Le regard d’Eve est rivé sur l’immense bâtisse à quelques pas d’elle (elle se sent observée). Les éclairs incessants déchirent le ciel dans un hurlement terrifiant. Il ne pleut pas, il grêle. Les billes s’abattent sur la place vide et se brisent avec violence sur le sol de pierre. La poitrine d’Eve se soulève frénétiquement, sa respiration encore saccadée suite à sa course lui arrache la gorge. (Quelqu’un l’espionne) pourquoi courrait-elle ? S’abriter de l’intempérie, fuir, arriver à l’heure à un rendez-vous ? (elle ne sait plus).

Elle se rappelle seulement être Eve Clément, avoir 21 ans et être perdue. Terriblement perdue. Elle a arrêté sa course en voyant ces portes, ces jolies montants en bois plus vieux que le monde et aux dessins méticuleux, un travail soigneux à la main (ça l’émeut). Elle se tourne et se retourne, fouillant dans la pénombre environnante la moindre trace de vie humaine (c’est certain, quelqu’un l’observe). Paniquée elle hurle, qu’on la laisse tranquille !

Certains visages flottent dans des souvenirs lointains. Des rayons de soleil dans un paysage rural empli de vaches. Y’avait une histoire de cerf-volant. La réalité engloutit la lumière lorsqu’elle entend un bruit suspect. Eve cri une nouvelle fois et s’enfuit vers une ruelle, en passant devant la fontaine qui déborde au centre de la place ses pieds glissent, le ciel se retourne. Sa tête frappe le pavé, ses vêtements s’imbibent d’eau et elle roule lentement sur le dos, gémissante (ça fait mal). La douleur qui résonne sur son front lui rappelle quelque chose.

Une dispute. Une dispute où elle demandait qu’il arrête (qui ?). Ses yeux s’ouvrent en grand (c’est ce dont elle voulait se rappeler !). Elle s’était énervée, pour les lettres, les photos d’elle lorsqu’il l’espionnait, les coups de fils, les messages sur le répondeur. Lentement elle se redresse. (Il est peut-être là, à l’attendre dans un coin sombre.) Sa tête trempée valse dans tous les sens, elle a oublié à quoi il ressemblait, est-elle capable de le reconnaitre ? La peur regagne ses membres, elle pleure, son corps tremble et convulse, ses mains se perdent dans sa chevelure mouillée (elle cri à l’aide). Il était pire qu’un détective privé. Elle avait la pression. Eve se relève brusquement, (ici au milieu elle est en danger) sa tête tangue, les mains toujours sur le haut du crâne elle se réfugie derrière une poubelle, s’y jetant comme si elle évitait le tire d’une balle. (il est peut-être là.) Il peut faire ce qu’il veut d’elle, c’est ce qu’il disait.

Elle regarde à nouveau les portes du vieux bâtiment.

Si seulement elle pouvait disparaitre, s’enfuir et être sûre de ne jamais le retrouver sur son chemin, disant « je t’attendais » comme à chaque fois.

Eve est paranoïaque. Qui se cache derrière son reflet ? Quelqu’un l’observe-t-il à travers un petit trou ? Peut-elle avoir confiance ? (Eve se pose trop de questions.) Eve est rongée par ses interrogations. Elle ne dort pas assez, elle ne mange pas assez, elle ne respire pas assez, elle ne vit pas assez. (Parce qu’Eve a peur.)

Il en faut beaucoup pour faire rire Eve, il en faut beaucoup pour arracher la crainte à ses yeux. (Eve a peur d’elle-même.) Pourtant derrière la paranoïa il y a bien quelqu’un. Elle aime ce qui est beau. Pour la jeune femme, la beauté c’est comme des sentiments, ces sentiments qui nous font vibrer, écrire, parler. C’est pourquoi elle aime tant lire ou qu’elle pourrait passer sa vie avec un casque sur les oreilles. Eve est ce genre de personnes à pouvoir admirer tout et n’importe quoi, une plante morte, un rat écrasé sur la route. Etrange. Tellement étrange. (Elle ne saurait expliquer.)

Au quotidien Eve est toujours là, invisible mais présente, assise dans un coin prête à mourir de peur au moindre geste anormal. Elle n’aime pas parler, elle parle quand même, puis elle regrette ce qu’elle vient de dire. Il ne faut pas poser trop de question à Eve, sinon elle se méfie et s’enfuit. Mais Eve aime écouter ce que l’on a à dire, (elle se souvient de tout,) vous pouvez lui demander de vous rappeler quelque chose même. On ne comprend pas Eve mais elle, peut vous comprendre.

Utile : méfiante, peureuse mais curieuse, se déteste, est émue devant les enfants, trouve les froufrous immonde, fuit les gens trop bruyant (ça attire les regards), peut se révéler bavarde quand on la met en confiance, s’attache à tout et n’importe quoi.

Eve est figée, visage de glace à jamais givré par la peur, (panel d’expressions limité). Ses yeux cernés par la fatigue sont constamment ouverts, à l’affut du danger, et sous un long voile la crainte fait miroiter sans relâche des reflets jade au creux de l’azur parsemant ses prunelles. (Ici se trouve certainement sa seule vraie beauté.) Pierres précieuses jetées sur une page blanche ; les traits d’Eve sont communs. Surplombées par son petit nez ses lèvres aux teintes insipides sont closes, abimées par ses dents au fil de ses angoisses. Rien de bien flamboyant.

Le corps d'Eve est loin (très loin) de remplir les critères des canons de beautés (toute culture confondues…). Il soulève plus l’effroi qu’autre chose, (elle en a conscience) alors il est caché, recouvert sous les tissus épais, enveloppé de jean masculin (camouflage). Sous ces apparats de mauvais goûts le corps d’Eve est l’épave de ce qui fut autrefois la convoitise de tous. Même Eve a oublié qu’avant ses longues jambes attisaient le désir, que sa taille finement vêtue rendait jalouse les plus belles femmes, ces temps sont si éloignés qu’elle se demande si ce n’était pas seulement un rêve (éphémère).
Pourtant, elle-même a détruit ce corps adulé; déchiré la chair au sommet de son dos, parsemé de coupures ses bras, ses jambes, brulé la peau sur ses mains et son ventre. Il est victime de son angoisse (sa paranoïa), beaucoup trop maigre à l’évidence, au point de lui enlever la totalité de son charme. Eve ne voulait pas faire tout ça (elle est faible).

Utile : cheveux châtains, n’a pas vraiment de forme, 1.70m, 47 kg, se met seulement du mascara (elle ne sait faire autre chose), difficile de définir son âge précisément, ne sourit pas, tire sur ses manches, porte parfois des lunettes de soleil (même à l’intérieur…).