conseil. A savoir, trouver un couteau. Il l'en applaudirait presque s'il en avait quelque chose à faire.

« Tu es bête. On ne va pas les trouver par terre, les « gros » couteaux. »

C'est ça, cause toujours. Aarne continue de donner des coups dans les objets qui traînent au sol, peu désireux de surveiller les agissements du Jack l'Eventreur miniature qui se met à sautiller dans la pièce. Vingt euros au premier qui l'attache et le balance dans un coin. Histoire de faire des économies, il compte bien le faire lui-même. Après avoir songé à l'assassiner sans remords ni douceur, cette idée lui semble presque suffisamment raisonnable pour être appliquée. Il pèse le pour et le contre, pensif, ses yeux clairs vissés sur un tas de couverts au sol.
A force de courir en tout sens et d'attirer son attention de droite et de gauche – sans le moindre respect pour la logique, d'ailleurs – Maël lui en avait presque fait oublier le but de sa présence ici. Presque ; presque. Alors il pince les lèvres, serre les poings. Aucune porte n'a le droit de le maintenir enfermé. Aucune, aucune putain de porte n'a le droit de décider là où il va, de là où il reste. Personne ne va lui faire croire quoi que ce soit qu'il n'a pas envie d'admettre, rien de ce qu'il ne veut pas voir ne va se présenter sous ses yeux. Jamais. Il décide, c'est lui qui décide !
Putain de –

« Dites-donc ! Ça vous dérangerait de m'expliquer pourquoi vous faites autant de raffut, là ?! »

Le finnois grince désagréablement des dents ; il manquait plus que ça. D'un geste presque trop lent, il se retourne vers le nouveau venu. Le jauge du regard, le dévisage de ses yeux glacés. Prêt à lui lancer la pire des amabilités s'il ose l'emmerder avec ses conneries.
Le problème, avec Aarne, c'est qu'il en a tellement rien à faire d'avoir mal que...

Le type lentement, Maël fulgurant. Et lui, ni incrédule ni plus énervé qu'avant, ne peut empêcher un rire étranglé de sortir de sa gorge.
Cette fois, il se tourne vers Maël. Il croit quoi ? Que ce type lui fait peur ? Que lui, il va s'en sortir aussi facilement, juste en accusant les autres pour ses propres erreurs ? Oh que non. Le regret, il viendra après qu'il lui ait remis les idées en place. Si un regard peut tuer en tout cas, ce garçon est officiellement mort. Mort et enterré, six pieds sous terre et on en reparle plus. Je vais te tuer.
Mais l'autre type avec sa coiffure ridicule est toujours à la porte et, franchement, il préfère frapper un ours qu'essayer d’attraper une souris.

« Si t'es pas content t'as qu'à venir la relever ta commode, Cendrillon, lâche-t-il avec une antipathie palpable. Alors à moins que tu veuilles mettre ton tablier et faire le ménage, t'as intérêt de te tirer si tu veux pas que je démolisse une chaise sur ta tête d'attardé. »

Il fait un pas en avant, poings serrés, prêt à refaire le faciès de l'autre s'il le faut ; est arrêté, net, par une surface qui heurte son épaule droite.

« Putain, c'est quoi ce truc encore ? MAËL ! »

Parce que bien sûr, c'est de sa faute. Dans l'histoire, c'est quand même lui le taré qui dit venir d'un époque reculée et prétend voir des cerveaux.
Aarne frappe des deux poings contre l'épaisse vitre qui le sépare à présent du pseudo-punk amateur de silence ; rien à faire. C'est solide, et il s'y connaît suffisamment en verre et en plastique pour savoir que ce truc ne cassera pas à coup de poings. Ils sont enfermés de ce côté de la pièce, ni plus ni moins.

« Saleté de... Vitre. »

Sa voix se brise sur la fin, dure et et glaciale. Ça va deux secondes, les histoires de parois. Là, il en a sacrément sa claque des allusions à peine subtiles à des trucs que lui seul dans cette pièce est en mesure de connaître. Il va vraiment tuer quelqu'un.

Mille excuses. x__x
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MessageSujet: Re: « Dans les cuisines, même le majordome n'a pas son mot à dire. » [Aarne]   « Dans les cuisines, même le majordome n'a pas son mot à dire. » [Aarne] Icon_minitimeLun 8 Avr 2013 - 3:14

Ok, il est 3:14 du matin. J'avais dit à Chess "Demain. Je promets "demain". " Considérant que nous sommes demain ... JE SUIS DESOLEE. SINCEREMENT DESOLEE. JE T'AIME. POSTE. JE T'AIME. PARDON.


Mais c'est qu'en plus d'être complètement inconscient, Aarne est suicidaire ? Les yeux fendus sous le coup d'une surprise qui parvient à me faire oublier ma terreur de l'ogre, je contemple Aarne avec une stupéfaction profonde, en me demandant brusquement s'il ne va pas finir par se transformer en une sorte d'énorme dragon. Premièrement, cela m'expliquerait pourquoi il agit de manière aussi insensée. Secondement, c'est peut-être tellement illogique, bête, et irrationnel que c'est la raison même du pourquoi il n'a pas peur. Cette idée me paraît particulièrement plausible. Après tout, s'il est en réalité une bête plus grosse que l'ogre aux cheveux roses qui nous fait face, alors nous pouvons considérer comme logique le fait qu'il ne soit pas le moins du monde effrayé par ce type patibulaire. Quoiqu'il en soit, cela signifie aussi que je suis depuis plus d'un quart d'heure en compagnie d'une créature, qui sous son visage humain, cache une gueule triangulaire, remplie de crocs, à la colonne vertébrale douteuse, à la capacité intellectuelle douteuse. Capacité intellectuelle, qui en vue des derniers travaux de mon père sur le cerveau, me fait brusquement penser que les animaux dans son genre ne sont doués que pour une chose : le fait de se nourrir.
Prunelles fendues dans un choc qui m'anéantit, je titube contre le placard, mon souffle bloqué au fond de ma poitrine. Il va dévorer le type rose. Il va dévorer le type rose, et quand cela arrivera, je courrai pour qu'il ne m'attrape jamais, et je me cacherai dans un endroit si petit que pas même une griffe de ses pattes monstrueuses ne pourront m'attraper. Jamais. En revanche, je crains l'idée qu'il puisse me carboniser avec son feu rédempteur.
Avec une discrétion assimilée aux fils de mes années à espionner les patients de mon père dans ses hôpitaux ; à me cacher dans les endroits les plus improbables, et à intégrer la manière de me déplacer avec furtivité, je recule lentement, et du bout des doigts, j'ouvre la porte du placard. L'ogre rose est tellement furieux, que dans le discours venimeux que lui a jeté Aarne, il y trouve son compte, et ne s'intéresse absolument plus à moi. Par-fait. Je pénètre sans un bruit, sans un mot, sans un souffle dans le placard, et les portes se referment sur moi, me camouflant dans les ténèbres.

« Putain, c'est quoi ce truc encore ? MAËL ! »

Je ne suis pas là, je suis invisible, tu ne me vois plus. Le dos plaqué contre la cloison, j'identifie néanmmoins la brusque panique qui vient de teinter les mots de Aarne. Il y a dans sa voix une surprise et une colère qui ne relèvent pas du fait de l'ogre. Certainement pas. L'ogre qui gromelle brusquement, avant d'éclater de rire. Alors je comprends qu'il y a quelque chose. Mais je sais aussi que Aarne ne m'a pas vu me cacher dans ce placard, qu'il ne sait pas où je suis, et qu'il ne me mangera pas. Jamais. S'il le faut, je lui frapperai les côtes, de l'intérieur, pour qu'il me recrache. Comme Pinnochio et la baleine.

« Saleté de... Vitre. »

Vitre ? Cette fois-ci, la curiosité gronde dans mon ventre, et ronge mon esprit. Qu'est-ce que j'ai à perdre à regarder, marmonne ma pensée ? Presque immédiatement, en échos à mon esprit, Jack se glisse sur ma nuque, appréciant la chaleur de ma peau sous ses petites pattes qui me griffent, et murmure à mon oreille « Tout. Le fait de découvrir tout ce que tu n'aurais jamais du savoir. Le fait de ne jamais pouvoir jouer à ce ''Pokémon''. Et accessoiremment, y laisser ta peau. C'est ce que tu veux ? ». Je ne réponds pas, mais le bruit de casse derrière les portes du placard font couler le long de mon dos un long frisson. J'ignore s'il s'agit de peur ou d'un tout autre sentiment, mais je sais maintenant que le manque d'informations est quelque chose que je ne supporte pas. Je déteste ne pas comprendre. Je déteste être ignorant !
Comme une réaction à ma colère et ma peur, se dévoilent alors devant moi deux tâches indistinctes, floutées par un obstacle que je n'identifie pas tout de suite. Puis, le bruit de déplacements dans la pièce m'arrachent un hoquet de surprise. Et de compréhension. Les cerveaux ! Je les revois ! Ainsi, Aarne a bien un cerveau humain. Aarne est là. Tout près. Aarne n'est peut-être pas un dragon. Les larmes emplissent mes yeux, et lentement, je lève la main, pour pousser la porte du placard. Mes prunelles se ruent sur Aarne. Aarne, qui finalement, n'est pas ce saurien monstrueux, gigantesque qui va me dévorer. L'autre aussi a un cerveau humain. Je n'ai plus peur. Non. Non ; le sentiment de la panique, des angoisses et de l'effroi ont disparus, évaporés dans mes pensées, remplacées, implacablement, par un soulagement intense, et une pointe de colère. Je descend du placard, et dans mes doigts, le bidule électronique se met à siffler sa musique obsédante. Je jouerai à Pokémon. Je le jure sur ma vie. Mes prunelles violettes se rivent sur Aarne, et mes poings se crispent. Le hurlement explose hors de ma gorge.

« ESPECE D'HIPPOPOTAME ! BORDEL. »

Cette fois-ci, c'est la fin de ma résistance et de ma fierté : mes larmes coulent sur mes joues, et furieux contre cette démonstration digne d'une fillette, je me mets à feuler comme un chat, reculant pour retourner dans mon placard. Je me prends les pieds contre le rebord, et je me sens tomber en arrière. Lourd, très lourd. Si lourd. Mon dos s'écrase contre le bois du placard, mon poignet heurte la butée avec un craquement sourd, et le placard tombe à la renverse. Le monde vient de faire une chute dans l'univers, là …
Les yeux épouvantés, fixant sans le voir le plafond de la cuisine, je garde plaqué contre mon cœur la gameboy advance, à la manière d'un talisman. Jack, paniqué, siffle dans une demie douzaine de langues que je viens de me casser le poignet. Moi, je réalise. C'est vrai que la douleur est impressionnante, tout de même. L'été dernier, je me suis moqué de Malachy, qui était tombé d'un muret. J'avais ri comme un dément, tandis qu'on l'emmenait chez mon père, hilare devant tant de chochotterie. Maintenant, je crois que je comprends à quel point ça fait mal. Oh, Malachy, pardon. La prochaine fois que nous nous reverrons, je t'offrirais un jeu. Une gameboy advance. Comme ça, tu comprendras que je suis sincèrement désolé. Il n'empêche... la douleur, bien que … douloureuse... est fascinante. Je suis totalement incapable de bouger, paralysé dans mon choc, mais avec un peu de concentration, je ressens le bout de mes doigts que j'agite. Alors, lentement...

« … heh … hehe... hehehehheheeeHEHEEEEHEEEEEEHEEEEEE ! »

Hilare, le souffle court, allongé dans mon cerceuil placard, je ris à n'en plus finir, le souffle court, le poignet explosé, le jeu Pokémon sur la poitrine me demandant si je connais le professeur Chen. Non, je ne connais pas. Mais le monde des Pokémon dans lequel les Pokémon et les humains vivent en harmonie me plaît bien. Je crois que je viens de tomber amoureux. Doucement, parmi mes éclats de rire, une question s'élève.

« Eyh, Aarne ? Tu as des Pokémon, toi ? »
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Aarne Kinnunen
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MessageSujet: Re: « Dans les cuisines, même le majordome n'a pas son mot à dire. » [Aarne]   « Dans les cuisines, même le majordome n'a pas son mot à dire. » [Aarne] Icon_minitimeMar 16 Avr 2013 - 9:34

Saleté de vitre, saleté de vitre, saleté de vitre. De colère et de frustration, Aarne file un violent coup de pied à la paroi ; elle ne tremble même pas. La lumière qui se reflète dessus est le seul indice permettant de deviner sa présence – et c'est comme une fenêtre, une putain de fenêtre ridicule qui n'a rien à faire là. Il se tourne vers Maël. Ne le voit pas. Jure, l'appelle de nouveau – « MAËL » – et, en désespoir de cause, envoie un second coup de pied rageur dans l'obstacle qui l'empêche de refaire le portrait de Cendrillon. Il ne sait pas ce qui se passe, n'y comprend absolument rien ; et ça l'énerve, ça l'énerve à un point qu'il n'avait plus cru possible d'atteindre. C'est illogique, ça n'a aucun sens. Rien ne peut apparaître du néant, c'est contre nature. C'est... Illogique. Pourtant il a mal au pied, ses poings sont encore rouges d'avoir violemment frappé une surface rigide. Cette paroi existe. Cette paroi existe, il ne l'a pas inventée : dans sa conception de la réalité, du moins, elle existe.
Il n'a pas d'autre choix que de l'admettre. Ça existe, c'est comme ça. Le jeune homme le voit, le conçoit, l'admet parce qu'en définitive, il ne peut rien faire d'autre. Rien. Ses pupilles se rétractent tandis que, le cerveau grippé par une migraine qui va en s'intensifiant, sa vision de la réalité et du possible se modifie sagement. Ça va faire un mal de chien. Ça va être impossible à gérer. Il le devine aux battements frénétiques de son cœur, au froncement de sourcils qui lui donne des airs d'animal prêt à mordre : ça va le bousiller, si tant est qu'il reste quoi que ce soit à démolir chez lui.
Perdu, Aarne baisse les yeux vers ses phalanges abîmées. L'autre décérébré en face dit quelque chose qu'il ne comprend pas, trop préoccupé qu'il est à écouter les signaux de détresse court-circuitant par milliers son cerveau et ses muscles. S'il vous plaît, j'ai...
Rien. J'ai rien.

Un rire le sort de ses tourments. Il l'entend., ce ricanement. Il l'entend même trop bien. Sautant sur l'occasion pour évacuer un peu de pression, son bras se tend à nouveau vers la vitre : son poing la heurte et, cette fois, la force du coup se répercute avec violence jusqu'à son épaule. Dents serrées, il lâche des insultes au hasard et recommence à donner des coups de pieds dedans. Il ne sait ni pourquoi, ni comment cette vitre s'est retrouvée là ; ce n'est plus l'important. Lentement, il recule et décide d'ignorer le punk. Ce n'est pas son problème numéro un. Son problème numéro un, c'est...
Comment la faire disparaître ?

Une musique résonne ; il se tourne vers Maël. D'où il sort, lui, au juste ?

« ESPÈCE D'HIPPOPOTAME ! BORDEL. »

Sale gamin.
Insensible aux larmes qui roulent sur ses joues, Aarne plisse les yeux dans sa direction. C'est un sale gamin, rien qu'un sale gamin ridicule qui mérite de se prendre une gifle. Rien d'autre. Il l'énerve, il l'énerve – et poings crispés, il se demande dans quelle mesure il ne ferait pas mieux de l'enfermer dans un placard, enrouler du fil autour des poignées et l'abandonner là à son triste sort. S'ils sont vraiment enfermés à vie dans cette baraque, de toute façon, quelle différence ça fera ?
Quelqu'un aurait bien fini par lui prêter main forte. Il recule.
Y'a toujours des idiots pour jouer les héros. Il va trébucher, il fait n'importe quoi.
Il trébuche.
Aarne ne fait pas le moindre geste quand Maël tombe et qu'une fois de plus, le monde s'effondre. Ce type fout vraiment tout par terre, c'est pas croyable. Il en reste coi. Bras ballants, le regard dans le vague, il attend un signe de vie : peut-être qu'il s'est brisé la nuque. Ça ne l'étonnerait pas. C'est possible. Il considère l'idée, nez plissé par l'agacement, mais refuse toujours autant de bouger. Est-ce que Cendrillon est encore là ? Il se le demande, ne vérifie pas.
Un rire, enfin, s'échappe du capharnaüm. Apparemment, il n'est pas mort.
Ça ne le soulage pas.

« Eyh, Aarne ? Tu as des Pokémon, toi ? »

Complètement à côté de la plaque. Il mériterait qu'il l'abandonne là ; seulement voilà, la vitre l'empêche toujours de sortir de la pièce. Sans compter que lui accorder sa compagnie n'est pas vraiment une récompense non plus. Ce serait même plutôt le contraire. Alors il avance entre les objets hétéroclites qui tapissent le sol de la cuisine, se penche au-dessus du tombeau improvisé que le gamin s'est lui-même construit : grimace en voyant dans quel état il a fichu son poignet. Pour s'être déjà déboîté ou foulé à plusieurs reprises divers os de son corps, diagnostiquer ce genre de blessures à vue de nez est devenu une simple formalité. En l'occurrence, son examen visuel le conduit à une constatation simple et évidente :
Ça craint.

« Qu'est-ce qu'on s'en fout, si j'ai des Pokémon ou pas, grommelle-t-il en jetant des coups d’œil autour de lui. Tu t'es pété le poignet, Einstein, t'es content ? »

Et il n'a pas intérêt de dire oui. Excédé, Aarne se jure de lui démolir l'autre main à coup de talons.

« Comme si c'était pas déjà assez chiant comme ça ! » Il envoie valser des ustensiles divers d'un coup de pied, de plus en plus énervé. « Y'a pas idée d'être aussi débile. Maintenant sors de là si tu veux pas que j'enterre ton jeu et toi avec. »
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MessageSujet: Re: « Dans les cuisines, même le majordome n'a pas son mot à dire. » [Aarne]   « Dans les cuisines, même le majordome n'a pas son mot à dire. » [Aarne] Icon_minitimeVen 3 Jan 2014 - 8:50

    Ouh, non, sérieusement, la douleur est réellement insistante, et dans le picotement mordant d'une insistance lancinante, je retins un gémissement lamentable de douleur qui ne s'esquive pas. J'ai réellement mal, et j'aimerais bien, il me semble, que Aarne se montre gentil et vienne m'aider en me faisant peut-être une attelle. Je n'ai jamais aimé me blesser, et je trouve cela irresponsable que l'ex-dragon me laisse dans cet état. Physiologiquement parlant, je suis plus jeune que lui, alors il pourrait avoir l'amabilité de prendre soin de moi. Au milieu de mes rires et de mes pleurs, il y a mon hystérie qui franchit mes lèvres, et je me relève péniblement pour me mettre en position assis. Sérieusement, qu'ai-je à perdre, à lui demander de m'aider ? J'ai étudié son cerveau, et j'ai conscience, face à cette considération, qu'il est humain. Il a un cerveau d'humain. Et puis, mes prunelles s'étrécissent dans le choc encaissé d'une nouvelle idée qui vient de germer dans ma tête. Ou alors, il est un dragon avec un cerveau très, très petit. Il doit être un dragon très bête.

    Un sourire distrait s'étire sur mes lèvres.

    S'il est très bête, je serais en mesure de lui échapper. A la limite, je pourrais toujours faire en sorte de m'arranger de manière à ce que l'ogre aux cheveux roses soit dévoré en premier par Aarne. Ensuite, quand Aarne-le-dragon-bête serait répu, je pourrais tenter une approche, et je ferais en sorte de le dompter. Peut-être qu'avec beaucoup de patience et de minutie, je pourrais en faire mon animal de compagnie. Un dragon comme animal de compagnie. Ça n'est pas une mauvaise idée, il me semble. Je referme mes doigts un peu plus fort sur mon poignet, et cette fois-ci, c'est réellement un feulement de douleur qui fuse entre mes lèvres.

    « Qu'est-ce qu'on s'en fout, si j'ai des Pokémon ou pas. »

    C'est très important, songeais-je avec protestation, en grinçant des dents sous les sentiments juxtaposés d'une frustration assurée et de la douleur qui se répandait dans mes doigts. J'avais la sensation d'avoir du feu qui bouillonnant dans mes veines, et ce jusqu'au bout de mes doigts. Essayant de les remuer, j'abandonnais très rapidement l'idée, après avoir envisagé que boire 25 litres de soupe aux choux de bruxelles serait moins douloureux comme mort. Et pourtant ! C'était terrible de boire de la soupe aux choux de bruxelle. J'avais horreur de cela, et mon père n'arrêtait pas de m'en faire, en ordonnant que je finisse toute mon assiette à chaque fois. J'avais envie de vomir rien qu'à voir la couleur, et l'odeur me faisait défaillir. Comment pouvait-on manger réellement cela en appréciant le goût ? Quoiqu'il en soit, j'étais intimement persuadé qu'il fallait proposer cela comme outil de torture pour faire donner la question à tous les grands criminels. Peut-être que si l'on divulguait l'utilisation de cette technique effroyable, le taux de criminalité baisserait nettement à Londres. J'eus un ricanement en imaginant Jack the Ripper torturé en buvant de la soupe aux choux de bruxelles. Ahaha, ça lui apprendrait bien, à ce petit crétin psychopathe.

    Toutefois, je m'interrogeais.

    « Bah non ! Ça fait mal, alors je ne risque pas d'être content, c'est logique ! Et c'est qui Einstein ? »

    Oh. J'avais réussi à prononcer correctement ? Cela se révélait compliqué, nonobstant ma réussite. J'essayais de réaligner une seconde, puis une troisième fois les syllabes du mot compliqué, sans y réussir. Dommage. Je tentais d'imaginer l'assemblage concret des sons, des lettres qui pouvaient former ce mot difficile à prononcer.

    « Comment ça s'écrit ? »

    Indubitablement, ça n'était pas britannique. Sinon, j'aurais forcément sut l'écrire! La menace de Aarne me fit cependant éviter me taire sur cette remarque, et à la place, je me relevais brusquement, le foudroyant du regard.

    « Non mais dis donc ! Espèce de rouspéteur! On n'enterre pas les gens vivants, ça n'est pas bien ! Hein mons... »

    Monsieur. Monsieur l'Ogre aux cheveux rose qui avait disparu. Je le cherchais du regard, mais indubitablement, la cuisine était vide de sa présence, et la porte s'ouvrait sur un couloir vide. Oh, assurément, il s'était enfui. Pourquoi ? Quelle sorte d'angoisse l'avait pris ? Était-il possible que Aarne ou moi l'ayons effrayé ? C'était bizarre, et je ne pensais pas que cela puisse être cela. Haussant un sourcil, je traversais les débris qui jonchaient le sol, et passant devant Aarne, j'allais jusqu'à la sortie de la cuisine, pour jeter un coup d'oeil dans le couloir. Toujours aussi vide et noir que tout à l'heure. Vaguement inquiétant, en fait. Délaissant mon poignet usé, je plongeais l'autre main dans la poche de mon pantalon, et en sortais le portable de Aarne, que je pointais devant moi.

    « Bzouuuuu. C'est une super arme contre les fantômes : ça leur envoie des décharges, comme pour les IRM. Bzz... Ah ? »

    L'écran du téléphone venait de s'allumer, affichant un message pixelisé que je lus avec un empressement avide.


    « Pas de réseau. Pas de réseau... Pas de réseau ? Pas de réseau, ça veut dire quoi, Aarne ? OH. PAS DE RESEAU COMME LA MAFIA ? »

    Je me retournais vers lui, un gigantesque sourire balafrant mon visage dans toute sa largeur.

    « C'est parfait ! Suis moi, et … Ah, attends. »

    Revenant en arrière, retraversant la cuisine au pas de course, je courais vers un des petits buffets du fond, sur lequel je venais d’apercevoir un énorme morceau de pain. Je n'étais pas absolument sûr qu'il y soit depuis le début de notre arrivée dans la cuisine, mais qu'importait, puisqu'il était là. Je le récupérais d'une main avide, et y déchirant un gros morceau de mie, je le fourrais dans ma bouche, avec un ravissement certain. Délicieux. Absolument délicieux.

    « Chais bon. Chuis moi, Aa'ne ! H'a pas de mafia donc chuis chure qu'on peut h aller pa' la ! Go ! »

    Je me ruais vers les couloirs, le pain, butin de ces explorations dans la cuisine, coincé fermement sous mon bras.
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